Touch The Sky [OS Riley S. Jenkins Vargas]

Dimanche 25 décembre 2016, dans l’après midi
Glasgow, Écosse

On a eu de la neige cette nuit, dehors il y a un côté irréel quand on se laisse aller à regarder le paysage. C’est calme, c’est blanc, c’est doux. Autour de moi les bras de Mateo, je me sens bercée dans son étreinte alors qu’un sourire flotte sur mes lèvres. Il était chouette ce Noël, un peu doux amer bien sûr mais ça n’est pas la tristesse qui a prédominé. Papa, Maman et Peter, les parents de Mateo, lui et moi. Circé, aussi. Charleen et Camélia très fort dans nos cœurs et nos pensées.
Un merle traverse le jardin à la recherche de nourriture et va se poser sur la vasque dans laquelle l’eau a partiellement gelée, un soupir s’évade de mes poumons dans un souffle.

Paisible.

Comme les pas qui me mènent jusqu’au cimetière où je décide de me rendre seule en m’amusant des craquements de la neige sous mes bottes. Pas grand monde dehors, pas vraiment de trace pour casser l’harmonie du blanc qui recouvre les trottoirs et les jardins. Je suis un funambule sur la ligne blanche que je ne vois pas au milieu de la route, bras écartés et rire cristallin. Je suis une enfant le bonnet enfoncé presque jusqu’aux yeux et l’écharpe remontée sur le nez. Je n’ai pas le cœur lourd quand les lettres gravées dans le marbre sautent à mes yeux et que son regard suit le mien à travers une photo que le temps ne fait pas passer. Elle aussi, elle a eu son cadeau sous le sapin.

« Joyeux Noël Riley. » La brume qui s’échappe entre mes lèvres ne trahis qu’à peine le sursaut, si mon cœur s’emballe la panique laisse rapidement place à autre chose. Elle aussi a le regard rieur, tout aussi bleu, le visage enfantin « Elijah … » Et la joie qui passe dans le vert de mon regard n’est pas feinte.
Mélange de rappel du passé, d’un avenir avorté sur certains aspects, pourtant c’est autre chose que je perçois émaner d’elle. L’innocence toujours gravée dans l’âme mais moins de naïveté peut être, rapidement les questions s’enchainent. Qu’est ce qu’ils deviennent, tous ? Alors un par un je lui raconte … Le nouveau départ de Kezabel, sans entrer dans les détails. Un nouveau travail, une vie à l’étranger. Sovahnn et sa fille qui grandi de jour en jour sans vraiment effleurer l’absence qui plane. William, ses études, son projet de s’impliquer pour les droits LGBT. Enzo, son bateau, ses rêves qui se réalisent. Mateo et Maxime, leur salon de tatouage. Cameron et Emily, leur nouvelle vie ailleurs loin des horreurs. Elle, Beauxbatons où elle suit désormais ses études magiques, son envie de travailler dans une confiserie dès qu’elle en sera sortie diplôme en poche. Inventer, développer, des tas d’étoiles dans son regard.

Puis vient cette question : « Et toi ? » Celle qui fait ouvrir la bouche avant de la refermer, l’évidence devenu mirage en une seconde. Moi ? Et bien … Je ne sais pas. Les études, le travail, mon petit studio … Oui, j’avance, mais ça vient me frapper presque brutalement : Pourquoi rester ? Qu’est ce qui me retient ici ? N’ai-je pas envie d’ailleurs si souvent ?

Il y a un sourire sur mes lèvres alors que je passe la porte de la maison quelques temps plus tard. Ça tourne dans ma tête, d’idées et d’envies, de possibilités, de nouvelles évidences que je garde sous silence le temps d’accrocher mon manteau dans l’entrée et de retirer mes bottes.
Le pas léger sur le parquet, chaussettes épaisses qui me font parfois glisser, ils captent tous quelque chose quand j’entre dans la pièce. Une lueur, peut-être, dans le fond des yeux.

Tous, réuni au coin du feu, une tasse de café ou de thé entre les doigts, Mateo debout appuyé contre la cheminé. Ma famille. Mon cœur qui bat d’un nouveau bonheur là dans ma poitrine, les doigts agrippés à la laine de mon pull et une mèche de cheveux brun devant les yeux.

« Qu’est-ce que vous pensez de Stanford ? »

Ω

I will hear their every story
Take hold of my own dream
Be as strong as the seas are stormy
And proud as an eagle's scream

I will ride, I will fly

Julie Fowlis – Touch the sky