To The End Of The World - One Shot - Irlande

12/02/16

Jordane avait laissé un petit mot sur la table de la cuisine accompagné d’un emballage carton. Celui-ci venait d’une boulangerie française.

« Hey messieurs, débout seulement à cette heure-là ? Bande de marmottes ! Je suis partie faire une rando, direction l’Irlande. Un petit cadeau du matin, je suis passée par un pâtissier de chez moi, terre de gourmandise. Vous me direz ce que vous en pensez ! Laissez-moi un petit quelque chose quand je rentrerais épuisée et courbaturée !
Bises. Jordane »

Besoin de s’évader. Besoin de prendre l’air. La jeune femme avait développé ces habitudes et ces besoins en parcourant le globe seule il y avait quelques années. A présent, elle pouvait utiliser la magie sans aucun problème ce qui n’était pas le cas à l’époque, alors autant en profiter. D’autant qu’après avoir été enfermée pendant quelques années à Poudlard, la liberté semblait presque dépaysante. Alors Jordane s’était décidée à en profiter. Après tout, le travail ne semblait pas vouloir pointer le bout de son nez malgré quelques petits boulots de quelques jours affreusement mal payés et… quelques heures de démarchage par-ci par-là. Rien de bien folichon, elle en avait conscience mais voilà, autant profiter de ce temps qu’elle avait pour elle. Souvent, le soir, elle proposait à Dorofei de s’entraîner avec. Oui, elle lui faisait les yeux doux pour se faire taper dessus. Chacun son délire. Elle trouvait doucement sa place, se laissant étrangement attendrir par son fils qui réussissait à la faire rire à force de chercher à passer du temps avec elle alors même qu’elle le repoussait sans cesse au début. Mais il avait fini par l’avoir à l’usure. Il fallait dire qu’il n’avait pas grand-chose avec sa sœur. Ou bien, peut-être n’avait-elle plus grand-chose avec l’ado qu’elle était à l’époque. Alors elle s’en occupait de plus en plus, appréciant secrètement ces moments.

Chaussures de marche aux pieds, la jeune femme avait disparu de la cuisine dans un craquement sonore. Bientôt, la voilà qui marchait dans les plaines bien loin de Londres afin d’attraper un portoloin qui l’amènerait après quelques autres étapes là où elle le souhaitait. Ses pieds foulaient des lieux oubliés depuis quelques années, l’amenant à retrouver des odeurs, des sensations familières. Là, dans le froid de férier – à défaut du froid de décembre – elle sentait par moment les herbes crisser sous ses pieds alors que la fine pellicule de glace cassait sous son poids. Ses muscles se contractaient bientôt sous l’effort, ne suffisant pourtant pas pour réchauffer ses oreilles qui lui piquaient. Sa gorge se serrait sous les assauts du froid et des petits nuages de condensation se formaient devant elle, disparaissant, déchirés, dans les éclats doux de l’aube. Alors seulement, le pincement qu’elle ressentait chaque jour s’évaporait. Là, alors que les heures comme les paysages défilaient, Jordane sentait son esprit se calmer, sa conscience s’apaiser jusqu’à ce qu’elle ne s’arrête finalement, sourire aux lèvres, contemplant les reliefs doux où perçaient quelques arbres jusqu’à ce que la pente devienne abrupte et qu’on distingue un cours d’eau là en bas. Alors elle resta là un moment, fermant les yeux quelques instants, bercée par le silence assourdissant où les battements de son cœur seuls semblaient trouver un sens.