Enter the asylum - Hailec -

Il aura fallu des années pour apprendre à exprimer des émotions autrement qu’au travers du contact physique. Apprendre à être proche de l’autre, se montrer davantage vulnérable et honnête. S’intéresser à l’autre, s’ouvrir.
Pas si simple pourtant, quand il s’efforce au quotidien de garder les apparences. Les limites entre l’ancien lui et celui qu’il s’efforce d’être se confondent jusqu’à lui en filer le tournis. Ou la nausée. Difficile, donc, de se situer, d’autant moins quand l’autre appartient au monde sang purs. Être ou ne pas être, comme dirait l’autre. Être, surtout, malgré des circonstances. Pas si simple de se sentir traqué, d’oublier en plongeant corps et âme dans ce qu’elle est, puis de faire de nouveau face à la réalité. Sang pur. Il y a ce truc qui plane et dont il ne sait se défaire. Ça, et tout ce qui gravite autour. Son père, Azalea, les Rivers, Walters. Les risques sont infinis et ce qu’il a à protéger, trop important. Et puis il y a le reste. Ces fêlures plus internes que tout ça sert à masquer au mieux. Le peu de temps passé ensembles, les découvertes lourdes chaque mois, les postures parfois étranges qu’ils prennent l’un avec l’autre. Sincères, pourtant, avec tout leurs défauts et leurs bagages. Peut être pas toujours tout à fait honnêtes cependant.
La confiance n’a jamais été la plus aisée de ses batailles. Pas plus que celle de l’intimité.
Mal à l’aise, il l’est donc sans doute un peu, par ses difficultés à se positionner une fois sorti du cadre physique. Contraint par ce qui pèse, du dehors comme du dedans. Mais surtout, du fait d’une relation encore bien jeune qu’il ne sait pas encore véritablement définir. Comparée à ceux qui gravitent dans son entourage, Hailey est nouvelle venue. Plus encore du fait de son absence durant l’enfance là où il lui semblait pourtant avoir connu du moins de vue tous les sangs purs. Elle fait figure d’exception sur bien des plans et la nature même de leurs échanges est un domaine inconnu. Des chemins nouveaux dans lesquels il s’aventure conscient d’y faire des erreurs mortelles mais incapable pour autant d’envisager de rebrousser chemin.

Ainsi oui, elle le surprend. Sans qu’il ne sache encore vraiment se situer tout à fait. Le genre de choses qui prend du temps, tout simplement. Un peu comme de fouiller un ancien asile poussiéreux que tous semblent avoir parfaitement délaissé. Peut être la nature finira-t-elle par reprendre ses droits et que junky, photographes et baiseurs de l’obscur viendront en faire leur QG. Peut être.

‘’ Je doute que les moldus ce souci encore de cet endroit. Déjà à l’époque, la ville a été accusée d’avoir retardé l'arriver des secours. Pas que ça beaucoup dérangés, tout le monde s’entend pour dire qu’il y aurait mieux valu qu’on laisse brûler... Personne n'aime avoir des fous dans sa cour arrière '’
“Bonne ambiance…” Conclue Alec dans une grimace. Pour être très honnête, la manière dont a été perçu cet asile ou les sanatoriums d’une manière plus générale ne l’intéresse aucunement. Ni dans le monde moldu, ni dans le monde magique. Pas tant un manque d’empathie, plutôt un manque d’engagement. Et d’espace mental.
En revanche, si intérêt il y a, c’est pour elle. Alors Alec relance sur des sujets plus personnels. Intimes, même.

‘’ Pour ma part, disons simplement que si c’était à refaire, je ne succomberais pas à la pression sociale ‘’ Le regard sur un cadre photo auquel lui ne porte aucune seconde d’attention. Ce qui lui parle en revanche, c’est la pression sociale. Celle dont il a fait partie bien trop souvent, avec ses réflexions à la con et ses demandes insistantes d’ado en chien. Alors il grimace et détourne le regard une seconde avant de se reprendre et de le ramener sur elle. ‘’ La virginité, c'est pas très populaire à l’Université ‘’ Lèvres jointes en un rictus, il n’a le temps que de répliquer un “C’est naze. Je suis désolé qu..” mais Hailey passe à la suite, manifestement avide de changer de sujet. Honteuse ? Ou porteuse de quelque chose de plus lourd ? Dans un sens comme dans l’autre, elle entonne ‘’ Que la lumière soit ‘’ et abaisse déjà le levier.
L’instant suivant, la fin de sa phrase est avalée loin de sa conscience par les gerbes lumineuses qui explosent du plafonnier dans un claquement qui tend ses muscles comme les cordes d’un arc. Si Alec sursaute, ce n’est pas le cas d’Hailey qui se retrouve projetée en arrière par un court jus qui l’aurait sans doute tuée si… Réflexion arrêtée nette. Pensée trop étrange, même pour lui.
‘’ Oops.. Ça règle la question ..‘’ Le rire, bref et nerveux agite son corps avant d’être à son tour englouti par la tension soudaine qui émane tant de la vampire que de l’air lui-même. Toute lumière lui semble être absorbée soudainement. La luminosité pourtant n’a pas dû changer, peut être alors n’est-ce que ses yeux qui peinent à se faire aux changements drastiques des dernières secondes qui l’ont laissé aveuglé ? Ou bien à l’arrivée soudaine d’autre chose. Quelque chose qui fait vibrer la voix de la vampire d’une manière qu’il ne reconnaît qu’à peine.
‘’ Alec? ‘’ Le regard fixe, droit vers la porte entrouverte, le corps immobile, la syllabe formée ressemble davantage à un avertissement qu’à un appel. Rien qui n’augure quoi que ce soit de bon. L’instant suivant, sa baguette se serre davantage dans ses poings et s’il tente de percevoir ce qu’elle entend, ce qui les attend de l’autre côté du mur ne laissent pas à ses sens la possibilité de prouver leurs valeurs : quelque chose s’agrippe à la porte. Une main. Un corps décharné. Et son cœur explose dans sa poitrine.
‘’ Alec! ‘’ Une gueule démontée, la mâchoire mal alignée et la peau grise passe à son tour au travers de la porte et s’il ne réfléchi pas plus et lance un sort, rien ne se passe. Un instant, tout est flou, noyé par le flux d’adrénaline qui balaye la conscience. La panique siffle à ses oreilles et Hailey se précipite à ses côtés. Même idée : repousser le bureau. Si ses mains se saisissent de la surface de bois, cette dernière lui échappe face à la rapidité de sa comparse. Ainsi manque-t-il de basculer en avant, ne retrouvant son équilibre que pour apercevoir dans l’entrebâillement de la porte repoussée par les créatures… un amoncellement atroce de ces dernières. Ça pousse, ça s’écrase, ça cherche à glisser la moindre parcelle de chair putréfiée dans l’espace mince qui est le leur.

Elle gronde et feule comme un animal face à plus gros que lui et s’il avait deux secondes pour réfléchir, sans doute prendrait-il le temps d’observer la prise de puissance qui se dégage soudainement chez elle. Les muscles tendus, les épaules en avant, le dos voûté comme un félin prêt à bondir. Une animalité qui l’attire, c’est certain. Mais qui ne traverse son esprit qu’une fraction de seconde puisque, déjà, la porte comme le bureau tremblent sous l’assaut.
Cette fois, des flammes s’échappent de sa baguette et atteignent leur cible. Il lui semble distinguer un recul tandis qu’au travers du brasier, l’un des corps animé se crispé et s’effondre au travers de l’ouverture ; main en avant. Les doigts pulsent encore en leur direction quand les flammes se calment.

Les inferis ne sont pas sensibles à tous types de sorts, mais le feu marche bien. Résumé d’un gamin qui levait les yeux au ciel face à son précepteur et dont la correction pour l’attitude lui est davantage resté en mémoire que la leçon initiale.

Le feu, certes. Le point faible des murs du vieil asile également.

“Putain d’merde..” Qu’il jure entre ses dents en éteignant le pan de mur supérieur à la porte. Un temps précieux pourtant, durant lequel plusieurs corps passent. Le premier droit vers Hailey, le second en passant par le haut, se déplaçant au plafond comme une araignée prête à fondre sur ses proies.
D’un stupefix allongé d’un fulgari, il plaque le premier - celui dont la gueule lui saute droit dessus - au sol. Un sortilège de flamme arrête le prochain qui passe la porte et s’il relève le regard vers le troisième, toujours au plafond, Alec n’a qu’à peine le temps de voir passer une cinquième ombre qui fond sur lui.
Un sort explose entre eux et projette les deux corps de part et d’autre de la pièce : l’un sur la porte qu’il referme, l’autre sur le mur du fond, droit sur l’un des meubles de rangement. L’impact lui scie les côtes et brûle cuisse et bras de ce qu’il devine être des coupures issues des vitres de l’armoire.
Un grondement et en tanguant, Alec tente de se redresser.

Et la porte s’ouvre sur de nouveaux inferis.

Une jeune femme plus sensible se serait sûrement senti validée par les mots d’Alec, elle aurait pris ses excuses et toute la compassion qu’elles contenaient. Alors pourquoi l’avoir interrompu? Pourquoi avoir poussé contre l’interrupteur alors qu’il exprimait quelque chose qui ressemblait avoir été dit avec sincérité et intérêt? Peut-être parce que c’était lui, Alec, et qu’elle n’avait pas envie que celle qu’elle était autrefois lui colle à la peau. Idiote, naïve et facile, tant de qualificatifs dont elle se marquait violemment avec l’esprit et qu’elle refusait de transmettre à son compagnon.

De quoi aurait-elle l’air s’il savait qu’elle s’était contenue si longtemps, simplement pour tout gâcher avec un crétin durant une fête universitaire? Qu’elle avait dû boire plus que son poids en alcool pour se laisser faire, et avait bu tout autant le lendemain pour tenter d’oublier.
Pourquoi l’avait-elle fait? Honnêtement, elle ne savait pas. Certes, elle aurait aimé briser le cœur à Sam, qu’il comprenne le message très clairement cette fois; c’est terminé ! Pour se venger de son père, se débarrasser de cette étiquette de gamine parfaite et lui crier; je suis une femme maintenant ! Non. Tout ça aurait pu sembler censé comparer à la vérité.

La vérité est qu’elle l'avait fait pour arrêter tout ces cancans et les attaques à son encontre. De lesbienne à attardée, elle avait subit tout ce qui s’offrait en matière d’insulte visant à la faire sentir anormal. Le sexe, c’est bon, c’est bien ! Pas aussi important qu’on le dit, tout le monde fini par oublier sa première fois ! Ça ne compte même pas ! Puis ce qui avait de la valeur pour elle n’en avait plus aucune pour la société. Sa pureté était devenue comme une tâche rouge sur sa robe blanche, lui donnant l’impression qu’elle devait s’en débarasser.

Alors comment était-elle arrivée jusqu’ici? Dans cet asile désaffecté à s’envoyer en l’air et combattre des créatures d’outre-tombe ? Elle n’en savait rien, ça s’était fait aussi naturellement que la neige qui tombe. Ce n’était ni un simple moment ou une courte action, c’était un cheminement qui prenait du temps et dont elle ne se rendait pas tout à fait compte. Tout le contraire de son paternel qui remarquait avec la finesse d’un aigle chaque changement qu’il pouvait déceler chez sa fille. Mais le temps n’était ni aux souvenirs, ni aux anciennes histoires de baises, puisque devant elle se trouvait une porte qui tressautait sous les attaques incessantes. Le bureau ne tiendrait pas très longtemps, dans sa panique, l’instinct du vampire pris le dessus et déforma son visage et sa bouche en une grimace animale.

Dans la pression du moment, Hailey ignora Alec qui resserrait sa poigne contre sa baguette, faisant un pas vers l’avant pour tenter de retenir la porte. À nouveau, elle fut éblouie, mais contrairement à l’électricité qui n’était pas dangereuse pour elle, le feu provoqua une réaction instinctive qui la saisi jusque dans ses os. Le vampire grogna de plus belle, prenant plusieurs pas de recul tandis que le feu embrassait la porte et les corps qui tentaient de la traversé. Évidemment, de toutes les créatures magiques, il fallait qu’elle tombe sur quelque chose qui partageait le même point faible. Elle n’avait jamais été brûlée et pourtant, elle savait. Chaque cellule de son corps lui disait de s’éloigner des flammes, la figeant dans une catatonie passagère.

“Putain d’merde..”Sa voix l’effleurait sans vraiment l’atteindre, Hailey avait le regard figé dans les deux billes brumeux de la créature squelettique qui avançait grotesquement vers elle. Peu importe combien elle s’était préparé pour la bataille, rien ne l’avait disposer à affronter la mort gesticulante qui fondait sur elle. Comme une gamine, Hailey fronça les sourcils tout en refermant les yeux, attendant nerveusement le moment ou la douleur et l’horreur allait l’atteindre. La créature lâcha un grondement désemparé tandis que son corps était propulsé au sol, forçant la vampire à faire face à l’adversaire, puis à l’homme qui venait de lui sauver la mise. Suivant son regard des mirettes, la blonde remonta jusqu’au plafond, son estomac se cillant à la vue de la masse désarticulé qui rampait juste au-dessus de sa tête. Trop tard, cette fois elle n’échapperait pas passivement à l’ennemi, sa tentative d’évasion échoua à demi et la créature s’échoua contre son dos, le vampire perdit pied avant de tenter de se libérer de la poigne de fer qui se refermait contre son cou.

C’en était fait, elle allait mourir une nouvelle fois aussi pathétiquement que la première. Les mains glacées de la bête s’acharnaient à lui écraser le larynx, les siennes s’agitaient dans tous les sens devant elle à la recherche de quelque chose à agripper. La petite pièce s’illumina soudain, Hailey reconnu l’éclat bleuté de la magie de la source, une distraction apprécier pour la jeune femme qui sentit une main l’abandonner pour protéger l’attaquant du vaisseau de lumière. Elle empoigna la main solitaire qui la retenait toujours tirant si fort qu’elle l’arracha de son articulation tout en libérant sa gorge maintenant sensible. Un cri de la bête, d’autres qui grognait en s’avançant vers le festin, mais tout ça ne comptait plus.

Dès qu’Hailey tomba sur les genoux et pris une grande inspiration en s’étouffa; ça la frappa encore plus fort que tout le reste. Le monde se mit à vibrer et à son oreille, le bourdonnement de la bête qui s’éveillait avec elle. Quand la créature reposa ses doigts rebutants contre elle, le mouvement fut beaucoup plus réactif. Le vampire bondit sur ses pieds, empoignant la tête de la créature entre ses griffes avant de l’abattre violemment contre le mur. Une fois, deux, puis trois, jusqu’à ce que la masse traverse le plâtre et que le crâne se craque puis s’écrase entre les doigts de la vampire.

Elle jeta un regard rubis au jeune homme qui peinait à se remettre sur ses pieds, ses prunelles maintenant totalement dénuder des émotions qu’elles auraient dû contenir. Sa lèvre retroussée lui exposait ses canines proéminentes, on aurait cru qu’elle allait se jeter sur lui, mais le danger n’était pas écarté, forçant la succube à se glisser entre lui et eux, comme si elle protégeait sa nourriture. Plutôt que d’attendre que le danger s’approche, elle fonça vers une chaise en bois renverser qui avait été projeter par l’explosion, l’empoignant avant de bâter la créature comme une vraie Yankee. Le cadavre fut propulsé vers l’arrière sous le choc de la chaise qui se brisa, laissant ainsi place à un comparse qui se prit la patte en plein cœur. Le vampire s’arrêta un instant pour grimacer à l’image du pieu enfoncé dans le corps de l’ennemi. Une seconde d’inattention, c’est tout ce qu’il fallait pour que le monstre tente la morsure. Une occasion en or pour la blonde qui profita de la proximité du crâne dégarni pour lui gronder son mécontentement avant de lui balancer son poing au visage.

Les estafilades pour lui mordre la chair, la chaleur qui se dégage dans les muscles, le vertige qui s’empare un instant de son être. Ça bourdonne, ne dure qu’une seconde ou deux, puis il faut se redresser et faire face… Faire face à un truc qu’il n’a pas prévu, pour lequel il n’a aucune véritable expérience et qui le dépasse totalement. Un instant, il cligne des yeux et plutôt que de voir Hailey qui gronde sur les créatures avant de se retourner vers lui, le regard rubis et les traits crispés, il ne voit que le fracas des combats à Poudlard. La course éfrénée dans ses jambes, la porte qu’il ouvre à la volée pour débarquer dans le bureau du directeur, là où Logan se trouve. La baguette levée, l’homme qui le menace, son propre sortilège. Et le type qui tombe comme ça, sans plus d’effort. Il pourrait s’être agit du premier à qui il prenait la vie. Mais c’était le troisième.
Celui après lequel il a cessé de compter.

Nouveau battement de cils. Le fracas des batailles. Poudlard attaqué, Logan qui lui dit d’emporter Aileen, le serment inviolable qui lui brûle la peau, la course contre la montre, la main de Julian qui s’échappe de la sienne. Le vide.

Un inferi est projeté en arrière, un autre retombe dans un hurlement suraigu un pieu dans la poitrine. Un troisième… C’est un putain de carnage. Un putain de carnage durant lequel un réflexe émerge, pas tout à fait assuré, de bloquer l’hémorragie comme Maxence le lui a montré il y a des années. Quelques sorts, le tissu de son jean trempé, mais aucun jet de sang ne pulse vers l’extérieur et Alec peine à ne serait-ce que véritablement sentir la douleur. Non, il vois les bêtes qui dégueulent de l’ouverture, la violence déployée par Hailey, son manque d’humanité dans ses prunelles vermeilles, la brutalité infinie de ses gestes. Ce serait le moment de se rappeler tout ce qu’il connaît des vampires, d’avoir eu l’intelligence de s’être renseigné en amont, d’avoir sous le coude des techniques pour se prémunir de ce qui vient. Mais non. Il n’est ni renseigné, ni stratège et n’a aucune idée de comment se sortir de cette situation. Un sort part - pas tout à fait droit, la faute à ses muscles qui tremblent comme s’il s’agissait de son premier combat - un deuxième et une des bêtes vole sur une seconde, bloquant pour quelques instants l’accès à la porte qui grince et ploie sous la violence de l’assaut. C’est Logan qu’il faudrait avoir, là tout de suite, auprès de lui. Logan qui n’aurait même pas besoin de baguette et qui immobiliserait la charge de sorts dont son cousin n’a aucune idée. Et pourtant, il en a épluché des bouquins. Il était bon, contre son gré, mais il l’était. Des listings de sortilèges embourbés dans son cerveau en panique. Un empilement inutile de trucs dont on l’a matraqué depuis l’enfance. Logan ne serait pas fier, son père non plus, mais rien ne vient. Il voit simplement la vampire foutre des mandales à tous ce qui débarque, emportée dans une fièvre meurtrière qui le cloue sur place. Et puis ça grogne à son oreille et l’inferi retombe avant même d’être arrivé jusqu’à lui sans qu’il ne comprenne pourquoi : ‘pas de son fait.

Des vies, Alec en a pris. Des batailles, il en a vécu. L’enfer, il le traverse chaque jour. Mais ça ne fait de lui ni un soldat, ni un expert.

Pour autant, le Rivers en lui fini par s’ébrouer et brutalement, le jeune homme balance un sortilège de lianes étriquées pour ralentir la progression de tout ce beau monde tout en se détournant de la bataille. Un autre geste et quelques gravas tombent du plafond pour échouer dans un amas de plâtre sur les horreurs animées. Ralentir, toujours. Dans un fond de son crâne, ça passe en boucle : les sortilèges d’explosion, de cisaillement, mais aucun ne marcherait.
Alors il fonce droit vers l’agenda. Cinq secondes plus tard, ce dernier est en flammes et il balance à l’affilée tous les contre-sorts qu’il connaît.

Et puis soudainement ; le silence. Les corps tombent les uns après les autres.

Baguette à la main, Alec réalise ne pas avoir envisagé de simplement transplaner pour tout laisser en arrière. Stigmate de Poudlard où cette option leur était impossible, bêtise ou loyauté ; ce n’est simplement pas l’heure de se poser la question.

Le cœur en panique, le corps en branle, l’esprit foutraque, il se retourne vers Hailey et cette fois, envisage à retardement de prendre le large. Autour d’eux, le calme est angoisse. En arrière plan, le néon d’un des plafonniers se détache et retombe lourdement sur les gravas en soulevant la brume de plâtre.
Elle a toutes les raisons de vriller. D’être l’animal en manque qui se jette sur tout ce qui bouge sans être capable de distinguer les alliés des ennemis.

“T’es avec moi.. ?”

Pas si certain.

Le sang. Une obsession dont elle ne pouvait se défaire, impossible à ignorer et qui enflammait son corps tout entier. Ce n'était pas la première fois qu'elle sentait son odeur, mais la quantité que son corps déversait tirait dangereusement sur sa faim. Car même si elle s'était nourri de cerfs, de poches de sangs et autres potions calmantesl il n'y avait rien comme le sang humain. Pire, il n'avait rien comme l'ADN d'Alec. Depuis le temps, Hailey avait goûté à beaucoup de sang. Des plus salés, des plus doux et des plus clairs. Tous avaient eu un goût distinct, aussi différent que l'enveloppe charnelle qui le contenait.

Elle n'avait pourtant jamais trouvé un autre sang comme celui du jeune Rivers. C'était peut-être parce qu'il faisait partie des premiers qu'elle avait véritablement goûtés. Après que la frénésie l'ait quitté, mais juste avant que sa conscience s'éveille. Son goût ne la quittait jamais, même à travers une tempête de neige à la recherche de l'inconnu, il l'accompagnait. Il la gardait au chaud quand elle tremblait dans son lit, hantait ses rêves pour en écarter les horreurs que son cerveau inventait.

Il n'était donc pas étonnant que dans ce combat, son focus était de préserver ce sang qu'elle chérissait tant. Non, aucun de ces cadavres répugnants n'allait poser la patte sur son dîner... Euh, son ami. Oui, c'est ça.

Bouillonnant d'une force nouvelle, Hailey attrapait et défonçait tout ce qui avait la malchance de lui tomber entre les griffes. Ce n'était pas aussi facile que ça en avait l'air, leurs membres s'arrachaient facilement, mais ça n'empêchait pas les créatures d'avancer et de gagné du terrain. À travers ses rugissements, la bête mettait en garde quiconque s'imaginait pouvoir lui retirer le pain de la bouche. Parlant de voleur, la vampire aperçu du coin de l'œil une créature qui avait franchis sa ligne d'attaque. Pas question, il est à moi.

Après s'être débarrassé de son adversaire d'un coup de pied qui l'envoya valser de quelques pas, elle se retourna juste à temps pour bondir dans le dos du sournois. Incapable de dire d'où sa force lui venait, elle attrapa simplement sa tête entre ses mains et la vira si brutalement que le craquement des os vint lui effleurer l'ouïe. Une fraction de seconde, c'est tout ce qu'elle avait eut besoin pour lui deviser, laissant le corps et sa tête qui tenait toujours par la peau tomber à ses pieds. Puis, un grognement, soit colérique, soit désespérer ; qui sait quand on ne parle pas le vampire. Dans tous les cas, son cri était dédié à l'homme ensanglanté qui gisait toujours au sol. Le combat repris de plus belle, la vampire surpris par une bête qui lui sautait dans le dos.

Quand la créature planta sa mâchoire dans l'épaule du vampire, celle-ci grogna de douleur, se débattant sans arriver à mettre la main sur son assaillant. Puis, comme une malédiction venue du fond des âges, elle se figea devant ces lianes vertes dont elle aurait juré voir les petites dents pointues. Elles s'infiltrèrent dans la pièce tels des serpents diaboliques, s'attaquant aux cadavres ambulants, emportant même celui qu'elle avait sur le dos. La créature s'agrippa à Hailey, celle-ci soulevant dans les airs avec eux, ses petites jambes dandinant dans le vide avant qu'il la relâche enfin et qu'elle tombe contre le plancher froid de l'asile, le souffle coupé. Elle eut à peine le temps d'engager un mouvement pour se relever que le plafond de la pièce tomba dans un fracas poussiérieux derrière elle, la vampire bloqua rapidement son visage quand du petit gravas lui tomba sur le dos. Elle aurait sûrement été impressionnée du tour de prestige d'Alec, si elle n'avait pas été cloîtrée dans un état de panique qui lui cillait le cerveau. Elle releva les yeux juste à temps pour voir la créature qui la surplombait tomber à son niveau, son regard brumeux s'asséchant pour ne laisser que l'horreur d'un visage à demi décomposer qui dégageait une odeur de mort. Un visage qu'elle soutenu jusqu'à ce qu'elle soit enfin sur ses pieds, incapable d'expliquer ce qui venait tout juste d'arriver.

Malheureusement, ce moment qui aurait du être un triomphe rafraîchissant sur l'environnement était bénin comparer à la situation dans laquelle elle était prise. Elle se détourna pour poser les yeux sur son compagnon, même le néon dandinant qui vint s'échouer dans un vacarme derrière lui n'était pas suffisant pour décrocher son regard qu'elle laissait serpenter sur son jean imbibé de sang.

“T’es avec moi.. ?”
Sa voix était toujours comme une caresse, pendant un instant, Hailey se bloqua, dévisageant celui qu'elle reconnaissait, mais qui semblait si étrange à cet instant. '' Je suis... '' Désolé? Avec toi? Complètement perdue et désorienté?

'' Affamé '' Souffla le vampire dans un sourire sadique avant de se lancer à toute allure vers le jeune homme qui venait immanquablement de lui sauver la vie. Pourquoi? Elle même ne saurait jamais pourquoi l'appel du sang était plus fort que tout le reste. Elle enjamba quelques débris comme s'il n'était pas là, atteignant le jeune homme qu'elle saisit par les épaules avant de le plaquer contre le mur du fond. Ses petites griffes étaient solidement plantées dans sa peau, une main le quittant pour lui saisir les cheveux et lui étirer le cou comme le monstre qu'elle était véritablement. Fermant ses yeux vermeil, elle huma l'odeur du jeune homme, sa main gauche glissant contre son torse pour atteindre l'endroit humide de son jean tandis que son souffle saccadé lui caressait la gorge.

'' Tu sens si bon '' Ajouta-t-elle avant de laisser sa langue glisser contre sa peau, sa mâchoire légèrement tremblotante tant l'envie de le mordre était fort.

Les coups s’enchaînent, les créatures tombent les unes après les autres. Si une chose est certaine, c’est que l’ambiance a changé. Dans sa posture, dans ses grondements, dans sa gestuelle. Bien sûr, Alec n’a pu la voir tout à fait mais certaines choses ne lui ont pas échappé le temps de se sortir de sa propre situation, de rejoindre l’agenda et d’arrêter le massacre. A peine lui reste-t-il la conscience d’avoir capturé Hailey en même temps que les inferis dans ses sortilèges de lianes. Une image reste gravée, en partie reconstituée par son imagination, en partie véritablement captée à la périphérie de son regard : parmi les gestes brutaux de la jeune femme, une tête qu’elle attrape pour la tordre jusqu’à ce qu’elle ne lâche dans un craquement sec. Comme un bout d’épicéa qu’on tord jusqu’à la rupture. Souvenir d’enfance. Un son qui, même adulte, lui file instinctivement des sueurs froides.
Mais pour l’heure, les inferis retombés à leur statut de cadavres, réduits en cendres au sol ; la peur ne s’apaise pas. Elle ne remonte pas à l’enfance mais s’ancre parfaitement dans le présent. Elle dévisage la vampire comme on jauge une situation dont on ne saisi pas la moitié des tenants et des aboutissants. Sans trop savoir où se positionner.

A lui faire face, Hailey n’oscille pas. Elle est de marbre, immobile à le dévisager de ses yeux rubis qui luisent dans l’obscurité. Sous ses yeux, de larges veines d’encre lui mangent la moitié des joues. Pas un mouvement, pas un sursaut quand le néon tombe derrière elle dans un bruit sourd et que le plâtre s’élève autour d’elle, lui offrant une aura plus inquiétante encore. Presque mystique.

- T’es avec moi.. ?

La paume fermée sur sa baguette, prêt à réagir, il la sent le dévisager. Un air qu’il lui connaît mais qu’il n’a pas vu depuis leur première rencontre. Comme si elle était plus en contrôle quand il est là… une pensée stupide, sans fondement.

- Je suis... Pas tout à fait toi-même… Affamée

Le frisson est immédiat, la réaction tout autant. La magie pulse, le sort se forme. Transplaner est si proche. Trop tard. Le corps de la vampire a déjà parcouru l’espace, enjambé les obstacles, rejoint son être. Ses serres se sont refermées sur ses épaules et son corps, projeté sur le mur arrière. Souffle court, la baguette lui échappe et à peine arrive-t-il à la rattraper du bout des doigts.
Sous l’impact, ses côtes grincent, ses poumons s’écrasent, son crâne pulse. Douleurs.
Du déjà vu.
Mais cette fois, il n’y a ni l’alcool ni la weed pour le laisser dans un entre-deux d’émotions. Il n’y a pas le désespoir pour lui faire attendre la fin avec impatience. Il y a la peur. Du moins c’est ce qu’il se dit, tentant d’ignorer le pincement électrique qui explose en une fraction de seconde. L’excitation.
De sa force inhumaine, elle le maintient d’une main et lâche la seconde pour joindre son crâne. Elle y racle la peau de son crâne, agrippe ses cheveux, tire. La force d’un homme, l’entraînement, sa propre paume qu’il plaque sur elle pour la repousser, rien n’y fait. Pantin, il est contraint de tendre le cou et son cœur s’emballe plus vite encore. Ça pulse si fort, quand elle inspire tout contre sa peau, qu’elle bloque son corps du sien et laisse couler sa main gauche contre son torse. L’épaule, le plexus, la ceinture, la hanche, la cuisse. La plaie. Et le souffle contre lui se saccade. Ça pulse plus fort. '' Tu sens si bon ''   Son souffle glisse sur lui avant que sa langue n’en fasse de même…
Cette dimension de plaisir ne devrait pas exister chez lui. Repenti du mal, il devrait être loin de tout ça. Loin de ce truc électrique qui rugit à chaque affrontement, mais qui rappelle pourtant à l’enfant qu’il était ce plaisir qu’il a appris à ressentir à certains moment de sa vie. L’association de la douleur et de la satisfaction, de la contrainte et du contrôle. Ça ne va pas. C’est pas naturel. Comme l’enfant qui apprend à s’amuser des coups de son père. L’adulte qui jouit de valser avec la mort. Sa cage thoracique vibre, son souffle se bloque. Retrouver contenance, se concentrer sur la baguette qui risque de lui échapper à tout moment alors qu’il tente de la ramener dans sa paume.
- Hailey arrête s’teuplais ; calmes-toi…
Est-ce qu’elle saurait s’arrêter, cette fois, si elle mordait ? Il en a déjà vu, ces vampires pris dans leur frénésie, qui pouvaient démembrer un frère, le vider de son sang, s’en couvrir avant de passer à un autre proche sans jamais avoir dans le regard autre chose que la gueule du drogué en manque de son fixe. Rendus fous par la Soif. Des bêtes incapables de s’arrêter, de prendre un instant pour parler. Des choses, régressées sous le joug d’un besoin profond, addictif, impérieux. Maître suprême de tout le reste. Mais elle a parlé. Elle entre dans une dynamique de jeu. C’est qu’il lui reste une part de contrôle. C’est qu’elle n’en est pas à la bête, au zombie affamé. Il reste un stade, ou plusieurs étapes dans la perte de contrôle. Il peut s’en sortir. Elle peut être là, à sa manière. Même si cette part d’elle est un vampire qui veut jouer avec sa proie. Une part animale, certes, brutale et avide, mais pas ingérable. Une part qui peut peut être encore raisonner le fait que tuer son jouet revient à le casser.
Encore faut-il qu’elle ne bascule pas de l’une à l’autre, esclave de l’appel du sang et de la violence…
De petit rien en petit rien, la baguette remonte entre ses doigts. Juste un rien. Il ne manque qu'un rien pour faire le geste, engager le sort, se sortir de là...
Et entre ses doigts, la baguette roule et tombe au sol.

Spoiler:

Ce plaisir électrique ne devrait pas exister. Il ne devrait pas surgir quand son corps est bloqué, qu’une langue passe sur sa carotide et qu’une main se perd sur sa cuisse. Ce devrait être aboli, interdit. Surtout pour lui. Surtout quand il croise une dimension d’attirance sexuelle là-dedans. Elle le tient, l’enferme, le maintient sans pour autant perdre assez le contrôle pour n’être qu’une bête assoiffée incapable de … jouer. Car c’est bien ce qu’elle fait : elle joue avec ses nerfs, elle fait monter le suspens. C’est qu’il reste chez elle une part de maîtrise. Ou peut être le corps solide qui le maintient au mur se fout-il de la cuisse sur laquelle il se presse. Peut-être ne cherche-t-il pas le bassin mais bien le sang, uniquement le sang. Peut-être n’est-ce que ses projections à lui, nées d’angoisses et de désir, écrasé par des sensations malsaines qui ne devraient pas exister. Non, il n’en a pas envie. Ni de se faire dévorer vivant jusqu’à ce mort s’en suite, ni quoi que ce soit d’autre. Pourtant l’influx électrique est réel et à peine a-t-il le temps d’en prendre la mesure.

'' T'entends ça? ''
Non. Il n’entends pas. Il n’a pour toute attention que ce corps qui le maintient et la conscience vive de la bascule qui pourrait suivre si elle ne reprenait pas contenance. Mais elle revient à elle et l’instant suivant, elle le relâche aussi brutalement qu’elle l’a pris en otage et Alec plaque une main contre le mur pour se stabiliser, pris de court par ce revirement de situation. Un instant encore, il en oublie de respirer.
Elle se penche, chope sa baguette, la lui fourre dans la main, recule. Et l’air n’est pas encore revenu dans ses poumons. '' Je... '' C’est là, au diapason de ce simple petit mot qu’il sent sa cage thoracique s’ouvrir de nouveau et l’oxygène refluer. '' C'est le sang qui me monte à la tête ''  
- Je sais. La voix est pâle. Autant que lui sans doute.

Et elle recule. Doucement. Comme pour lui faire oublier la vitesse surnaturelle avec laquelle elle a traversé la pièce un peu plus tôt avant de le fracasser contre le mur comme une poupée de chiffon qu’on pourrait… il n’en démord pas. Tuer n’est pas le mot qui semble amené à compléter cette phrase. Et peut être n’est-ce pas la perspective qui a crispé le plus fort ce corps si grand maintenant. Épais. Musclé. Un corps d’homme qui peut se défendre.
Si fragile, pourtant, sous la puissance du sien.

Il dégluti.

Dans ce regard qu’elle pose sur lui une fraction de seconde une fois la pièce traversée, Alec ne sait qu’y lire. Il y a quelque chose de l’ordre de la prédation, une évidence qui n’a rien d’une nouveauté mais qui pourtant, lui chope les tripes un instant. Que pense-t-elle ? Qu’a-t-elle, elle, sous la peau quand elle l’observe ainsi ? Il inspire quand elle ramasse son sac et le fout sur son épaule d’un geste sec.

Là seulement, Alec se rend compte qu’il n’a pas bougé. Planté dans les débris de plâtre, les jambes mal assurée, le regard fixé sur la dangereuse amante. '' On devrait continuer ''  
- Ouais. Un réflexe, plus qu’une décision.
Elle revient vers lui et il se sent se tendre, d’autant plus qu’elle-même se crispe. En contrôle ? Il semblerait. Pourtant ses yeux restent de rubis et les larges veines sous ses paupières sont aussi sombres que du charbon. Lorsqu’elle sort sa baguette d’un geste vif, il sent son cœur faire un bond et ses muscles se crisper dès lors qu’elle pointe l’arme vers lui.
A raison.
'' Récurvite ''  Une douleur vive lui transperce la cuisse et brûle la blessure mais la sensation est stoppée nette par l’explosion qui secoue la baguette d’Hailey. Dans un sursaut, une main crispée vers sa cuisse, il en lève la seconde - celle qui tient sa propre baguette - vers la jeune femme.
- ça va ça va, pose ça, je m’en occupe. Prends un peu d’avance, je nettoie cette merde et j’arrive. Qu’elle aille se calmer au loin, qu’il ait le temps d’effacer les plaies à coup de dictame et le sang de ses fringues.

En attendant, sa cuisse pulse, l’adrénaline peine à se calmer et son crâne bourdonne des coups successifs qu’il s’est pris.

Mais au moins, les inferis semblent bien inertes.

C'était plus facile d'ignorer. De bouger dans la pièce à la recherche de son sac à dos, de quelque chose à dire plutôt que l'affronter. Ce regard avec lequel il la dévisageait, bien différent de celui qui l'avait adoré la première fois. Il était réveillé du songe qui l'avait emporté et avait finalement traversé la ligne avec ceux qui la craignait. Il pouvait rester aussi immobile qu'il voulait, la teinte de sa peau et de ses lèvres étaient explicites. Pas ma faute, c'est le vampire. Pas vraiment une excuse qu'on veut commencer, bien qu'elle l'avait utilisé. Oui, son sang lui montait à la tête. Compliquer parce qu'il ne pouvait s'en débarrasser, tout comme l'odeur de sa peau et celle de son cuir chevelu. Arrête Hailey, ce n'est pas le temps. Faut se débarrasser de tout ce sang. Elle connaissait la formule ! Elle l'avait utilisé souvent chez grand-mère durant son enfance pour nettoyer la vaisselle.

Hailey plaqua sa main libre contre sa bouche dès que le visage d'Alec se déforma sous la douleur. Dès qu'il releva sa baguette vers elle, sa main s'abaissa pour viser le plancher, toujours choquer que le sort n'ait pas simplement nettoyer le tissu de son pantalon comme elle l'avait imaginer.

'' Désolé ''
- ça va ça va, pose ça, je m’en occupe. Prends un peu d’avance, je nettoie cette merde et j’arrive.
'' D'accord '' Dit-elle de manière automatique sans même réfléchir. '' Je... '' Elle hésita un instant, préférant finalement partir sans en rajouter avec le moulin à paroles qui lui servait de bouche. Elle se retourna tout de même une dernière fois vers lui rapidement avant de traverser la porte qui donnait sur le couloir. Elle voulait imprimer son image et capturer son énergie, juste pour être sûr.

L'habitude d'avoir vu les gens pour la dernière fois était amère et ne la quittait jamais vraiment complètement. La peur du changement, d'être jugé et exécuter sans vraiment savoir pourquoi. Quand Hailey se mit à avancer dans le couloir, son estomac se nouait et sa gorge s'asséchait. Ce n'était pas à cause de l'esthétique lugubre des lieux ou de cette vibration qui l'attirait dans l'obscurité. Elle se vira pour inspecter la porte qu'elle avait quittée, poursuivant avant de soupirer dans le vide. Valait mieux se concentrer sur ce bruit qu'elle avait été la seule à entendre. Sensé puisque l'ouïe d'Alec n'était pas aussi fine que la sienne, mais elle n'avait pas rêver ; il y avait bien du bruit qui venait du fond du couloir.

Un grattement, qui ressemble beaucoup à ceux que font les rats dans sa plaque. Non, c'est plus gros, ça semble bouger des objets, les balancer. Puis les grognements semblent échapper un juron. Non, elle doit rêver.

Hailey traversa le couloir, finalement convaincu que ça ne pouvait être qu'un humain, après tout, il avait parlé. Peut-être un squatteur, rien d'alarmant dans sa situation. Elle ne craignait ni les pistolets, ni les baguettes magiques. Une petite victoire à rapporter à Alec, lui montrer qu'elle n'était pas totalement inutile ou incompétente.

Quand elle vira au coin pour atteindre la porte d'où les bruits émanaient plus tôt, mais s'étaient subitement tu, le vampire fut surpris de tomber sur une pièce vide. Aucune silhouette à travers la pièce éventrée qui donnait sur la suivante. Juste un ramassis d'objets brisés qui ressemblait à une chambre vide. L'anneau de fer au mur lui rappelait quelque chose...

'' Escampe-toy d'ici, crâne d'œuf ! ''
Surprise par la voix et la petite créature poilue qui fonçait sur elle, Hailey fut saisie d'une stupeur immobilisante qui permit à l'asseyant de lui sauter dans les boucles. Les griffes aiguisées du furet de grande taille s'enfoncèrent dans son crâne tandis qu'il tentait de prendre une bouchée de son front. Elle le dégagea assez facilement, tentant pourtant de ne pas le blesser en le balançant dans un coin de la pièce. Elle prit quelque pas de recul, mais la créature ne semblait pas décourager par le vampire.

'' Du calme, boule de poil! '' Le prévint-elle en retrouvant la liberté du couloir
Rien à faire, la petite bête fonçait droit sur elle, visant cette fois ses chevilles, Hailey n'eut d'autres choix que d'utiliser son pied pour le booter à l'autre bout du couloir, son cri strident raisonnant à travers l'étage avant de s'éteindre dans un atterrissage forcé contre le mur du fond.

La bonne nouvelle c'est que cette fois elle n'avait pas eu besoin d'être sauvé par son ami, la mauvaise c'était que maintenant; en plus d'être un vampire, elle allait passer pour une psychopathe qui aime faire souffrir les animaux.

'' C'est lui qui m'a attaqué!! '' Se justifia-t-elle quand la tête d'Alec apparu à travers une des portes. '' Et j'suis presque sûre qu'il m'a traité de crâne d'oeuf '' poursuivit-elle, visiblement toujours confuse par ce qui venait d'arriver.  

Elle s’excuse, hésite, bafouille. Elle bats en retraite aussi, puis s’éloigne comme une pré-adolescente dans le bus pour retourner dans sa famille et perdre de vue son idylle de vacances. Elle l’agace, avec ses manières de vierge effarouchée alors qu’un instant plus tôt, elle était une vampire prête à assouvir ses désirs et le traiter comme un bout de viande prêt à être dévoré. Brusqué, vexé même, d’en avoir ressenti de la peur. Et heurté, de son changement d’attitude. Cette Hailey là, l’enfant qui cherche l’attention et qui regarde en arrière avec ses yeux de biches, Alec ne la connaît simplement pas et n’est pas en mesure de comprendre la bascule. Retrouver le contrôle si vite ? Jouer les petites choses fragiles ? Aucun sens.
Pas plus que ce putain de désir électrique qui s’est pointé alors même que la peur prenait le dessus et qu’aucune envie véritable n’était là. Il gronde, la repousse d’un geste de la main et s’occupe de sa propre cuisse blessée une fois la présence de la vampire effacée. Refermer les plaies, s’occuper du jean, éliminer les traces de sang. Et puis se redresser en gardant conscience d’avoir quelques petites entailles ici et là. Il lui faudrait un miroir, quelque chose pour repérer les petites plaies. Du dictame, aussi et surtout. Mais à défaut, il se contente de ressouder le tout en bloquant les chairs. Le reste attendra.

Quand son regard se redresse, Alec s’arrête un instant sur l’état de la pièce. Les câbles échappés du plafond, le plâtre qui recouvre le sol et sature l’atmosphère, les gravas, le bureau brisé et les reliquats de meubles coincés contre la porte d’entrée. Il s’arrête un instant et ses doigts se crispent sur son jean encore trempé par l’aquamenti qui vient d’en délaver l’hémoglobine. Fixer les amas de cendres, les vagues formes de corps humain, les marques de griffes, de sang ou les murs erafflés lui font grimper un frisson sous l’épiderme. Une seconde, Alec songe à la manière dont elle l’a fixé. L’air sauvage qui était le sien. Le grodement dans sa gorge.. L’envie sous sa main. Les doigts qui ont rejoint sa ceinture, puis sa cuisse, et le désir dans son regard.
Il bloque.
Un frisson l’arrache à son immobilité. Et Alec délaisse les lieux en serrant fort dans sa paume le manchon de sa baguette. Elle est sale, cette impression laissée sur ses nerfs. Elle appelle le timbre d’une voix passée. Une sensation délaissée. Quelque chose de grinçant dont il ne veut rien entendre. Quelque chose qui lui fout la gerbe et ont il ne sait que faire.

Alors à défaut de trouver des solutions à un problème auquel il ne veut faire face, le sorcier enjambe les gravas, grimpe sur les restes du bureau brisé et sans un véritable regard vers les papiers et les classeurs abandonnés dans les décombres, il saute dans l’obscurité du couloir.

- Hailey ? Une grimace passe. Tu sais que ça pue la série B d’horreur à la manque pour ado en manque de sensations fortes ? Le genre de trucs qu’il a maté faute de mieux, enfermé chez lui pour éviter de retourner droit sous la main mise de sa famille.
Mais puisqu’il n’a rien de mieux, il se retrouve à lever le lumos devant lui avant d’éclaircir plus encore la lueur magique.

Ce sont les bruits qui le guident. Des paroles, des appels peu assurés. Des sons mats et emportés. Une lutte ? Certainement pas de celles dont ils viennent d’échapper. Dans tous les cas, ses pas se font lents, loin d’être pressé de comprendre ce qu’il se passe. Il reste à se demander, encore et encore, comment on peut passer d’une émotion à l’autre, et d’un visage au suivant, en quelques secondes. Ça ne fait pas sens. Ça n’a même pas de logique véritable quant au fonctionnement d’un vampire. Non, c’est dû à elle. A ce qu’elle est.
Je ne suis pas folle ! A-t-elle dit. Le terme n’est peut être pas le bon. Mais sa psyché semble bien fracturée.

En passant la porte, le sorcier marque un stop, coincé entre les battants. Sourcils froncés, il observe les dégâts : un chartier, particulièrement gros, couinant dans un coin, à s’extraire des débris de ce qu’avait dû être une étagère. Et Hailey, avec son air de parfaite petite innocente un peu naïve - si profondément éloignée du vampire qu’elle était quelques minutes plus tôt - à se justifier d’une voix aiguë au manque de crédibilité criant.

'' C'est lui qui m'a attaqué!! Et j'suis presque sûre qu'il m'a traité de crâne d'oeuf ''  
- Aux dernières nouvelles, t’as des cheveux. Tout ce qu’il trouve à dire, perplexe face à la situation. De perplexe, il passe à dubitatif quand la créature se redresse et beugle quelques insultes choisies à la truelle en s’extrayant de sous une planche mal fixée.

Pas plus d’un regard envers la bestiole. Un jet de lumière verte part de sa baguette et l’animal tombe raide.

- Marre de ces conneries.

Et Alec fait demi-tour dans l’embrasure, et rejoint le couloir en sortant le petit carnet de sa poche. La chose est sombre, calcinée par les sorts d’annulation. Loin d’être tout à fait intact.

Différent. Si parfois il était attiré et exciter par la créature qu'elle était, d'autre fois il était nerveux et distant. Est-ce que ça venait d'elle, ou de lui? Peut-être qu'il arrivait à savoir quand c'était elle qui jouait, ou quand le vampire était réellement en contrôle. Puis il y avait ça. Cet écart aussi gros qu'un gouffre quand il la retrouve. Dans le ton de sa voix jusqu'à la raideur de ses gestes. Son regard n'est plus bleu comme l'azur, il est gris, aussi terne que sa peau à elle. Elle n'aime pas la forme svelte que ses joues prennent à présent, absente de cette rondeur que provoquaient ses sourires larges.

Différent. Cet endroit n'est pas ce qu'il était avant. Autrefois, il était aussi propre qu'un sous neuf et les couloirs grouillait de gens presser. Elle se souvint qu'il y avait des chiffres aux portes, et qu'on les ouvrait avec une clef. La clef qu'elle portait au cou, accrocher par une cordelette noire. Mais qui?

Différent. Elle avait toujours su qu'il en était capable, ou plutôt elle l'avait imaginer ainsi. Dans ses rêves par contre, il terrassait un vilain dragon ou un méchant sorcier, pas une petite bête qui n'avait rien demandé à personne. Elle sent sa colère, et elle la boit comme un cerf se nourrit de la rivière. Elle absorbe son émotion, parce que c'est le seul moyen de rester en vie. Alors son visage tombe, se fige dans le marbre de son éternité et ses yeux scintillent dans la pénombre. Pas un regard pour elle, comme si il l'ignorait sans vraiment le faire. Elle sait qu'il n'aime pas cette jeune fille, celle qu'elle devient dans ses derniers retranchements. Quand elle n'est plus sûre de qui elle est, ou plutôt de qui elle devrait être.

D'un geste furtif, elle traverse la pièce à toute vitesse, s'arrête à la hauteur d'Alec pour dévisager le carnet des yeux. Elle ne l'a jamais vue auparavant. L'a-t-il apporter avec lui, ou était il déjà dans l'asile? Pourquoi n'avoir rien dit? Suivait-il une piste différente de la sienne? Sa petite voix intérieure commença à murmurer, mais ce n'était pas la première fois. Elle avait fait paix avec le fait qu'elle ne le comprenait pas toujours, mais c'était insuffisant pour perdre confiance en lui. '' Qu'est-ce que c'est? '' Demanda-t-elle en pointant les pages d'un coup de menton. Son regard rubis inspecta rapidement l'objet, remontant vers le jeune homme pour le dévisager. Curieux comment il pouvait incendier ses émotions, mais aussi les calmer. Ses yeux tombèrent sur sa poitrine, là où il cachait ce tambour qui la fascinait toujours autant. Un simple regard, court, avant de se reposer sur les pages du carnet.

'' J'crois toujours qu'on devrait aller par là '' Dit-elle en pointant le couloir noir d'où elle arrivait. Elle ne saurait pourquoi, une impression. Comme si quelque chose l'attirait dans l'aile Ouest, ça chantait à son oreille. Lui murmurait de la rejoindre. '' Mais si t'as une meilleure idée, j'te suis '' Le mince sourire qu'elle lui offrit s'étira vers le bas plutôt que le haut, ressemblance effrayante avec celui que son père tirait constamment. Plus un faciès commun qu'une émotion partagée, il se dissipa rapidement. Inutile de s'excuser, elle ne ferait que lui casser les oreilles.

Différente, oui, cette envie qui lui mord la chair quand elle ne devrait pas exister. Amorale, anormale. Cruelle. Elle lui file la nausée, crispe ses nerfs et broie ses tripes. Le désir interdit. Celui qui murmure à l’oreille de l’enfant effrayé des choses qu’un gosse n’a pas à entendre. Celui qui se plante en poison et dévie les pensées. Qui macère et lui mord le bassin alors même qu’Hailey a disparu. Elle et ses envies brutales, qui mêlent sang et violences. Ce “elle” qu’il a vu et qui n’appartient ni à la jeune femme qu’il connaît, ni au vampire qui cherche à jouer avec une proie qui répond à ses jeux morbides. Non, là elle était une autre. L’animal affamé qui ne fait plus aucune concession, ne reconnaît plus personne. Celui qui prendra sans plus le considéré d’aucune manière. Celui pour qui il ne sera qu’un bout de viande.
Et le pire, c’est que cette sensation, si elle persiste, cède à la colère qui le prend quand elle joue de nouveau les petites filles effarouchées. L’impression le bouffe. Incapable de déterminer si elle n’a fait que mentir sur sa perte de contrôle tant la reprise lui semble rapide. Comment peut-elle switcher ainsi de l’un à l’autre alors même qu’il a vu d’autres vampires s’isoler, trembler, vomir et bouffer pères et mères sans être capables de se retenir. Sans jamais revenir à un état plus normalisé avant de trop longues minutes. Et pire que ça encore, c’est une part de déception qui lui ronge les os et lui rappelle comme une part malsaine de son être existe et appelle au chaos.
A celle-ci, Alec refuse de faire face. Il décide d’ignorer cette morsure d’envie qui persiste, la rejette et avance. Il nettoie ses entailles, enfouie sa conscience dans la douleur d’une plaie collée à vif, et avance.
Quitte à défouler ses nerfs sur une bestiole innocente. Car il n’a rien de ça. Rien des fantasmes qu’elle lui prête. Rien d’un chevalier, rien d’un mec bien. Il y a quelque chose de mortifère en lui. Une plaie qui macère depuis trop longtemps qu’elle a fini par pulluler et suinter dans chacune de ses cellules. Un poison qui s’est répandu et qu’il se plaît à ignorer.
Qu’importe pourtant. Il est là. Vingt ans qu’il est là.

Ainsi la colère lui laboure les côtes quand il la retrouve.
Contre elle, parce que c’est vrai, il n’aime pas la vierge effarouchée qui joue les empotées.
Contre la situation, pour avoir provoqué le danger.
Contre ses plaies, qui le tiraillent et ont réveillé des stigmates plus enfouies.
Contre sa perte de contrôle.
Contre son switch rapide.
Mais surtout contre cette putain de déception ressentie dès lors qu’elle s’est arrêtée. Ce truc qui le violente de l’intérieur sans lui laisser le moindre répit.

Et contre ce regard qu’elle lui lance…

Jamais Alec n’a caché être impulsif et violent. Il ne jouera pas à l’ambiance guimauve pour camoufler les cendres. Tout au mieux sait-il cracher dans le charbon que cette atmosphère lui évoque.
Puis Hailey traverse la pièce et le rejoint. Un instant, son regard vermeil le chope, puis tombe sur le petit carnet poussiéreux. Les couleurs de la couverture sont passées depuis longtemps. Les pages jaunies et arrachées. La trace du sort grignote la cellulose comme l’aurait fait celle d’une flamme.

'' Qu'est-ce que c'est? '' Comme si elle le découvrait..
Un instant, Alec n’image pas qu’elle puisse effectivement poser pour la première fois les yeux sur l’objet. Tout est allé trop vite. Tout a dégénéré trop vite.

Il l’observe, à son tour. L’orage plonge dans les rubis. Les bourrasques de ses prunelles prennent l’éclat de l’acier, comme celles de son père avant lui. Comme celles de Logan. Comme celles de chacun de ces putains d’hommes violents de cette famille de dégénérés. Mais rien de plus. Dans le carmin de ses yeux, Alec retrouve simplement celle qu’il connaît. Celle qui s’échappe de son attention inquisitrice pour poser les yeux sur son torse puis, de nouveau, sur le carnet. Avant de changer de sujet.

'' J'crois toujours qu'on devrait aller par là ''   La reine de l’esquive. '' Mais si t'as une meilleure idée, j'te suis ''   Une seconde, derrière la banalité du discours, il lui semble voir l’ombre de son père.
Ça tient à rien. Une posture. Une mimique. La familiarité des traits ou la violence dont il la sait capable et qui, il ne peut l’endiguer, l’attire comme un papillon vers une flamme.
- On fait vraiment ça ? Et, puisqu’il veut la faire réagir, plaque l’agenda sur son ventre. Plus fort que voulu. “Comme s’il s’était rien passé ?” Les inferii, certes, l’enfer qui s’abat brutalement. Mais surtout l’attaque brutale d’Hailey, ses gestes à l’encontre des créatures comme une bête défend sa pitance. Sa perte de contrôle. Le grondement d’envie et sa main qui passe sur sa cuisse pour s’emparer du sang. Mais pas que. Il le jurerait. Ce serait pire, si ça n’était pas vrai.

Et puisqu’il lève les yeux au ciel en comprenant qu’elle ne sait vraiment pas, pour l’agenda, Alec consent à céder ce terrain.
- C’était dans le bureau, les inferii se sont pointés quand j’ai lu le nom de ta mère dessus.

Mais le sujet perd de son attrait, face au reste.

- A quel point t’étais en contrôle tout à l’heure ? Et à quel point tu l’es, là tout de suite ?

Aucun désir de jouer au jeu de celui qui ferme les yeux. Qui laisse couler et fait semblant pour s’adapter au milieu et éviter le conflit. Ce jeu c’est celui d’Hailey, pas le sien.

Une vilaine habitude. Aussi encré en elle que le sang maintenant séché dans ses veines, aussi laide que celui qui tachait les vêtements d’Alec. Un instinct de survie qui la prend au ventre, qui la force a plier l’échine parce que cette peur sans nom l’envahissait. Curieux, puisqu’elle n’a aucune crainte face à lui.

Non parce qu’elle était un vampire, ou qu’il était un quelconque saint. Une confiance qu’elle ne pouvait pas expliquer, tout comme son attrait pour ce cœur battant dont elle redoutait tant la fin.

“On fait vraiment ça ?”Elle reçut le cahier avec surprise, fronçant les sourcils sous la force qu’il avait utilisé. Certes, aucune chance qu’il la blesse avec un tel geste, mais le message était clair. Une barrière entre eux, décorer d’un gros néon qui dit; Casse-toi. Elle recula d’un pas, voulant rétorquer, mais il ajouta “Comme s’il s’était rien passé ?”

Pas tout à fait... Ou plutôt si, elle aurait préféré. Qu’il ne voit pas qu’elle était brisée, que quelque chose déconnait grave chez elle. Impossible, ce genre de folie ça ne se cache pas sous du maquillage ou un sourire Colgate. Il est sans cesse là, la fait trébucher quand elle devrait savoir marcher. “ C’était dans le bureau, les inferii se sont pointés quand j’ai lu le nom de ta mère dessus.” Une bouée de sauvetage pour l’amener loin de cette île ou elle se sentait coincée et vulnérable.

‘’ Ma mère? ‘’ S’exclama-t-elle en laissant tomber son menton pour éplucher les pages usées du carnet. Un moment qui ne dura pas très longtemps, puisque comme toujours Alec n’était pas du genre a fermer les yeux, la pressant à nouveau avec des questions. Sans vraiment savoir, ça lui plaisait. Personne n’avait envie d’entendre parler de son mal, on lui avait toujours dit de le taire, de n’en parler à personne. Aie l’air normal, Hailey, autrement les gens ne voudront pas de toi. Elle ferma le cahier, le resserrant contre sa poitrine, comme si elle cherchait à s’apaiser tout en baissant les yeux.

‘’ Quand ces choses se sont pointés, ça allait encore... Mais quand j’ai cru qu’ils allaient t’avoir, j’ai... Dérapez ‘’ Elle releva les yeux, affrontant son regard tandis que le sien semblait brumeux. La culpabilité, elle ne pouvait y échapper grâce à son vampirisme. ‘’ J’aimerais te dire que j’avais envie de te protéger, mais... ‘’ Comment expliquer que même si c’était tout de même vrai, elle avait été plus motivée par l’idée de garder cet homme, son corps et son sang pour elle. Il était délicieux, sa force se transmettait à travers votre être et vous donnait l’impression d’être invincible.

‘’ Ce n'est pas le vampire qui déconne, tu sais... C’est moi ‘’ Dans un geste automatique, elle releva une main, venant caresser la cicatrice barbaresque qui se dessinait sur son crâne. Elle pouvait sentir l’odeur de la pluie sur le pavé, celle du cuir de la voiture que son père lui avait acheter. Non, ne va pas là-bas, Hailey. Reste ici, avec lui.

‘’ Après l’accident, ils ont dit que je pouvais éprouver des troubles au niveau de la personnalité ‘’ Un rictus nerveux avant de laisser tomber son bras dans le vide.’’ Étrange façon de dire que j’allais devenir quelqu’un de complètement différent ‘’

Qui est-elle? Même Hailey ne pouvait répondre à cette question. Elle savait qui elle avait été, celle qu’elle voulait devenir. ‘’ Je passe de chaud à froid sans même le réaliser, c’est comme être pris dans un tourbillon qui ne s’arrête jamais ‘’ Une tornade qui lui donnait la nausée, qui changeait ses paroles et ses actes en impulsions incontrôlables. Oui, elle était dingue, folle. Une vraie tarée. Mais il n’y avait pas que ça, ce qu’il haïssait, ou plutôt celle qu’il détestait avait été là bien avant l’accident, bien avant tout ce qui avait fracassé son esprit. Un nouveau pas vers l’arrière, la solidité du mur sur lequel elle s’adossa était apaisant. Un ancre dans le monde qui semblait instable sous ses pieds. À nouveau, elle abaissa la tête, plus empreinte de honte que de soumission.

‘’ Y’a aussi ce truc que je fais quand j’ai la trouille ‘’ Un vampire qui à la trouille d’un endroit complètement vide? Elle jeta un regard sur ce couloir qu’elle reconnaissait malgré son allure massacrée. La peur, aussi profonde que le gouffre dans lequel elle se jetait lorsque c’était plus facile d’ignorer le monde que de l’affronter. ‘’ Et rien n’me fait plus peur que d’être enfermé dans un endroit comme ici. De finir... Comme elle. ‘’

Folle, et abandonner. La solitude, elle la craignait autant qu’elle l’adorât. Insuffisante pour être sociale, et pourtant elle le désirait ardemment. ‘’ Sauf peut-être l’idée que tu disparais ‘’ Elle ne pourrait pas lui en vouloir dans l’éventualité ou il la quitte, il ne serait pas le premier, sûrement pas le dernier. Être trop et pas assez en même temps, ce sentiment qu’elle avait toujours ressenti et qui la poussait dans ses retranchements. Dans ce Elle qui se jetait à plat ventre pour éviter de contrarier.
         
‘’ J’aimerais tellement être comme toi ‘’ Poursuivit-elle en relevant ses yeux brillants de sang pour capter son regard. ‘’ Apprendre à crier quand je suis en colère et affronter ce qui me fait peur ‘’ Oui, malgré tout ses défauts et les millions de choses qu’elle ne connaissait pas sur lui, il y avait une chose dont elle était certaine. C’était un être fort, solide et indomptable. ‘’ Mais si je l’avais fait, si je Lui avais désobéit... Il se serait débarrassé de moi comme il l’a fait avec elle ‘’

Une jeunesse, toute une vie à baisser les yeux, à se laisser contrôler dans l’espoir qu’on lui laisse sa liberté un jour de plus. Une existence imposée par ce savoir qu’à tout moment, on pouvait la faire disparaître. '' Alors, comment je me sens en ce moment?... Fragile '' Un mental qui n'avait rien à voir avec ses capacités physiques et que même le vampire ne pouvait réparer en quelques mois.