Les mines [Dorofei]

De la sciure mélangée à de la poussière marque mes mains jusque sous mes ongles. J’ai l’impression d’en respirer un peu plus à chaque minute passée dans ces mines, mais étrangement,  je ne suffoque pas comme je l’aurais fait ailleurs. Dans cette partie de la galerie, une petite brise fraîche s’engouffre par l’embouchure qui donne sur la sortie est, et je respire un peu mieux que dans l’obscurité épaisse qu’offrent les couloirs étroits des premières galeries.
En quelques mois, sortant la tête du carnet pour nous aérer l’esprit, Logan et moi avons cartographié une bonne partie des mines, dans les limites de nos découvertes et de nos capacités. Nous avons ainsi découvert quatre entrées et sorties potentielles : la principale étant celle que nous empruntons, et les trois autres restant à ce jour inutilisables, à cause d’éboulements ou de grilles condamnées qu’ils seraient peu judicieux de forcer, vu l’état des lieux. Un fait que je rappelle souvent à Logan malgré son impatience à assurer l’existence d’autres possibilités de repli si jamais les mines étaient découvertes par l’ennemi. Chaque chose en son temps. Et pour le coup, je ne pensais pas être un jour celle qui tempérerait les impatiences de Logan.
Au moins, la longue galerie principale a été sécurisée, des sortilèges renforçant la construction, et dégagée des amas de pierres et outils laissés à l’abandon. Quand nous aurons enlevé ce qui reste des anciens rails ayant servi au déplacement des wagons chargés de charbon, la galerie sera un long couloir principal en distribuant d’autres. La majorité de notre travail s’est concentrée sur la consolidation des espaces accessibles, mais la curiosité étant trop grande à chaque visite dans ces profondeurs, Logan ne peut s’empêcher d’explorer un peu plus loin, au risque de se mettre en danger. Nous avons déjà réchappé à trois éboulements, transplanant in extremis au moment où le ciel menaçait de nous tomber sur la tête, et je n’ai aucune envie de me retrouver ensevelie une bonne fois pour toutes. Au lieu d’avancer sur les zones déjà découvertes, je dois donc continuellement sécuriser et consolider celles que Logan explore à chaque visite. Sauf que plus nous avançons, plus les galeries sont difficiles à atteindre et instables à parcourir, ce qui ne semble pas gêner Logan, tout concentré qu’il est sur son objectif. Monsieur a la folie des grandeurs et est certain que des espaces plus larges existent plus loin dans les mines, selon je ne sais quelle ancienne carte qu’il a trouvé. Même s’il y a de grandes chances pour que ces espaces n’existent plus à cause de la proximité avec le rivage et les falaises toujours en mouvance, il n’a pas l’air de vouloir abandonner cette idée. Putain de Rivers entêté.

Mais aujourd’hui, à la veille d’un anniversaire auquel je ne veux pas penser, et mettant de côté tout ce qui à trait au carnet, j’ai décidé de ne pas faire ça seule. Depuis peu, Logan a enrôlé Dorofei dans cette folle entreprise et depuis les récents événements à la Garde, nous privant de Quartier Général, les mines sont devenues un lieu appréciable pour retrouver au moins un autre membre du groupe. Je réussis à voir Max à l’hôpital clandestin et en dehors, lorsque nos agendas coïncident, mais je suis prudente sur toute autre rencontre avec les membres de la Garde. Je ne joue pas seulement ma sécurité mais aussi celle de Logan, Kezabel, et tant d’autres. Le choc entraîné par la mort des nôtres et la chute du Quartier Général se réverbère encore en chacun de nous, soulevant un nombre de questions incalculable et créant un nouveau sentiment de paranoïa. Je ne fais confiance à personne, sauf à ceux dont l’esprit ne m’est pas étranger. Et même si je ne suis jamais rentrée dans celui de Dorofei, si Logan lui fait confiance, alors il n’y a aucun risque.

Je tousse un bon coup en reposant un rondin de bois qui se tenait autrefois verticalement pour soutenir le plafond. De petits orbes lumineux flottent au-dessus de nos têtes, diffusant une faible luminosité. Ma main passe sur mon visage perlé d’une légère sueur, y étalant sûrement de la poussière, mais de toute façon, dans cette semi-obscurité, pas sûr que ça se remarque vraiment. Les cheveux attachés en une queue de cheval haute, quelques mèches brunes s’en échappent pour se coller à mes tempes. Heureusement qu’il y a une petite brise, bien que ce n’est pas assez vu les efforts que nous faisons.
« J’ai l’impression d’être exploitée. » grognè-je en soulevant le rondin de bois avec un sortilège, baguette en main. « Et les premières galeries pourraient être terminées et exploitables s’il se prenait pas pour Dora l’exploratrice. On aurait pas à les mettre en pause pour venir consolider de nouvelles zones… »
Je râle, je maugrée, je grogne mais rien n’y fait, ça ne me débarrasse pas de mon irritation. Il y a pourtant une forme de soulagement et de liberté à se plaindre de Logan à voix haute ; une belle découverte que je tente d’exploiter à chaque fois que Dorofei est présent. À qui d’autre que lui pourrais-je râler sur mon colocataire ? Pourtant, je reste prudente : je ne sais pas ce que Logan a dit de nous à Dorofei, même si ce dernier est celui qui l’a prévenu lors de mon coma, alors je ne parle jamais du fait qu’on habite ensemble, ni de notre lien, seulement de l’aide que je lui fournis pour les mines. Je reste néanmoins curieuse : est-ce qu’il lui a parlé de moi ? Et si oui, qu’a-t-il dit ? Je n’ai pas osé poser la question à Logan. Peut-être que la réponse m’inquiète…
Dorofei m’aide à placer le rondin et à le relier au sortilège de consolidation qui maintient toute la construction de cette galerie. Comme les sorts peuvent fuser de partout quand les cours commenceront, nous ensorcelons à chaque fois les parois des mines pour les rendre imperméables aux sortilèges.
« Alors, tu vas te lancer dans l’entraînement des troupes toi aussi ? » demandè-je à Dorofei.
Après tout, il a été auror et je le sais très compétent au combat, pour avoir fait des missions avec lui et m’être entraînée en sa compagnie.

Est-ce que ce qu’ils faisaient allait vraiment être utile par la suite ? Est-ce que ce vaste et valeureux projet verrait vraiment le jour ? Quelque part, il avait envie de dire oui, d’y croire totalement mais le massacre de la Garde, les quelques rares membres qui restaient ne l’encourageait pas forcément à voir cela dans ce sens-là, pour l’instant du moins. La Garde était encore trop… éparpillée, ne ressemblait plus à grand-chose pour qu’il arrive à s’imaginer vraiment à quoi cela pourrait ressembler par la suite, même si la poignée de membres restants – de survivants- allaient bien avoir besoin de ces entrainements fournis par Maître Logan. Malgré tout, il avait répondu présent pour aider à l’exploration des mines.

Par amitié pour l’ex directeur de Poudlard, par ce que cela lui changeait les idées, par ce qu’il croyait dur comme fer que si la Garde arrivait à être un peu plus focus, ces entrainements pourraient être salvateurs. Il avait l’impression de servir à quelque chose, ce n’était pas vraiment du terrain … mais c’était toujours mieux que rien. Ca restait plaisant, il se sentait presque dans l’âme d’un aventurier… grognon et ronchon, accompagné d’une binôme tout aussi buzzkill sur lui. De bons moments en perspective tout ça ! Alors le voilà qui crapahutait avec Sanae dans les mines et leur poussière. Tout comme sa camarade, il toussa fortement essayant d’expulser de ses poumons toutes ces foutues particules qui semblaient vouloir s’agglutiner sur ses muqueuses respiratoires et c’était très loin d’être agréable. Brève pensée pour tous ceux qui bossaient tant d’heures dans ces lieux insalubres, irrespirables, sans magie qui plus est. Un léger frisson imperceptible le saisit. « J’ai l’impression d’être exploitée. » léger rire goguenard de sa part, mais il opina doucement. C’est vrai que ça donnait presque cette impression… sauf qu’ils étaient autan volontaire l’un que l’autre. « Et les premières galeries pourraient être terminées et exploitables s’il se prenait pas pour Dora l’exploratrice. On aurait pas à les mettre en pause pour venir consolider de nouvelles zones… » Lourd soupir lorsque le nom de Dora atteignit ses oreilles. « Par pitié. Ne parle pas, ce dessin animé de malheur, par ce que je crois que je serai capable d’être violent.» Nouveau soupir. « A la limite si tu veux chanter « heyoh on rentre du boulot », on sera autant dans le thème mais je risque moins d’avoir envie d’arracher des cordes vocales.» Promis ce n’était pas une vraie menace, bien sûr qu’il ne lui ferait rien, à part râler encore et encore si elle le gonflait.  D’un ton plus pragmatique et sérieux, il était venu ajouter « S’il agit comme ça, c’est qu’il a forcément une idée derrière la tête. Laquelle, ça dépasse probablement mon entendement mais on sait tous les deux qu’il ne fait rein au hasard.» Silence, regard vers Sanae « Ou alors, il prend son pied de nous voir galérer de la sorte.» ca pourrait presque ressembler à Logan ça.

« On est des explorateurs-bâtisseurs. Toutes ces cordes à nos arcs.» commenta-t-il tandis qu’ils plaçaient ces foutus rondis pour consolider la galerie. Peut-être aurait-il pu faire une blague avec le blaireau – aka le signe de sa maison et le fait que c’était un animal normalement doué pour les galeries sous-terraines… peut-être qu’il la ferait à un moment, mais pour l’instant, il ne la sentait pas.  Il observa un peu plus les parois, les touchant doucement sans oser pour l’instant taper dedans pour vérifier qu’elles tiendraient le choc. Ils n’avaient pas encore assez renforcé cette partie de la galerie. Une fois cela fait, il tiendrait à faire des tests, avant qu’il y ai de vrais entrainements, afin de ne pas courir trop de risques… en espérant que rien ne s’écroulerait avec eux dessous. Il savait à chaque fois qu’il venait ici que c’était un risque encouru… ça serait quand même presque comique, de crever par ce qu’on creuse une galerie… et non pas à cause d’une guerre, d’un combat, d’une torture. La nouvelle question de Sanae lui fait hausser les épaules. « Je suis mauvais professeur, mais je pourrai lui servir de cobaye… je pense qu’ils seront déjà assez traumatisés par lui sans que j’en rajoute une couche.» Par ce que oui, Logan n’irait pas le dos de la cuillère, ça ne serait pas fait pour tout le monde. « Et toi, à part jouer à la taupe qui creuse et construit, vous avez prévu quelque chose d’autre pour toi ?» Non, toujours pas le blaireau de cité.

« Par pitié. Ne me parle pas de ce dessin animé de malheur, parce que je crois que je serai capable d’être violent. À la limite, si tu veux chanter « heyoh on rentre du boulot », on sera autant dans le thème mais je risque moins d’avoir envie d’arracher des cordes vocales. »
Je le regarde de travers, les sourcils froncés et la bouche grimaçante, comme quand on goûte un truc trop amer et qu’on ne peut pas le recracher.
« La seule raison pour laquelle je chanterai ça, ou quoi que ce soit d’autre, ce serait parce que cette poutre me serait tombée sur la tête. » lui assurè-je.
Sauf que la question n’est pas tant de savoir ce qu’il convient de chanter ou non dans ce genre de lieux et circonstances, mais de se plaindre des explorations poussées de Logan.
« S’il agit comme ça, c’est qu’il a forcément une idée derrière la tête. Laquelle, ça dépasse probablement mon entendement mais on sait tous les deux qu’il ne fait rien au hasard. Ou alors, il prend son pied de nous voir galérer de la sorte. »
Je réprime un sourire. Rien au hasard ? Je peux m’accorder avec lui pour dire que Logan aime tout savoir à l’avance, placer ses pions sans rien dire à personne et tirer les ficelles imaginaires de la vie des autres, mais ce serait lui donner un pouvoir surhumain que de dire qu’il ne laisse rien au hasard. Pour ma part, je crois...non, je sais...que Logan agit parfois sans savoir où ça va le mener et que dans bien des domaines, ses actes se résument plus par la maladresse ou l’imprudence que par la maîtrise du cours des événements. Mais je ne dis rien de tout ça, parce qu’au fond, cette façon dont Dorofei pense à son ami comme un être aux desseins bien ficelés participe à la légende que Logan établit sans peut-être en avoir seulement conscience. Cette légende tient les autres à distance, le rend brumeux, indéchiffrable, inaccessible, et alors ses gestes, comme ses paroles, n’ont tout leur sens que pour lui. On ne sait jamais si une légende est vraie ou fausse. Et sans doute que ça l’arrange, d’être un peu entre les deux. Je ne blâme pas Dorofei ou quiconque de le voir ainsi : moi-même, dans les premiers mois à m’occuper de lui, j’ai été aveuglée par la réputation, l’aura énigmatique et le silence qui l’entouraient. L’homme, dans son caractère fragile, imparfait et humain, m’est apparu bien plus tard.
Je hausse les épaules.
« C’est sûr qu’il prend son pied. Mais je pense plutôt qu’il veut se créer son petit Poudlard à lui. »
Une théorie à laquelle je pense de plus en plus, au vu de tous les efforts que met Logan dans ce projet. Je crois que Poudlard lui manque, dans une certaine mesure. Ce lieu, si ambivalent dans sa propre histoire, représente trop pour ne pas lui faire éprouver quelque chose. Je ne sais pas s’il y retournerait un jour, peu importe les circonstances ; ni si ce serait une bonne idée étant donné les traumatismes encore trop présents. Mais il y a dans la construction de ce lieu, autant un retour en arrière qu’un renouveau, une façon de corriger une erreur, d’apaiser une blessure, et d’avancer tout à la fois. S’il ne peut revenir au château et reprendre son ancienne place, c’est ici qu’il s’établit à nouveau. Alors il explore, et nous passons derrière, comme de petites fourmis.
« On est des explorateurs-bâtisseurs. Toutes ces cordes à nos arcs. »
Je secoue la tête en ricanant.
« Ça valait le coup de faire de longues études, dans mon cas... »
Malgré la plaisanterie, je suis plus heureuse ici qu’à l’hôpital ces derniers temps. Le climat politique et les mesures de plus en plus strictes dans le domaine de la santé pèsent sur tous les services, en plus d’angoisser profondément les patients. Aux urgences, certains collègues me racontent des duels de plus en plus fréquents entre sorciers, les désaccords et les tensions augmentant radicalement ; et dans mon service, les traces de la magie noire se multiplient, comme si les Supérieurs étaient de moins en moins discrets sur les blessés qu’ils laissent derrière eux. On ne compte plus le nombre d’oubliétés à mon étage. Et personne n’ose rien dire, parce que nous savons tous pourquoi nous en sommes là, et que ceux qui parlent disparaissent, eux, sans laisser de trace.
Alors finalement, être là à consolider des galeries, c’est un peu comme des vacances. Surtout, ça me permet de moins culpabiliser pour les efforts que fait Logan pour m’aider, moi, dans mes propres projets. Donnant-donnant. Quant à Dorofei, je m’interroge sur ses motivations : prévoit-il d’être formateur à son tour ?
« Je suis mauvais professeur, mais je pourrai lui servir de cobaye...je pense qu’ils seront déjà assez traumatisés par lui sans que j’en rajoute une couche. »
Je trouve une nouvelle poutre un peu bancale qui semble s’affaisser sur un côté et fragiliser le reste de la structure alors je fais signe à Dorofei et nous nous y attelons. « J’ai du mal à croire que tu serais si mauvais professeur. Tu es sérieux, plutôt rigoureux, c’est déjà mieux que certains. Et puis, tu as été auror. Ce serait un savoir précieux pour le groupe. » lui dis-je avec sincérité, les bras levés pour soutenir la poutre supérieure. « Ce serait plus utile qu’être un cobaye en tout cas. »
Je grimace, sentant le bois s’effriter légèrement entre mes doigts.
« Et toi, à part jouer à la taupe qui creuse et construit, vous avez prévu quelque chose d’autre pour toi ?
– Non, je suis là juste par plaisir d’être six pieds sous terre, m’amusè-je avec un large sourire, avant d’ajouter, plus sérieuse : Je n’ai pas le temps et la patience en ce moment de jouer les enseignantes. »
Ou les élèves, d’ailleurs. Mais ça, c’est une conversation que j’évite soigneusement avec Logan. Hors de question de suivre ses cours. Pas parce que sa réputation le précède, comme le souligne Dorofei, mais parce que je me connais assez pour savoir que les choses dégénéreraient beaucoup trop vite entre nous. Nous n’avons pas besoin de nouvelles raisons de se disputer ou d’être frustrés l’un de l’autre ; et peut-être passer également ce temps-là ensemble serait une erreur. Mais par curiosité, je ne peux résister à poser des questions à Dorofei, seul ami de Logan qui me soit accessible ou simplement qui...soit.
La structure est stabilisée alors nous avançons dans l’obscurité, baguettes brandies pour éclairer les parois.
« Tu dis qu’ils seront traumatisés par Logan...il était si terrible en tant que professeur à Poudlard ? »

Il avait bien vu le regard de travers qu’elle lui avait lancé et il répliqua par un simple haussement d’épaules. Il ne faisait que dire la vérité après tout. Il y avait des chansons  ou des références de dessins animés qu’il ne supportait plus du tout… comme cette foutue DORA. Il ne savait plus bien depuis combien de temps il en mangeait mais c’était beaucoup trop long… surtout avec un Adam, qui, il y a deux ou trois répétait cette phrase beaucoup trop à son goût… ou plutôt le gamin la baragouinait. Un enfer. Alors oui,  si Sanae continuait avec cette phrase, il risquait fort d’avoir envoie de tout faire pour la faire arrêter de parler.  « La seule raison pour laquelle je chanterai ça, ou quoi que ce soit d’autre, ce serait parce que cette poutre me serait tombée sur la tête. » Il opina du chef, sourire goguenard sur les lèvres. « Foi d’ex Auror, je ferai tout pour protéger ta boite crânienne et ce qu’il y a dedans.» Il aurait pu s’en suivre un léger rire mais ce son n’arriva jamais, il se contentait de la regarder, amusé.  C’était plus une boutade qu’autre chose, il savait pertinemment que la jeune femme savait bien se protéger seule. Il avait eu envie d’ajouter une phrase du genre « ou sinon j’finis le travail commencé par la pierre » mais il n’osa pas ;  Sanae devait apprécier ce genre d’humour mais il ne voulait pas non plus être lourd… ou qu’elle puisse imaginer qu’il lui en voulait vraiment de quelque chose, ou qu’il serait capable de l’assommer – ou de l’achever- pour une sombre histoire de chanson enfantine. De toute manière le sujet principal n’était pas là, mais plus Monsieur Rivers. Il l’imaginait bien les observer au loin pour pouvoir leur lancer deux-trois piques plus tard… pour les emmerder certes, mais plus dans la partie « qui aime bien châtie bien » ; et non pas pour les humilier ou pour faire mal. Ceci dit, il n’était pas bien certain de savoir comment fonctionnait son ami avec la médecin, mais quelque chose lui disait que se lancer des piques – comme ils faisaient tous deux depuis Poudlard- était une bonne manière de fonctionner.

« C’est sûr qu’il prend son pied. Mais je pense plutôt qu’il veut se créer son petit Poudlard à lui. » Cette nouvelle phrase le tira de ses pensées,  et il abandonna un bref instant son exploration des alentours, sa vérification que tout était bien renforcé, se contenta de regarder Sanae. Il était possible qu’elle ait raison… mais il n’en était pas certain non plus. Par ce qu’il n’était pas certain que Logan ait vraiment aimé cette période de directeur, il l’avait pour Cooper fait plus par nécessité, même s’il avait pu y prendre par moment une certaine forme de plaisir. A son tour, l’ex Auror avait froncé les sourcils, il hésitait sur la réponse à fournir mais bientôt ses lèvres s’ouvrirent de nouveau « Possible, à la différence qu’ici il n’y aura pas d’enfants à proprement parler, ça lui ira certainement mieux de parler d’adultes à adultes.» Ou peut-être pas, au final, là non plus il n’était sûr de rien… mais il se disait que c’était pas si illogique que cela « Tu as des indices qui te font penser cela ?» ajouta-t-il bientôt, curieux. Plus par ce que cela concernait son ami qu’autre chose. Il voulait être là pour lui du mieux possible et comme la discussion à l’un et l’autre n’était pas leur fort, peut-être qu’avec quelques données supplémentaires il pourrait mieux aider Rivers. Question de loyauté.

« Ça valait le coup de faire de longues études, dans mon cas... » Il eut un sourire, quelque part un peu triste pour elle. Même s’il n’avait pas de détails, il ne pouvait qu’imaginer son quotidien, il l’avait bien vu en 2015 lorsqu’il était encore Auror : les choses avaient déjà bien changé au Ministère et ce venin continuait de se répandre aujourd’hui dans toutes les autres Institutions.  Il secoua un peu la tête, essayant de ne pas penser à cela, d’ailleurs elle n’avait aucunement évoqué cela,  elle avait juste parlé d’études, mais qui dit études, dit métier au bout… Or, il se doutait que ledit métier devait pâtir de ces nouvelles réformes, des mentalités qui changeaient ; pour lui c’était presque une remarque sous-jacente logique.   « Tu m’étonnes.»

Fort heureusement, ils ne s’étaient pas vraiment appesantis là-dessus et étaient revenus sur cette grotte, ce qu’elle allait devenir. Dorofei lui expliquait qu’il ne serait pas un bon prof. Il en était certain. Il n’avait aucune pédagogie et ne savait pas bien expliquer et c’était sans compter que sa patience était moindre avec la plupart des gens. Il continuait en même temps d’aider Sanae à renforcer les structures. Il jeta un nouveau sort à un rondin pour le stabiliser un peu plus, il avait l’impression qu’au moindre choc, il aurait pu s’effondrer avec la roche. Il tâta et observa ce qu’il venait de faire dans tous les sens pour jauger de sa fiabilité. L’instant suivant il en faisait de même avec la femme sur une nouvelle poutre qu’elle avait repérée. « J’ai du mal à croire que tu serais si mauvais professeur. Tu es sérieux, plutôt rigoureux, c’est déjà mieux que certains. Et puis, tu as été auror. Ce serait un savoir précieux pour le groupe. » il haussa les épaules, en soi, elle avait raison, il en avait conscience mais… Logan avait ce quelque chose qui lui manquait clairement à son sens. « Ce serait plus utile qu’être un cobaye en tout cas. » Il soupira doucement avant de souffler entre ses dents. « Certes, mais il faut de la pédagogie que d’la patience et surtout savoir expliquer et je ne sais pas faire. Je suis plus doué dans les démonstrations. D’où le cobaye.» Elle aurait certainement des contre-arguments,  et peut-être qu’elle pourrait le faire changer d’avis. « Je pourrais leur montrer de meilleurs postures ou ce que tu veux, mais pas en tant que professeur, peut-être plus comme une aide… Tu vois ce que je veux dire ?» Pas sûr d’être clair, un des soucis qui faisait qu’il se jugeait comme mauvais professeur. Et il lui avait bientôt retourné la question.
– Non, je suis là juste par plaisir d’être six pieds sous terre. Je n’ai pas le temps et la patience en ce moment de jouer les enseignantes. » Il copina, montrant qu’il comprenait à 100%. Il y avait des personnes faites pour être plus dans l’ombre, lui en faisait partie et d’après ce qu’elle semblait dire, elle aussi.

Il n’avait pas pu s’empêcher de faire une ou deux blagues ‘’gentilles’’ sur Logan et les traumas, la dureté qu’il pourrait provoquer aux élèves. Ils avaient de nouveau pu avancer dans la frotte, son lumos lorgnant chaque parcelle des parois de la grotte, notamment ce qui allait servir de plafond, mais il faisait aussi attention au sol qui n’était pas des plus droits, des aspérités se trouvaient presque à chacun de leurs pas comme s’ils étaient en terrain miné, et il avait l’impression que plus ils s’enfonçaient pire c’était. « Tu dis qu’ils seront traumatisés par Logan...il était si terrible en tant que professeur à Poudlard ? » Un léger sourire sur le visage, des souvenirs qui affluaient en masse alors qu’il était Gardien là-bas. Il se rappelait des mines défaites des élèves en sortant de cours, certains semblaient presque de rendre malade avant d’y aller. Il entendait les bruits de couloirs, sur sa dureté, sur la complexité des cours…Il n’était pas aimé, clairement. Certainement professeurs semblaient trouver grâce aux yeux des élèves, comme Dimitri ou Ismaëlle voire même Benjamin pour ne citer qu’eux… mais Logan semblait faire l’effet contraire., et son rôle de Directeur ainsi que les choix faits n’avaient pas aidés. « Il n’était pas populaire, j’étais Gardien à l’époque là-bas, et certains des élèves arrivaient le teint verdâtre d’appréhension et de stress et repartaient du cours le visage carrément livide comme  si tout le sang avait quitté cette partie de leur corps.» il haussa les épaules « Mais peut-être que tout ce qu’il a fait comme Directeur à cette époque a aussi joué en sa défaveur. Je pense qu’il était quelqu’un de très dur avec ses élèves mais pour leur bien, il avait peut-être tendance à oublier que certains n’étaient que des gamins traumatisés. Mais je comprends ses choix, il a essayé de les préparer au mieux pour la suite et aujourd’hui je pense que beaucoup pourraient le remercier.»  Et il était sincère, même si ce n'était que sa perception, peut-être pas si véridique que cela. Ce n’était pas une critique du travail de Logan, bien au contraire. Il pensait comme lui. Ces gamins devaient être prêts au prochain combat pour survivre, il n’y avait pas de temps pour la douceur. Chaque seconde, chaque cours comptait comme un compte à rebours.

Je ne suis jamais entrée dans l’esprit de Dorofei, et pour être honnête, l’idée me rebute. Par sa façon de se comporter avec les autres, la manière dont ses pensées doivent certainement se contorsionner pour former une logique bien à lui, et le choix de ses mots, traduisant souvent une maladresse qui laisse présager des tergiversations interminables sous sa caboche, j’imagine sans mal un esprit avec beaucoup trop d’angles. La complexité des autres a beau être passionnante, je préfère me tenir loin des esprits qui s’embrouillent eux-mêmes. Je n’ai aucun intérêt, de toute façon, à pénétrer les pensées de Dorofei. Logan s’y est-il déjà aventuré ? Probablement. Peut-être même par accident.
C’est de lui d’ailleurs, que non parlons en consolidant les structures des galeries. Dans l’obscurité, à peine dissipée par quelques petits orbes lumineux flottant çà et là au-dessus de nos têtes, nous bâtissons les couloirs de ce qui deviendra le lieu secret de nos entraînements. Ou, comme j’aime à l’appeler, le Petit Poudlard de Logan. N’est-ce pas ce qu’il tente de reproduire, même inconsciemment ? Un lieu à lui, qui le ramène à la position qui l’occupait autrefois dans cette vieille école ?
« Possible, à la différence qu’ici il n’y aura pas d’enfants à proprement parler, ça lui ira certainement mieux de parler d’adultes à adultes.» C’est certain. Peut-être pas plus à l’aise avec des adultes pour ce qui est de faire la conversation, mais il aura plus d’amplitude pour les former, devra moins se retenir. « Tu as des indices qui te font penser cela ?» Je souris discrètement alors que mes mains entourent un des piliers de bois que Cooper ensorcelle pour le faire tenir. Sans le regarder, je souffle « Juste une intuition. ». Je ne tiens pas à m’étendre davantage sur le sujet.
Nous continuons d’avancer, nous plongeons encore plus loin dans la galerie en jetant des sortilèges sur les parois pour les protéger. Comme le dit Cooper, nous devenons de vrais bâtisseurs aux multiples talents. Et je ne crois pas m’être un jour imaginée dans des mines, à explorer et enchanter des poutres. Mais soit, pour les extravagances de mon colocataire, je peux faire un effort. En revanche, si je vois bien Dorofei prendre le rôle de formateur, lui ne semble pas convaincu de ses propres qualités d’enseignant.
« Certes, mais il faut de la pédagogie que d’la patience et surtout savoir expliquer et je ne sais pas faire. Je suis plus doué dans les démonstrations. D’où le cobaye. Je pourrais leur montrer de meilleures postures ou ce que tu veux, mais pas en tant que professeur, peut-être plus comme une aide… Tu vois ce que je veux dire ?» J’acquiesce, laissant s’échapper un souffle amusé. Un cobaye pour les démonstrations de Logan...je lui souhaite bien du courage.
« Je comprends. Au moins, tu seras là pour limiter les débordements de notre diva. » m’amusè-je.
C’est dit sur le ton de la plaisanterie, mais en réalité, ce n’est pas plus mal que Dorofei reste aux alentours pour aider Logan. Sa présence sera sûrement utile sur bien des aspects, dont celui de calmer les esprits s’ils s’échauffaient un peu trop. Connaissant les fortes têtes de la Garde, et le caractère de leur futur formateur, je suis sûre que certaines leçons seront plus difficiles que d’autres. Ce qui me pousse à me demander comment Logan était durant ses jours à Poudlard en tant que professeur et directeur, comment, surtout, il était perçu par les autres. J’ai beau savoir les grandes lignes, je viens pêcher de nouvelles infos.
« Il n’était pas populaire, j’étais Gardien à l’époque là-bas, et certains des élèves arrivaient le teint verdâtre d’appréhension et de stress et repartaient du cours le visage carrément livide comme  si tout le sang avait quitté cette partie de leur corps. Mais peut-être que tout ce qu’il a fait comme Directeur à cette époque a aussi joué en sa défaveur. Je pense qu’il était quelqu’un de très dur avec ses élèves mais pour leur bien, il avait peut-être tendance à oublier que certains n’étaient que des gamins traumatisés. Mais je comprends ses choix, il a essayé de les préparer au mieux pour la suite et aujourd’hui je pense que beaucoup pourraient le remercier.»
Un léger sourire me vient alors que nous avançons dans la pénombre. Dur pour le bien des autres. Oui, sans doute est-ce un côté de lui que je connais bien désormais : il n’avait jamais été tendre quand il s’agissait de faire progresser Alec, et j’avais vu bien des souvenirs où ses méthodes dénotaient des miennes, aussi exigeantes étaient-elles. Il avait appris par la dureté et c’est ainsi qu’il reproduisait cet apprentissage. Rien de bien étonnant. Dorofei ne m’apprends rien de bien nouveau mais quelque chose me peine dans ce qu’il dit : Logan avait-il jamais reçu de remerciements ? Aussi imparfait qu’il soit, ses intentions avaient été les bonnes pour Poudlard et ses élèves. Là non plus, rien d’étonnant dans la colère qu’il éprouvait envers le silence des uns, l’absence des autres, et la méfiance de la Garde envers lui.
« J’imagine sans mal la terreur de ses élèves... » soufflè-je, pensive. Puis, en glissant un regard vers Dorofei, je demande « Comment vous vous êtes rencontrés lui et toi ? Pour que votre amitié soit encore d’actualité, elle doit valoir beaucoup. »

Il était curieux, il faut bien l’avouer, de comprendre pourquoi Sanae semblait croire que Logan pourrait voir ça comme un « nouveau Poudlard » - ou quelque chose approximatif. Peut-être avait-elle raison, qui sait ? Quelque part, il s’en fichait un peu, Logan devait savoir ce qu’il faisait et il avait confiance en son ami et en ses choix ; s’il trouvait qu’il abusait il ne se gênerait par ailleurs pas à lui dire. Mais pour l’instant, il voyait surtout ça comme quelque chose qui pourrait être vraiment utile à la Garde…« Juste une intuition. » Il haussa un sourcil mais acquiesça, vu sa réponse il se doutait que même s’il posait plus de questions il n’aurait guère plus d’informations… et puis, l’intuition féminine était quelque chose qui pouvait quand même bien fonctionner paraissait-il. Il se rappelait de Prune qui avait parfois des intuitions qui s’avéraient vraies, sans qu’il n’y ait de réelles explications à ses yeux… c’était « comme ça ». « Je comprends, je suis de curieux de voir par la suite su cette intuition s’avère vraie ou pas.» Le ton n’était aucunement moqueur, il était sincère et prenait ce qu’elle avait dit au sérieux. Il était réellement curieux de voir ce que ça avait donné, si Logan avait d’autres idées derrière la tête ou pas.

En attendant ils avançaient la mission donnée par Logan et plus le temps passait plus ils s’amélioraient même si un vrai maçon ou architecte aurait certainement fait des bons en voyant ce qu’ils avaient fait. Du moment que ça tenait les chocs, c’était le principal, les nombreux sorts après les aideraient à tout maintenir. Ils en étaient arrivés au rôle de formateur. Dorofei tenta de lui expliquer pourquoi est-ce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un formateur et une fois qu’il s’était tut, il se dit qu’il aurait éventuellement pu rajouter qu’il n’aimait tout simplement pas les gens – sauf deux ou trois exceptions-. Quoiqu’il en soit, Coop’ savait que c’était quelque chose qu’il prendrait à cœur s’il devenait formateur, que c’était un point important pour la Garde et il ne voulait pas tout faire foirer parce qu’il ne savait pas se débrouiller. « Je comprends. Au moins, tu seras là pour limiter les débordements de notre diva. » Cette fois, il eut un léger rire rapide et pencha la tête sur le côté, sourire amusé. « C’est effectivement une façon de voir les choses, même si je doute pouvoir limiter quoi que ce soit s’il a vraiment envie de le faire.» Parfois, il pouvait peut-être le raisonner, mais suivant les conditions, le sujet, c’était loin d’être vrai tout le temps. Néanmoins oui, il pourrait toujours essayer de limiter certains débordements… « Ceci dit, on est souvent d’accord et sur la même longueur d’onde.» Certes, le mot « souvent » était peut-être un peu excessif mais tant pis ! Sanae comprendrait l’idée générale et c’était le plus important pour l’instant. Par contre, il pourrait peut-être « raisonner » un peu les élèves. Ou pas. Ce n’était pas comme s’il était quelqu’un de populaire non plus, il étai juste moins craint que Rivers.

Bientôt Dorofei avait rapidement évoqué le temps où il était Gardien, un souvenir ou deux, des choses banales qu’à peu près n’importe qui pouvait se douter. Si Sanae était là c’est que Logan avait confiance en elle, mais jusqu’à quel point ? A quel point pouvait-il parler du passé dans trahir son ami, ou du moins sans laisser échapper une information qui pourrait être compromettante d’une manière ou d’une autre. Si Sanae s’amusait à taquiner Rivers sur une chose qu’il aurait évoqué… Doro se doutait qu’il le paierait au centuple. Ou pas. Et c’est ça aussi qu’il aimait chez Logan, cette incertitude pour des choses aussi banales alors qu’il savait que son ami serait toujours là pour lui s’il en avait vraiment besoin ou s’il lui demandait. Quelques instants, il rêvassa de ce passé commun, avant d’essayer de se concentrer de nouveau sur leur tâche. Bout de bois. Sortilèges. Vérifier la tenue de ce qu’ils faisaient. « J’imagine sans mal la terreur de ses élèves… Comment vous vous êtes rencontrés lui et toi ? Pour que votre amitié soit encore d’actualité, elle doit valoir beaucoup. » Dorofei haussa les épaules « Je vois surtout que c’était un super prof, peut-être le meilleur depuis longtemps de mon point de vue.» dit-il en faisant une moue, il aurait bien aimé pouvoir avoir un type comme lui en professeur pendant ses études. « On s’est connus pendant nos études à Poudlard. J’ai réussi à sympathisé avec lui, même si ça n’a pas été une chose très facile… Tu dois t’en douter… Et cette amitié s’est forgée au fil des mois et des années et elle est restée, tout simplement. il serra quelques instants les dents, rien qu’à se rappeler la façon dont Logan pouvait être perçu ne serait-ce que par son Don. Il en voulait, là encore, pas trop en dire. Il hésita quelques instants avant de rajouter «Qu’est-ce qu’il t’a raconté sur ses années Poudlard ? demanda-t-il pour être certain de ne pas trop en dire. Jusqu’à quel point Logan et elles avaient pu parler ? Quelques instants plus tard, par curiosité « Tes études, avec ton Don, ça s’est passé comment ? » Est-ce qu’elle aussi était vue comme un monstre ou un rebut de la société ? Il aurait certainement pu rajouter qu’il avait été un des seuls amis de Logan, qu’il avait toujours été sincère envers lui et qu’il se fichait bien de savoir s’il avait un Don ou pas. Il l’avait toujours côtoyé en sachant pertinemment que cet ami pouvait s’introduire dans son esprit, il ne voyait pas pourquoi est-ce qu’il l’aurait rejeté pour cela.

 « Je comprends, je suis de curieux de voir par la suite su cette intuition s’avère vraie ou pas.» dit Dorofei. Je manque de répondre un « Moi aussi » mais préfère le garder pour moi. Mon intuition est-elle la bonne ? Est-ce que Logan tente de créer sa propre version de Poudlard pour combler un vide, guérir une plaie, faire disparaître un regret? Ni Dorofei ni moi n’allons lui demander ça, quoique...j’ai pris la fâcheuse habitude de poser à mon colocataire d’étranges questions sorties de nulle part au moment où il s’y attend le moins. Celle-ci ne ferait pas exception.
Nous continuons dans les galeries mais en nous éloignant de la sortie barricadée d’où s’infiltre un filet d’air frais, la chaleur nous rattrape à force de nous activer sur les parois et les piliers en bois. J’essuie mon front en sueur, étalant sûrement un peu plus de poussière sur ma peau. Tant pis, je ressortirai toute crasseuse des mines, comme d’habitude, et j’irai me poster devant Logan, au milieu de notre salon, en lui jetant un regard noir. Même pas la peine de lancer un « C’est ta faute » avec cette tronche-là. La saleté et l’état de mes fringues parleront d’eux-mêmes.
En m’interrogeant sur la capacité de Dorofei à devenir formateur à son tour, je découvre avec surprise qu’il ne s’en sent aucunement capable. J’imaginais qu’avec son côté rigide et droit, bien que bougon, il ferait un bon candidat pour enseigner, surtout au vu de ses compétences et de sa formation, mais à l’entendre, il n’a rien des qualités requises pour assumer ce rôle. En revanche, assister Logan semble lui convenir, ce qui pourrait s’avérer utile pour calmer les ardeurs de mon colocataire.
« C’est effectivement une façon de voir les choses, même si je doute pouvoir limiter quoi que ce soit s’il a vraiment envie de le faire.» Pas faux. «Ceci dit, on est souvent d’accord et sur la même longueur d’onde.» Je prends un air blasé mais pas étonné. « Ça promet. » soupiré-je.
Parler d’enseignement nous amène à parler de Poudlard, des années passées là-bas et de la façon dont Logan et Dorofei se sont rencontrés. Derrière ces questions banales, je ne peux ignorer qu’il y a un véritable besoin de savoir. Je ne sais presque rien sur Logan, si ce n’est les miettes de lui qu’il m’a données, et cet intense partage où j’ai pris la mesure de sa captivité à Poudlard. Il ne parle jamais de lui, jamais du passé. Je crois que ça ne changera pas, ou très lentement sur le long terme, mais que jamais je ne saurai autant de choses sur lui qu’il en sait sur moi. Et je sais que ça restera une blessure profonde qui s’alimentera elle-même à chaque rappel que je sais si peu de lui… A-t-il une idée d’à quel point c’est humiliant pour moi de grappiller ces informations ?
 « Je vois surtout que c’était un super prof, peut-être le meilleur depuis longtemps de mon point de vue.» dit Dorofei, et je souris dans l’obscurité. « On s’est connus pendant nos études à Poudlard. J’ai réussi à sympathisé avec lui, même si ça n’a pas été une chose très facile… Tu dois t’en douter… Et cette amitié s’est forgée au fil des mois et des années et elle est restée, tout simplement. » J’ai mille autres questions à lui poser mais le harceler n’est pas l’idéal. Il ne sait pas ce qui me lie à Logan. Personne ne sait, à part Kezabel et Margo. Max sait des choses un jour, et les oublie le lendemain, ce qui rend toute évaluation de ses connaissances compliquée. Mais il n’a eu aucun mal à deviner que Logan était mon patient, tout comme il n’a pas été étonné de le trouver à mon chevet à l’hôpital clandestin. Et Dorofei, que sait-il exactement ? Logan lui a-t-il parlé de moi ? J’en doute, mais la question se pose. Je finis par acquiescer avant de laisser échapper un souffle amusé « Tout simplement…répété-je en secouant la tête. Comme si quoi que ce soit avec lui était simple. » Je souris, consciente qu’il le sait très bien. Un drôle d’ami, ce Rivers. A son tour curieux, Dorofei me lance alors «Qu’est-ce qu’il t’a raconté sur ses années Poudlard ? » Je me mords la lèvre, hésitante, en continuant d’avancer dans les galeries. « Pas grand-chose. Quasi rien en fait. Il n’est pas très bavard, tu le sais. »
Nous continuons, nous attaquant aux parois quand les piliers semblent assez solides pour ne bénéficier que d’un léger renforcement, et avançons encore et encore… L’obscurité se fait plus dense, nous remarquons une autre galerie perpendiculaire où tout s’est éboulé avec le temps, et poursuivons en marquant sur la petite carte que je possède des mines, une croix rouge pour signifier que cet espace est condamné. Et puis, nous reprenons notre chemin. « Tes études, avec ton Don, ça s’est passé comment ? » Je ne sais pas d’où il sort cette question mais je lui lance un regard vif, manquant de trébucher contre une grosse pierre. « Euh…. » Je n’ai pas pour habitude de balbutier mais pour le coup, Dorofei me prend de court. On ne parle pas de ces choses-là avec des gens...normaux ; et les gens normaux ne demandent pas. Sauf qu’il connaît Logan depuis leurs études à Poudlard et que finalement, ça fait sens...Dorofei doit être conscient des difficultés. «C’est-à-dire que... je n’ai été qu’une année à l’école, en France. Ensuite, j’ai été scolarisé à la maison, avec des tuteurs, jusqu’à ce que j’intègre l’hôpital de Paris. » Je me racle la gorge. « C’était...compliqué. On ne m’appréciait pas beaucoup à l’école et c’était réciproque disons. » Mal à l’aise, et désireuse de changer de sujet à tout prix, je lance aussitôt « Comment va ton fils ? » <.b>

Est-ce qu’il serait capable de poser la question à Logan pour savoir ? Oui, mais il ne le fera pas. Il n’en voit pas l’utilité. Ils le découvriraient bien assez tôt de toute manière et ça aurait une saveur différente qu’avoir la réponse tout faite probablement. Dans tous les cas, cela ne changerait rien, quelle que soit la réponse. En attendant, ils avançaient, ils bossaient comme il le pouvait pour un rendu quand même assez satisfaisant même s’il y avait une légère frustration par ce qu’il avait l’impression qu’ils avaient encore une tonne de travail à faire. Un autre sujet avait bientôt été abordé :  celui d’être formateur, sans aucun souci Coop’ donna son avis sur la question à son sujet, ajoutant même quelques mots sur son ami. Il était clair que Logan était une tête d’âne – tout comme lui- « Ça promet. » qu’elle lui répondit avec un air qui en disait long… mais en soit, elle avait raison.

Pour les questions sur Poudlard, il avait été comme à son habitude assez restreint dans les détails et avait donné juste quelques éléments essentiels. Déjà, par ce qu’il n’aimait pas spécialement causer et en plus et surtout il ne savait pas bien ce que Rivers avait pu raconter à Sanae et il ne voulait pas dire quelque chose que Logan aurait préféré garder secrète. Pas simple donc de trouver un juste milieu surtout qu’il sentait que sa camarade aurait bien souhaité en savoir plus. Il tenta donc de savoir ce qu’il avait bien pu lui dire Logan pour ne trahir aucun secret. « Tout simplement… Comme si quoi que ce soit avec lui était simple. » Il eut un petit rictus amusé mais acquiesça doucement, d’accord, c’était loin d’être simple, elle avait raison, mais il y était arrivé… c’était le principal. « Pas grand-chose. Quasi rien en fait. Il n’est pas très bavard, tu le sais. » Il pencha la tête sur le côté comme pour approuver ce qu’elle venait de lui dire. Il est vrai qu’elle avait tout à fait raison. Il se passa une main dans les cheveux et laissa quelques secondes de silence avant de souffler « Certes. Mais il aurait pu dire deux ou trois petits trucs.» Non, il ne rajouterait rien d’autres sur la question. Il préférait du coup respecter le choix de son ami et ne rajouterait rien qui pourrait le mettre dans l’embarras.

Tout en parlant, ils avaient continué de travailler, une question le tiraillait un peu. Savoir s’il n’y avait qu’à Poudlard qu’on traitait les légimens de la sorte ou si c’était répandu ailleurs. L’attitude des gens envers Logan lui restaient des années après toujours en travers de la gorge, alors… il souhaitait savoir ce qu’il en était pour la jeune femme. Il savait que c’était assez personnel, mais elle avait assez de personnalité pour l’envoyer chier ou ne pas lui répondre si elle n’en avait pas, sinon il ne se serait peut-être pas permis cela. La réaction ne se dit pas attendre, elle manqué d’en trébucher et balbutia. Autant dire que le « euh », n’était pas vraiment dans son vocabulaire, elle était plutôt professionnelle de la joute verbale. «C’est-à-dire que... je n’ai été qu’une année à l’école, en France. Ensuite, j’ai été scolarisé à la maison, avec des tuteurs, jusqu’à ce que j’intègre l’hôpital de Paris. » Il acquiesça doucement, se doutant vaguement du pourquoi du comment. Les gamins étaient tous pareils, et au final cela n’était guère étonnant « C’était...compliqué. On ne m’appréciait pas beaucoup à l’école et c’était réciproque disons. » Il allait ouvrir la  bouche pour dire quelque chose mais il n’en eut pas le temps, elle lui coupa très rapidement l’herbe sous le pied « Comment va ton fils ? » Il laissa quelques dizaines de secondes de silence, pour ne pas se foirer sa réponse. Il savait qu’il était parfois – très souvent même- maladroit et bourru mais là ce n’était pas vraiment le moment. « Je suis sincèrement désolé pour toi, Sanae. Les gamins sont cruels entre eux.» pas que, mais il ne voulait pas enfoncer non plus le couteau plus profondément dans la plaie. « Les différences ne plaisent pas, et je sais déjà à quoi je dois m’attendre pour Adam s’il est cracmol comme sa mère.» Il avait bien compris qu’elle ne voulait pas s’étendre sur le sujet alors il essayait de faire un lien entre les deux sujets abordés par sa camarade. Il savait comment les gens avaient traité Logan, ou même sa femme Prune. Deux problèmes complètement opposés, mais deux différences. Il eut un faible sourire avant d’ajouter « Il va aussi bien qu’il peut je crois. Il est en sécurité avec ma famille, loin d’ici et j’le rejoindrai à la fin de la journée.» Si Logan avait confiance en elle, il savait qu’il pouvait donner plus de détails qu’il aurait pu le faire avec d’autres personnes. « Mais c’est compliqué pour lui tous ces changements de vie depuis quelques années.» il haussa les épaules en soupirant. Il essayait vraiment de faire au mieux, mais il était conscient que malgré tout l’amour qu’il avait pour son gamin, il était loin d’être le père idéal et ne savait pas bien quoi faire pour s’améliorer : quitter la Garde pour se mettre au vert aurait pu être un choix judicieux, mais il ne se voyait pas abandonner le combat, déjà par ce que ça concernait l’avenir de son fils… mais aussi par ce qu’il avait un besoin viscéral d’être sur le terrain, d’avoir des missions.

« Certes. Mais il aurait pu dire deux ou trois petits trucs. » fait valoir Dorofei.
Deux ou trois petits trucs...Je laisse échapper un souffle amusé pour toute réponse.
Est-ce que c’est tout ce que je peux espérer découvrir ? Il m’a pourtant montré des images tirées de son enfer personnel, de ses pires traumatismes, mais le passé qu’il a partagé avec les autres m’est toujours inconnu. Je ne suis même pas sûre qu’il se refuse à le partager, mais plutôt qu’il ne pense pas à le faire.
Nous sommes les deux êtres capables de littéralement partager nos esprits mais le partage ne se fait pas toujours naturellement. Après tout, comme la parole, l’esprit se fait timide, avare, et si pudique que parfois, rien n’arrive à sortir. Dorofei doit sûrement comprendre ça, cette pudeur qu’on éprouve à se dire les choses, à ressentir ouvertement. Il ne me semble pas être quelqu’un de très expansif, ayant cette petite rugosité de caractère qui me plaît autant qu’elle doit plaire à notre ami commun. Pourtant, il n’hésite pas à poser les questions les plus délicates, me prenant par surprise.
On ne me demande pas souvent comment je vis, ou j’ai vécu, avec mon don ; comment les autres y réagissent et ce qu’ils ont pu en dire au fil des années. En vérité, ils n’en disent pas grand-chose, mais leur silence parfois est plus parlant. On parle autant de légimencie que d’embaumement. Le tabou est si ancré que même avec ceux que j’estime et qui m’estiment, nous n’abordons pas le sujet. J’ai appris depuis longtemps que les gens préfèrent oublier mon don, me considérer en parallèle, détachée de cette particularité qui les inquiète, comme si elle n’était pas intrinsèquement moi et ne définissait pas mon identité, ma personnalité, mes réactions. Ça les dérange d’y penser, de se rappeler que de l’autre côté, il y a un esprit qui peut se tendre et s’emparer du leur. Qu’à tout moment, on peut basculer dans l’angoisse et que ce basculement ne dépend que de ma volonté – notre volonté, à nous si peu nombreux.
Alors quand Dorofei me pose la question, je trébuche et les mots en font de même sur ma langue. Il n’a pas peur, lui, de demander, d’y penser, de se rappeler ce que je suis, et c’est aussi déstabilisant qu’agréable, terrifiant que surprenant. Je réponds, un peu gauche, à ses questions et enchaîne sur un sujet qui me semble plus sûr.
« Je suis sincèrement désolé pour toi, Sanae. Les gamins sont cruels entre eux. Les différences ne plaisent pas, et je sais déjà à quoi je dois m’attendre pour Adam s’il est cracmol comme sa mère.» Je n’ai pas réfléchi à la situation de son fils, ne l’aie jamais rapprochée de la mienne, et pourtant, sur l’instant, je ne vois pas tant de différence entre nous. Là où le légimen rappelle à la société que ce qu’on estime secret au fond de son esprit pourrait ne pas l’être, un cracmol est à son tour le rappel que la magie n’est jamais acquise. Elle peut disparaître d’une génération à l’autre, sauter une tête dans l’arbre généalogique. Si le fils de Dorofei est un cracmol, il souffrira certainement de vivre entre deux mondes, écartelé entre deux vies différentes, et hanté par des possibilités qui ne verront jamais le jour. Ou peut-être suis-je biaisée par ma propre expérience ? « Il va aussi bien qu’il peut je crois. Il est en sécurité avec ma famille, loin d’ici et j’le rejoindrai à la fin de la journée.»  Je hoche la tête. Les risques que prennent les parents pour l’avenir de leurs enfants… Mon coeur se serre et je déglutis. « Mais c’est compliqué pour lui tous ces changements de vie depuis quelques années.»
« Tu fais de ton mieux, le rassuré-je. Et puis, tu sais, tout le monde ne souffre pas de sa particularité...Logan et moi ne sommes pas de bons exemples, parce que nous avons commencé avec de moins bonnes cartes en mains, mais ton fils t’a toi depuis le début. Tu l’aideras à traverser tout ça. » Mais je grimace, un instant, en pensant à mon propre père et à ses combats, à ses mensonges et son absence. « Est-ce qu’il sait ? Ce que tu fais ? »

Oui, bon d’accord. Logan ne laissait jamais rien échapper… Mais qui sait ? Sanae aurait pu faire mentir cette vérité, mais il est vrai que ça restait quand même globalement une idée assez saugrenue, il voulait bien l’entendre. Et il est vrai que sa question stupide sur son Don n’était pas non plus forcément des plus adaptée, mais cette fois-ci, il savait quand même dans quelle direction il s’engageait, que ce n’était pas simple d’en parler. Il souhaitait savoir si c’était juste Poudlard – la Grande Bretagne- qui était pourrie jusqu’à l’os de se montrer aussi con et arriéré avec ces dons, ou alors si c’était le cas dans d’autres pays. Ce n’était pas tous les jours qu’on croisait des Légimens et s’il n’avait pas eu confiance en la personne face à lui, jamais il n’aurait osé poser la question.

Le monde était cruel pour les gens différents. Que ce soit dans un pays ou dans un autre. Les problèmes semblaient les mêmes, et c’était triste. Il était désolé pour elle qu’elle ait dû vivre tout cela. Et si lui-même rentrait globalement dans le moule, il avait assez vu comment on avait traité Logan ou même son femme Prune. Deux différences, des traitements qui n’auraient jamais dû exister… Et il avait la boule au ventre à chaque fois qu’il pensait qu’Adam pourrait être dans le même cas. Qu’il devrait dire adieu à la magie et à ce monde pour être « reclus » un maximum dans le monde Moldu pour plus de sûreté. La colère ébouillantait bien souvent ses nerfs, ses veines, s’instillant dans chacune des parties de son corps. Il fallait que les choses changent, pour son fils, mais pour tous les autres qui seraient dans son cas. Dans celui de Logan. Ou encore pour ceux qui seraient mordus par un Lycan. Ceux que les sang-purs (et pas mal de sorciers au final), ces « Tares » étaient au final si nombreuses ; plus le temps passait plus la liste semblait s’allonger comme si au lieu d’évoluer on devenait revenir à des pensées ancestralement étroites et stupides.

Coop’ avait bientôt répondu aux questions sur son fils. Il n'aimait pas ce qu’il disait, il était loin d’être un bon père à ses yeux. Inconstants. Absent, puis trop présent. Changements de domiciles. Ce n’était pas bon pour un gamin, mais au final… tout ce qu’il faisait c’était aussi pour son avenir, qu’il soit meilleur, qu’il puisse trouver une place dans le monde magique s’il en avait envie – ce qui n’était pas franchement possible aujourd’hui s’il était cracmol-. Pour la mémoire de sa mère, pour ne pas qu’elle soit morte… disparue en vain, vu qu’il n’était toujours pas certain qu’elle soit vraiment morte le corps n'ayant jamais été retrouvé. Johann avait laissé sous-entendre lorsqu’il était prisonnier qu’elle était toujours en vie, séquestrée quelque part, mais il n’avait jamais trouvé la moindre information. Il chassa cette dernière idée de son esprit pour se concentrer seulement sur son gamin, les réponses qui le concernaient.

« Tu fais de ton mieux, c’était vrai mais parfois ça ne suffisait pas non. Et puis, tu sais, tout le monde ne souffre pas de sa particularité...Logan et moi ne sommes pas de bons exemples, parce que nous avons commencé avec de moins bonnes cartes en mains, mais ton fils t’a toi depuis le début. Tu l’aideras à traverser tout ça. » Il acquiesça, lui faisant un vague sourire de remerciements, mais il n’était pas tout à fait certain de cela. Il avait vu les répercussions sur Prune, il savait à quel point son gamin avait envie de pouvoir aller à Poudlard, alors ça serait un déchirement pour lui. « Est-ce qu’il sait ? Ce que tu fais ? » Il fronça les sourcils, et hésita sur la réponse. « Il est encore un peu petit, il a même pas 6 ans… mais je lui ai déjà expliqué vaguement que des fois j’étais pas là, pour qu’il puisse vivre dans un monde meilleur.» Et qu’il l’aimerait toujours, quelque soit son sang, mais ça, ça coulait de source s’il avait épousé une cracmole. Il ne se voyait pas parler des batailles, de la Garde, il ne savait pas adapter cela à un vocabulaire d’enfant. « Et je ne veux pas qu’il s’inquiète non plus à chaque fois que je pars.» il planta son regard dans celui de Sanae avant de soupirer doucement. « Je sais que je risque ma vie à chaque fois que… je suis ‘’dans le coin’’, qu’à n’importe quelle mission ou combat je peux mourir, je peux pas lui enlever cette insouciance et qu’il risque de s’imaginer le pire.» il n’y avait certainement pas de bonne ou de mauvaise solution, il n’y avait que des choix qui auraient différentes conséquences. « J’espère qu’il ne souffrira pas trop de sa condition s’il est cracmol, il aura toujours toute sa famille derrière lui mais… mais c’est aussi abandonner l’idée d’aller à Poudlard, être différent de ses cousins, des autres membres de sa famille et… rien que ça, si on enlève tout le contexte politique actuel, ça lui fera mal.» Nouveau soupir. « Mais j’ai encore quelques années devant moi avant d’être certain de ce qu’il est vraiment.» Et de trouver les bons mots. D’arriver à rétablir au mieux une situation acceptable pour les cracmols. Trop court, beaucoup trop court, même si environ 4-5 ans pouvait paraitre énorme.