Le temps glissait sur lui tandis que sa poitrine prenait feu à chaque respiration. Cette putain de sensation que son sang s’enflammait à chaque seconde éraflait chacune des secondes qui passaient. La tête lui tournait à présent. Logan ne savait pas depuis combien de temps il n’avait pas eu à manger. Parfois, des ombres passaient et le torturaient. D’autres, elles faisaient quelque chose, lui lançaient des sorts, sans doute et il sentait que malgré la douleur, ses forces lui revenaient, doucement. Affreusement. Ils ne le laisseraient jamais partir, il le savait maintenant. Non, ils le laissaient mariner là. Il ne leur donnait pas ce qu’ils voulaient et ils avaient manifestement tout leur temps. Ils se décideraient sans doute plus tard à faire quelque chose de lui. Mais quoi ? Un allié ? Un otage ? Quelqu’un sait-il seulement qu’il était encore en vie ? Il en doutait. Là, dans le froid et l’ennuie, les os brisés, la conscience vacillante, il ne pouvait qu’attendre. Que le temps passe. Qu’il s’écroule, peut-être. Les ombres glissaient, elles allaient et venaient et son regard ne s’accrochait même plus à elle. Lui non plus d’ailleurs. Il dérivait, loin. C’était préférable d’ailleurs. Là bas, il était en sécurité, il pouvait s’enfermer bien loin de toute réalité et oublier tout ce qui le déchirait. Là bas, il pouvait s’inventer des mondes, gravir des montagnes, plonger auprès de créatures fantastiques. Il pouvait simplement s’oublier, se réinventer, se défaire de tout ce qui avait pu être ici, sur cette terre, dans cette réalité. Et pourtant son esprit y revenait bien souvent. Il venait s’accrocher aux gamins, aux erreurs qu’ils avaient pu faire, aux leçons de morale qu’il s’était sentit obligé de prodiguer, agacé de les voir agir avec inconscience. Il savait qu’ils risquaient leur vie. Il savait ce qui allait se passer. Et c’était arrivé, bien sûr. Tout comme il savait qu’il n’y avait pas de bons choix dans ceux qu’il avait prit. Il n’y en avait jamais eu et il n’y en aurait jamais. Ça n’était pas comme ça que les choses marchaient, pas quand on a des dizaines d’existences entre les mains. Comment faire autrement que de réfléchir pour le bien commun ? Mais comment cesser d’être humain pour penser avec une logique parfaite ? Il n’avait pas réussi sans doute. Pourtant, Logan avait essayé. Il avait cherché à faire le mieux qu’il soit, pour eux tous. Mais tout ça était vain. Ils avaient gagné. Ils les détenaient. Combien de gosses étaient morts ? Combien d’adultes avaient baissé les bras ? Combien de pertes y avait-il eu ? Combien d’esprits rebelles s’étaient finalement agenouillé ? Il faudrait combien de temps avant que leurs valeurs s’écroulent ?
Leurs valeurs… ça n’était même pas les siennes. Il n’avait jamais voulu ça. A vrai dire, il n’avait jamais rien voulu tout court. Logan n’avait jamais cherché à être au devant de cette bataille. Il s’était contenté de jouer sur les deux tableaux, de se préserver. Et puis, ils l’avaient soupçonné et amener ici. Et ça avait dérapé. Il avait prit les armes. Merde mais quelle idée débile. Il en était même arrivé à tuer son frère, à se dresser ouvertement contre sa famille, contre tout ce qu’on lui avait apprit. Et pour quel prix ? Pour quel résultat ? Avait-il seulement réussi ce qu’il avait entreprit ? Sans doute pas. Il n’avait pas protégé les gamins. Il n’avait pas réussi à faire quoi que ce soit de ses relations sociales. Non, définitivement, il n’était arrivé à rien. Tout ça n’avait servit à rien. Il n’aurait jamais dû s’engager dans une telle bataille. Il aurait dû être dans le camp des gagnants. Celui des forts. Pas celui des humanistes. Jamais il n’aurait dû s’attacher ainsi. Et chercher à faire le mieux. Jamais…
Mais c’était trop tard maintenant. Il payait le prix de ses erreurs. De leurs erreurs. De leurs dérives à tous. Des siennes surtout.