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Sacred Silence, Losing all violence | Alec

 :: Autour du monde :: Grande Bretagne :: — Angleterre
Jeu 11 Juil 2024 - 1:12

Sacred Silence, Losing all violence


🙤 Pays de Galles
🙤 3 mai 2017

 ft. @Alec Kaleb Rivers
La planque ne paie pas de mine.

De l’extérieur, l’immeuble défraîchi paraît abandonné. La façade a besoin d’un bon coup de jeune mais qui coûte trop cher au syndicat de la copropriété qui a abandonné l’idée d’entamer des travaux. Des parpaings condamnent les fenêtres du rez-de-chaussée, tandis que de nombreux volets demeurent fermés dans les étages. Plus grand monde habite la Résidence Saint-Martin, autrefois occupée par des mineurs gallois qui travaillaient dans les mines voisines avant qu’elles ne ferment. Depuis la fermeture des mines de charbon, la petite bourgade n’accueille que peu d’habitants, le plus souvent des personnages âgées qui n’ont pas eu la force de déménager malgré la dégringolade de l’économie locale. Les promoteurs immobiliers tentent bien de brader les prix pour attirer de nouveaux habitants, mais la démarche s’avère limitée - et franchement handicapée - par le caractère reculé de la ville et par son manque cruel de commerces.

Une affaire pour Aldric en revanche, qui a rarement investi dans un appartement aussi peu cher.

En revanche, pour le cadre, on repassera.

Outre les murs décrépis et le manque d’entretien flagrant des espaces verts sur le domaine de la résidence, le hall d’entrée de l’immeuble a connu ambiance plus chaleureuse. L’ampoule du plafonnier grésille, la porte d’entrée - sécurisée par badge - reste coincée une fois sur deux et nécessite un bon coup d’épaule pour l’ouvrir quand le badge veut bien fonctionner - et l’interphone fonctionne une fois sur trois. Un vieux tapis aux couleurs dévalées recouvre le sol carrelé, et mieux vaut ne pas se demander si les couleurs ont pâli sous les rayons de soleil ou à cause de la crasse. La peinture des murs s’écaille, quand le mur ne s’effrite pas par endroits - sans parler des impacts de balles sur le pan de mur à proximité de l’entrée.

Aldric aurait voulu choisir plus accueillant qu’il n’aurait pas réussi.

Des rubans barrent l’accès à la porte de l’ascenseur qui ne sert plus que de décoration depuis des années, ce qui laisse les escaliers plongés dans l’obscurité pour grimper les cinq étages de l’immeuble. Par chance, les marches ont survécu aux affres du temps, et ne menacent pas de s’effondrer à chaque pas. En revanche, il vaut mieux ne pas se montrer tatillon sur la propreté des locaux communs - la copropriété a cessé depuis longtemps à les entretenir.

Décidément, Aldric en vient à penser qu’il collectionne les endroits miteux où donner rendez-vous à Alec, comme un code tacite entre eux.

Plus c’est miteux, et plus la discussion s’annonce délicate.

En comparaison, le café du village - qui servait un café vraiment dégueulasse - lui apparaît comme d’un grand raffinement désormais, et ses habitués des hôtes de marque. Rien à voir avec cet immeuble décrépi, qui n’a pas encore été classé comme bâtiment insalubre.

Mais heureusement, l’intérieur de l’appartement n’est pas à l’image de l’extérieur.

Entièrement refait à neuf une poignée d’années auparavant, l’appartement de trois pièces se révèle bien plus propre. La cuisine est peut-être un peu trop petite, la salle de bains un peu trop dans son jus, et les deux chambres en enfilade sont loin d’être une idée de génie en termes d’agencement, mais l’ensemble s’avère potable, vivable aussi, et loin d’une catastrophe ambulante.

Situé au dernier étage de l’immeuble, l’appartement offre une belle vue sur tous les environs - c’est-à-dire sur pas grand chose - et possède un calme incomparable. Les voisins - s’ils existent - se montrent des plus silencieux, et la ville ne grouille pas non plus d’activité. Le calme est le mot d’ordre, et ce n’est pas pour rien qu’Aldric a choisi cette planque en particulier pour retrouver Alec.

Personne ne viendra chercher le gamin dans un trou paumé, encore moins dans cet immeuble à la limite de l’insalubrité. Personne ne les dérangera non plus si les sortilèges de protection flanchent par mégarde, parce que personne aux alentours ne les entendra.

Aldric laisse s’échapper un soupir d’entre ses lèvres alors que son dos repose vautré contre le dossier d’une chaise. Il ne cesse de ressasser les détails de cette stratégie, de se demander s’il s’agit de la bonne décision ou non. Peut-être qu’il pourrait faire mieux. Peut-être qu’il tombe le nez un piège. Il n’oublie pas les précédents messages codés d’Alec qui les ont poussés à reporter des semaines durant cette rencontre. D’un certain côté, Aldric ne s’en plaint pas - il avait assez à faire de son côté sans avoir à se soucier de ce qui cogite dans ce crâne-là. Il a développé davantage son réseau, renforcé toute la sécurité encore et encore après la chute de la Garde, s’efforçant de ne rien laisser au hasard.

Aldric ne prétendra pas être serein depuis la chute de la Garde. Jouer les durs à coup de “je l’avais senti venir” est une chose, mais les implications en sont une autre. Malgré toute cette faiblesse, la Garde a succombé face aux Supérieurs. Elle ne se relèvera pas de sitôt. En d’autres termes, si les exactions du petit groupe d’Aldric commencent à faire du foin du côté des Supérieurs, et qu’il n’a pas assuré correctement leurs arrières… toute cette histoire se terminera mal pour eux.

Et ce n’est pas simplement une histoire de survie. De résistance. C’est aussi une question de responsabilités. Il a choisi de mener ce petit groupe, malgré ses propres problèmes indépendants des conflits actuels. Il a choisi, à leurs côtés, de s’exposer face aux Supérieurs pour ruiner leurs actions. Il ne le regrette pas. Mais pour autant, il ne peut nier la responsabilité qui pèse désormais sur ses épaules, et son inquiétude retombe sur Beck.

Alors que la Garde est tombée, peut-il vraiment la protéger ?

S’il a eu la confirmation de sa survie, il ne l’a plus revue depuis leur escapade à la Réunion. Elle ne lui a laissé un message que pour l’informer qu’elle était bien en vie, mais il ne sait rien de plus. Était-elle sur place cette nuit-là ? Comment se débrouille-t-elle désormais ? Les Supérieurs l’ont-ils dans le collimateur ? Et tandis qu’Aldric aimerait faire davantage pour l’aider, il est réduit à l’état de spectateur, à attendre qu’elle le recontacte - en espérant que ça ne soit pas l’année prochaine.

Ses gestes trahissent son inquiétude comme à chaque fois. Il attrape son paquet de cigarettes, en prend une et l’allume dans la foulée pour calmer ses nerfs à vif. Il ne regrette pas ses choix, mais il ne cesse de se dire que tout aurait été plus s’il avait bel et bien tué Aldric cette nuit-là dans l’explosion du club.

Et il éviterait ainsi cette nouvelle rencontre avec Alec si lourde de conséquences. Il lâche un long soupir, puis tire une première bouffée sur sa clope. Cette fois, il a la tête davantage au clair, même si c’est loin d’être parfait. Il a assez la tête sur les épaules pour affronter ce qui l’attend. La transformation des deux semaines en presque trois mois lui a permis de clarifier bon nombre de choses, même s’il ne prétendra pas avoir réussi à conclure un armistice avec ses pensées - encore moins avec Beck dans la nature dans il ne sait trop quel état. Il ne tient pas à la retrouver comme la dernière fois, recroquevillée sur un lit le corps couvert d’hématomes et le regard hagard.

La sonnerie de l’interphone l’arrache à ses craintes. Il fixe un instant le vide, le silence brisé par cette sonnerie stridente, puis il arrache sa carcasse à la chaise. Il rejoint l’interphone, appuie plusieurs fois sur le bouton d’ouverture pour qu’Alec puisse entrer, tourne les clefs dans la serrure pour déverrouiller la porte.

Des bruits de pas résonnent dans la cage d’escalier, et quand Alec atteint le dernier pallier, Aldric ouvre la porte avant de la refermer derrière lui sans un mot.

Étrangement, il y a un côté peu naturel dans ses échanges avec Alec qu’il ne retrouve pas avec Beck.

— C’est pas les Bahamas, mais c’est tranquille. Pas un touriste à la ronde.

Aldric vérifie les protections de la planque, qu’il a pourtant déjà vérifié à son arrivée. Il ne laisse rien au hasard ; une façon aussi de s’occuper, avant d’entrer dans le vif du sujet.

— Dernière chance de reculer pour l’occlumencie.

Pas d’hésitation dans sa voix. Il a déjà fait son choix ; il le lui a promis.
(c) Taranys
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Aldric Tivari
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Aldric Tivari
Ven 19 Juil 2024 - 21:05

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari

La grande salle de réception est dans son dos. La table centrale est vide, seulement décorée de quelques chandelles et d’un chemin de table qu’on qualifie de moderne dans le monde sang pur. Personne à venir.
Et seuls les murmures critiques des tableaux aux murs.

Alec n’y prête pas gare. Il fixe la porte. Il y a du marbre sur ses traits. Une crispation profonde qui prend racine dans l’enfance. Un marbre qui se fend quand une main se pose sur son épaule. Chaque muscle se tend, l’acide passe dans ses veines, le buste pivote, prêt à frapper… Pour poser le regard sur Mack.
Un sourire pince ses traits. Toute la douceur du monde sous ses airs soucieux et ses grands yeux clairs. Toujours aussi mince. Un détail qui pourrait en attirer d’autres mais qui le heurte chaque jour un peu plus, conscient que l’angoisse qui lui lie le corps ici l’empêche d’avaler quoi que ce soit.
La main qu’elle passe dans son dos n’est accompagnée d’aucun mot. Et d’aucun mot elle n’use lorsqu’elle se glisse contre lui et détourne son regard de la porte qui perce le mur face à eux.

- Depuis qu’on est arrivés, il y a des zones que tu esquives…
- Hm..

Aucun mot n’existe, d’ailleurs, pour évoquer le poison qui parasite ses souvenirs. Qu’importe qu’il soit grand et qu’importe que la maison soit vide, cette porte, Alec n’a jamais cessé d’y poser les yeux. Même à présent, la regarder accélère son cœur et fait trembler ses mains. Même actuellement, du haut de son mètre quatre-vingt trois et de ses quatre vingt cinq kilos de muscles, ce qui ressort de ce simple montant en bois… c’est une impression de vulnérabilisé malsaine. Il se sent petit. Poisseux. Faible. Il lui semble que sa peau est aussi fine que du papier. Si fine même qu’en l’effleurant, on pourrait entrer en lui et prendre possession de son être. L’infiltrer, jusque dans ses os.

Dans un souffle, un frisson sous l’épiderme, Alec se laisse retomber contre sa femme. Ses épaules se ramènent vers l’avant, son dos se courbe et ses bras l’attirent à lui.

- Sortons d’ici…

S’il engage le départ par la parole, Alec n’initie pourtant pas le moindre mouvement. Bien au contraire, il ferme les yeux et cesse un instant de respirer, juste pour se contenter d’enfouir son visage dans le cou de la jeune femme, de s’imprégner de son parfum, de la texture de sa peau et de la chaleur de son corps.
Une seconde, l’envie d’être lâche et de tout laisser tomber l’agrippe aux tripes comme de longs doigts glacés. Et puis la vie le rappelle à l’ordre.

- Vesper t’attend. A la voix de son père, Alec sent Mack se crisper contre lui. Il rouvre les paupières sans bouger. Et il parait que tu fais une descente avec Vargas ce soir…

Trois heures plus tard, il reste à Alec la sensation de leurs souffles respectifs, mêlés dans un soupir las. C’est à ça qu’il se raccroche, non pas à la discussion qui a suivi, à l’hématome qui prend forme sur son bras droit ou au rictus surpris sur le visage de Mack. Il oublie les menaces voilées et les risques encourus, l’évocation lointaine au père d’Hailey et à Azalea, ne prête attention aux remarques glissées ici et là ou aux piques balancées à propos de son métier. Il oublie sa propre fureur et l’envie de mettre son père face à ses propres manquement, prenant sur lui pour une fois afin de protéger sa femme et de garder son père à distance.
En parcourant la ville inconnue, ses murs tagués et ses trottoirs défoncés, Alec se revoit emporter les premiers meubles pour les déposer dans leur ancien appartement, au centre de Londres. Il aura fallu un an pour obtenir la possibilité de réellement déménager, et qu’Azalea semble disparaître de la circulation. Il aura fallu accepter que son père connaisse l’adresse, et de se savoir surveillés. Un an de résistance journalière, de conflits incessants, de coups et de réponses. Un an de rires cyniques et de grondements défiants. Un an à jouer à nouveau au petit con, de sorte à pousser ses parents à bout. Une part entière du rôle à jouer.
Un an, aussi, à parfois imaginer Mack disparaître du jour au lendemain, épuisée par la situation.
Mais après avoir mis en place sommier et matelas et avoir déposé sur une étagère un ensemble de films, de romans et d’ouvrages traitant de psychologie. Du matériel de dessin. Ainsi qu’un bouquet d’arums et d’iris. Et sur le lit une fois fait : un tournesol.
L’humidité dans son regard. Ses traits détendus. Son sourire à faire fondre le plus épais des glaciers.

- C’est que tu pourrais presque devenir romantique quand tu veux…
- Il fallait marquer le coup… Ses lèvres sur sa nuque. Un déménagement hors de l’enfer ça se fête.. Le t-shirt froissé sous ses doigts. Garde ça pour toi, je tiens à ma réputation.. Le tournesol qui tombe sur les lattes du parquet.

Et l’immeuble craquelé qui lui fait face, ancré dans une réalité bien immédiate ; loin de ses souvenirs du jour.

Il inspire ; sonne.

Quelques secondes le séparent de l’ouverture. Il y repousse ce que la mémoire possède de poison et entre dans le hall. Quelques boites aux lettres sont défoncées, à l’image du battant qu’il a fallu forcer pour l’ouvrir. Les escaliers sont cloqués, la peinture vieillie. Tant de détails qu’il note sans y prêter plus attention que ça. Ici, pas un sang pur n’y foutra les pieds sans en avoir suivi l’un ou l’autre du duo qui, après une volée de marches, se retrouve dans un silence pesant. La complicité passée n’a plus tout à fait sa place quand chacun sait ce qui les attend. Et si l’un et l’autre ne parlent pas, c’est une manière de se préparer moralement. Comme un athlète avant une compétition.
La porte se referme. Les lieux sont neufs. Aldric a sa gueule déterminée des jours fastes. Ceux dont on ne saurait déterminer s’ils sont bons ou mauvais. Un peu des deux sans doute.

— C’est pas les Bahamas, mais c’est tranquille. Pas un touriste à la ronde.
- T’avoueras que les Bahamas, ça avait plus de charme.. Un sourire en coin se dessin sur les lèvres du plus jeune. Taquin toujours. Une manière de se protéger de ce qui va suivre. De faire comme s’il n’y avait pas quelques tremblements dans ses poings que cachent les poches de son jean. Une sueur moite dans son dos. Un regard à la fois trop vif quand il balaye les lieux et trop fixe quand il se pose sur Aldric.
— Dernière chance de reculer pour l’occlumencie.
Nouveau sourire en coin.
- J’te retourne la proposition.

S’ils sont là, c’est que la dernière chance a déjà été balayée.

- On procède comment ?

Il sait comment faisait Sana. Comment s’y prenait Logan. En posant le regard sur cet homme, la question revient : comment est-il, lui ? Avec le passif qui est le sien, Alec se doute de l’intransigeance d’Aldric. Et l’heure n’est plus au doute. Elle n’est plus à ceux qu’il pourrait trahir s’il faisait une erreur avec cette décision. Plus aux amis, aux nouveaux arrivants dans sa vie, aux secrets ou à ceux qui ont rejoint la Garde. Un pincement au cœur seul s’y raccroche. Lui qui a été si marqué de n’avoir de nouvelles de Jordane et Kezabel durant quelques jours. De la peur pour les unes, découle celle pour les autres.
Mais là encore, l’heure n’y est plus.
Pas plus qu’à celle de songer au tournesol et au sourire de sa femme. Son parfum, pourtant, lui semble un instant flotter dans la pièce.

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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Lun 22 Juil 2024 - 15:12

Sacred Silence, Losing all violence


🙤 Pays de Galles
🙤 3 mai 2017

 ft. @Alec Kaleb Rivers
Faire ça aux Bahamas aurait été plus tranquille.

Le climat des îles pour apaiser l’esprit, la plage pour se décontracter après l’effort. Rien à voir avec la grisaille monotone de l’Angleterre, avec ces paysages connus et habituels. Aldric ne dit pas non à l’idée de retourner à Cilaos, à grignoter des goyaviers sur l’arbre avec André, ou à boire une dodo sur la plage de la Saline. La dernière fois, ils sont descendus avec Maurice et Marie sur la plage. Ils se sont installés sous les pins, un peu en retrait, et ont sorti les marmites du coffre de la voiture. Avec le réchaud installé, ils ont dégusté un cari poulet délicieux avant de lézarder sur la plage.

Mais amener Alec à la Réunion ?

Aldric est prêt à beaucoup pour ce gosse. Il a renié sa ‟mort” pour maintenir son engagement auprès de lui. Il est là aujourd’hui, à utiliser la legilimancie d’une manière qu’il déteste pour l’aider, sans rien attendre en retour de sa part.

Mais l’emmener à la Réunion ? C’est tout bonnement hors de question.

Beck est une exception à bien des niveaux - et il la chasse aussitôt de son esprit. Ce n’est pas le moment. Quand Alec a franchi le seuil de l’appartement, Aldric a barricadé ses sentiments à l’extérieur pour ne pas les laisser interférer. Il déteste cette sensation, mais il renoue avec la mésange, avec cet homme qu’il a tué en fuyant la Nouvelle-Zélande.

Et malgré ce qui l’affirme, il n’a jamais oublié comment procéder. Comment décortiquer un esprit en un temps record afin d’en extraire toute la substance. Comment chasser l’inutile pour repérer les détails dignes d’intérêt. Trier l’ivraie du bon grain.

Il tire une taffe sur sa clope, achève ses énièmes vérifications. Tout est en ordre - sans surprise. Les moldus ne se douteront pas un seul instant de ce qui se trame entre ces murs. Les protections sont conçues pour passer inaperçues aux yeux des sorciers - efficaces, mais discrètes. Un mot d’ordre lorsqu’on trempe dans les milieux criminels magiques.

Il ne reste plus qu’Alec. Alec et ses souvenirs à dépiauter, Alec et sa détermination à suivre cet entraînement. Il ne recule pas. Il lui renvoie la balle, signe qu’il n’y a pas besoin d’en discuter. Un rire léger secoue Aldric. Il lui tourne le dos, les mains accrochées à la table. Il ferme les yeux.

Alec a beau demander, la question ne se pose pas. Pour Aldric, il n’existe qu’une façon d’apprendre l’occlumencie, comme il n’existe qu’une seule façon d’apprendre à se battre. La jouer fair-play vaut pour les deux premières minutes, et encore. Dans le monde dans lequel évolue Alec, il n’a pas le droit aux seconde chances. S’il commet un impair, il s’en mordra les doigts toute sa vie - et ce gamin en a conscience.

Alors jouer dans le cadre des règles ne sert à rien. C’est stupide, générateur de mauvaises habitudes qui peuvent ruiner tout un plan, voire toute une vie. Et si Alec a accepté son aide, en dépit de tous les dangers, c’est pour protéger ses amis, ses proches.

— Je ne te ferai pas de cadeaux.

Son seul avertissement. Aldric écrase sa clope à moitié consumée dans le cendrier, inspire un grand coup.

Qu’est-ce qu’il aimerait regarder les étoiles avec André, sur le perron de la case.

Il fait volte-face, réduit la distance avec Alec à peau de chagrin et à l’instant même où il croise son regard, il entre. Il enfonce la porte des défenses du gamin avec perte et fracas, et fouille chaque recoin. Aldric sait ce qu’il cherche : les amitiés du gosse dont il pénètre l’esprit par la force. Il le prend de court, ne lui laisse aucun répit, parce qu’un ennemi ne lui laissera jamais la chance de se défendre. Il parcourt souvenir après souvenir, balaie tout ce qui lui paraît insignifiant ; tout cela dans le seul but de tester ses capacités, peu importe la douleur causée.

Peu importe le prix à payer - parce que la legilimancie n’est jamais gratuite, d’un côté comme de l’autre.  
(c) Taranys
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Aldric Tivari
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Aldric Tivari
Mer 7 Aoû 2024 - 2:44

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari

/!\ TW parce que là c'est vénère : violence, agression pédophile et comment y survivre, rapport au viol (les deux faces de la pièce) .../!\

Il se souvient de la première fois. Logan l’avait mit au sol. Il manquait d’air et de repères. Impossible de comprendre la droite de la gauche, le haut du bas. De rattraper la baguette qui lui avait échappé pour réussir à se défaire du sort qui lui avait été asséné. Et lorsque le monde s’était reformé en lui, alors que Logan le soulevait de terre par le col et lui crachait toute sa faiblesse en lui ordonnant de se relever, chose qu’il n’arriva pas à faire… vint l’intrusion. Brutale. Infernale même. Une lame chauffée à blanc dans son esprit, venue pourlécher chacune de ses faiblesses et tailler dans le vif de ses défenses.
En un instant, son cousin avait pris possession de son âme qu’il avait ouvert en deux pour y déverser des torrents de lui-même.
Il se souvient de l’impression de lui appartenir. D’être aussi insignifiant dans ses refus qu’un enfant… face aux mains d’un adulte.

- T’es un putain de timbré, t’en as conscience de ça ?! Voilà tout ce qu’il a conscience d’avoir jeté à la face de son psychopathe de cousin avant d’échouer lamentablement à lui en coller une et d’être sorti de son bureau comme… un adolescent brusqué.
Il se souvient avoir vomit au bas de la statue en forme de gargouille.
D’avoir mis plusieurs jours à se défaire de la pire migraine de son existence.
Et du sang qui coulait de ses narines en titubant jusqu’au dortoir.

Puis, une semaine plus tard, après s’être de nouveau pointé dans le bureau circulaire du directeur de Poudlard, Alec se revoit poser une bouteille sur le bureau du fameux bâtard Rivers, craint de la majorité, méprisé du reste.
- C’était quoi ta leçon ? Qu’est-ce que t’as voulu me faire comprendre avec tes méthodes de dégénéré au juste ?
La glace acérée dans le regard de Logan. De ça aussi il se souvient. Et de ses mots.
- Un jour t’en auras besoin. Un jour savoir protéger ce qui compte, ça sera une question de vie ou de mort. Et je peux t’enseigner ça.


Il y a quelque chose d’atroce dans ce sort. De ce don. C’est au delà de l’intrusion. Au delà du viol. Il lui a fallu des années à subir les assauts de Logan comme le pire des entraînements qui soit, puis des mois face à Sanae pour enfin avoir cette réflexion : et eux ? Pour apprendre à maîtriser leur don, comment ont-ils fait ? Qu’ont-ils vécu ?
Et lui ? Se demande-t-il à présent, le regard braqué sur le dos d’Aldric.

— Je ne te ferai pas de cadeaux.
- Je sais.

Et il serait idiot de ne pas le craindre. Voilà le deuxième inconnu à qui il confie sa vie. Le deuxième avec qui il s’engage à plonger droit en enfer. Avec la foutue bénédiction de Logan.

Aldric écrase sa cigarette dans un cendrier, sur la desserte de l’entrée et Alec y reste bloqué une seconde. Il sait d’ors et déjà ce qui ressortira et esquisse un soupir, d’avance.
L’un souffle, l’autre inspire. Et Alec cesse de respirer dès qu’Aldric se retourne et lui fonce dessus comme un aigle sur sa proie. Trop près. Assez près, pour être honnête, pour qu’il ait pour tout réflexe que celui de lui en coller une, le cœur manquant un battement. Coup qu’Aldric se serait sans doute pris si son esprit ne s’était pas déversé dans celui d’Alec avec une similarité toute proche de celui de Logan.
Par la forme. Par l’efficacité, en revanche, il est comme celui de Sanae. Logan prends. Il cavale dans chaque partie de votre être, noie tout ce qu’il peut. Il déferle et s’infiltre dans chaque interstice comme une vague trop puissante à endiguer. Il fracasse ce qu’il trouve. Aucun doute, à l’avoir expérimenté, qu’il puisse brisé les âmes s’il le souhaite.
Sanae c’est différent. Plus technique. Plus maîtrisé. Bien sûr elle est capable d’être tempête et le lui a prouvé à bien des reprises. Mais elle sait surtout être indétectable. Là où avec Logan il terminait systématiquement le souffle court et les lèvres en sang, parfois incapable d’aligner trois pas ; il lui est arrivé de ne simplement pas être capable de détecter l’intrusion. De ne pas sentir qu’une fois profondément enfoncée dans les strates de son esprit, incapable alors de la diriger ailleurs que dans les plus reculés de ses souvenirs. Un souffle ou une aiguille. Un typhon ou le scalpel d’un chirurgien.

Aldric, comme Logan, fait mal et à peine Alec entend-il le grondement qui passe sa gorge quand son corps se crispe, figé par la violence de l’intrusion. Il va vite, s’enfonce et s’oriente.

Alec, comme n’importe quel être qui ne soit pas rompu aux dons de la légimencie ou de l’occlumencie, a pour esprit un chaos de brumes et de dunes. C’est là un leurre. Pas de défenses, pas de murailles ou de labyrinthes pour perdre ses ennemis. Pas de piège. Pas de force pour le repousser.
Il laisse la douleur se planter en lui et lui couper le souffle.
N’importe qui, lui a un jour dit Logan, qui serait rompu à l’art de l’occlumencie, aurait pour premier réflexe de monter des barricades face à la moindre intrusion. Tu dois te maîtriser. Tu dois accepter la douleur si tu veux qu’ils croient que tu n’es rien sous leur joug. Tu dois te faire leur jouet pour disposer tes pions comme tu l’auras décidé.
A l’époque, l’idiot qu’il était a cru que ce serait son conseil le plus terrible.

Mais d’autres sont venus.

Laisser l’autre s’infiltrer dans la brume, donc. Parcourir les dunes. S’emparer de chacun des souvenirs qui ne manqueraient pas de remonter. Ceux, bien gentiment laissés à disposition.
Et Aldric sait chercher. Il écarte ce qui ne sert pas, s’enfonce et balaye l’inutile. Ainsi il se fout du dernier repas de la journée, des enquêtes au Ministère, des réflexions de Géraldine, la tante au 36 ème degré et des conquêtes passagères qui jonchent en foutoir ses pensées. Non, ce sur quoi il tombe est simple et exhumé bien vite. La clope que sa mère lui a écrasé contre le bras lorsqu’il a osé dire qu’il ne voulait pas aller avec Janie chez leur oncle. Le bruit caractéristique de la braise qui crépite sur sa chair. Les yeux exorbités de Lydia, ses mots acérés.
Les rires échangés avec sa soeur. La manière dont, petit, ils se cherchaient sans cesse. Les regards en coin dans le dos du précepteur et les bêtises en douce.
Puis l’infernal “Tu sais où est passée ta sœur. Il faut parler Alec, c’est maintenant.” Et l’arrivée de Logan, pour arracher à sa mémoire ce que ses lèvres taisaient, y compris sous veritaserum.

Les proches, donc. C’est ce que cherche Aldric.

Des filles. Qui s’enchaînent les unes autres les autres. Parmi celles là, certains visages ont bien davantage d’importance pourtant. Julian, Tallulah, Elwynn, Jordane, Jayden, Caitlyn, Sovahnn, Hailey, Jillian.. Bien des noms.
Des baises comme les autres. Pour la première strate.
Puis des mélanges de proximité et d’engueulades.
Ainsi de Julian ses souvenirs amputent leur véritable complicité et n’en montrent qu’une partie. Deux crétins à rouler des mécaniques dans les couloirs. A s’embrasser et rire. A se soutenir, aussi, aux moments importants. À se confier l’un à l’autre. Et s’épauler, quand ça ne va pas. Au “juré” échangé avec Jeroen, son mec et celui dont on devine aisément qu’il était ami avec Alec, quand ce dernier lui a demandé de ne plus rien tenter avec Julian. Qu’en ami, il l’a respecté.
Puis la main qu’il a lâché et Julian qu’il a abandonnée à Poudlard. Ensuite, plus rien. Rien de plus qu’une baffe assénée dans un pub londonien.
Et le vide sidéral.

Pour Tallulah, Elwynn, Sovahnn, Hailey et Jillian, même dynamique. La proximité évidente, peut être moins complice. La baise, pour deux d’entre elles. Puis les critiques, la haine, les larmes et les regards de reproches.

Jayden et Caitlyn, même chose. Le fameux “t’es mignonne mais si j’ai envie de toi j’te sonne. En attendant contente toi d’être belle” balancé à la belle rousse un jour où il perdait totalement pied, conscient qu’il les ferait tuer s’il… s’il quoi d’ailleurs ? S’il était lui-même ? S’il ne jouait pas le jeu tracé pour lui ? Une baffe, pour toute réponse. Et tout le mépris du monde.
Et le “T'es vraiment qu'un pauv' con ! Laisse-moi passer, maintenant. Ou alors dégage.” Asséné par Caitlyn.

Kezabel. Quelques moments échangés, de la proximité, mais également une phrase lâchée dans le cellier à Poudlard. “J’crois qu’on ne se voit qu’aux pires moments. On n’arrive pas à mieux. Et quand on fait ça, on s’enfonce. Alors j’pense qu’on doit arrêter”.

Jordane, qui le cherche, danse et joue à le chauffer. Qu’il matte avec insolence, et avec qui il rit quand elle répond, mordante. Des amis, mais une dynamique étrange, peut être malsaine, peut être seulement de désir partagé.

Les hommes ensuite. Le conflit avec Enzo, la manière dont ils n’ont cessé de se chercher, à manquer chaque fois d’en venir aux mains, de se battre pour des histoires de filles. Puis les tentatives de réconciliations et ses maladresses concernant son homosexualité. Son recul. Et la manière dont ça a de nouveau vrillé entre eux. Pour n’en laisser que ça. Quelques pauvres tentatives soldées par des échecs et ce qui apparaît comme une haine commune.

Les fou rires avec Warren et leur capacité à balancer des blagues profondément misogynes, à draguer, à noter les filles même. Puis leur engueulade, après les interrogatoires, quand Warren l’encourageait à le frapper, les yeux rougis et la bouche rendue pâteuse par l’alcool. Les coups, qui ont suivi. Puis la méfiance, mise en exergue par quelques moments bien choisis.

Tout ressort, alors même que les souvenirs s’esquivent sous le passage d’Aldric, qu’il érige de faibles palissades parfois, quand ça semble compter. Non pas pour eux, mais pour lui. Parce que chacun de ces échanges fait mal, qu’il n’y a de lui qu’un pauvre type qui fait les mauvais choix et perd ceux qui ont ou auraient pu compter, les uns après les autres.
Ça, ça lui vient de Sanae. De pauvres résistances faibles et instinctives. Plus vraies que natures. Pendant que d’autres souvenirs s’esquivent en aval de la présence d’Aldric. Alors il les poursuit, et Alec l’amène là où il faut. Mais il creuse, ne lâche pas, sait qu’il y a plus.
Sinon il ne serait pas là.

Alors il trouve.

Sous la brume, là où l’esprit d’Alec laisse des chaos et des ravines. Là où plus rien ne garde consistance. Dans ces tréfonds de l’esprit qu’on ne veut visiter. Il sait. Et c’est parce qu’il sait qu’il trouve ce lieu où la brume noircit d’une présence étrangère. Le monstre dans les nuages, qui gronde et se rapproche.
Celui qu’on trouve quand on suit le fil de Janie, sa soeur. Et de Kezabel. Qu’on déterre leur rencontre. Là où il trouve un homme sur elle, et la panique dans la gorge de la jeune femme alors que le type appose ses mains sur elle. La violence avec laquelle il le repousse. La manière dont il vrille, sans retenue.
Et le type, en sang, qui fini accroché au toit d’une des tours.

Là, dans les ombres des ravines, sous la brume et dans les crevasses ; la violence, la peur, le mépris et la haine.
La violence d’un père.
Le mépris des proches.
La peur de l’autre, la peur de soi. La peur d’Azalea.
Et la haine. La haine de tous.

Là se trouvent les coups pris dans l’enfance. Les échecs successifs. L’autodestruction et tout ce qu’il provoque de dédain dans les yeux de ceux qui pourraient compter. Qui comptent peut être.
Toutes ces fois où on l’a traité de violeur. Celle où tout Poudlard a chuchoté qu’il aurait drogué Elwynn pour abuser d’elle. Ce regard atroce, jeté par Néolina, plus âgée que lui, qu’il a brusquée en la déshabillant. Cette incertitude, une fois adulte, de se pencher sur ses propres comportements. De voir que là, on a insisté. Que là, on n’a pas écouté la première fois, ni la seconde. Qu’on s’est arrêté, bien sûr. Mais est-ce que d’autres ont été moins explicites ? Ces accusations de filles qu’il n’a jamais vu de sa vie. Et le doute. Le doute horrible, derrière ses sourires.
Et l’envie de se foutre en l’air.
Ces quelques mots, qui remontent sans cesse, balancés par une obscure grande tante du côté de sa mère. “Qu’est-ce que tu ressembles à ton oncle, c’est fou !”
Puis toutes ces fois où il a cherché la merde, d’abord dans l’espoir de frapper ou de l’être. Ce truc qu’Aldric a identifié à l’instant même où il a posé un pied dans son club. Les coups, l’injustice. Pas des autres, mais de lui. L’enfoiré à son paroxysme. Celui qu’il sait être. Celui qui a cogné trop de gens pour s’en rappeler. Qui en a flingué un dans un bar, avant d’être balancé à Poudlard pour “que quelqu’un t’apprenne la vie”, des mots de sa mère, qui résonnent dans l’espace.
Ceux qu’il a emmerdé, parce qu’ils ne lui revenaient pas. Qu’ils étaient efféminés, parfois. Qu’ils avaient le tors d’aimer la mauvaise personne.
Parmi eux, Enzo. Casey surtout.
“ Rien. De ce que j’entends, t’es juste un connard avec les autres, en particulier avec les femmes.”
D’autres mots, qui vibrent dans ses souvenirs, et le visage crispé de Casey.
“— Je me demande bien pourquoi d’ailleurs… Est-ce que tu utilises les femmes pour cacher tes véritables préférences ? Ou alors t’es seulement trop pourri pour provoquer autre chose que le malheur autour de toi ?”
Et l’horreur infligée par Azalea. Observer en silence l’enfer s’abattre sur un pauvre type qui n’a rien demandé. Un mari, manger les restes de sa femme, née moldue. Et l’autre qui s’extasie et jouit tout autant de l’horreur de la victime que de celle du spectateur qui reste stoïque, à trop savoir que ça sera pire, s’il réagit.
Et parce qu’il ne peut pas. Un contrat sur sa tête, et de quoi lui lier les poignets.
L’image d’une femme, Youlia, qu’il a dragué avec ses plus beaux airs de charmeurs, afin d’entrer dans sa maison, d’y laisser entrer le diable. Youlia, qui a fini les os brisés, pendue. Les coups, qu’il a lui même donné, sur ordre d’Azalea. Marqués comme pour la fin de la pauvre fille, de quelques trous noirs, souvenirs altérés par une dissociation qu’il ne cherche pas à combler.

Isaac, aussi. L’homme que Mack aurait dû épouser, qu’il aurait frappé à mort si on ne l’avait pas arrêté.

Le troisième cercle de l’enfer, donc, celui qui dresse de lui le pire des portraits.

Mais pas le pire. Non, le pire, Aldric l’atteint ensuite.
Ce n’est pas si simple. Cette fois, les dunes de ses souvenirs collapsent et s’écrasent sur lui. Le souvenir s’échappe, fuit, passe entre les filets. Il est là, le petit creux de la mémoire dans lequel sont cachés chaque fragment de ce qui compte. Planqués dans le brouillard, enterrés dans le gouffre, sous les dunes, là où il serait aisé de se perdre dans les galeries de ses souvenirs. Les circonvolutions qui donnent le tournis.
Oui, il en faut beaucoup pour accéder à ce qui se trouve là.

Deux solutions : un occlumen.
Ou un traumatisme.

Et lorsqu’il se saisi enfin de ce qui se cache là, c’est une porte qui apparaît. Une porte rouge, dans une grande maison. Sur les murs, des portraits qui pourraient être ceux de monarques. Seulement des Rivers. Des Rivers qui tournent la tête.
Et un gosse qui tremble face à la porte. La gorge nouée, sa respiration se perd. Elle siffle.
Depuis une autre pièce, sa mère l’engueule.
Quelque part derrière le battant, le gémissement d’une petit fille perce la musique d’un tourne disque.
Pas plus.
Rien que cette putain de porte.
Cette monstrueuse. Putain. De porte.

Qu’il faut ouvrir.

Et tout son esprit se cabre quand Aldric le fait. Son corps manque de lâcher.
Sa respiration, dans la réalité, siffle à son tour.

Et il ouvre.
Une autre réception. Un repas de famille. Janie en face de lui.
Verte.
“Sois mignonne, tais toi.” Les longs doigts de leur mère sur l’épaule de sa fille, puis un regard vers son fils qui en dit de même. De ce regard aux yeux si clairs qu’ils vous transpercent. Et derrière son air affable si bien ajusté pour les invités ; toutes les menaces du monde.
Et lui, le gosse de cinq ans, qui hurle pourtant. Son âme hurle à s’en péter la voix, elle se débat, cabre et pleure.
Sur sa cuisse, il y a la main d’un adulte. Qui remonte doucement.

“Ce sont des gentils enfants Lydia. Ils ne disent jamais rien.”

En chutant, Alec bascule en arrière, l’acide dans la gorge et l’estomac qui se révulse.
Lorsqu’il atteint le lavabo, trois larmes se mêlent à la bile qui frappe le métal. Un instant, il lui semble s’étouffer. Perdre pied.
Ses paumes tremblent sur le plan de travail. Ses genoux claquent.

Puis l’ensemble se calme. Car quelque part, dans sa main, l’impression de tenir celle de Julian est encore là. Quelque part dans son cou, le souffle de Kezabel subsiste, lorsqu’elle lui disait de ne jamais rien céder à cet enfoiré qui, un jour, a osé poser la main sur lui. Pas même ça. De tordre l’horreur pour en faire sa force.
Alors ses muscles roulent dans son dos, et Alec se redresse un peu, actionne l’eau et la laisse couler quelques instants.

Puis, d’une voix d’orage, brise le silence.

- C’est moi… qui me fais pas de cadeaux.

Ce sont ses yeux de tempête, ses yeux Rivers qui se retournent vers Aldric.

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Alec Kaleb Rivers
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Dim 29 Sep 2024 - 1:29

Sacred Silence, Losing all violence


🙤 Pays de Galles
🙤 3 mai 2017

 ft. @Alec Kaleb Rivers
Rossignol ne lui laissait jamais une seconde de répit.

Fondre sur l’esprit de la cible. Fouiller de fond en comble son esprit, ravager chaque protection qui se dressait sur son chemin, les unes après les autres. Balayer les souvenirs inutiles, maintenir dans un coin ceux qui pouvaient se révéler intéressants, conserver les informations clefs. Arracher jusqu’au plus fin renseignement utile, quitte à détruire l’esprit de la cible. En sortir. Puis recommencer, encore et encore.

Rossignol veillait toujours à ce qu’il ne se relâche pas. A ce qu’il maintienne le rythme. A ce qu’il ne manifeste aucune pitié, surtout.

A chaque faiblesse, chaque échec, Rossignol lui offrait une nouvelle démonstration. Il subissait ce qu’il devait faire subir aux prisonniers de Rossignol. La douleur a bien vite été un professeur dans le sillage de Rossignol, qui demeurait présent même après la séance - une marque indélébile dans son esprit. Avec les années, il a appris à ployer l’échine et à enchaîner la compassion dans les tréfonds de son esprit - à défaut de pouvoir l’éradiquer complètement.

Avec les années, il a enterré les remords pour fondre sur l’esprit de la cible. Pour fouiller de fond en comble son esprit, pour ravager chacune de ses protections… Et il a abandonné bon nombre de corps sanglotant face à ce traitement inhumain qu’il leur imposait pour leur arracher les renseignements désirés. Les ordres de Rossignol avaient valeur de loi. Rien d’autre n’avait d’importance.

Il était Mésange. Le protégé de Rossignol.

Et il a tué Mésange.

Il l’a tué pour s’affranchir de son influence. De celle de Rossignol.

Pourtant, peu importe les années, les enseignements de Rossignol ne sont jamais bien loin. Le fantôme de Mésange plane au-dessus de sa tête, les mains sur ses épaules pour le guider à chaque fois qu’il a recours à la légilimancie. Comme s’il était désormais indissociable de son pouvoir. Son don, comme disait Rossignol.

Aldric l’a toujours vu comme une malédiction. Un pouvoir qui a fait peser de trop grandes responsabilités sur ses épaules d’enfant, un pouvoir qui lui a attiré des attentions indésirables, qui a engendré bon nombre de jalousie. Un pouvoir sans lequel il ne survivrait pas, mais sans lequel il ne serait pas là aujourd’hui non plus.

L’envie de retourner sur les plages de la Saline le démange. Avoir les pieds dans le sable, la tête en arrière, les yeux rivés sur la voûte étoilée. Il n’y a pas grand monde, la nuit. Personne pour l’interrompre dans sa contemplation. Dans sa solitude. C’est l’envie de refaire sa vie à la Réunion qui le titille, surtout. Tout oublier. Repartir de zéro.

Être véritablement libre de ses propres choix, et ne plus vivre dans les ombres.

En est-il seulement capable ?

A chaque difficulté, le spectre de Mésange s’empare de lui pour dicter ses gestes. La légilimancie s’impose comme un instant de survie. Et c’est tout naturellement qu’il condamne Alec à subir ce qu’il a vécu pendant des années.

֍ ֍ ֍

Après avoir fondu sur l’esprit de la cible vient la fouille minutieuse, précise et chirurgicale.

Fouiller de fond en comble son esprit, ravager chaque protection qui se dresse sur son chemin, les unes après les autres. Balayer les souvenirs inutiles, maintenir dans un coin ceux qui peuvent se révéler intéressants, conserver les informations clefs. Arracher jusqu’au plus fin renseignement utile, quitte à détruire l’esprit de la cible.

Aldric sait ce qu’il cherche ; sa boussole dans cet esprit qui n’est pas le sien. Alec a déjà confié ses faiblesses à demi-mots, ce jour-là au club, alors Aldric entame ses recherches par ce premier angle. Il se fiche des relations familiales ou professionnelles ; il cherche les proches, les amis, ces personnes qu’Alec protège en restant à Londres au lieu de disparaître.

Mais aucune protection ne se dresse. Il n’a qu’à tendre la main pour saisir les souvenirs et les balayer. Seule la brume les entoure. Pas un seul mur, pas un seul rempart. Pas même une succession de portes pour dissimuler ce qui doit être caché.

Les souvenirs défilent sous les yeux d’Aldric. Les visages se succèdent, certains familiers - voire trop familiers. Voire Beck au milieu de ces réminiscences manque de briser sa concentration. Jordane. Une Serdaigle à Poudlard, lors de ces années aux mains des Supérieurs. Une toute autre jeune femme qui se dévoile sous ses yeux, bien loin de celle qu’il a rencontrée sur l’île Maurice, qu’il a côtoyé entre les murs de la Garde, et qui possède désormais sa confiance alors qu’il ne sait rien d’elle.

L’apprendre de la sorte lui noue la gorge. L’impression de violer l’intimité de Beck sans qu’elle ne le sache le taraude.

Mais la concentration prend à nouveau le relai - les habitudes de Mésange, plutôt - et les sentiments personnels disparaissent, chassés au-dehors de l’esprit d’Alec.  A nouveau, il observe avec froideur les visages qui défilent sous ses yeux, analyse le comportement du gamin qui ne ressemble en rien à ce qu’il connaît de lui aujourd’hui. A croire que les années l’ont assagi.

Après les femmes viennent les hommes, bien que le constat demeure le même. Aucun proche. Des débuts d’amitié s’amorcent, rompu par la stupidité d’Alec, son attitude de parfait connard. Les souvenirs avec Enzo l’affectent plus que de raison, mais cette fois, Aldric ne chancelle pas. Il laisse le dégoût et le malaise hors de l’esprit, même s’il sait qu’une fois cette session terminée, il ne s’en dépêtrera pas.

Inévitablement, ces souvenirs affecteront sa relation avec Alec.

Mais toujours aucun proche. Les maigres palissades qui se dressent sur son chemin ne cachent rien de sérieux. Aucune amitié forte. Aucune amitié qui vaille la peine d’endurer mille souffrances pour elle.

Et Aldric ne cerne pas où est l’entourloupe - car elle existe, il en est certain. Il sait qu’Alec a déjà été formé par l’occlumencie, mais il n’en voit là aucune preuve. Il n’y a que cette brume qui n’offre aucune défense mais des souvenirs inutiles à profusion.

Puis viennent les ravines, ces crevasses dissimulées par la brume. L’obscurité les habite, s’enroulant autour de souvenirs bien plus sombres que les précédents. Des vestiges bien ancrés dans l’esprit qui dévoilent autant l’horreur que le doute. Et si les coups pris dans l’enfance font écho au passé d’Aldric, le reste étreint son cœur et anime à nouveau le dégoût. Derrière la confiance et l’arrogance du gamin se cache une noirceur qu’il ne montre pas au tout-venant, et à raison.

S’il avait rencontré Alec sous ce jour, sans doute qu’il ne lui aurait pas proposé son aide. En dépit de tous les enseignements de Rossignol, Aldric s’est tissé des limites, et il ne les a jamais franchies, peu importe les conséquences de son entêtement.

Voir Casey dans cet océan de noirceur confirme un peu plus cette sensation alors qu’il ne peut pas faire marche arrière. Plus maintenant. Il pourrait, pourtant. Se retirer de l’esprit, couper court à cette session et tourner le dos à ce gamin une bonne fois pour toute.

Mais il reste. Il avance dans la brume, chasse ces souvenirs tous plus horribles les uns que les autres qui ne lui apprennent toujours pas ce qu’il veut savoir. Parce qu’il y a autre chose. Il le sait. Les proches. Ils existent. Aldric le sait. Alors il se fait violence, cadenasse une fois de plus tous les sentiments contraires qui l’habitent. Mésange devient sa béquille pour avancer, le pilier qui ne flanche pas face à l’horreur.

Et il touche au but. Après les ravines et les crevasses, un nouveau souvenir apparaît, fuyant à travers les dunes. L’attraper demande du temps, une bonne maîtrise de la légilimancie pour ne pas s’avouer vaincu.

La brume disparaît. Une porte rouge trône désormais au cœur de l’esprit, avec une grande maison pour décor. L’intérieur lui rappelle la demeure des Teller, avec ce faste qui renvoie à l’aristocratie et au dédain habituel des sang-purs. Mais à l’intérieur, il n’y a rien d’autre d’intéressant que cette porte.

Il n’a pas envie d’ouvrir cette porte.

Cette porte, elle lui en rappelle une autre, à condition d’oublier son rouge rutilant et son emplacement. Il n’a pas besoin d’entendre le gémissement d’une fillette pour comprendre qu’il n’a aucune envie d’ouvrir cette porte. Ce qui se cache derrière, personne ne devrait le voir. Personne d’autre ne devrait en être témoin.

Mais le spectre de Mésange tient toujours ses épaules, et il ouvre cette maudite porte. L’esprit d’Alec se cambre, résiste véritablement pour la première fois à cette intrusion, mais il est déjà trop tard.  La porte s’ouvre sur un dîner de famille, sur une horreur sans nom qui se joue à la vue de tous sans que personne ne réagisse. Sans que personne ne remarque rien.

Le regard de Fauvette, dans l’entrebâillement de la porte, indifférente à la colère que Rossignol déchaîne sur lui.
Tous ces oiseaux de malheur qui se fichent bien de savoir qu’il est derrière cette maudite porte

Cette indifférence, il la connaît, mais c’est une maigre branche à laquelle se raccrocher alors que l’indicible se peint sous ses yeux.

Cette fois, Aldric vacille pour de bon, et même Mésange n’y peut rien. La concentration se brise, et il sort de l’esprit d’Alec avant même d’avoir atteint son but. Il recule de quelques pas, s’appuie au mur pour stabiliser sa carcasse soudain bien trop lourde. Les images se fracassent encore dans sa tête, la nausée lui sert le ventre, et sans le mur, il tomberait au sol.

Après un moment, il attrape une cigarette. Ses mains tremblent. Allumer la clope lui demande un temps fou inutile, et le tabac n’apaise pas ses nerfs écorchés. Rien qu’une façade pour contenir les troubles qui le secouent au même instant. La collision entre les souvenirs d’Alec et les siens, l’horreur à laquelle il a assisté et sur laquelle il ne met même pas les mots. Cette même atrocité qui lui donne envie de déguerpir, d’attraper le portoloin dans sa poche et de se réfugier à la Réunion.

Et pourtant, des horreurs, il en a vues à force de fouiller les esprits des prisonniers de Rossignol. Les mafieux font rarement dans la dentelle. Il a parfois été trop jeune pour comprendre certains souvenirs, mais il a appris. Compris. Serré les dents, parce qu’il n’avait pas le choix. Mais les souvenirs d’Alec l’ébranlent davantage, peut-être plus qu’ils ne le devraient. Il n’en sait rien.

La voix d’Alec tonne dans l’appartement. Le gamin a repris du poil de la bête, se dissimule à nouveau derrière ses murs d’arrogance. Aldric le dévisage un instant sans trop savoir quoi dire. Sans comprendre cette fierté. Une partie de lui est restée prisonnière derrière la porte rouge. Il peine à garder le fil. Même son pull ne suffit pas à le réchauffer.

Y a-t-il seulement quelque chose à dire ? Des questions à poser ? Il n’est pas là pour découvrir la vie d’Alec, pour apprendre à le connaître ; il est là pour lui enseigner l’occlumencie. Aucun commentaire sur ce qu’il a vu n’est bienvenu.

C’est là que Mésange réapparaît. Que sa boussole se rappelle à lui ; la raison derrière cette plongée brutale dans son esprit. Les proches. Aldric a déniché un traumatisme que n’importe qui chercherait à dissimuler, mais il n’a pas mis la main sur les proches d’Alec. Ce constat agite la nausée à nouveau, et cette fois, il se laisse glisser contre le mur jusqu’à s’asseoir par terre.

Un constat qui n’a aucun sens.

Il tire sur sa clope pour rassembler un semblant de courage, pour dénouer sa gorge et pour chasser la nausée. Pas la meilleure idée du monde. Il fait appel à il ne sait trop quel sang-froid pour ne pas dégobiller la bile qui remonte.

— J’ai l’impression d’avoir tout vu… comment pourrait-il en être autrement, avec cette porte ? Mais je sais que c’est pas le cas.

Aldric croise le regard d’Alec. Mésange est là, prêt à fondre à nouveau sur l’esprit du gamin. A le dépouiller du moindre de ses souvenirs pour obtenir ce qu’il cherche. Fouiller de fond en comble son esprit, ravager chaque protection qui se dresse sur son chemin, les unes après les autres. Balayer les souvenirs inutiles, maintenir dans un coin ceux qui peuvent se révéler intéressants, conserver les informations clefs. Arracher jusqu’au plus fin renseignement utile, quitte à détruire l’esprit de la cible. En sortir.

Puis recommencer, encore et encore.

Aldric hésite. Mésange s’impatiente. L’envie lui manque. Il ne veut pas y retourner. Il veut disparaître sur les plages réunionnaises, oublier tout ce qu’il a vu.

Mais il a promis d’aider Alec. De l’entraîner. Ce n’est pas en lui accordant une pause qu’il l’aidera.

Alors il plonge à nouveau, laisse Mésange aux commandes pour arpenter la brume avec force, sans tomber dans ce piège sordide cette fois.
(c) Taranys
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Aldric Tivari
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Aldric Tivari
Dim 6 Oct 2024 - 2:46

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari

/!\ TW parce que là c'est vénère : violence, agression pédophile et comment y survivre, rapport au viol (les deux faces de la pièce) .../!\

Le monstre gronde dans son âme. Il se réjouit de ce cœur qui bat trop fort, de cette respiration sifflante et de la bile qui remonte inlassablement chaque fois que ses tripes se tordent sous le coup des souvenirs. C’est une bête terrée dans les brumes. La seule part de son âme qui ait une véritable représentation physique, cachée dans les crevasses et le chaos. Une exploitation de ce qui était là avant.
Le travail de l’âme n’est pas chose aisée. On ne modèle pas son esprit en quelques mois. Ça demande des efforts et un apprentissage qui relèvent de l’occlumencie et de la légilimencie. Des particularités qui n’existent donc pas chez le tout venant. Mais qui apparaissent lorsque l’esprit est marqué au fer rouge.
Donc oui. Alec exploite ce qui était… déjà là.

Qu’importe l’ancienneté de ses ravines, elles lui soulèvent toujours autant le cœur. Et alors qu’Aldric se laisse tomber sur le mur de crépi, c’est avec hargne qu’Alec s’y refuse.

L’arrogance, donc. Qu’il appelle ça comme il le souhaite. Qu’il le perçoive comme la sous-merde qu’il a dépeinte n’a pas tant d’importance en vérité, quand murmure à ses oreilles les râles du monstre de l’enfance.

— J’ai l’impression d’avoir tout vu… Mais je sais que c’est pas le cas.

Tout est là ; coincé entre le regard qu’Aldric possède lorsqu’il se laisse glisser le long du mur et les mots qu’il prononce.
Tout.

- Non, c’est pas le cas. Ce n’est qu’un murmure, et pourtant il vibre d’une puissance rêche. Quoi qu’Aldric ait pensé, le plus jeune des Rivers n’a jamais pensé s’en tirer à bon compte. Le rythme imposé d’abord par Logan puis par Sanae n’a jamais été autre qu’exigence à l’état pur. Il est prêt.
Et ne l’a jamais sous-estimé.

Nulle besoin de lui expliquer le piège : Aldric l’a parfaitement compris. Et une fois encore, comme à chaque embranchement de leur relation, il aperçoit ce que le caractère bourru du sorcier masque pourtant : de l’empathie.
Celle qu’il emmerde, là tout de suite, mais dont il a pourtant immensément besoin.
D’un geste sec, Alec attrape une chaise et la place face à celui qui s’est posé en enseignant. Dossier sur l’avant, il s’assoit face à Aldric.
Pas un commentaire.
A l’instant où son cul touche l’assise, le legimen a de nouveau pénétré son esprit.

Et reprend la tempête.
Tout son être se crispe alors que le sorcier l’envahi de nouveau. Mais cette fois, ce dernier va droit au but. C’était là quelque chose qu’Alec attendait mais rien n’y fait, dans l’enceinte de sa cage thoracique, ça bat plus fort et si sa respiration accélère davantage, il maintient son esprit dans le calme relatif qu’il se doit d’avoir. Ainsi les brumes désolées de son âme reste telles qu’elles étaient la première fois.
A peine frémissent-elles à son passage alors qu’il passe en météore, ignorant superbement la surface et ses souvenirs en écran de fumée.
Il file, droit sur la porte rouge.
Et la défonce.

Là, comme la première fois, c’est un séisme de refus qui met en branle de faibles défenses mal initiées. Rien de concret, aucun piège, aucun mur, pas d’entraves véritablement élaborées. Les souvenirs se font épais, comme si l’air ou la physique y était différent. Bien sûr Aldric les force sans mal.
Il perce sa mémoire et passe d’une scène à l’autre sans s’y arrêter. D’une main sur la cuisse à celles posées sur ses épaules pour se pencher sur sa nuque. Aux bouquets de phalanges qui pressent ses cheveux. D’un secret murmuré à l’oreille d’un enfant de cinq ans aux demandes enrobées de miel. Il passe sur la grande sœur qui capte toute l’attention de leur oncle et serre très fort la main de son petit frère. Il balaye les brûlures infligées par la mère et les coups de ceinturon du père. Les pleurs que les enfants n’osent pas lâcher quand il s’agit d’inviter le tonton à bouffer et les regards inlassablement déviés aux réunions de famille, d’amis, de collègues.
L’indifférence en fond sonore.

Elles s’emboîtent, se toisent, s’imbriquent dans un capharnaüm proche de la structure d’un labyrinthe. Chaque cercle de l’enfer franchi en laisse deviner d’autres et au fur et à mesure, esprit comme corps se cabrent. Chaque fois, Aldric survole et trouve l’accès suivant. Il se perd un moment, assez pour laisser à Alec une respiration hachée et l’acide au bord des lèvres.
Puis, après le pire que son âme puisse receler, quand le corps et l’attirance d’un homme deviennent les plus monstrueux des cauchemars, Aldric trébuche hors de la boucle.

Et trouve le reste.



Elle reste jeune, cette Janie. Une adolescente. Une adolescente aux yeux rougis de larmes qui redresse le regard pour trouver son petit frère sur le pas de sa porte et lui adresse les pires mots qu’il ait jamais entendu. “Je suis désolée. Je peux pas. J’y arrive pas.” Et le petit frère de la prendre dans ses bras pour apposer sur ses blessures la plus douloureuse des réponses. “Je sais.”



Et ce qu’elle ne dit pas, qui rebondit dans les souvenirs. Leur mère qui lui présente l’homme qu’il faudra épouser, une sommation qui n’accepte aucun recours.
Et le type. Trois fois son âge.

__

Treize ans.

Janie se trouve dans l’encadrement de la porte de l’immense manoir. Elle ne possède qu’un petit sac dont Alec sait le contenu ensorcelé. Elle aurait pu partir par la fenêtre ou la porte de service. Elle aurait pu profiter d’une soirée ou d’une sortie des parents, l’une de celles qui les amènent dans d’autres pays pour des affaires “familiales”.
Mais elle se trouve . Ce n’est ni n’importe où, ni n’importe quand. Elle, la grande sœur, le point de repère et le seul soutien de la famille, semble si petite au centre des grandes portes. De tout ce qu’elle pourrait observer de l’immense manoir, elle a le menton levé et le regard porté vers l’étage du dessous d’où il l’observe, adossé à la rambarde qui surplombe l’escalier double.
D’un geste, frère et sœur s’adresse un au-revoir silencieux. Dans sa poche, le poing serré tient un artefact qui sèmera la confusion dès le matin arrivé.
Lorsqu’elle se détourne, Alec inspire et bloque. Du haut de ses treize ans, il sait que si elle part seule, elle a une chance. Lui est le mâle. L’héritier.
Ils ne le laisseront pas disparaître.



Dix-sept ans.

- Mais lâche moi ! C’est quoi c’est ta meuf ? Qu’est-ce’ tu t’en mêles ?!
Alec est adolescent à son tour, il maintient un autre jeune de son âge, l’avant bras au travers de son torse.
- Non. Mais tu vas lui rendre sa tune.
- Elle est grande, si elle a un problème avec moi, elle le dit. Mais elle le fera pas…
Avec un sourire mauvais, Alec trace un souffle amusé.
- J’crois qu’on s’est pas compris toi et moi…

Son prénom lui échappe à l’heure actuelle. Le type était l’un de ceux avec lesquels Mack a pu sortir. Ceux qu’elle a aimé, peut être un peu, et dont Alec restait loin. Parce qu’il n’avait strictement rien à dire, et qu’il ne se serait jamais permis de jouer la carte de la jalousie.
Non, ses interventions se limitaient à celles-ci. Empêcher les dérives physiques… ou monétaires.

Au souvenir se mêle celui de Mack et ses traits si jeunes qu’encadraient le blond de ses cheveux.
- Il m’a tout rendu. Alec tu m’entends ?
Lui, allongé sur le lit de la jeune femme, un joint aux lèvres et le regard braqué au plafond.
- Tu vois que ça s’arrangerait finalement.
- Alec… T’as fait quoi ?

Les regards qui se croisent. Et dans ces derniers, tout l’éclat de chaque baiser volés au cours des années.

- Rien.
- Tu fais jamais rien toi hein ?
- Jamais.



8 ans. Manoir Rivers.

Retour en arrière. La gamine qu’elle était, petite blonde aux cheveux en queue de cheval, le visage griffé par l’arbre accolé au manoir Rivers. Celui qu’elle a grimpé en pleine nuit, après avoir passé la haute haie qui séparait le manoir de la demeure des Blackburn, plus modeste mais à peine.
Perchée au haut de la fenêtre, elle s’en retrouve mise à terre alors qu’Alec saute de son lit, l’attrape par le poignet et, paniqué, lui demande ce qu’elle fout là. A peine a-t-elle le temps de répondre qu’il la balance au sol, brutal enfant. La seconde suivante, Alec l’a fourrée sous le lit.
La suivante, son père ouvre la porte à la volée.
Et une poignée de minutes plus tard, le gosse finit à terre, des coups de ceinture pour lui apprendre à respecter les tableaux de ses aïeux, éventrés le matin même.
Ceux-là même qui voient tout, dans cette baraque.

Quelques heures plus tard, tous deux sont toujours au sol, dans le calme retrouvé du manoir. Assis dos contre le lit ; ils rient.
Comme les enfants qu’ils sont.



Douze ans. Manoir Rivers.

Mack était là, avec eux, face à ce précepteur impitoyable. Ses parents avaient insisté pour qu’elle puisse bénéficier de l’éducation exemplaire des Rivers. Janie venait de passer, encore tremblante de l’épreuve imposée par McNill, elle écoutait, docile, les remarques, critiques et reproches.
Mack, elle, se pressait à lui. Qu’importent à quel point ils pouvaient s’engueuler durant l’enfance, ce jour-là, son index passait doucement sur le dos de la main de la petite. Une tentative d’apaisement, rapidement rejointe par les mimiques grimaçantes de Janie dès l’instant où McNill s’était détourné d’elle.



Seize ans. Manoir Blackburn.

S’ils n’avaient pas voulu déraper, ça s’était pourtant fait en quelques secondes. Les rires, les épaules l’une contre l’autre, un mouvement vers l’avant pour elle, afin de ramasser un cadeau offert un peu plus tôt qui venait de lui échapper. Le même de sa part. Et les visages trop près. Ils le sont toujours, de toute manière. Mais cette fois-là, la volonté de s’en éloigner n’a pas remporter la bataille.
Les lèvres qui s’effleurent, les souffles qui se mêlent, les corps qui se frôlent. Et puis la bascule, aussi soudaine qu’elle n’est torture depuis bien des années.
Ses doigts s’étaient enroulés autour de sa nuque et il s’était penché sur elle. Il n’avait fallu rien de plus pour que les corps ne s’emballent et qu’ils ne partent à l’assaut de leurs vêtements respectifs.
Sa première fois, à elle.
Tandis que lui, était connu dans la communauté sang pure pour être à la recherche de sexe violent depuis ses treize ans. Avant sans doute.

- Stop stop stop arrête. Mack ?” Le souffle en branle, le corps à vif, les mains tremblantes et toute son âme pourtant avide d’elle. “J’peux pas t’faire ça.”

Et les mots coincés dans sa gorge, lorsqu’il avait fini par quitter la chambre, un vertige à l’arrière du crâne. “J’suis désolé.”



Et toutes ces nuits, pourtant, passés l’un contre l’autre. Toutes celles qui ne devraient pas exister. Qu’ils n’assument qu’à mi-mot. Qui se disséminent au fil des années. La tendresse, apprise. Les caresses, assumées.
Celles qui s’invitent petit à petit, auprès des autres. Une voie ouverte, offerte. Dans laquelle il ne tarde pas à s’engouffrer dans un besoin dévorant.
Celui d’un homme qui ne peut plus être proche des femmes autrement qu’ainsi. Dans ce que les corps offrent d’intime.



20 ans - Dortoir Poufsouffle

- Pourquoi t’es comme ça ?
- Comment ?

Il n’y avait pas une lumière, seule la lueur de la lune filtrait au travers des lucarnes du dortoir des Poufsouffles et dessinait sur les rideaux des lits des arabesques argentées.

- Dès que tu sors d’ici t’es insupportable… Mais ce mec-là, ... Il me plaît bien.” Allongé contre Sovahnn, l’arrière des phalanges glissant sur l’arrondi de son épaule, Alec fermait une seconde les paupières. “L’autre est un con, t’en as conscience ?”
- Ouais.. J’le sais ça.

Un souffle s’échappait et roulait sur sa peau diaphane.



Quatorze ans - Réunion Sangs purs

- En fait t’es pote qu’avec ceux que tu peux ken ?
Verre à la main, Alec lâche un rire et fait teinter le cristal sur celui de sa vis à vis. Belle brune, yeux verts. Erin.
- Y’a d’ça ouais.
En aucun monde il ne pourrait avouer la vérité : la peur, incessante, qui demeure chaque fois qu’un individu de son propre sexe se trouve à proximité.
- On baisera pas.
- Ok.
- J’suis sérieuse.
- D’accord.
- Casses-toi alors.
- Tu crois qu’ils arriveraient à vendre l’intégralité du PIB du Laos en vomissant des sauterelles ?
- .. Quoi ?

Avec un petit sourire, Alec se retourne vers elle, une capsule au creux de la main. Et du coin de l’oeil, il repère quelqu’un d’autre.
Une jolie rousse aux yeux olive. Julian Neil.



Julian, il l’a retrouvée à Poudlard. Et avec Julian, ils se sont percutés trop souvent pour qu’il n’en perde le compte. Sur sa peau, il s’est perdue. Dans ses bras, il a trouvé un équilibre perdu depuis longtemps.
Avec Julian, ils ont rit, ils ont marché sur le monde. Ils ont grandit, surtout.
Et Julian est tombée amoureuse. Du premier mec avec qui Alec a fini par nouer une relation d’amitié.



19 ans - Poudlard

- Écoute, j’sais pas comment dire ça, juste… on est ensembles. Julian et moi… c’est pas en elle que j’ai pas confiance..
- C’est en moi.
- C’est pas c’que j’ai dit..
- J’ai compris Jero, pas besoin de me faire un laïus.

J’ai compris. J’la touche plus.
Et l’impression, bien importune, de s’effondrer. Bien par manque de l’autre. Bien parce que tout ça dépassait de très largement le sexe, comme ça le dépassait avec Jayden. Jamais de la même manière c’est vrai, mais toujours avec une sincérité qui le dépassait indubitablement. Non pas un besoin de l’autre mais besoin d’eux, besoin de leur chaleur, des moments partagés, de tout ce qui, autrement, ne pouvait exister.

Les souvenirs à la pelle. D’être avec eux, d’observer l’amour grandir et prendre force entre ses deux meilleurs amis.
Les rires, allongé en travers du lit de Julian, une bouteille passant de mains en mains, tous deux seuls dans le dortoir, à refaire le monde.
Les silences aussi, lorsqu’il en écoutait l’un ou l’autre. Les prises de position de Jeroen, ses démêles avec les Supérieurs, les expériences communes, sa disparition. Les secrets de Julian.
Là, le souvenir s’évade. Il échappe à Aldric. Remplacé par celui d’une soirée arrosée sur les gradins du stade de Quidditch. Les rires, le mal être. Elle était allongée au dessus de lui. Les doigts qui se mêlent, le temps d’une sage pression, pour se souhaiter bonne chance à l’un comme à l’autre sans plus trop savoir à qui s’adresse le plus fort besoin de soutien.
Et la danse alcoolisée sous les étoiles.



Vingt-deux ans.

Reviennent d’autres évènements, sous un autre prisme.
Le Serment Inviolable, imposé par Logan, l’obligeant à s’évader et emporter avec lui une femme dont le nom lui échappe à présent. “Qu’importe le reste”.

Et la brûlure sur sa peau, lorsque Julian a chuté, lâchant sa main dans la fuite. L’enfer s’ouvrant sous ses pieds, lorsqu’il s’est vu ne pas réussir à ralentir, pousser l’autre fille, et disparaître en laissant sa meilleure amie en arrière.

Le vide, ensuite, lorsqu’il l’a retrouvée dans ce bar, nombre mois plus tard. Puis la relation qu’ils ont reconstruit comme ils le pouvaient. Ses excuses, ses mots, les étreintes qu’ils ont fini par échanger. Mais la distance et la colère, impossibles à ignorer.

Sa présence, pour aider Mack. Celle qui n’a jamais faibli lorsque la belle blonde a dévoilé les marques de coups sur sa peau le marbre. Sa constance, quand il a fallu trouver une technique pour l’arracher à la violence d’un homme et à la perspective d’un mariage atroce.
Et puis son départ, acté en quelques mots échangés dans un café.
Ses lèvres, venues chercher les siennes, pour conclure quelque chose qui aura définitivement été une belle histoire.
Mais une histoire dont les plaies ne pourraient être soignées.

C’aurait pu s’arrêter là. Mais le visage de Julian apparaît, blonde et non rousse, dans la foule au travers d’un autre souvenir.
Là aussi, s’évade. Remplacé par d’autres sujets.



Dix-neuf ans. Poudlard.

La vérité à propos d’Elwynn, la belle brune qu’il aurait drogué pour profiter d’elle. L’histoire qui a fait le tour de Poudlard.
Elwynn qui s’écroule sur le lit, les mots pâteux lui parlant de ne pas avoir autant rit depuis des années. Le fait qu’il reste assis sur le bord du matelas en s’amusant - bien inconscient idiot - du bien être affiché. La nuit passée jusqu’au matin, à distance et sans la toucher, jusqu’à s’assurer qu’elle ait repris possession de ses moyens.
Et l’envie, des semaines plus tard. Irréelle. Anormale. L’envie dévorante et flottante, engendrée par quelque chose qu’il mettra des mois à comprendre. Elwynn, semi-vélane.
Une relation forcée ayant eu lieu, c’est vrai. Mais pas celle qui aura été annoncée par tout le château.
Et dont il ne sait toujours que faire.



L’absence de Jero. Les mois qui passent. Les années peut être. Une relation qui se noue doucement. Avec un dénommé Yassen.

Vingt et un an - Poudlard

Ce dernier, accoudé en haut d’une rambarde à Poudlard, les yeux fixes et le regard brillant. Bientôt rejoint par un Alec qui se place à ses côtés, dans une posture similaire.
- T’as la gueule des sales jours…
- Sans doute parce que c’est un sale jour.
- C’était un peu mon sous entendu ouais…
- …
- Tu veux en parler ?
- Nan j’veux pas en parler avec toi.
- …D’accord… On fait un tour au match ?
- En fait si je veux en parler, mais si j’le fais tu vas…
Le silence qui s’invite, Yassen qui arrondit les épaules et abaisse sa tête.
- Yass’, tu..
- Tu sais quoi, vas-y, cogne-moi ! Ça achèvera parfaitement cette journée de merde : J’me suis fait j’ter. C’est par un mec et je suis assez con pour être très clairement amoureux de lui : t’en dis quoi de ça ?! Vas-y casses-toi.
Pour première réponse, un frisson sous sa peau, à lui faire dresser les poils jusqu’à lui en faire mal.
- C’est de lui dont tu me parlais la dernière fois ?
- Ouais.
- …
- …
- C’est très clairement lui le plus con des deux. Il s’est passé quoi ?
- Tu veux vraiment qu’on en parle ?
- Ouais Yass’ ; j’veux vraiment qu’on en parle.

Et la soirée, à retracer ses déboires amoureux, jusqu’à réussir à lui arracher quelques sourires.

Il lui faudra enterrer Yassen l’année suivante. Éliminé par les Supérieurs.



Puis, parce que le deuil fait ressurgir le reste et qu’Aldric est trop bon rafleur quand il s’agit de pensées ;

Des soirées passées dans la salle commune, étalé sur les jambes de Mack ou de Jayden, à se laisser emmerder par leurs piques ou à danser avec Jordane.
L’attaque qui aura manqué d’emporter Mack, l’évidence des sentiments qui ressurgit avec une violence terrifiante au moment où il lui semble la perdre. Les baisers, les rires, la simplicité évidente avec Jayden et leurs moqueries lorsqu’on leur dit qu’ils sont ensembles.
Les moments du quotidien, une fois “chez eux”, à Londres, quand il se trouve comme un con à comprendre le fonctionnement d’un lave vaisselle et qu’elles le taillent sans mesure. Ses baisers laissés contre une nuque, bon joueur.
La panique, lors d’une attaque à Poudlard, quand Jayden est tombée sous la surface du lac noir, gelé en plein mois de décembre. Et qu’il a sauté. Bien sûr qu’il a sauté. Sans la moindre foutue once de réflexion.

Et puisqu’il a sauté ce jour-là…

Ving-trois ans - Londres

- T’es décidé hein ?
Ce n’est pas si souvent, qu’on trouve ce sérieux sur les traits de la belle rousse. Jayden.
- Ils s’en sont pris à Keza… Là elle s’en sort, mais …
- Je sais.
- La prochaine fois ça peut être toi, ça peut être Sova. Ils peuvent s’en prendre à sa gosse, ça peut..
- je sais.
Le dos contre le mur, les yeux clos, les lèvres pincées et le visage tourné vers le plafond.
- Faut que tu partes. Jay, tu m’dis pas où.
Et ces paupières qu’il refuse d’ouvrir, lorsqu’elle le rejoint et pose sur lui ses paumes à plat.
- Tu vas te faire tuer.
A aucun moment, durant toutes ces années, sa voix n’a tremblé. A aucun moment elle n’a eu pour lui la moindre véritable douceur dans les gestes, elle qui prenait bien d’avantage qu’elle ne venait le chercher. Eux dont les relations n’ont jamais été qu’explosions et complicité exaltée. Dans le silence de la maison londonienne, les gestes sont devenus feutrés. Les mots, murmurés sur les lèvres de l’autre.
- Je vais pas me faire tuer. Je suis meilleur que ça.
- Alec… Tu me demandes de partir sans te dire où.
- Je sais..

Feutrés, les corps qui se retrouvent pour la dernière fois.
Feutrées, les mots qu’ils ne diront pas.
Feutrés, les souffles mêlés sur la chaleur d’un oreiller.
Feutrées, ces angoisses partagées, lorsque Mack s’allongera à leurs côtés, doigts emmêlés aux leurs.
Feutrées, leurs étreintes.




Ils défilent. Enzo, Kezabel, Caitlyn, Jordane, Julian. Mais l’esprit d’Alec ne se révolte jamais aussi fort que lorsqu’il est question de Janie, Mack et Jayden. Cette dernière marque son absence depuis plus d’un an et son cœur fait une embardée à cette pensée. Mains crispées sur la chaise, muscles tendus, il ne s’est pas dérobé. Le labyrinthe des cauchemars passé, Aldric avait le champ libre et qu’importent les heures passées à l’entraîner, Alec en a parfaite conscience.
Il aurait pu s’y perdre pourtant, le labyrinthe est construit ainsi. Il tourne en boucle, d’une manière insidieuse, comme le font ses traumas. Pas tout à fait authentique, il a été travaillé de nombreuses heures avec Sanae. Tout comme la décharge d’amour, la multiplication des souvenirs et de l’intime que recèlent ce qui se masse en aval du labyrinthe permet encore de cacher d’autres souvenirs.
Ceux qui les feront tous tuer : Logan.
Et Sanae.

La preuve qu’il ment, depuis le premier pas posé de nouveau sur les pavés posés par la société Sang Pure.

Un battement de cil chasse une larme. Trop d’absents, trop de morts en sursit, dans ces souvenirs.
Et la certitude glaçante que s’il s’est planté sur le compte d’Aldric, c’est une condamnation à mort qu’il a offert à ses ennemis.
En silence, Alec balaye l’humidité sur sa joue. Il ferme une seconde les paupières pour s’arracher du regard trop clair d’Aldric et pose une seconde le front sur le dos de ses mains. S’il renifle une fois en relevant le visage, sa détermination n’a pas disparu. Elle apparaît seulement brouillée par la nausée des premiers souvenirs, et la solitude qu’engendrent les seconds.

- C’est là qu’est la merde… Une fois que t’as capté l’arnaque, la porte est grande ouverte. Ou plutôt pas si loin de l’être ; t’as pas tout chopé… mais ça te prendra pas longtemps.

Passer pour un non occlumen est essentiel et la duperie est bonne. Mais par la suite, Alec le sent bien. Il aura eu beau tenter de contrer l’intrusion par les techniques apprises par Sanae, celles-ci n’ont pas encore corps en son esprit. Les pièges, les détournements… il s’est entraîné bien sûr, mais l’apprentissage seul n’a pas la même efficacité.
Trois ans de travail acharné ça ne fait pas de vous un occlumen à part entière. Ou du moins certainement pas quelqu’un d’efficace face à un legilimen de naissance ou un personne entraînée… ou maline. C’est bien là son avantage principal : ils pensent tous savoir qui est le fils Rivers. Ils ont tors.

- Ton diagnostic ?

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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Dim 13 Oct 2024 - 3:20

Sacred Silence, Losing all violence


🙤 Pays de Galles
🙤 3 mai 2017

 ft. @Alec Kaleb Rivers
La fouille minutieuse reprend. Avec Mésange aux commandes, la première étape ne dure pas. La brume n’oppose aucun obstacle, rien d’autre qu’une succession de souvenirs mornes qui dépeignent Alec comme une ordure solitaire. Un portrait peu reluisant qui dissimule le traumatisme profond dans les ravines. La porte rouge ne tarde pas à se dresser au milieu de cette demeure qui pue le faste - cette porte rouge qu’Aldric hait alors qu’elle ne le concerne même pas. Il n’a rien à voir avec les évènements qui se jouent derrière le battant, si ce n’est une appartenance commune au monde sang-pur. Mais il n’était pas là. Il n’est qu’un témoin des évènements déjà inscrits dans le marbre, des évènements sur lesquels il n’a aucun pouvoir, mais qui le prennent aux tripes malgré tout.

Replonger dans l’esprit d’Alec, Aldric n’en avait aucune envie. Revoir cette porte rouge le lui confirme. Parce que tout ce qu’il voit derrière percute avec qui il est, avec son propre passé qu’il ne cesse de fuir depuis des années.

Mais Mésange est là pour prendre le relai. Pour imposer son rythme comme ses décisions. Cette porte rouge, Mésange la balaie comme un fétu de paille. Traverse les souvenirs déjà vus sans sourciller devant les défenses pitoyables d’Alec. Mésange a affronté des occlumens bien plus coriaces, ceux qui nécessitent un travail de longue haleine pour déconstruire une à une toutes leurs barrières. Une fois la supercherie de la brume démasquée, il ne reste plus rien à Alec pour se défendre des intrusions. Le labyrinthe qu’il dresse ne tient pas la route. Sitôt le souvenir douloureux balayé que l’accès suivant se dessine, et l’expertise de Mésange gagne du terrain sans faiblir.

Aurait-il perçu la supercherie s’il ne connaissait pas Alec ? Le tableau présenté par la brume est efficace. Des rencontres variées à l’âge propice des amitiés ; des débuts d’amitié, d’amourettes, toutes gâchées par un comportement de pourriture et autodestructeur. Rien qui ne dure, rien de probant à utiliser contre Alec. Un portrait brossé qui ne laisse guère imaginer des amitiés profondes et sincères, pour lesquelles Alec ferait tout. Un portrait expliqué par les traumatismes dissimulés dans les ravines, derrière cette lourde porte rouge. Des explications pour justifier cette solitude.

Une stratégie abjecte, mais bien rodée. Le genre de stratégie dont Rossignol serait capable, à tous les coups - et rien que cette idée réveille la nausée d’Aldric. Mais Mésange reste aux commandes, et ignore la faiblesse de l’enfant qui n’a jamais su satisfaire Rossignol.

Le labyrinthe vole en éclats, la brume se dissipe, et Aldric reprend son souffle. Mésange fuse sur les secrets enfin à découverts.

Sans Mésange, sans ce qu’il sait, aurait-il décelé la supercherie ?

La question reste en suspend alors que de nouveaux souvenirs prennent place.

Des liens familiaux, d’abord ; des liens précieux pour Alec, cette sœur qu’il a protégée, laissée partir pour son propre bien malgré le dur secret qui les lie. Aldric peine face à ces souvenirs, tant l’ensemble lui paraît incongru, presque impossible. Le visage de Janie se superpose sur celui de Fauvette, mais ne colle pas. La définition de sœur se brouille. A la place de Janie, Fauvette l’aurait enterré dans ses ennuis jusqu’à ce qu’il ne puisse plus respirer, tant que ce geste lui permettait d’avoir le beau rôle. La complicité entre frère et sœur, Aldric la découvre dans les souvenirs d’Alec - ou l’a imaginée dans sa relation avec Beck sans jamais le formuler de vive voix.

D’autres visages se succèdent, les uns après les autres, pour la plupart déjà vus dans les souvenirs de la brume. A dire vrai, les réminiscences filent sans qu’Aldric ne les observe dans le détail. Il a ce qu’il voulait savoir, dans les grandes lignes - les capacités d’Alec en matière d’occlumencie. Sa stratégie pour faire face aux intrusions. Le reste ne le regarde pas. Mésange est là pour apporter son expertise et sa technique, et non pour dépiauter la vie d’Alec au microscope. Il se contente d’apercevoir les visages, de mettre des noms dessus afin de cerner dans les grandes lignes leurs relations avec Alec, mais il a conscience que toute cette flopée de souvenirs sans protection contient le vrai gamin, et pas celui dont la brume a brossé un portrait peu flatteur.

Rien n’efface pourtant certains souvenirs, qui ont bien eu lieu dans toute leur horreur, et qui ont engendré chez Aldric un dégoût sincère. Ce qu’il voit là, qui arrondit pourtant les angles, ne suffit pas à effacer tous ces mots durs ; sans doute parce qu’il est concerné de trop près, parce qu’il ne prend pas assez de recul.

Les souvenirs défilent, accompagnés de visages familiers. Il ne s’étonne même pas de voir Beck - Jordane - dans le lot, même si à chaque fois, plus encore que pour les autres, il ne s’attarde pas sur elle. Il ne veut pas savoir. Il en a déjà trop appris, et il refuse de violer davantage la confiance de la jeune femme.

Et après un moment qui lui paraît bien trop long, Mésange lâche les commandes et Aldric s’extirpe de l’esprit meurtri. Il a besoin d’un moment pour reprendre le fil de la réalité, de ce qui l’entoure. Être assis par terre est une bonne chose ; il n’a pas à se soucier de ses appuis. Son dos repose contre le mur. Sa cigarette brûle toujours, déjà à moitié consumée. Il tire une taffe, appelle un cendrier avec sa baguette pour lâcher la cendre qui s’accumule.

La nausée est toujours là, dans un coin. Il est aussi vidé de ses forces que doit l’être Alec, à croire qu’il est celui qui a vécu cette intrusion. Il n’a plus les épaules pour ce travail ; sans Mésange, il n’aurait pas tenu le coup.

La voix d’Alec le pousse à se reconcentrer sur le gamin qu’il a pris sous son aile, plutôt que de se soucier de son propre état. Il le dévisage un instant, prend conscience qu’effectivement, il n’a pas tout vu. Même s’il a survolé tous ces souvenirs intimes, il n’a pas aperçu l’ombre d’un entraînement à l’occlumencie. Il n’a pas non plus aperçu ce maudit Logan Rivers, qui est la cible de bon nombre de recherches de la part des Supérieurs. Pas que cette absence lui déplaise, mais elle n’a rien de normal.

D’un geste lent, il hoche la tête aux explications d’Alec qui ne lui apprend rien de neuf. Il tire une nouvelle bouffée sur sa cigarette, prend le temps de remettre de l’ordre dans ses pensées. De ne pas se laisser déconcentrer par tout ce qu’il a vu.

— Qui t’as conseillé cette stratégie ?

La réponse lui paraît évidente, mais Aldric préfère ne pas tirer de conclusions hâtives. Peut-être qu’il se trompe - peut-être pas. Et dans ce second cas, il n’est pas encore certain de ce qu’il fera.

Il soupire doucement, tapote sa cigarette contre le cendrier.

— T’as conscience de tes propres faiblesses. Brève pause, il cherche ses mots. Mais prends en compte que j’ai pas cherché à dépiauter ta vie. Tous ces souvenirs que tu caches me regarde pas, alors j’ai été moins virulent que ne le serait un ennemi.

Et Alec a moins souffert qu’il n’aurait dû. Mais à quoi bon l’épuiser alors que le constat est là, sans même utiliser l’intégralité de sa force ? Il ne tient pas à torturer ce gamin.

— Si t’es là, c’est que personne n’a encore capté la supercherie.  Il se frotte le front un instant. Il n’aime vraiment pas cette tournure de situation. Les souvenirs derrière sont vulnérables, mais d’un autre côté, si tu ériges des barrières visibles, il sera facile de comprendre que tu caches quelque chose, et ceux qui fouilleront ton esprit ne se laisseront pas avoir deux fois.

En d’autres termes, cette stratégie qu’exècre Aldric est à approfondir en toutes circonstances, pour protéger ces souvenirs vulnérables, sans jamais vendre la mèche.
(c) Taranys
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Aldric Tivari
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Aldric Tivari
Lun 21 Oct 2024 - 13:45

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari



Là, c’est le moment où selon toute probabilité ; il lâche l’affaire. S’il n’y avait chez lui cette volonté de protéger ceux qu’il n’aurait jamais dû croiser, sans doute Alec se serait-il déjà écroulé. Plus juste encore, s’il n’avait pas eu l’égoïsme parfait de vouloir protéger celui que leur présence a fini par faire naître en lui, jamais il ne continuerait à mettre un pied devant l’autre. S’il n’avait pas une haine profonde pour celui qu’il est et qu’il était, celui qu’il décrit sans la moindre sympathie dans les méandres de son néant. Avant la porte rouge, avant ce qui compte. Un homme qu’il hait profondément mais celui qui rassure tant ceux qui se pensent supérieurs aux autres. Sa famille, ceux qui leur sont affiliés ou qui trônent au gouvernement. La bande de cons qui, petit à petit, tend à oublier son existence.
Aldric a été une bourrasque sans son esprit. Moins violent que Logan, moins sadique peut être. Aussi efficace que Sanae, mais sans sa discrétion. Sa présence a fait ressurgir la nausée habituelle et la migraine tinte déjà aux tempes du cadet Rivers. Nulle trace pourtant des vaisseaux sanguins pétés au cours des séances avec Logan, ou de l’épuisement due aux longues heures de travail avec Sanae. Quant à la véritable torture administrée lors de sa reddition auprès du monde sang pur, bien évidemment : on en est loin.

Aldric hoche du chef avec lenteur sans chercher à se relever de sa position d’ado vaincu. Pas qu’Alec la juge. Il l’envie. Derrière la colère et l’arrogance, il y a un gars qui ne peut se voir en peinture. Un gars qui, s’il se risquait à admettre toute l’étendue de sa fatigue, risquerait bien de ne plus se lever.

Qui t’as conseillé cette stratégie ?

Il lève un sourcils sans répondre. La réponse est évidente et Aldric le sait parfaitement. Cherche-t-il un autre enseignant dans cette vie qui n’en désigne aucun ? Car à moins de l’avoir manipulé, le legilimen n’a rien vu. Il y a ça s’amusant. On pourrait penser qu’il a dans les cercles concentriques de son esprit un petit côté Dante. C’est d’affection et de confiance dont il est question pourtant, au plus profond de ses pensées. Et Sanae y possède une place qu’il n’a donné à Logan que par absolue nécessité.

- Ce serait naïf de penser qu’il “conseille” quoi que ce soit. Il ouvre des portes - pour ne pas dire qu’il les défonce - et te laisse te démerder avec.

Dans un soupir, Aldric tapote sa clope sur le cendrier qu’il a pensé à emporter avec lui au sol. Cette fois Alec n’en demande pas. D’une certaine manière une rupture a été consommée. Sans doute au vu de celui qu’il est. Chose prévisible. Aucune surprise donc, seulement un pincement au cœur dont il se passerait bien. L’effet miroir a ses limites, sans aucun doute.

— T’as conscience de tes propres faiblesses… Mais prends en compte que j’ai pas cherché à dépiauter ta vie. Tous ces souvenirs que tu caches me regardent pas, alors j’ai été moins virulent que ne le serait un ennemi.

Avec un sourire tordu, Alec laisse reposer son menton sur l’un des avants-bras posés sur le dossier. Il laisse parler, ne coupe pas. Le respect acquis n’a pas disparu.

— Si t’es là, c’est que personne n’a encore capté la supercherie… Les souvenirs derrière sont vulnérables, mais d’un autre côté, si tu ériges des barrières visibles, il sera facile de comprendre que tu caches quelque chose, et ceux qui fouilleront ton esprit ne se laisseront pas avoir deux fois.
- C’est pour ça que t’es là.

Alec en a conscience ; son ton est sec, sur la défensive. L’offensive même peut-être. Il a dans la gorge une nausée qui dépasse celle imposée par les exigences des arts mentaux. Une impression sale sous la peau qui pique chacun de ses nerfs et lui donne envie de prendre la chaise sur laquelle il est assis pour la fracasser contre le mur. Une tension sourde dans ses nerfs, qui l’appelle à éclater des gueules pour écarter le plus loin possible toute notion de vulnérabilité de son âme à vif. Et trop de peurs pour n’en citer qu’une. Celle d’être dépassé, enfermé, contraint et abandonné. Haït, aussi sans doute, à la hauteur dont il se haït lui-même. A son tour c’est un soupir qui le prend et Alec ferme un instant les paupières et roule son crâne vers l’avant pour poser non plus le menton sur son avant bras mais son front. Il inspire, passe une main sur sa nuque et soulève les mèches de nouveau trop longues qui s’y ébattent en bataille. Ses doigts sont gelés. Dans l’appartement étrangement propre et avenant, Alec se sent glacé jusqu’à l’ongle. Et son seul réconfort constitue la pensée qu’Aldric semble passablement affecté par le contenu de ses souvenirs. Une info dont il ne sait en vérité que faire. C’est après avoir laissé passer de longues minutes qu’il reprend d’une voix plus douce, étouffée par sa position, tête contre son bras.

- Ils m’ont “interrogé” pendant près de quatre heures. Il inspire, soupire de nouveau, et ramène un regard voilé vers son ancien boss. Quelque chose comme ça.. j’ai perdu le compte., ajoute-t-il en battant des cils pour repousser les souvenirs de la torture qui refluent malgré toute sa volonté.  Quelques récidives depuis, rien de bien méchant. Du moins selon une échelle de valeur qu’on a salement amoché depuis sa plus tendre enfance. Ils ont cherché à m’épuiser. Moralement et physiquement. A utiliser mes proches contre moi. Warren a été contraint de mener l’interrogatoire et Azalea a fait venir une pauvre fille sous les traits de Kezabel pour leur donner à lui et Tveit un aperçu de ce qu’il se passerait pour leur amie s’ils osaient leur mentir. A me prendre par surprise en mêlant doloris et légilimencie. Et bien sûr, ils ont menti. Alec dégluti, mais aucune salive ne répond à sa demande. Je sais quand t’es virulent ou pas… Le souffle d’un rire sans joie soulève ses épaules. Du moins j’en ai l’impression. Et si ce n’est pas le cas, une part de lui voudrait arrêter les frais dans l’instant. Ses épaules se sont affaissées. C’était le 17 mai l’année dernière. J’la sens pas.. la date anniversaire qui approche. Un instant, son regard s’est perdu au travers du mur contre lequel est assis l’homme qui devrait être mort.
Mauvaise dénomination. Ici, ils sont deux dans cette situation.
Un souffle ironique passe ses narines.
- T’as une idée ?

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Alec Kaleb Rivers
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Ven 15 Nov 2024 - 23:45

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🙤 Pays de Galles
🙤 3 mai 2017

 ft. @Alec Kaleb Rivers
Rossignol a toujours détesté l’odeur de la cigarette. A chaque fois, il fronçait le nez, fusillait du regard l’impertinent qui osait fumer en sa présence - et si ce dernier était l’un de ses hommes, il ne faisait pas de vieux os. C’était la règle implicite, celle que tout le monde respectait à la lettre pour éviter les foudres d’un homme redoutable. Personne ne fume en la présence de Rossignol.

Aldric ignore d’où lui vient cette aversion. Il n’a jamais cherché à comprendre. A ses yeux, fumer est apparu comme une petite rébellion, un geste anodin qui brisait les chaînes forgées dans le sang par Rossignol. Une habitude qui ne dépendait pas de cet homme qui régissait sa vie dans les moindres détails. Son petit secret - quelque chose qui lui appartenait.

A dire vrai, il ne sait pas grand chose de Rossignol. Dans les livres de Dante, les protagonistes apprennent tôt ou tard l’histoire du grand antagoniste et découvrent ses motivations comme ses sombres desseins. Les origines du mal, comme disent certaines histoires. Aldric n’a jamais cherché à les découvrir avec Rossignol. Il n’a pas besoin de les connaître pour savoir que Rossignol est une ordure sans nom, et qu’il fait mieux de tout mettre en œuvre pour rester hors de sa portée. Il n’est pas le héros d’un récit stupide ; son histoire ne comportera pas son triomphe héroïque contre le mal absolu. Toutes ces conceptions manichéennes qui abreuvent les enfants n’existent pas dans la réalité. Rossignol n’est qu’une ordure parmi d’autres, Aldric un gars qui tente de survivre tant bien que mal ; et il est bien connu que les connards ont la vie longue.

Toujours est-il que Rossignol déteste l’odeur de la cigarette, et fumer aide Aldric à s’ancrer dans le réel. A fuir les méandres de son esprit, à échapper à la jungle qui ne connaît aucune amnistie qu’est son âme. Il se doutait bien que depuis sa confrontation avec Logan, il n’a plus les épaules assez solides pour plonger dans un autre esprit, encore moins dans celui d’un môme qui lui ressemble. Tout vrille dans sa tête, apparaît comme trop personnel. Il est trop proche. Se brûle les ailes.

Quelle idée de merde.

Après un soupir, il tire une nouvelle taffe sur sa cigarette. Il se concentre sur l’odeur âcre, sur le tabac qui brûle ses poumons, sur la cendre qu’il dépose dans le cendrier.

— T’as pas tort.

Un ricanement secoue sa vieille carcasse. Aldric note que le gamin sait. Alec sait qu’il a croisé Logan quelques mois auparavant, qu’il a compris leur lien, a minima dans les grandes lignes. Et ils n’ont pas besoin de davantage pour se comprendre sur la question ; un constat qui lui laisse un goût amer en bouche que le tabac n’arrive pas à masquer. Petit à petit, les pièces du puzzle s’assemblent pour reconstituer l’ensemble de l’histoire.

Logan n’est pas apparu dans les souvenirs entraperçus par Aldric. Plus que tout, plus que ses proches, Alec le protège. Il a enfermé tout ce qui le concerne dans les tréfonds de son esprit, tout ce qui peut incriminer leur relation proche aux yeux des Supérieurs.

“Proche”.

Le mot lui arrache un frisson de dégoût.

Alec a bien résumé la situation : cet homme défonce les porte et laisse ses victimes se démerder avec la merde qu’il a causée. Aldric n’a pas besoin d’illustration pour le comprendre ; il l’a vécu. En garde encore un souvenir cuisant.

Et cet homme est à l’origine de cette stratégie qui le débecte au plus haut point. Utiliser un traumatisme pour dissimuler ce qui compte vraiment. C’est abject. A quel moment une personne qui s’estime “proche” et qui souhaite aider l’autre le pousse à revivre les pires moments de sa vie ?

Et pourquoi semble-t-il être le seul à s’insurger contre ce qu’a subi Alec ? Son instinct lui souffle que la brume et le labyrinthe ne sont pas du ressort de Logan, qu’un autre enseignant de l’occlumencie se cache derrière ces barrières - et de toute évidence, cette personne a approuvé la stratégie mise en place. N’a pas cherché à dénicher une stratégie plus viable.

Aldric a l’impression qu’Alec a été en proie à un Rossignol soi-disant bienveillant.

La bonne blague !

La colère gronde dans ses muscles, dans ses yeux qu’il ferme pour se contenir et recouvrer son calme, la main qui tient sa clope contre son front, le coude appuyé sur le genou. Il soupire longuement tandis qu’il exhale un nuage blanchâtre.

— On aura pas le temps de changer de stratégie. Malheureusement. Vu le délai court, faut que tu mettes en place ta brume après la porte. De quoi perdre un intrus, le ramener à ce qu’il a déjà vu. Comme ça, tu crées l’illusion d’avoir fait le tour, tandis que le plus important reste hors de portée.

La nausée persiste à lui remuer les tripes. Aldric déteste ce temps qui leur manque, tout ça parce qu’il a fait traîner les choses. S’ils avaient commencé plus tôt…

— T’as déjà des bases solides. Nouvelle bouffée, puis il se force à regarder le gamin. Je sais que t’as encore caché tes instructeurs d’occlumencie.

Et celui à l’origine de cette stratégie ne mérite pas cette protection. Il ferait mieux de se démerder par ses propres moyens.

— Mais ta stratégie repose surtout sur la supposition que ton interrogateur ne te connaisse pas. Si tu tombes sur quelqu’un qui en sait plus sur ton compte, ou qui a appris par quelqu’un d’autre que t’es plus que ce que tu laisses paraître, ton plan s’effondre.

Les petites stratégies abjectes ne suffiront plus. La supercherie éclatera, et face à la ruse, l’interrogateur emploiera la force brute. Celle qui défonce des portes et les laisse béante, hors de leurs gonds. Celle qui laisse une trace indélébile sur l’esprit.

Rossignol n’a rien à envier à Logan sur ce point.

— Et pour ça, pas trente six mille solutions. Faut t’entraîner à résister aux attaques de force brute.
(c) Taranys
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Aldric Tivari
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Mar 19 Nov 2024 - 14:34

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari

— T’as pas tort.

Il soupire, la clope sur le front. Ferme les yeux ou regarde ailleurs. Et le rire le prend, soulève sa poitrine et pulse comme palpiterait une vieille blessure infectée. Il y a quelque chose de tordu, de tremblant dans ce rire. Par moments, Alec se demande s’il n’est pas le plus abîmé des deux. Il s’interroge sur ce qui le flingue autant, sur ce qui l’a relié à Logan assez frontalement pour que celui-ci se pointe pour lui autoriser ces rencontres. Sur ce qu’il tait de cette famille pour que les Rivers ne la lui rappellent. Sur la peau du garçon, le grésillement électrique agace ses nerfs. Il lui semble avoir le parfum de son oncle dans le fond de la gorge et la nausée acide jusqu’à l’arrière des dents. Pourtant il se pose la question. Son esprit passe d’un sujet à l’autre, comme lorsqu’Aldric est dans sa tête. Sa façon à lui d’ignorer les contractions dont le rythme erratique fait tressauter les muscles de son dos. Une manière aussi de mettre à distance sa proximité avec un homme, enfermé dans un appartement paumé, seuls. Réflexion parfaitement con, mais s’il refait le fil, a-t-il seulement accepté d’être enfermé avec le moindre mec depuis des années ? Warren fait office d’exception. Parce que comme Isaac, il a fini par cracher ses poumons à ses pieds. Logan, également, pour d’autres raisons. Un ping pong dans son esprit entre intérêt et curiosité pour l’homme qui lui fait face, retour en force de ses angoisses et combativité viscérale.
La réflexion est bête mais c’était… plus simple avec Sanae.
Une inspiration sèche tente de balayer la réflexion. Pourtant il se revoit avec elle, à se rappeler à chaque séances un peu plus le calvaire de l’enfance et le retour d’une mémoire qu’il serait plus aisé d’étrangler de nouveau. Ses moments de mutisme, l’alcool pour dénouer les barbelés dans sa gorge et après les plus difficiles des séances, le besoin de retrouver le contrôle. Il se revoit la chercher, provoquer le désir, puis les corps qui retombent entre le canapé et la table basse.
Et ce monstre qui ne cesse de lui écraser la cage thoracique lâchait un peu de lest.

Alec inspire en observant l’homme assis au sol. Entre eux, le dossier de la chaise sur lequel il est assit. Et la sensation poisseuse qui lui lèche l’épiderme… d’avoir un sérieux problème. Un besoin constant de se rassurer.
Devant, Aldric se crispe. Ses prunelles luisent des éclats de la colère. Très bien. Ça a toujours eu quelque chose de rassurant, les hommes en colère.
— On aura pas le temps de changer de stratégie. Sans blague. La réflexion passe mais Alec la garde pour lui. Malheureusement. Vu le délai court, faut que tu mettes en place ta brume après la porte. De quoi perdre un intrus, le ramener à ce qu’il a déjà vu. Comme ça, tu crées l’illusion d’avoir fait le tour, tandis que le plus important reste hors de portée. Il hoche du chef, les avant bras crispés sur le dossier de la chaise. L’odeur du tabac pour principale compagne. — T’as déjà des bases solides. Première fois qu’Aldric ramène son regard vers lui en dehors de ses entrées aux portes de son esprit. Je sais que t’as encore caché tes instructeurs d’occlumencie. En silence, Alec hoche du chef, le menton posé sur son avant-bras. Sous ses côtes, une mitraillette d’angoisse reprend le pas. C’est con : si Logan a validé ce type, c’est qu’il ne craint pas pour Sanae. Ce qui n’est pas le cas de son cousin. Comment sait-il ? Comment a-t-il deviné que Logan n’était pas le seul ? Sait-il comme la légilimencie du bâtard Rivers a quelque chose de profondément animal ? Loin de correspondre à la subtilité que Sanae lui a enseigné.
A peine ses narines se soulèvent-elles sous l’angoisse d’avoir fait erreur et d’avoir enterré celle pour qui il éprouve bien davantage que du respect. Alec garde maîtrise sur lui-même, comme il a appris à le faire au cours de ces dernières années. L’acide de l’angoisse pourtant, ne quitte pas ses veines. Il est trop tard de toute manière. Nulle possibilité de revenir en arrière.
— Mais ta stratégie repose surtout sur la supposition que ton interrogateur ne te connaisse pas. Si tu tombes sur quelqu’un qui en sait plus sur ton compte, ou qui a appris par quelqu’un d’autre que t’es plus que ce que tu laisses paraître, ton plan s’effondre.
Cette fois, le garçon inspire et bloque sa respiration.
- Je sais. Des mots butés, rêches d’une angoisse qu’il ne prend cette fois pas la peine de cacher. Sa survie et celle de ses proches, basée sur le fait qu’on le voit comme un connard violent et imbu de sa personne sans envisager autre chose que ce… qui reste une réalité. Lorsqu’Aldric ramène le regard sur lui, Alec s’interroge de ce qu’il y voit. Le hait-il comme il se hait lui-même ? Compte-il les jours avant lesquels il chutera obligatoirement ?
Ses mains se referment davantage sur le dossier de la chaise.
Solide, se répète-t-il. Et solide il sera.
Pas le choix.
— Et pour ça, pas trente six mille solutions. Faut t’entraîner à résister aux attaques de force brute.
De nouveau, Alec hoche la tête. Il revoit son premier combat, lorsqu’il s’est pointé au club avec le besoin de détruire ou de se faire détruire. Quand Aldric a répondu à ses coups et que plutôt que de répondre par un coup le pompe à la toxicité de son mal-être… lui a proposé un job.
A sa manière celui qu’il appelait “boss” a installé chez lui un climat de confiance.
- J’me doute. C’est ce qu’il a fait pendant deux ans. Une précision qui n’est sans doute pas nécessaire. C’est lui-même qu’Alec rassure. Tout l’enjeu c’est de me laisser… Le mot lui échappe, hérisse ses bras. …Le but c’est de savoir m’adapter. Laisser faire dès l’entrée, comme si j’avais pas trois ans d’apprentissage derrière moi, jusqu’à la porte. En remettre une couche avec la brume après… ouais. Et s’ils dépassent tout ce qui est mis en place parce qu’ils savent où chercher, c’est seulement là que doivent se mettre en place le reste. J’ai bossé sur des pièges, des manières de perdre l’intrus, mais ça fait des mois et je sens que je perds le truc. ça prend des années de travail minutieux et même si Alec travaille chaque jour les exercices donnés par Sanae, ça ne l’empêche pas de se sentir moins solide. De perdre la main. Au début j’avais le réflexe de “repousser”.. Ce que tous les jeunes occlumens font. Réaction normale, instinctive… et dure à endiguer. … j’arrive à m’en empêcher, à laisser l’autre venir.. Et accepter autant la douleur d’une telle intrusion que la violence émotionnelle qu’elle provoque. Il ne précisera pas pourquoi laisser quelqu’un forcer ainsi son être est aussi atroce qu’injuste ; tout le monde l’a compris. … mais une fois arrivé si bas.. J’en suis incapable. C’est comme si ça demandait trop d’énergie. S’ils arrivent derrière la porte, s’ils trouvent ma dernière planque et défont les pièges mis en place… j’ai plus rien. J’suis incapable de repousser quoi que ce soit.  J’ai pas la force.
Cette fois, Alec regarde ailleurs.
Faut t’entraîner à résister aux attaques de force brute.
J’me doute.

Ou comment accepter  de laisser quelqu’un le violenter. Par une putain de nécessité vitale.
Le jeune homme agite le visage et son menton pivote sur son avant bras. Il inspire, chasse la nausée.
- Il te l’a fait hein ? Logan. Un sourire tordu lui passe sur les lèvres et les yeux Rivers reviennent dans les siens. Vas-y.
Parce qu’ils ne sont pas là pour enfiler des perles.

Et parce que ces deux petits mots, si secs, si frêles, si courts ; ont une importance que tout le monde ne saisit pas.

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Alec Kaleb Rivers
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Mar 19 Nov 2024 - 16:43

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 ft. @Alec Kaleb Rivers
Les explications du gamin n’apaisent en rien les nerfs déjà à vif d’Aldric. La situation se pare d’une autre bien trop personnelle. Les ressemblances se tissent à nouveau, deviennent plus que de simples similitudes. Elles dérivent, pourtant ; l’expérience d’Alec prend un autre tournant, mais le fond demeure le même. Marche ou crève. Apprends l’occlumencie, ou souffre de ton échec - perds tout ce qui t’est cher. Les circonstances ne sont peut-être pas les mêmes. Aldric a appris sous la houlette de Rossignol, parce que Rossignol n’en attendait pas moins de lui. Un savoir nécessaire pour leurs activités, selon lui. Un impératif. Alec a appris par la force des évènements, pour protéger ses proches. Les circonstances diffèrent, mais la résultant demeure identique.

Ils n’ont pas eu le choix.

Dans son malheur - et Aldric a envie de cracher sa verve face à la seule idée d’entrapercevoir son vécu sous un jour positif -, il a disposé de l’enseignement de Rossignol. Il ne compte plus le nombre de fois où il a craché ses tripes sur le sol, où il a perdu toute notion d’intimité face aux intrusions répétées de Rossignol, mais il n’a pas appris seul. Rossignol lui a enseigné les bases. Fait des démonstrations. Transmis des techniques et des ruses. Rossignol a persévéré jusqu’à ce qu’il obtienne satisfaction - et même satisfait, il n’a jamais relâché le niveau d’exigence qu’il lui imposait.

Plus jeune, il se répétait qu’il n’avait qu’à être meilleur pour préserver ses secrets. Que c’était sa faute si Rossignol entrait encore et toujours dans son esprit avec une telle facilité.

Aujourd’hui, ces pensées lui donnent envie de vomir.

Mais Alec ? Logan l’a lâché après l’avoir torturé pendant deux ans. Son autre instructeur a pris le relai, mais l’a aussi lâché. L’image du chaton mouillé se superpose. Le gamin tente de se débrouiller avec des morceaux d’enseignement, le temps qui file à vive allure, l’épée de Damoclès au-dessus de sa tête en cas d’échec, et la douleur de l’apprentissage. Il est seul. Désemparé. Livré au doute comme à la peur de l’échec.

Peut-être qu’Aldric serait dans la même posture, s’il n’avait pas rencontré Madame. Si elle ne lui avait pas tendu la main dans un moment de besoin.

— C’est humain.

C’est humain de lâcher prise face à l’horreur de son propre passé. Face à la persévérance de ses ennemis qui s’engouffrent toujours un peu plus dans les profondeurs des souvenirs.

— C’est humain que tu lâches prise à un moment donné. C’est ta limite. Et c’est déjà honorable que tu tiennes aussi longtemps alors que tu forces ton ennemi à traverser les pires horreurs de ta vie.

La bataille de l’esprit est sans doute la plus ardue qu’Aldric ait mené - et il l’a perdue un nombre incalculable de fois. Il n’a pas souvenir d’avoir déjà réussi à tenir tête à Rossignol sur ce terrain. Et face à Logan, il a essuyé une cuisante défaite. Un affrontement qui n’en avait même pas le nom. Logan a pris ce qu’il voulait, rien de plus. Aldric n’a même pas eu le temps de se défendre. Un échec sur toute la ligne.

Un soupir douloureux le traverse, étouffé par une nouvelle taffe sur sa cigarette. Le cône se consume trop vite à son goût. Il ne dirait pas non à un verre de rhum arrangé pour chasser les démons - la pire idée du moment. Il vacille déjà trop tout en restant sobre. Quelle aide peut-il prétendre apporter à Alec, s’il s’effondre d’entrée de jeu ? A dire vrai, plus le temps défile, plus il en apprend sur le gamin, et plus Aldric se pose la question. Que peut-il faire ? Il y a bien une réponse qui se dessine dans les ombres, mais elle le répugne.

Il n’est pas Mésange.

Le regard d’Aldric retombe sur le gamin à la mention de Logan. Son cœur rate un battement malgré lui. Il ne pipe mot. A-t-il vraiment besoin de confirmer la supposition d’Alec ? Son silence parle déjà bien assez. Et le sourire tordu d’Alec laisse entrapercevoir une certaine compréhension. La compréhension de deux hommes qui ont subi l’assaut du même bourreau.

Une compréhension qui s’écrase sur une porte ouverte sur l’horreur à cause de deux petits mots.

"Vas-y."

Une autorisation. Une incitation.

Un choix qui n’en est pas un, plutôt.

La nécessite qui s’impose par abnégation. Protéger les autres. Protéger les proches.

S’oublier soi-même dans l’équation.

L’acceptation n’en a que le nom.

Il écrase sa cigarette dans le cendrier.

— Non.

Il n’est pas Mésange.

Il a tué Mésange de ses propres mains.

Aldric braque son regard dans les yeux bleu givre d’Alec. N’active pas sa legilimancie. Une part de lui a l’impression de fuir ses responsabilités. Il a promis à Alec de l’aider, et il refuse à présent de l’entraîner avec son occlumencie. Cette même part de lui a l’impression de fuir par confort personnel, parce que l’esprit du gamin renferme des souvenirs douloureux qu’il n’arrive pas à gérer. Et peut-être que cette part de lui n’a pas tort, dans le fond. Peut-être bien qu’il apprécie cette ‟facilité”.

Mais surtout, il n’a pas promis à Alec d’endosser le rôle de Logan. Son image, derrière cette promesse, c’était celle de Dante.

— J’ai promis de t’aider. Pas de te torturer.

Un autre soupir lui échappe. Cette fois, il lève sa carcasse du sol. Il contourne Alec, rejoint la cuisine pour se servir un verre d’eau. Le rhum arrangé lui titille toujours l’esprit, mais il chasse toute pensée qui le renvoie à la Réunion. Au calme paisible des plages de sable fin. Il chasse avec la même précision tous les souvenirs qu’il a visionnés dans la tête du gamin. Tous ces souvenirs qui parasitent ses pensées et ce qu’il croit savoir de lui. Tous ces souvenirs qui changent l’affect qu’il lui porte parce qu’ils sont trop personnels.

Ce n’est pas le moment.

— La résistance aux attaques de force brute, c’est pour ta stratégie actuelle. Son verre d’eau vide, il le repose sur la table, se tourne vers Alec. L’ultime recours. Aldric n’a aucune envie que cette stratégie devienne la norme. Alec n’a pas à subir ça au quotidien. Et cet entraînement ne fera que décaler le problème. Tu amélioreras tes limites, mais si ton interrogateur sait ce qu’il doit trouver, et qu’il a la puissance de Logan… Que t’aies trois ans d’expérience ou trente, le résultat sera le même.

Rossignol tomberait-il dans le piège ? S’il fouille l’esprit d’Alec, c’est qu’il a conscience du lien qui le relie à Aldric. Il cherchera à en savoir plus. Il gardera cette boussole en tête jusqu’à dénicher ce qui l’intéresse.

Et l’horreur du passé d’Alec ne le fera pas sourciller.

Une chance que Rossignol ne travaille pas de concert avec les Supérieurs.

— Je peux t’apprendre à améliorer ta brume. A mieux la diriger pour duper les intrus. A nouveau, il capte le regard du gamin en quête d’une réaction. Mais ne me demande pas de te torturer.

Aldric compte se montrer inflexible sur cette question. De toute façon, il n’a plus les épaules pour employer son pouvoir de la sorte. Il s’effondrera avant Alec, à coup sûr.

— Mais tu peux aussi agir avant. Cette stratégie comporte des risques, mais s’avère bien moins cruelle que celle concoctée par Logan. Si tu retires de ton esprit les souvenirs à protéger, un legilimens ne les verra pas. Ça demande une personne de confiance pour ensuite te les rendre, parce qu’il ne faut pas que tu aies le souvenir de les avoir enlevés, mais ça se prépare.
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Aldric Tivari
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Mer 20 Nov 2024 - 10:59

Mercredi 3 mai -   @Aldric Tivari

— C’est humain.

La réflexion le prend de court. Elle tombe comme un caillou dans la soupe et éclabousse au passage une chiée d’idées pré-conçues. Deux mots qui refont le lien. Deux mots qu’il pourrait avoir prononcé de lui-même. Qu’il a même souvent prononcé auprès de tant de monde. Un instant, la vision de Kezabel s’impose. Il se revoit métamorphoser pour elle une toupie et la confier au creux de sa main. Lui rappeler qu’elle a le droit de lâcher du lest, de craquer, de prendre le temps de se reconstruire. Un instant, Alec pourrait sentir les doigts glacés qu’il logeait dans les siens puis les tremblements de son amie lorsqu’il l’enlaçait.
Et sous ses côtes, le roulement de son cœur, lourd de son absence actuelle.

— C’est humain que tu lâches prise à un moment donné. C’est ta limite. Et c’est déjà honorable que tu tiennes aussi longtemps alors que tu forces ton ennemi à traverser les pires horreurs de ta vie.

Le coin gauche de ses lèvres se soulève d’un spasme amusé. Des mots qu’il aurait pu prononcer, effectivement, s’il s’était agit de soutenir quelqu’un d’autre. Quand bien même Alec aurait pu l’anticiper, sa gorge ne se serait pas moins serrée qu’à l’instant, pris de court par la bienveillance inattendue.
Honorable, le mot met un temps à infuser derrière la crispation de ses traits. Comme s’il s’attendait davantage à un coup qu’à un compliment.

- Mais en face leurs limites n’ont rien d’humaines… Craquer, lâcher… ça n’a plus rien d’acceptable, tout humain que ce soit. Alec le sait, il a ses limites. Sous les crocs d’une vampire, il s’est senti soulagé d’arrêter la lutte, de voir sa vie s’acheter par une bête mauvaise rencontre totalement aléatoire. D’être emporté hors de leur portée. De leur arracher sa mort. A défaut d’avoir pu préserver sa vie.
Ça aussi, Aldric le verra comme il prendra possession de tout ce qu’il est. Ses défauts, ses faiblesses, ses craintes et ses injustices. Lui qui se refusait à la moindre vulnérabilité durant l’adolescence se laisse voir sous toutes ses facettes, y compris les pires. La légilimencie a ça d’horrible qu’elle ne laisse pas de zone d’ombre. Pas même ces pensées parfois ignobles qui passent sans but, immédiatement contre-carrées par la conscience. Alec le sait, l’a accepté.
Derrière ce qu’Aldric cite comme honorable, il y a surtout bien des mains tendues.
Ces femmes qui ont craquelé le marbre Rivers. Des inconnues à celles qui ont pavé sa vie.
Ces hommes, acceptés à retard, peut-être plus précieux encore tant ils n’avaient pas leur place et l’ont trouvé malgré tout.
Ce sont eux, tour après tour, à coup de briques posées dans sa vie, qui ont fait ce qu’il est. Ces souvenirs-là, qui permettent à ces briques de revêtir toute leur importance. Celles sur lesquelles il trouve l’équilibre pour faire fit de la merde sur laquelle elles sont posées.

Qu’importe l’horreur alors. Il y a des choses trop essentielles pour les céder.

Alec vide ses poumons alors, déjà prêt au nouvel assaut. Sanae ne l’a jamais laissé au sol à cracher sa bile comme Logan le lui a imposé. Il a tremblé plusieurs fois, saigné, vu noir même et se serait parfois cogné le crâne pour en faire passer la migraine, certes, mais seul le rythme imposé par l’urgence les a poussé à en arriver là. Des racines à mâcher, quelques potions, du temps et du soutien, voilà ce qu’il savait exister au bout du tunnel à ses côtés. Jamais Logan ne l’aurait envisagé.
Mais aucun des deux n’aurait non plus eu une telle réponse à son acide demande.

— Non.

En oubliant d’inspirer, Alec le fixe, interloqué. Son regard le percute sans chercher à entrer.
Non ?
Le garçon ouvre les lèvres. Les referme. Cligne et recule le visage. Sans comprendre.

— J’ai promis de t’aider. Pas de te torturer.

S’il n’y avait le soupir d’Aldric pour lui rappeler d’inspirer, sans doute Alec n’y aurait-il même pas songé. Le souffle qui lui permet de prélever de nouveau un peu d’air n’a pourtant rien de lisse. Comme ses mains qui se pressent sur le bois du dossier ou sur la peau de son avant bras, sa respiration tremble un peu. Il inspire par à-coups. Tente de conjurer le vertige que lui provoque cette réflexion.
C’est idiot.
C’est ce que dirait n’importe qui. C’est ce que font les gens, dans le monde normal, dans celui qui n’est pas régit par les affres de la guerre et les règles dictées par les puissants.
Mais Aldric n’est pas n’importe qui. Lui aussi s’est construit sous leur joug.
Alors la chiée de préjugés en prend un nouveau coup et Alec bute de nouveau sans savoir que répondre. Il l’observe, comme un gamin regarderait un adulte. D’en bas, et sans comprendre.
Étourdi, même, par cette réponse.

Avec un temps de retard, Alec se retourne pour aviser son ancien boss, verre d’eau à la main.
— La résistance aux attaques de force brute, c’est pour ta stratégie actuelle. Oui. S’il y en a un de moins con que les autres. Moins égotique. L’ultime recours.   Qu’il lui faudra mettre en place si jamais l’intrus arrive jusque là. Auquel cas… auquel cas, il ne lui restera plus qu’à protéger ceux qu’il aime. Lui sera déjà foutu. Ils auront compris qu’il a menti, qu’il a caché être devenu occlumen. Et donc, en sous-texte, la probable présence de Logan dans tout ça. Ils ne chercheront pas plus loin.
Quoi que Johan, le plus vindicatif, semble avoir disparu. Peut-être…
Alec sent son cerveau tourner à plein régime, s’accrocher aux suppositions et aux faits pour fuir le bourdonnement sourd qui a rougit il le sait, le blanc de ses yeux.
Quand on est élevé aux coups, c’est la douceur qui percute le plus fort.
Et cet entraînement ne fera que décaler le problème. Tu amélioreras tes limites, mais si ton interrogateur sait ce qu’il doit trouver, et qu’il a la puissance de Logan… Que t’aies trois ans d’expérience ou trente, le résultat sera le même.
Une chance, donc, que Logan soit qualifié d’exception.
Alec tique, s’interroge de la soit disant puissance de celui qui l’a “interrogé”. Il inspire, calme la respiration qu’il sent toujours trop hachée, et croise les bras sur son torse, une jambe sous la table, la seconde à l’équerre.

Je peux t’apprendre à améliorer ta brume. A mieux la diriger pour duper les intrus. Il hoche, gorge sèche. Mais ne me demande pas de te torturer. Nouveau soubresaut dans ses muscles. Nouveaux tremblements.
Merde, ce ne devrait pas être si dur d’entendre ce que tous prennent pour un pré-requis.
— Mais tu peux aussi agir avant.  De nouveau, Alec ouvre les lèvres pour les refermer. Il sait ce qu’il vient. Et ses mains se pressent sur sa chair aussi fort que son souffle se tarit de nouveau. Si tu retires de ton esprit les souvenirs à protéger, un legilimens ne les verra pas. Ça demande une personne de confiance pour ensuite te les rendre, parce qu’il ne faut pas que tu aies le souvenir de les avoir enlevés, mais ça se prépare.
De l’alcool. Une bouteille. Deux. Mille.
Alec se lève et cogne la table. Il jure. Sa respiration bute.
Dépasse Aldric pour lui faire dos, choper un verre à son tour et chasser autant que possible le trouble qui le prend.
Rien que ça... Rien que ça prouve une forme de confiance qu’il n’attendait pas accorder à Aldric.

- ça fait une belle histoire hein ? Le regard braqué sur le jet du robinet, Alec entend sa voix comme au travers d’un tube de plexiglass. Distordue. Le mec qui cherche à protéger ses proches, quitte à vivre l’enfer… la vitrine est plaisante. Un joli conte de sacrifices et d’abnégations… Il évoque la solution la plus simple. Celle de lui enlever ses souvenirs. Celle que Kezabel a été la première à envisager. Que Warren a proposé de nombreuses fois avant de devoir lui faire face dans cette salle des tortures. Après aussi. Celle qu’il a choisi, lui. Oublier. Balayer ce qu’il a fait, emporter dans les ombres une part de lui. L’eau dans le verre déborde. Tu comprends pas… Il dégluti, la langue comme du papier de verre. … Si on me retire ça.. Dans sa main, la vaisselle lui échappe et s’éclate dans l’évier. Je ne serais plus que le connard d’avant la porte.
Il n’est pas question d’abnégation. Il n’a jamais été question d’abnégation.
Il est question de lâcheté. D’égoïsme.
Sans eux, j’suis une sous merde. Reprend-il après un silence. Avisant le verre brisé, Alec coupe l’eau et pose ses paumes à plat sur le rebord du plan de travail. J’choisirais toutes les tortures du monde pour pas être ce gars-là à nouveau.. Il serait capable de…  De quoi ? De prendre ce qu’on lui refuse ? De foutre en l’air chacune des relations qu’il a construite. De dénoncer ceux qu’il aime, de blesser pour ne pas avoir à aimer, de baiser quitte à violer, de fracasser la première gueule qui ne lui revient pas, sans doute trop androgyne pour ses frêles épaules d’imbécile fragile. D’écouter les discours, de se foutre de ce qui compte, d’abandonner les voies empruntées. Il pâlit. Même quelques jours, même quelques heures… m’oblige pas à être ce type…

Pitié.

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Alec Kaleb Rivers
Break Me If You Can
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