The Good The Bad and the Ugly past time

L’humidité et le souffle léger de la bise d’hiver qui traversait les passages secrets des bordures des Docks, provoquaient des frissons remontant jusqu’aux épaules de l’Ambassadrice, qui venait de s’être laissée ouvrir l’accès après avoir posé les talons sur ce vieux rafiot amarré au bord du quai. Ou bien était-ce le souvenir glaçant d’une mésaventure que l’informatrice aurait sans doute préféré oublier. Car tandis qu’elle longeait le passage sous-terrain, laissant claquer ses talons sur les dalles humides, elle ne pouvait s’empêcher d’y penser. Le souvenir en question était sombre et brumeux, seules quelques bribes de paroles et de légers traits de visage lui étaient revenus à l’esprit. Parmi eux, l’une des rares personnes dont Rain n’avait pu oublier l’identité étant donné qu’elles faisaient parties de la même faction, et qu’elle avait préféré ne pas revoir. Pour son bien,  certainement. La colère que la brune refoulait allait de paire avec les claquements de ses escarpins. Mais elle savait faire la part des choses et dissimuler son véritable ressenti, tout comme elle savait bien faire surgir sa langue de vipère lorsqu’elle le jugeait nécessaire.

Neolina Hampton faisait pourtant partie des personnes que l’ambassadrice ne détestait pas, sans l’apprécier réellement, elle avait droit à un minimum de considération, ce qui était tout comme, sur l’échelle du mépris de l’américaine. Jusqu’à ce qu’elle se souvienne de sa présence à cette table, la toisant comme la pire des criminelles alors qu’il n’en était rien, et qu’elle-même n’aurait jamais osé faire ce que Rain avait dans la tête ce soir-là. Hélas, celle-ci était loin d’avoir la mémoire courte, et même si elle s’efforçait de ne pas éprouver de rancune, c’était plus fort qu’elle. Les femmes comme elles, ne pardonnaient jamais, en réalité. Elles faisaient semblant, jusqu’au moment propice où elles obtiendraient vengeance. Et l’une des rares réelles qualités de la brune était la patience. Dans certains cas, cela avait toujours porté ses fruits. Ce soir-là, elle n’avait guère de projet en tête si ce n’était effectuer le rapport de sa précédente mission, ainsi que d’en apprendre plus sur ces tenants et aboutissants.

Jusqu’à présent, leurs rapports restaient cordiaux et avec le moins possible de contacts physiques, ce qui était loin de déplaire à l’ambassadrice introvertie. Les relations humaines n’étaient pas son fort, n’importe qui qui la côtoyait un minimum le savait. La diplomatie dans le cadre de la Garde ne lui était plus d’une grande utilité maintenant que les venues au quartier général ne devaient survenir que de temps à autre, et que beaucoup d’identités devaient être protégées. Rain n’était pas concernée, même si elle avait déjà tout prévu en cas de problème quant à son appartenance à Myrdinn révélée, cela ne l’empêchait pas de redoubler de prudence à chaque mission. Elle avait juste à repenser à Jane et à ce qui lui était arrivée au Ministère, maintenant elle vagabondait à travers le pays et vivait tous les jours avec la peur d’être retrouvée ou que les Supérieurs s’en prennent à sa famille. Cette dernière qu’elle ne pouvait plus voir non plus. Malgré son manque d’empathie habituel, l’informatrice n’aurait jamais souhaité une telle situation à quiconque.

Lorsque ses pas franchirent la porte de la salle de réunion où elle devait rejoindre sa Générale, un frisson désagréable la parcourut de nouveau, lui faisant esquisser une légère moue. L’ambassadrice se souvenait de cette pièce en question, où elle avait confronté Hampton et Arthur, avant de se réveiller chez elle sûrement plusieurs heures plus tard, avec simplement des bribes de souvenirs.
Elle était un peu en avance, elle avait fait exprès d’arriver avant pour s’installer la première. À la place où s’était tenu Arthur lors de son procès, pour bien montrer qu’elle ne se laisserait plus ainsi juger. Ce fut donc au tour de Neolina d’entrer dans la pièce, face à elle la brune hautaine la toisait d’un sourire hypocrite, mais pas antipathique non plus.

« Bonsoir, chère Générale. »

Aussitôt, Rain sortit de sa malette en bandoulière, un dossier peu épais qu’elle déposa lentement sur la table, devant elle.

« Comme convenu, voilà mon rapport de la mission du mois dernier. » Elle laissa maintenant échapper un léger rire, sarcastique, tout en ouvrant le dossier et en parcourant les pages, fort peu nombreuses, qui le constituaient.

« Il n’a pas été trop long à remplir… »

Comme Hampton pouvait s’en rendre compte par elle-même. Tandis qu’elle parlait, l’américaine ne quittait pas des yeux les mimiques et expressions de sa cadette. Mais elle continuait, un brin soupçonneuse, sans lui laisser le temps de réagir :

« Pourtant, j’ai fouillé. Pendant un moment. Et même le garde du corps que l’on m’avait assignée était surpris du manque d’informations que j’aie pu en tirer. »

L’air de rien, Rain termina en haussant les épaules.

« J’espère ainsi que cela conviendra… »

Vendredi 3 mars 2017,
Ce n’était qu’un mauvais moment à passer ; du moins c’est ce dont elle essayait de se convaincre. Elle était loin de détester Rain, mais son comportement n’était pas franchement facile à gérer, tout comme sa répartie, le mépris qu’elle avait pour les autres. Alors, à chaque face à face, elle se demandait comment est-ce que cela allait finir, une légère appréhension pour elle qui n’aimait pas franchement les conflits. Elle alla se préparer un thé bien chaud et laissa ses mains froides se réchauffer au contact de la tasse. De plaisir, elle ferma les yeux quelques instants avant de pousser un long soupir. Se motiver. Ne pas y aller d’ores et déjà démotivée, Rain le sentirait et s’y engouffrerait pour lui mener la vie dure. Pour se venger, ou juste l’humilier selon son humeur. Elle se doutait que l’ambassadrice avait la rancune tenace, peut-être même qu’il y avait une forme de jalousie par ce qu’elle était générale contrairement à Goodwin – si forte, avec tant de qualités…-. Tu deviens mesquines, là. C’est vrai, ce n’était pas très juste pour Rain qui faisait malgré tout du bon boulot ; et comme Neolina avait toujours ce doute qu’elle n’était pas forcément une bonne Générale après l’Erreur de janvier, c’était une pensée un peu abusée. Rain était comme elle de toute manière, pas forcément faite pour les terrains de « guerre », de baston. Les deux femmes se débrouillaient beaucoup mieux à récolter des informations, à espionner ou autres.

Neolina ne tarda pas à rentrer dans la salle où avait été convenu le rendez-vous et Goodwin était déjà là à l’attendre avec ce genre de faux sourire qui avait tendance à crisper la Générale. Elle ne devait pas rentrer dans son jeu. Récupérer le dossier, parler vite fait et hop, C’était en théorie dans la poche… Dans la pratique, connaissant la dame et vu l’humeur qu’elle semblait avoir, elle avait un petit doute sur la faisabilité de la chose ! D’ailleurs, la plus âgée avait bientôt commencé les hostilités avec des salutations qui en disait déjà long sur son état d’esprit. Génial. Ca allait vraiment être un plaisir. Néanmoins, elle ne lui ferait pas le plaisir de lui faire une réflexion, elle se contenta de lui rendre un sourire de manière entendue. « Bonsoir Rain, comment vas-tu ?» Est-ce que la réponse l’intéressait ? Peut-être un peu, par ce que le bien être des « troupes » était quelque chose de primordial. Elle se doutait que l’autre allait lui rire au nez, mais ce n’était pas bien grave. Elle agissait de cette manière avec tout le monde de toute manière… à quelques exceptions près… dont faisait partie Dorofei, et puisqu’on parlait du Loup, l’ambassadrice avait bientôt mis sur le tapis sa mission… qu’elle ne semblait pas franchement avoir apprécier. Elle l’avait su bien avant cette discussion et le ton qu’utilisait l’autre elle ne laissait aucun doute. Si elle avait été mesquine, elle aurait pu lui répliquer que pour « un si petit rapport elle en avait mis du temps », mais elle ne voulait pas rentrer dans ce jeu-là.

Hampton s’empêcha de contracter les mâchoires pour ne pas montrer son agacement. Quelque part, Rain avait raison… la mission avait peu de chance d’aboutir. « Merci Rain, je le lirai avec attention.» commença-t-elle « Le garde du corps qui t’a été attitré, lui, comprend la nécessité de tout vérifier sans faire de ce genre de sous-entendu » Par ce qu’après tout, s’ils avaient été envoyés là-bas, c’est qu’il y avait une raison, qu’il fallait une vérification « Et je te rappelle aussi que c’était une mission test, comme on put le faire d’autres avant toi et qui, bizarrement ont bien compris les enjeux.» Elle lui dédia néanmoins un léger sourire, absolument pas moqueur et encore moins supérieur, elle voulait lui montrer qu’elle n’était pas en train de la descendre, juste d’énoncer des faits. Et elle ne comptait pas se laisser marcher sur les pieds par quelqu’un qui se croyait supérieure par ce que Madame était ambassadrice. « Toutes les missions n’aboutissent pas toujours à des résultats, je peux comprendre ta frustration, par ce que c’est toujours décevant de ne rien ramener de croustillant, je l’ai déjà vécu. Mais il faut que l’on vérifie toutes les pistes que l’on a. » Autrement dit ce n'était pas la première fois ni la dernière fois que ça arriverait, et que cela pouvait arriver à tous les informateurs. Point barre.

Pimpante et agréable, comme à son habitude, une tasse de thé fumant dans la main et le sourire aux lèvres, ce fut chaleureusement que Neolina accueillit l’Ambassadrice, qui était loin de porter la même sympathie, mais sa collaboratrice y était probablement habituée, d’entrée de jeu le ton était donné. L’une des deux femmes peinait à dissimuler son exaspération et son amertume, alors qu’il s’agissait bien d’un exercice auquel elle excellait dans d’autres circonstances plus professionnelles. Mais depuis quelques temps, Rain était fatiguée des faux semblants, au Ministère britannique elle en avait l’habitude, au Congrès Magique américain elle était plus libre de ses mouvements et chacun était au parfum de sa personnalité pas simple à gérer. Du moins, cela était avant. Compte tenu du basculement prochain du MACUSA, elle le sentait venir, l’ambassadrice devait faire profil bas et ne comptait plus ses heures de travail, cela n’allait pas en s’arrangeant. Vainement, elle s’efforçait de dissimuler ses traits d’épuisement sous une fine couche de maquillage bien dosée, mais cela ne trompait guère les rares personnes qui la connaissaient réellement. Ce n’était pas le cas d’Hampton, qui ne remarquerait probablement rien, si ce n’était que l’irritabilité encore plus flagrante de la brune hautaine.

Pour le moment, l’échange n’était ni agressif ni piquant, de légers sarcasmes accompagnaient les paroles de Godwin, sans plus. Elle n’avait pas d’intention particulière en venant ici, même si elle était amère et qu’elle refoulait sa colère à l’égard de sa Générale, loin d’elle l’intention d’aller plus loin que ses remarques cinglantes. Pour le moment. L’intention n’y était pas, mais l’envie, sans doute un peu plus. Guetter le moindre faux pas pour s’engouffrer dans la brèche à juste titre, par simple vengeance personnelle. Peut-être même qu’au fil de la conversation, elles seraient amenées à évoquer le sujet. En attendant, Neolina lui posa la question la plus bateau qui pouvait être posée lors d’un échange relationnel. Un hochement de la tête, le même sourire hypocrite sur les lèvres, Rain répondit simplement :

« Ça va. »

Évidemment, une simple réponse sans renvoyer la question, afin de clôturer cette cordialité, en réalité il était difficile d’affirmer qu’elle allait bien. Comment se pouvait-il ? C’était impossible. Mais elle ne souhaitait pas rentrer dans ses détails, elle laissa juste la jeune femme en face d’elle réagir quant à la présentation du dossier sur la mission, sans intervenir. Rain la laissa aller au bout, mais ne put s’empêcher de réagir à certains points. Elle ricana, de manière particulièrement sarcastique, puis secoua lentement la tête en regardant ailleurs, avant de reporter son attention sur sa Générale. Elle se souvenait de chaque détail de chaque mission qu’elle avait pu faire, et lors de la plus récente elle se souvint de la réaction de Dorofei qui l’air tout aussi enchanté qu’elle d’être là, tous deux avaient partagé le même ressenti, celui de perdre leur temps. Les informations étaient bien transmises…
Mais la suite fit réagir d’avantage l’ambassadrice, dont le sang commence à bouillir dans ses veines, et sa respiration s’était emballée, cette fois elle ne put s’empêcher de répondre. Elle prit simplement le temps de faire taire les battements dans sa poitrine, afin de ne pas s’épuiser plus qu’elle ne l’était déjà. Mais le ton y était. De nouveau, la brune hautaine toisa sa jeune collaboratrice, plantant son regard dur et noir dans le sien.

« Tu mens. »

Elle esquissa alors un rictus, les bras croisés sur sa poitrine, attendant d’Hampton qu’elle ne cesse de faire sa Poufsouffle, et qu’enfin elle n’ose prendre le taureau par les cornes.

« Je sais différencier les enjeux, je me souviens dans les moindres détails de chacune de mes missions. » Elle marqua une pause, mais ne lui laissa guère le temps de répliquer. « C’était donc bien un test, j’aurais dû m’en douter. Trahir Walters et ainsi m’exposer, n’a manifestement pas suffit. »

Elle n’avait pas été mise au courant, ni même Dorofei d’ailleurs, ce que l’ambassadrice ne manqua pas de lui rappeler.

« Je t’impressionne, peut-être ? Pour que tu ne daignes même pas être honnête et admettre que ça t’amuse, de me faire perdre mon temps ? »

Comme si Madame l’ambassadrice n’avait pas autre chose de plus intéressant à faire. Que la Garde ne lui fasse plus confiance, elle s’en accommodait et cela lui passait au-dessus du cigare, mais que Neolina n’ait pas la décence de la prévenir de cette mission test, Godwin restait amère. Et elle enchaîna.

« Je n’ai pas que ça à faire, de répondre aux tests ridicules d’une bande d’incompétents. » Là, étaient les chefs inconnus de l’organisation qui étaient visés, mais Godwin ne s’arrêta pas là. « J’espérais que tu n’en fasses pas partie, mais apparemment je me trompais. »

Elle termina en haussant les épaules.

« Quant à Dorofei, il a eu le même ressenti. Le problème ne vient donc pas de moi. »

L’ambassadrice lui affirmait qu’elle allait bien. C’était une réponse aussi bateau que la réponse et comme bien souvent elle ne prit pas la peine de retourner la question. Tant mieux en soit, par ce qu’elle n’avait pas spécialement envie de lui répondre. Il ne lui tardait qu’une chose :  que cette conversation finisse au plus vite, mais quelque chose lui disait que ça ne serait pas le cas sinon Rain aurait certainement trouvé un moyen pour lui coller le rapport sans qu’elles n’aient à se rencontrer en prétextant des choses plus ou moins vraies, comme un emploi du temps de Ministre alors que dans la réalité, Neolina était certaine que même si l’ambassadrice était occupée, si elle en avait vraiment envie elle trouvait toujours le temps. Enfin, ici, la question ne se posait pas vraiment vu qu’elle était devant elle. Mauvais présage, même si elle essayait de se dire qu’elle était juste parano.

Elles étaient vites allées dans le vif du sujet, et visiblement le point de vue de la Générale ne plaisait pas trop à Rain qui avait quelques petits rires caractéristiques. Elle fit abstraction de tout cela et continua à dire ce qu’elle avait à dire. Et forcément, la plus âgée avait très vite repris la parole et commença fort « Tu mens. » Elle n’eut même pas le temps de sortir un « pardon » et sembla du coup juste surprise et prise de cours
« Je sais différencier les enjeux, je me souviens dans les moindres détails de chacune de mes missions. C’était donc bien un test, j’aurais dû m’en douter. Trahir Walters et ainsi m’exposer, n’a manifestement pas suffit. » elle s’empêcha de lever les yeux au ciel. Sérieusement, elle se demandait POURQUOI, est-ce qu’elle ne lui avait pas dit, alors que la réponse semblait si évidente et couler de sens. Neolina savait de toute manière que quoiqu’elle dise l’ambassadrice ne se remettrait jamais en question, elle était si parfaite qu’elle ne pouvait jamais faire d’erreurs et que ça serait toujours la faite des autres, et donc ici de Hampton. Le problème était donc « juste ça ». Elle trouvait ça limite puéril, d’autant plus que Rain avait juste les contacts qu’il fallait et que c’était réellement une mission. Une vraie mission, avec un vrai but, mais là encore elle se doutait que ça serait comme de pisser dans un violon, l’autre ne la croirait jamais. Elle avait presque mal au crâne d’avance et s’empêcha en plus de soupirer tandis que l’autre continuer de blablater. Ne pas lever les yeux au ciel, sinon les choses seraient encore pires et pourtant, à cet instant elle en mourait d’envie. Elle la laissa finir, avant de reprendre en essayant de garder son calme

« Si tu avais meilleur caractère, je t’en aurais averti. C’était une vraie mission même si tu sembles en douter, et tu étais dans tous les cas, grâce à tes relations la plus à même à la mener. J’aurais préféré que tu en tires quelque chose. Ce n’est pas le cas, c’est comme ça.» elle haussa les épaules, elle aussi avait fait des missions qui n’avaient mené à rien. « Si tu étais un peu moins imbue de toi-même, tu saurais qu’après ce qui s’est passé pour, ou pour Dorofei, pour ne citer que vous deux, il y a toujours des missions tests. Toujours de vraies missions quoiqu’il en soit. Est-ce que si j’avais utilisé le mot « mission  test » tu aurais tant donné ? Je n’en suis pas sûre, par ce que tu juges que ton temps est trop précieux pour ça. Tu n’aurais retenu que le mot test.» Elle aurait pu lui rappeler qu’elle n’était pas seule à prendre les décisions mais vu son discours ce n’était pas franchement le moment, et puis elle préférait de toute manière en prendre la responsabilité entière. « On sait toutes les deux que Dorofei, les seules missions où il se sent vraiment à l’aise c’est sur le terrain à se battre.» Elle planta son regard dans celui de la femme « Et lui, ne vient pas pleurer, par ce qu’il sait que c’est une mission, même si elle n'a rien donné. Je ne contrôle pas les informations que l’on obtient et que l’on doit vérifier. Comme si tu étais la seule à avoir fait ce genre de missions.» Heureusement que tout le monde n’était pas comme elle, par ce, si elle avait vraiment obtenu des informations, est-ce qu’elle aurait réagi de la sorte ? Probablement que non, par ce qu’elle n’aurait pas eu l’impression de perdre son temps. Peut-être que son égo en avait pris un coup aussi. Elle se retint tout juste de lui rappeler qu’elle était sa chef et qu’elle lui devait un minimum de respect, par ce que ça serai certainement encore pire. Quoiqu’avec Rain tout était possible et elle ne la comprenait pas toujours. « Tu es un bon élément Rain, mais vraiment arrête de croire que le monde tourne autour de ta personne...»

Sarcastique et réellement amusée, Rain laissa échapper un rire dès les premiers mots qu’utilisait la plus jeune des deux informatrices pour se justifier. Mettre la cause de tout cela sur le caractère de l’ambassadrice était l’excuse la plus légère et simpliste qu’il ne lui était donnée d’entendre. Ils avaient tous ce même mot à la bouche, ce qui devenait lassant. Mais elle préféra ne pas intervenir pour laisser la Générale aller au bout, qui défendait bec et ongles son point de vue et ne regrettait pas de lui avoir fait perdre son temps dans une mission bateau, espérant que la brune hautaine en tirerait quelque chose par rapport à ses relations. Un nouveau rire s’échappa des lèvres de l’américaine, qu’Hampton prétendait connaître mieux que quiconque en insinuant qu’elle n’aurait jamais voulu s’investir si cela n’était pas une mission officielle. En fin de compte, elle avait raison, car Rain aurait tout simplement refusé. Mais ça, inutile de lui donner raison, car elle n’était pas là pour ça. Elle était mécontente, elle voulait que sa supérieure le sache. Elle secoua la tête en levant le menton en l’air, laissant planer le doute sur le fond de sa pensée. Elle savait que Neolina s’emporterait facilement aussitôt que l’ambassadrice remettrait ses décisions en cause. En réalité elle n’était pas venue pour la rabaisser plus que cela, mais cette intention était très tentante, compte tenu de sa défense légère.

Puis vint le sujet Dorofei. Cette fois, l’informatrice soupira, tout en gardant ce petit sourire amusé. Elle se retint tout juste encore de rire, en se souvenant de leur conversation au château de Lancaster. Lui n’était peut-être pas venu se plaindre à Neolina directement, mais n’avait pas particulièrement apprécié d’être rabaissé à devoir jouer les gardes du corps alors qu’il avait été Auror expérimenté. De plus, Rain n’imaginait pas Dorofei se plaindre à son Général, globalement. Surtout pas après avoir été réintégré depuis peu de temps, mais peut-être qu’elle se trompait. Hampton ne lui apprenait rien en tout cas, en rappelant que l’ancien Auror était plus à l’aise sur le terrain que dans une réception mondaine, l’ambassadrice l’avait bien remarqué et certaines images lui resteraient probablement en tête un moment.

Après un bref instant de silence, la Générale informatrice conclut par une affirmation qui n’échappa guère à la brune hautaine. Un bon élément, c’était peu dire. Elle avait toujours été discrète. Au point que ces imbéciles ne s’étaient pas rendus compte tout de suite qu’elle côtoyait Johan Walters. Elle ne souhaitait pas que le monde tourne autour d’elle, elle voulait juste ne plus perdre son temps en futilités. Être envoyée en mission dans de meilleures conditions. Neolina semblait ne pas réaliser à quel point le fossé était profond entre elles. Rain se demandait si la plus jeune des deux réussissait à s’imposer, auprès des pontes. Elle l’imaginait plutôt s’écraser, mais elle espérait se tromper, là encore.

« Évidemment. Je n’en doutais pas. »

Qu’elle était un bon élément. Toujours à se jeter des fleurs la première, et si le reste suivait, elle n’en profitait que d’avantage.

« Tu peux me reprocher mon caractère, ou bien ce qu’il s’est passé l’année dernière, autant que tu le voudras. » Elle s’était adoucie légèrement, énonçant les faits sur un ton plutôt posé. « Mais ma seule faute, a été de me faire prendre. »

Cette idiote d’informatrice avait tout gâché, néanmoins Rain s’était à ce même moment rendue compte que l’organisation ne lui avait jamais réellement fait confiance. Sa manière de penser et ses méthodes, avaient toujours été très différentes de celles de la majorité des membres. Et pourtant…Un sourire narquois passa sur ses lèvres.

« Par la suite, vous en avez allègrement profité. »

En effet, ils avaient été bien contents de la trouver lorsqu’il avait fallu traquer et capturer Johan. Mais l’ambassadrice n’était pas là pour revivre ces événements, elle ne souhaitait pas non plus éternellement tergiverser, elle savait bien où elle venait en venir en rappelant les faits. Avant que Neolina ne puisse ajouter quoique ce soit, la brune s’empressa d’ajouter :

« Ne te méprends pas, je ne vous en veux pas. C’est exactement ce que Moi, j’aurais fait. »

Elle insista exprès sur le Moi. Car la manière dont la Garde l’avait sanctionné puis s’était ensuite servie d’elle, tout cela aurait pu être extrêmement brillant, si Rain n’avait pas été l’objet de cette manipulation.

« Toi, par contre, ça ne te ressemble pas. »

Voilà où elle voulait en venir. Mesquine, elle planta son regard insistant dans celui d’Hampton.

« Donc je m’interroge. À laisser faire ce genre de choses, entre autre, plus des missions inutiles à des membres expérimentés, as-tu vraiment ta place ? Ce ne sont que des exemples parmi d’autres, je me trompe ? »

Inspirer. Expirer. Elle pouvait lui répondre sans péter un câble. Rain cherchait à l’humilie et/ou à la faire sortir de ses gongs. Madame Grand Ego ne semblait pas supporter certaines choses, tant pis pour elle, par ce que ça serait comme ça que ça se passerait que cela lui plaise ou non. Tout le monde en passait par là, Rain n’avait pas être privilégiée. Ce qui était dommage, c’est qu’elle était talentueuse et intelligente l’Ambassadrice et elle gâchait toujours tout avec ce genre de comportement insupportable. Qu’elle ait tort ou raison, il fallait qu’elle ait le dernier mot. Il ne fallait pas toucher à son égo et c’était sans compter la façon dont elle causait à tout le monde en le prenant de haut, en les jugeant, en étant sarcastique, désagréable et tout ce qui s’en suit. Bref, une personne avec qui peu de gens avaient vraiment envie de travailler, beaucoup semblaient vouloir l’éviter et elle ne pouvait que les comprendre. Mais bien sûr, ce n’était pas Elle – sa grande seigneurie- le problème. Godwin avait d’ailleurs bientôt repris la parole, devenant presque étrangement trop douce.

« Si tu as été sanctionnée, c’est qu’il y avait une raison.»

Elle haussa les épaules ne comprenant pas bien pourquoi est-ce qu’elle remettait ça sur le tapis. Tu fautes, t’es puni. Elle, comme les autres. Mais bien sûr, elle ne voyait pas son tort… Et Hampton n’avait pas spécialement envie d’en rajouter une couche sur le sujet. Elle avait surtout envie que tout cela se termine et que Rain se casse bien loin, mais l’ambassadrice ne semblait pas bien décidée. Elle s’empêcha tout juste de lever les yeux au ciel lorsqu’elle ajouta qu’ils en avaient profité. Oui, le but c’est d’utiliser les atouts de chacun. Tout comme elle pouvait être utilisée pour son Don.

« Toi, par contre, ça ne te ressemble pas. » Ah, le voilà, le point où Rain voulait certainement la mener depuis le départ. Et si elle croyait qu’elle allait baisser le regard face à elle, elle se plantait bien. Et, elle ne tarda pas à soupirer légèrement en se demandant à quel point l’égo de Godwin pouvait être immense. «Si je n’avais pas ma place, crois-tu que l’on m’aurait gardé à ce poste-là ? » Elle avait été prête à partir, elle-même avait des doutes, mais certaines de ses compétences semblaient plus qu’appréciées et surtout la plupart des membres lui faisaient confiance, mais ça bien sûr Rain n’était pas au courant. Elle reprit bientôt d’un ton toujours posé Peut-être qu’il faudrait te remettre en question un peu plus et que ça te ferait du bien. Chaque membre ici est utile, tu n’es supérieure en aucun point à quelqu’un – tout comme je ne le suis pas-, même par rapport aux petits jeunes qui viennent de sortir de l’école et qui ont beaucoup plus de savoir vivre et d’expérience que toi sur beaucoup de choses. Et encore une fois, il n’y a pas de missions inutiles, il y a parfois des informations qui ne donnent rien. Mais ça tu le sais. Tu ne digères juste pas d’être traitée comme les autres à cause de ton rang.» Quel rang d’ailleurs ? Juste par ce que Madame était ambassadrice et qu’elle trainait avec les gens de la Haute. « C’est bon, tu as fini, ou est-ce que tu as encore quelque chose sur le cœur ?» Tant qu’on y était…. Le ton n’était pas impertinent, juste las. Elle aurait pu l’envoyer bouler beaucoup plus et même si elle en avait envie, engager un conflit avec Rain n’était pas quelque chose de nécessaire. Au contraire, il fallait tenter d’apaiser les choses un maximum, instaurer une « nouvelle ère » en quelque sorte même si la confiance entre les deux étaient brisées et qu’il y avait un fossé « Ecoute Rain, on est trop différentes pour vraiment s’entendre, mais la Cause est bien plus importante que ça, non ? Notre avenir à tous.» elle eut un vague sourire. « J’ai entendu ce que tu as eu à dire, et j’en prends note mais je ne peux pas te promettre que tu n’auras plus de missions comme la dernière, tout dépend de qui est impliqué.» essayer de gérer le conflit au mieux pour beaucoup trop de raison. Rain restait un électron libre, quelqu’un qui pouvait être dangereux mais comme elle lui avait dit c’était aussi un très bon élément et elle n’avait pas envie de le perdre pour des broutilles.

Rain préféra ne plus rebondir sur la remarque de Neolina sur la sanction, quoiqu’elle pouvait dire, la rancune resterait présente encore longtemps. Le regard insistant et le sourire mesquin de l’ambassadrice ne faiblissaient pas, car d’une simple interrogation, elle avait obtenu des réponses satisfaisantes. Bien que ce n’était pas leur contenu qui intéressait le plus la brune hautaine, mais la manière dont sa Générale se défendait face à ses provocations. Comme toujours, elle essayait d’être le plus apaisante possible, tout en défendant sa place ici, une qualité que personne ne pouvait lui retirer, c’était certain. Dommage, elle résonnait de la mauvaise manière. Elle était le reflet parfait de bien des membres de la Garde que l’américaine avait croisé depuis ces quelques années, si Hampton était une amie de Beaumont ou de Jane, elle n’en serait guère étonnée. Sans oublier Dorofei. Leurs manières de penser et de chercher à recadrer Rain en lui rappelant qu’elle n’était pas mieux que les autres etc, témoignait d’un état d’esprit dans lequel elle ne se reconnaissait pas. La naïveté du tout-venant, du petit peuple, avait tendance à agacer profondément l’ambassadrice, qui avait évolué autrement.
Elle resta silencieuse un instant, le temps d’écouter Neolina déblatérer sa défense, transformée en un énième reproche sur sa personnalité. Rain leva d’abord les yeux au ciel, puis laissa échapper un rire narquois et moqueur, haussant brièvement les épaules.

« Ne te fie pas à ça, surtout lorsque l’on a à faire à tant d’incompétents qui peuplent cette Organisation. »

Elle finit par faire taire ce rire, mais elle le pensait. Arthur, pour commencer, et tant d’autres, qu’elle n’avait pas rencontré, les faits parlaient d’eux-mêmes. Voilà pourquoi Hampton ne pouvait se fier à cette seule raison pour avoir gardé son poste. Déçue, l’ambassadrice avait imaginé d’avantage de défense de la part de sa cadette. Machinalement, elle jeta un œil à sa manucure, la tête penchée sur le côté. Un autre ricanement s’échappa d’entre ses lèvres, elle s’étonnait d’entendre Neolina l’attaquer une nouvelle fois sur son caractère compliqué, sa soit-disant supériorité par rapport à d’autres, plus jeunes qu’elle, ce n’était pas ce que Rain avait voulu dire. Elle était venue ici pour demander des comptes, sans aucune autre intention par respect pour sa Générale, mais elle risquait fort de laisser un peu trop pendre sa langue de vipère, suivant le déroulé de la conversation.

« Ta bien-pensance est vraiment exaspérante, ma chère. » Vraiment, ce genre de personne aurait bien besoin d’apprendre la vie. « Il y a autant de missions inutiles, que de membres qui le sont tout autant. Nous ne sommes pas tous à la même échelle, c’est comme ça partout, dans tous les domaines. »

L’ambassadrice lâcha des yeux sa belle manucure pour retrouver le regard de sa collègue. Celle-ci avait sûrement oublié qu’elle ne serait même pas entrée dans la Garde sans son aînée. Ou peut-être plus tard, du moins. Une petite piqûre de rappel ne lui ferait sûrement pas de mal. Hampton avait raison, elles ne s’entendraient pas, mais elles pouvaient simplement s’entendre sur leur objectif commun. L’une ne remettait pas en cause l’allégeance de l’autre, ce n’était pas le but de cette entrevue.

« Je m’interrogeais surtout sur ta capacité à t’imposer, pour le moment tu ne m’as pas ôtée de mes doutes. »

En effet, Rain doutait fort que Neolina réussisse à s’imposer auprès des autres pontes. Elle ne l’imaginait tout simplement pas devenir Générale, du moins pas avant quelques années. Arborant toujours ce même sourire mesquin, elle s’éclaircit rapidement la gorge et passa une main dans ses cheveux.

« Mais, peu importe. Tu as raison, la Cause est plus importante. Alors, garde tes petites missions inutiles pour tes « jeunes qui sortent de l’école », j’ai autre chose à faire. »

Elle ricana de nouveau, mais cette fois c’était un peu par nervosité. Elle redevint ensuite plus serieuse.

« Je prends mon indépendance, je vais enquêter et infiltrer le Ministère de manière plus approfondie, et je ne répondrai plus à tes appels de missions. »

Une manière formelle d’annoncer ce que Rain faisait déjà, plus ou moins. Mais en parallèle de ses activités, elle prenait toujours la peine de répondre aux missions pour lesquelles elle était appelée. Au moins, c’était dit. Neolina n’allait pas l’apprendre d’une autre manière que de la bouche de l’ambassadrice elle-même. Difficile, mais celle-ci allait profiter du basculement qu’elle sentait venir au MACUSA. Enfin, elle aurait pu s’arrêter sur cette dernière phrase, mais elle ne put s’empêcher d’ajouter :

« De toute façon, tu n’as pas l’étoffe d’une Générale. Tu aurais peut-être dû te contenter de ton petit poste à l’artisanat. »

Leur problème, à l’une aussi bien qu’à l’autre, c’est qu’elles restaient sur leurs positions. Neolina avait du mal à comprendre comment Rain ne pouvait pas se remettre en question plus que cela et toujours remettre ses erreurs, ou les fautes sur les autres. Sans compter son comportement permanent hautain avec les gens. Elle savait si bien énerver les gens avec juste quelques mots que ça en était presque un Don. Elle était tout le contraire de Hampton qui essayait de penser au bien être des autres, à la cohésion et compagnie. Et les répliques de Rain bien que changeantes avaient toujours le même fond. Une fois de plus Neolina s’empêcha de lever les yeux au ciel et tenta de garder son calme un maximum. L’autre aimait chercher les gens pour leur faire faire des erreurs et elle n’avait pas du tout envie de rentrer dans ce petit jeu là, du moins autant que possible. Par ce que comme tout le monde, sa patience avait des limites et Godwin savait pertinemment comment faire pour la frôler. D’un autre côté, rester calme devait aussi agacer l’ambassadrice et rien que ça l’encourageait à garder le même ton. Au lieu de s’énerver, elle se contenta à sa nouvelle réplique d’un petit HmHm. dubitatif. Sans aucun autre commentaire ou argumentation.

« Ta bien-pensance est vraiment exaspérante, ma chère. » Oui, elle savait, mais ce n’était jamais pire que le mépris de son interlocutrice. Mais ça non plus, elle ne comptait pas le dire. De toute façon c’était comme parler à un mur, alors autant ne pas répondre sur cela. Au moins certains de ses collègues venaient se confier à elle en cas de souci et des conflits étaient résolus juste en parlant lorsque c’était possible, même Rain ne semblait pas pouvoir imaginer cette situation. « Il y a autant de missions inutiles, que de membres qui le sont tout autant. Nous ne sommes pas tous à la même échelle, c’est comme ça partout, dans tous les domaines. » Et voilà qu’elle se remettait au-dessus des autres. « Hmhm.» Qui cette fois aurait aussi bien pu dire « cause toujours tu m’intéresses », ou bien « encor ce refrain changes-en ». Bref. Elle n’apportait rien à la discussion Rain à part convaincre encore plus Neolina qu’elle ne se prenait pas pour de la merde, pour ne pas dire qu’elle se voyait meilleure que les autres.

Rain avait bientôt repris avec de nouvelles affirmations. Effectivement, Neolina savait qu’elle n’était pas la meilleure pour s’imposer, elle était certainement un peu trop gentille pour ça, mais vu qu’elle s’entendait bien avec la plupart de « leurs collègues », et qu’elle les respectait, qu’ils avaient le même objectif, généralement elle n’avait pas trop besoin de cela. Et sinon… elle faisait comme elle le pouvait. « Et bien doute. Tu trouveras toujours quelque chose à reprocher quelque soit le candidat de toute manière.» Elle haussa les épaules. Et si ça aurait bien pu se finir, Rain avait recommencé avec cette histoire mission « inutiles » à laisser aux autres. Elle claqua la langue contre son palais, ne voulant pas lui donner le plaisir de s’énerver. « Tu connais les règles, Rain, et je te rappelle que je suis ta Générale.» Autrement dit « tu as des devoirs à accomplir, comme tout le monde ». Un ton neutre était utilisé, comme pour énoncer quelque chose de factuel. Et si elle lui faisait confiance pour prendre son indépendance, d’autant plus qu’elle devait déjà être un électron libre… elle ne pouvait pas accepter qu’elle ne réponde plus à ses appels de missions, cela ne fonctionnait pas comme ça. Du moins pas sans autorisation. Rain devait bien savoir qu’elle allait finir, à continuer d’agir ainsi, par être oublietter de tout ce qu’elle savait de la Garde… et même si c’était très sous-entendu, elle voulait lui rappeler dans les paroles prononcées juste avant.

Quant à la dernière réplique, elle eut un sourire sarcastique « Tu es en boucle, et visiblement tu n’as plus d’argument. Tu en deviens si risible, que je vais finir par croire que tu es jalouse de la nulle que je suis -selon tes sous-entendus-? » Sauf que personne ne voudrait de quelqu’un comme Godwin comme générale. Trop perso. Trop imbue d’elle-même. Trop hautaine à dénigrer tous les autres.

Mauvaise surprise pour l’ambassadrice agacée par les récentes demandes de sa Générale, elle ne l’avait pas pensé en venant ici, mais elle se frottait à un mur. Ce qui était assez étonnant, car il lui avait semblé qu’Hampton était plus sensible à certaines remarques. Peut-être s’était-elle endurcie, depuis le temps. Ou bien s’était-elle blindée pour se préparer à cette brève entrevue avec Rain, sachant pertinemment qu’elle allait essayer de la déstabiliser. Elle qui n’avait pourtant pas eu cette intention au début, mais le simple fait que sa Générale campe sur ses positions et ne se remette pas en question, avaient fait friller l’américaine, qui ne connaissait guère ce côté assuré de sa cadette. Elle en vint presque à se dire qu’il était dommage qu’elle ne découvre que maintenant, une Neolina plus sûre d’elle et droite dans ses bottes, sans baisser les yeux, ni craquer face à une odieuse insubordination. Une réflexion qui fit apparaître une bribe de sourire au coin des lèvres de Godwin, dont les manigances venaient d’échouer, du moins en apparence. Elle connaissait un minimum la jeune femme pour se douter qu’elle prenait sur elle et retenait tout ce qu’elle pouvait, pour ne pas céder à la langue de vipère, mais que ses remarques la feraient sans doute cogiter un moment. Quant à Rain, elle n’allait bien évidemment pas admettre qu’elle avait perdu et qu’elle n’avait pas pu obtenir ce qu’elle voulait, puisqu’elle n’était pas venue pour avoir le moindre gain de cause, juste pour rappeler à Hampton de ne plus lui faire perdre son temps, désormais.
Encore une fois, le refus d’admettre que tout le monde n’était pas au même niveau l’interrogeait. Pourquoi s’entêter à vouloir mettre chaque personne sur un pied d’égalité ? L’ambassadrice côtoyait suffisamment les Hautes sphères depuis des années, pour savoir de quoi elle parlait. De jeunes gens fraîchement arrivés ne pouvaient être aussi aguerris que les autres. Encore un point sur lequel les deux femmes étaient diamétralement opposées. Jane, voilà à qui Neolina lui faisait penser. La brune savait qu’elles se connaissaient puisqu’elles les avaient vues une fois ou deux se côtoyer au Ministère, elle était sûre qu’elles devaient bien s’entendre. Cette autre pensée l’amusa.

La Générale avait donc suffisamment pris sur elle pour ignorer la plupart des remarques de Rain, mais elle ne put s’empêcher de rebondir sur certaines choses. En effet, peu importe qui avait pris ce grade, elle aurait trouvé à redire. Elle n’était pas du genre à tout accepter aveuglément, Hampton devait bien le savoir, sauf quand elle n’en avait pas le choix. Tout dépendait des enjeux, obéir docilement avait toujours été un exercice compliqué pour l’ambassadrice, ses collaborateurs au MACUSA pouvaient le confirmer. Elle peinait à prendre sa Générale au sérieux, ou bien tout ce qu’il arrivait du côté de la Garde lui passait au-dessus, comme si les enjeux n’étaient plus si importants pour elle qu’ils ne l’avaient été. L’informatrice avait toujours été un électron libre et Neolina le savait, cette entrevue n’allait rien arranger. Elle préféra ignorer à son tour les remarques de sa cadette, et se retirer avant de réellement regretter une parole mal placée. Elle reconnaissait l’endurcissement de sa Générale, mais elle attendait plus. Même si c’était un peu tard, comme elle le lui avait dit, Rain était décidée à ne pas répondre aux appels de mission si elle ne les jugeait pas assez pertinents. Ainsi, la tentative de démonstration d’autorité d’Hampton la fît ricaner. Elle l’a laissa finir, puis elle répondit sur un ton très sarcastique :

« Oh, mais quelle autorité… »

Elle marqua une pause, son sourire s’étirant sur ses lèvres. Elle se moquait de Neolina ouvertement. Était-ce une menace ? Après tout, l’américaine avait déjà eu une partie de sa mémoire effacée, elle savait la Garde capable de recommencer. Cela lui pendait au nez et pourtant, elle continuait de les défier, ne leur pardonnant toujours pas leurs agissements envers sa personne, la première fois. Ils allaient sans doute le regretter, un jour. À son tour, l’ambassadrice haussa les épaules et se leva, redressant la bandoulière de sa malette.

« Je répondrai. Si je juge la pertinence suffisante. »

Elle releva légèrement le menton, toisant Neolina de haut.

« Si ça ne te plaît pas, vous n’aurez qu’à m’effacer la mémoire. Vous savez si bien le faire, à ceux qui ne rentrent pas dans votre moule. »

Rain passa une main dans sa chevelure noire, machinalement, avant de tourner les talons.

« À bientôt, « Générale ». »

Inspirer. Expirer.  Tout allait bien se passer pas. Elle savait que cette conversation se finirait forcément d’une manière qu’elle n’allait pas apprécier. Quoiqu’elle dise ou taise, elle savait que Rain allait partir mécontente, qu’elle aurait le dernier mot. L’ambassadrice était forte pour cela ! Malgré tout, elle essayait de garder une ligne de conduite qu’on ne pourrait pas trop lui reprocher, elle aurait certainement pu hausser la voix, lui hurler dessus pour tenter de se faire entendre mais la plus âgée n’avait peur de personne. Ou presque. Cela lui aurait été bien égal, au contraire, ça lui aurait fait plaisir de voir qu’Hampton avait cédé à cette « facilité ». Non, elle ne lui ferait pas ce plaisir, c’était certain.

« Oh, mais quelle autorité… » Certes, ce n’était pas son point fort, mais en même temps, Rain était un électron libre et elle aurait répondu plus ou moins la même chose à la plupart des personnes qui essayeraient de lui faire entendre raison. Vraiment, comment une femme aussi intelligente pouvait se montrer aussi stupide ? Par ce que pour elle, Rain frisait la bêtise à ce niveau-là ; et encore c’était bien gentillet ce mot de « bêtise ». Tout ça pour une rancœur. Tout ça par ce que son égo était plus gros que tout le reste. Elle s’empêcha de la tacler à ce sujet-là, cela n’apporterait rien de bon à la conversation de toute manière. « Je répondrai. Si je juge la pertinence suffisante. » Neolina au lieu de répondre acquiesça, voulant clairement dire « Si tu veux jouer à ce jeu-là, joues-y ». Après tout, ils n’allaient pas se prosterner devant elle pour se faire pardonner et qu’elle puisse choisir ses missions, par ce que certaines ne plaisaient pas à sainteté. « Si ça ne te plaît pas, vous n’aurez qu’à m’effacer la mémoire. Vous savez si bien le faire, à ceux qui ne rentrent pas dans votre moule. » C’est ce qui lui pendait au nez effectivement. Rain était un excellent élément, Hampton le maintenait mais son attitude était de pire en pire. Et c’était ça qui la gênait, elle devait forcément en parler à ses supérieurs, aux autres Généraux pour ne pas laisser une possible situation s’empirer. Mais elle devait aussi bien vendre tout ça, perdre Rain pourrait être préjudiciable, même s’ils feraient toujours sans elle… Qui pourrait lui faire entendre vraiment raison ? Elle ne semblait pas avoir peur de perdre la mémoire, de ne plus être dans la Garde. « À bientôt, « Générale ». Neolina prit une nouvelle inspiration avant de souffler « A bientôt Rain.»  Aucun autre commentaire, elle avait failli ajouter un « peut-être », pour lui montrer qu’elle n’était pas certaine de remettre les pieds au QG, mais elle avait finalement préféré se taire. Elle avait confiance en Rain, mais elle n’était pas certaine de quoi elle pouvait être capable si on la cherchait un peu trop. Tout comme ne pas lui répondre sur l’effacement de mémoire, à cette énième tentation de la faire sortir de ses gongs, à cette impertinence lui paraissait inutile. Chaque parole aurait été vaine, démontée par des arguments plus ou moins fondés.  A quoi bon lui signifier que les effacements de mémoires étaient surtout pour ceux qui partaient de la Garde. Ou pour se protéger. Godwin le savait, elle voulait juste continuer à jouer à la plus forte en joute verbale, sauf que Hampton la trouvait plus ridicule qu’autre chose au final à continuer à agir comme une gamine pourrie gâtée meilleure que les autres. Comme ça, on doit se trouver l’une et l’autre risible. Parfait.