[Event Projet Lycan] Keep this secret ▬ Rain

Dans la nuit du 18 au 19 Aout 2016 - Pleine Lune
Quelque part dans Londres, non loin du Ministère de la Magie

« Il ou elle vient de Londres ? »
« Oui, on s’est dit que ça serait mieux de … »

De l’autre côté du téléphone Leroy laisse la fin de sa phrase en suspens. Ici, à Londres, le coude droit posé dans l’intérieur du gauche, Jane scrute l’horizon sans même le voir. Debout contre la rambarde du petit balcon de son appartement elle a pris soin d’insonoriser son environnement direct avant d’appeler son cadet. Elle n’est pas tranquille, jamais vraiment un jour de pleine lune. Surtout pas ces derniers temps.

« T’es pas obligé de m’en dire plus Leroy, t’en fais pas. »

C’est mieux comme ça, malgré son esprit entraîné et hermétique. Oui, moins elle en sait mieux c’est même si elle détient quelques bribes. D’après ce que lui a expliqué son frère des personnes ont été mordue dans les rues de Londres le mois dernier, au point d’être proche de leur première transformation ce soir. Elle ne sait trop comment, Leroy est entré en contact avec un ou des loups venant d’ici et se joint à eux pour aider ces nouveaux mordus. Bien sûr qu’elle pense à Osborne, hésite même à aller l’affronter de nouveau pour lui poser directement la question. Elle n’en fera rien, par respect pour ces instants sacrés qu’ils vivent une fois par mois.

« Fais attention, d’accord ? »
« T’en fais pas Big Sis’, tout ira bien. »

Il est loin, c’est vrai, mais désormais si celui ou celle étant entré en contact avec lui tombe il ou elle pourrait entraîner son frère dans sa chute. En elle un mélange de frustration et d’anxiété, elle se mordille l’ongle de l’index un instant. Son regard glisse sur l’Ogive de Foster, à peine visible au loin parmi les autres gratte-ciels. Ses propres secousses, celles qui font onduler sa vie, elle ne lui en a pas parlé.

« Appelle-moi demain matin dès que tu peux. »
« Ça marche. Hâte de vous voir toutes les deux. »

Le cœur de Jane se serre autant que son poing à l’évocation d’Amalia. Ce qu’elle ressent ici est de la colère, autant envers elle qu’envers ce système contre lequel elle ne parvient plus à se taire. En faisant ça elle met sa famille et plus particulièrement sa fille en danger, la savoir en vacances à l’étranger avec son père la rassure mais ça n’est que temporaire. Bien sûr qu’elle a prévenu Kendrick des menaces à peine dissimulées d’Oliveira, fidèle à lui même il a été compréhensif envers le combat que mène la mère de son enfant. Prudents tous autant qu’ils sont l’Anglaise à ce serpent qui sinue le long de sa colonne vertébrale depuis quelques semaines, comme si elle ressentait les prémices de quelque chose.

Une fin, elle l’espère un commencement.

¥

Il est tard lorsqu’elle quitte le Ministère ce soir, rien d’étonnant quand on la sait en charge d’une partie du dossier lycan comme certains l’appelle. La haut dans le ciel la Lune est bien haute et surtout bien ronde, sa lueur argentée peine à trancher celle des réverbères. Vêtue d’une veste légère dont elle relève le col contre son cou elle prend une profonde inspiration et s’élance dans les rues pavées. Son pas est calme, d’apparence tranquille, en réalité les battements de son cœur ne sont pas si serein. Il cogne vite ce cœur, un état qu’elle apaise par le biais d’exercices de respiration qu’elle pratique en marchant. Elle pourrait transplaner, à vrai dire elle le fera mais sans trop savoir pourquoi elle a ressenti le besoin de marcher un peu. Et puis ce réflexe, celui de regarder derrière elle, partout autour, quelque chose qui lui colle à la peau depuis sa discussion avec Oliveira. Jamais encore Jane n’avait ressenti tant d’aversion envers quelqu’un et le mot est sans doute bien faible. Cette femme a su creuser un sillon de sel dans son esprit et la frustration qu’expérimente l’Anglaise lui fait serrer les poings bien trop souvent. Ça n’est pas dans ses habitudes, elle d’ordinaire si détachée de ce genre de personne qu’elle cherche même parfois à comprendre. Histoire de ne pas les mépriser. Une sorte de ligne de conduite qu’elle s’impose sans même le réaliser, primant la bienveillance par dessus tout le reste. Mais elle est humaine, Jane, faillible parfois comme tout un chacun. Faillible envers elle même, à dire vrai, puisque personne ne lui demande rien.

Son regard brun se perd sur l’obscurité lorsqu’elle perçoit un mouvement, puis un son. D’une porte arrière d’un bâtiment s’ouvrant avec fracas apparaît soudainement une silhouette. Le réflexe de l’Occlumens est immédiat, sa baguette en main elle la braque vers le corps de l’homme qui vient de s’écrouler sur le sol. Quartier magique, a quelques pâtés de maison du Ministère, son esprit a eu le temps d’appréhender ces faits avant d’exposer ce qu’elle est.
C’est l’effroi qui vient lui serrer la gorge alors qu’elle croise le regard de cet inconnu dont le corps semble vouloir se disloquer. Il a peur, il a mal, un craquement atroce vient faire résonner la nuit juste avant le hurlement qui s’échappe de sa gorge. Un hurlement de douleur, de celui dont le corps se brise.

Dont le corps change.

« Aidez-moi. »

Il rampe, elle se fige un instant. Juste un instant. Le suivant elle est à ses côtés et pose une main sur l’une de ses épaules, l’autre sur son front.

« Je suis là, je suis là. Je ne vous laisse pas. »

Elle a compris, lui non. Elle a compris ce qui est en train de se produire sous ses yeux parce que ça n’est pas la première fois qu’elle assiste à une transformation. Au début elle était là à chaque fois pour Leroy, présence salutaire bien qu’inutile elle le savait mais jamais elle ne lui a fait défaut. Pourtant que c’était douloureux pour elle de voir son frère se briser si violemment … mais ses émotions n’étaient rien face à ce que lui endurait alors malgré la frustration et l’angoisse elle serrait les dents.
Ici elle n’est pas plus utile elle le sait mais la terreur dans le regard de cet inconnu lui suffit à ne pas détourner le sien. Et puis vient cette présence qui semble lui caresser la nuque, Jane se tourne vivement et braque sa baguette dans la direction de la nouvelle venue.

Depuis quelques temps maintenant, les nuits de Pleine Lune étaient devenues l’un des sujets de préoccupation principale du Ministère, suite aux attaques survenues dans les rues de Londres. Jusqu’à présent, l’ambassadrice Godwin n’avait pas reçu d’autres consignes plus précises de la part du MACUSA, que celle de les tenir informés en cas d’attaques sur des ressortissants américains. Ainsi, aux yeux de Rain, ce n’était qu’une consigne parmi d’autres, les personnes comme elle se tenaient à mille lieux de ce genre de problèmes.
Son retour de vacances n’avait pourtant pas été de tout repos, les dossiers à étudier et les réunions d’États s’étaient enchaînées. Aujourd’hui encore, une réunion avait eu lieu plusieurs autres ambassadeurs, le Directeur du département chargé des affaires étrangères, et le Ministre chargé des relations au monde moldu. Une réunion plutôt houleuse qui avait engendré d’éternels débats, sans en tirer quoique ce soit de concret puisque même le département de la justice n’avait pas rien trouvé au sujet des Lycanthropes. Heureusement, d’autres sujets avaient été abordés concernant la situation magique internationale. Si bien que la représentante du MACUSA comprît rapidement qu’elle n’aurait pas beaucoup de temps libre dans les semaines à venir, elle devrait travailler jusqu’à tard le soir.

Malgré sa capacité de résilience naturelle et de détachement, les dossiers de Godwin n’avançaient guère beaucoup, elle ne pouvait s’empêcher de penser à Walters et à sa libération par les siens de la semaine passée. Bien sûr la perte de plusieurs membres de la Garde était un nouveau coup dur, et Rain espérait que personne qu’elle n’ait pu connaître ait perdu la vie ce soir-là. Mais elle se demandait où pouvait se trouver Walters à présent. Il ne se souviendrait de toute façon pas d’elle, et c’était mieux ainsi.
L’été avait pourtant plutôt pas mal commencé. La brune avait pu revoir sa famille aux États-Unis, et Maeve, avec qui elle avait partagé du bon temps sans grands discours, ni sans se poser plus de questions. Mais tout cela était bien loin derrière elle à présent.

En attendant, l’heure tournait, Rain travaillait d’arrache-pied à son bureau, suait à grosses gouttes malgré la fraîcheur de la soirée et le port d’un léger chemisier blanc chic. Trois tasses vides de café étaient empilées à côté de son encrier, sa consommation était grimpée en flèche depuis quelques jours, semblant oublier complètement les recommandations des médecins. L’ambassadrice travailla jusqu’à sentir sa vue se brouiller et ses pupilles brûler. Elle se redressa et se frotta les yeux. Elle n’avait aucune idée de l’heure, mais ses fonctions cérébrales, bien que plus performantes que la moyenne, lui sommaient de faire une pause.
Godwin soupira longuement et rassembla ses affaires, avant d’ajuster sa veste noire en jersey. Dans les couloirs du département et le hall du Ministère, elle ne croisa personne.

Presque personne…La brunette supportait parfois mal le transplanage et ce soir elle sentait qu’elle ne serait pas en état. Le quartier magique étant non loin de Knightsbridge, un taxi suffirait et ne serait pas long à la ramener chez elle. Elle s’éloigna un peu du quartier magique pour appeler un taxi. Mais Rain n’était pas la seule travailleuse au Ministère qui était sortie tard. Non loin de là, il lui avait semblé avoir reconnu une silhouette familière. Curieuse, elle s’était approchée, et avait rapidement reconnu Jane, ancienne amie d’école. Rain avait tout d’abord tenté de l’appeler, mais la responsable du dossier Lycanthrope était trop loin et visiblement occupée ailleurs. L’ambassadrice se rapprocha d’avantage, mais lorsqu’elle aperçut cet homme au sol, hurlant à la mort et suppliant Jane de l’aider, elle se figea et ne bougea pas. Mauvaise idée, mauvaise idée de se trouver là. Horrifiée par les cris de terreur de l’homme, Godwin recula de quelques pas. Elle n’aurait pas dû suivre Jane et aller prendre son taxi comme prévu initialement. Elle voulut donc faire machine arrière. Mais, rattrapée étonnamment par un acquis de conscience et pour éviter toute culpabilité supplémentaire, la brune décida de ne pas fuir seule et d’aller récupérer Jane.

Elle s’approcha alors, doucement, ainsi elle put mieux voir la scène. Ce qui se déroulait sous ses yeux était choquant et inhabituel, les cris et le corps de l’homme qui semblait se disloquer, terrifiait l’ambassadrice qui regrettait à cet instant de ne pas être tranquillement chez elle, dans son canapé, avec son chat.

« Par Merlin…Quelle horreur… »

La respiration haletante et le cœur battant de peur, Rain se rapprocha pourtant d’avantage. Son état émotionnel brouillait considérablement sa capacité de réflexion, toutefois elle se demanda soudainement si il ne s’agissait pas d’une transformation de lycanthrope. Elle était loin d’être experte en la matière, mais cela pouvait expliquer la volonté de Jane à vouloir aider. Quelle folle elle faisait, elle pouvait se faire dévorer d’un moment à l’autre. Alors, l’ambassadrice accéléra le pas, son amie finit par l’entendre et se tourna vivement vers elle, baguette braquée en sa direction. Rain s’arrêta net et prévint son ancienne amie de sa présence.

« C’est bon, c’est moi ! Rain…Godwin. »

Peu sûre d’elle, elle n’osa s’approcher d’avantage à cause des cris de l’homme, certes il semblait avoir besoin d’une assistance, mais il l’a terrifiait. La brune ne voulait pas laisser Jane, mais elle ne souhaitait pas non plus s’occuper de l’horreur que subissait cet homme. Elle tenta alors de convaincre son ancienne amie de laisser tomber.

« Laisse-le, Jane ! Ne reste pas là, il peut être dangereux ! »

L’homme lâcha alors un cri plus sourd, plus terrifiant que jusqu’à présent, Rain sursauta et frissonna de peur, suppliant presque Jane de fuir avec elle en lui attrapant la manche.

« Appelle la police magique, qu’ils s’en occupent, et partons d’ici ! »

Elle espérait que la protectrice des lycanthropes entende raison et suive Rain, hélas ses supplications ne suffiraient probablement pas..

« C’est bon, c’est moi ! Rain…Godwin. »

Les yeux écarquillés, la menace dans le fond du regard comme à l’extrémité de sa baguette, il lui faut une seconde ou peut être deux pour intégrer l’information. Ce n’est pas un ennemi qui se tient près d’elle mais belle et bien Rain. Amies depuis l’enfance, camarades à l’époque de Poudlard, leurs chemins se sont éloignées puis recroisées au Ministère ainsi Godwin n’est jamais réellement sortie de la vie de Wilson. Deux êtres aussi opposées que leur caractère et pourtant un lien qui persiste, à sa manière. Rain est aussi acariâtre que Jane est solaire, adolescente cette dernière prenait un malin plaisir à taquiner la Serpentard. Ici, ce soir, l’ambiance n’est pas à ce type de réaction et la terreur dans le regard de l’Ambassadrice échappe totalement à Jane. Là encore, pas de place ni de temps pour ça car au sol la vie d’un homme se joue.

Elle se joue dans la souffrance et la terreur.

« Laisse-le, Jane ! Ne reste pas là, il peut être dangereux ! »

Simple vérité, elle le sait, mais contrairement à Godwin – sans doute – l’Anglaise n’en est pas à sa première transformation. Combien de fois a-t-elle vu Leroy se tordre de douleur ? Elle ne les compte plus et qu’importe le danger elle n’a jamais quitté son frère lorsqu’il avait le plus besoin d’elle. Il aurait pu la mordre 100 fois, elle n’a jamais reculé. Aidée par la Magie, la sorcière se sait bien plus puissante qu’elle ne le montre alors non elle ne tremble pas. Si ce n’est pour la survie de cet inconnu qui hurle sur le pavé tandis que son corps se déchire.

« Appelle la police magique, qu’ils s’en occupent, et partons d’ici ! »

La colère fait trembler ses veines comme un Tsunami alors qu’une main posée sur le bras de l’homme elle se retourne brutalement vers Rain de nouveau.

« Qu’ils s’en occupent ?! »

Son regard exprime toute la rage qui fait battre son cœur, toute la haine qu’elle éprouve pour ce Ministère qu’elle a tant aimé et respecté par le passé. La confiance s’est envolée au fil du temps, jamais elle ne confierait qui que ce soit à ces hommes et ces femmes persuadés d’agir pour le bien commun. Ils ne le font pas, ils n’agissent que pour leur propre salue. Celui de la pureté du sang et de l’intolérance.

« Hors de question. »

Tranchant, sans la moindre hésitation. Sans le moindre doute. Mâchoires serrées, elle plonge son regard sombre dans celui de l’autre sorcière mais une nouvelle crispation chez l’homme à terre la ramène à cette réalité plus urgente. Il ne peut pas rester ici, seul, à la merci de tous. Il ne peut pas plus y rester alors qu’il est un danger en devenir pour les autres et en ça Rain a raison, Jane le sait.

« Je vais vous emmener ailleurs, d’accord ? Vous ne pouvez pas rester ici. »

Un murmure adressé d’une voix douce, d’apparence sereine, à celui qui cherche son regard sans réussir à le trouver tant le voile devant ses yeux se fait de plus en plus opaque. Sa jambe droite semble bloquée dans un angle inhumain, les râles qui s’échappent de sa gorge révèlent la bête un peu plus à chaque respiration. Et si son cœur lâchait ? Une possibilité, un fait qui l’a fait tremblé chaque fois que son frère changeait dans les premiers temps. Ici pas d’impact émotionnel, simplement l’amour inconditionnel que l’Anglaise porte à son prochain. D’autant plus à ceux qui sont marqués d’une cible, jugés, mis de côté.

Non, elle ne l’abandonnera pas. Déterminée.

De nouveau son regard trouve celui de Godwin, l’autre femme semble terrorisé mais Jane n’en tient pas compte. Nombreux sont ceux à ne voir en Rain qu’une femme dénuée d’émotion et d’intérêt pour les autres, ce qui est le cas en partie elle ne le niera pas. Il n’y a pas que ça pourtant, à la voir ici on ne perçoit aucun intérêt pour cet inconnu qu’elle abandonnerait sans scrupule mais c’est bien sa superbe qui s’envole au profit de la peur. En aucun cas Wilson la juge, pas son genre, pas le moment.

« Je vais transplaner avec lui pour le mettre à l’abri, vas-t-en si tu veux mais n’essaie pas de m’en empêcher. »

Est ce qu’elle le ferait ? En souvenir de cette amitié qu’elle n’oserait sans doute avouer sous ses grands airs, peut être.

« Et je t’en conjure Rain ne contacte pas la Police Magique où cet homme est perdu. »

Cet homme ou ce qu’il en reste mais rien ne fait trembler Jane, ni de peur ni de dégoût. Un craque d’os atroce est précédé d’un nouveau hurlement, on peut deviner les muscles qui s’agitent sous sa peau, quelques parcelles d’épiderme semblent se couvrir des prémices de ce qui deviendra fourrure animale si son corps tient le coup.

Baguette en main, prête à transplaner, un dernier regard pour l’ancienne Serpentard.

Pourquoi ne pas avoir fait comme si elle n’avait rien vu, au lieu d’être là, à assister à cette horreur…Et bien parce qu’il s’agissait de Jane, et que Rain, en toute son âme et conscience, avait jugé on de ne pas laisser son ancienne amie aux prises, seule, avec ce monstre. Mais que pouvait bien faire une ambassadrice face à une telle situation ? Mis à part faire appel à des personnes plus compétentes en la matière pour s’occuper de la chose en détresse, elle ne saurait quoi faire. Elle ne se sentait tout simplement pas capable de faire quoique ce soit d’autre. Maudite soit cette Wilson et ses soudaines envies de toujours venir en aide à autrui…

Les grognements sourds, mélangés à des cris de douleur, les craquements d’os, probablement, tout ce que Rain préférait ne pas imaginer, tout cela lui provoquait d’innombrables frissons lui parcourant l’échine, sans aucun doute la peur et le désarroi s’étaient emparés de l’ambassadrice. Son premier réflexe, donc, avait été de demander à Jane de contacter la police magique, eux prendraient la bête en charge, mais l’ancienne Serdaigle refusa catégoriquement. Pire que cela, son regard bouillonnait de rage, comme si ces mots qu’avait prononcés l’américaine était une hérésie. Elle pouvait comprendre que son amie ne porte pas ce Département dans son cœur, elle partageait allègrement ce sentiment, pourtant dans certaines situations, comme celle-ci, il fallait savoir mettre ses rancunes de côté. Rain était plutôt mal placée pour penser cela, mais là, leurs vies étaient tout de même lourdement menacées.
Devant le refus de Jane, l’ambassadrice se pinça légèrement la lèvre inférieure avec ses dents. Maintenant, elle voulait transplaner dans un endroit plus sûr avec le monstre…Pardon ? Elle avait l’air sérieuse. Mais qu’est-ce qui ne tournait donc pas rond chez elle ? Rain haussa le ton.

« Mais…Mais tu es complètement folle ! Il va te tuer, pauvre idiote ! »

Un nouveau grognement s’échappa de la créature mi-homme mi-loup, l’ambassadrice recula de quelques pas en laissant échapper un cri effrayé. Jane avait beau être son ancienne amie, cette fois elle ne pouvait pas suivre aveuglément ses agissements. Qu’elle le veuille ou non, l’américaine contacterait le Ministère, c’était une question de vie ou de mort, surtout en vue des récentes attaques, ce n’était d’ailleurs qu’une question de temps avant que Rain ne soit obligée d’intervenir pour une affaire d’attaque sur un citoyen américain.
L’ambassadrice tentait de garder contenance, mais elle ne pouvait s’empêcher de ne pas lâcher la bête du regard, observant et détaillant ses moindres faits et gestes au cas où il n’attaque Jane. Rain se demandait vraiment comment sa collègue du Ministère pouvait encore vouloir absolument venir en aide à cet homme-garou. À l’inverse, la brunette gardait les idées claires malgré la situation, elle ne pouvait pas fermer les yeux ainsi. Elle se mordit la lèvre une nouvelle fois, elle resta campée sur ses positions, tranchante et sans remords.

« Désolée, je ne peux pas fermer les yeux. Je dois prévenir le Ministère. »

L’ambassadrice savait très bien qu’elle ne pouvait empêcher Wilson d’aider la créature si elle l’avait décidé. Elle transplanerait avec lui, c’était certain. Le temps que la police magique arrive sur les lieux, la jeune femme serait déjà loin. En danger, probablement. Même si Jane semblait vraiment savoir ce qu’elle faisait. Son ton s’était radouci, elle implorait l’américaine de ne pas prévenir la police. Maintenant, Rain se trouvait face à un dilemme. Trahir son amie, ou lui faire confiance. Son regard quitta la bête, pour se focaliser sur Wilson. L’ambassadrice avait très envie de prévenir la police et de vite rentrer chez elle, retrouver son canapé et son chat. Mais une nouvelle fois, sa conscience lui joua un drôle de tour.

« Et merde… »

Rares étaient les jurons qui sortaient de la bouche si aristocratique de Godwin. Elle espérait ne pas regretter son choix, elle agrippa le bras de son amie dans un premier temps, mais les quasi hurlements désormais de la créature, lui fit serrer son étreinte. Blottie et cachée dans le dos de Jane, Rain pestait contre le monde entier. Mais surtout, contre Wilson.

« Ton altruisme te perdra, Wilson !! »

Et ce n’était pas la première fois que l’ambassadrice le pensait. Maintenant qu’elle avait accepté le transplanage, Jane avait deux vies entre ses mains, celle du lycanthrope en devenir et celle de Rain, qui en cas d’attaque n’aurait probablement pas les réflexes suffisants pour se défendre rapidement.

« Je te préviens, si ce monstre m’attaque… » Le monstre en question poussa un nouveau grognement. « Ahh ! »

« Mais…Mais tu es complètement folle ! Il va te tuer, pauvre idiote ! »

Elle ne relève pas, à quoi bon ? Ces mots-là Jane ne les entends pas vraiment et surtout elle s’en moque. Rain pourrait bien la traiter de tous les noms que ça ne lui ferait qu’esquisser un sourire. Elle n’y voit qu’un mécanisme de défense de la brune, même chose pour ce qui est de ce besoin d’écraser les autres en permanence. Peut-elle la blâmer d’être transie de peur alors que sur le pavé un homme s’apprête à devenir l’un des prédateurs les plus dangereux sur terre ? Wilson ne se fait pas d’illusion et analyse parfaitement la situation, elle sait que si la transformation va à son terme la créature n’aura pas une once de reconnaissance pour elle. Non, il ne verra en elle qu’une proie, les sens affolés de frénésie meurtrière pour se délecter de sa chair si attirante. L’humain ne pourra rien y faire, sa conscience éteinte au profit de l’instinct de la bête. Elle n’a pas de Tue-Loup sur elle et ça ne changerait rien de toute façon, au regard des expressions traversant le regard et le visage de cet inconnu il est évident qu’il s’agit de sa première transformation.

« Désolée, je ne peux pas fermer les yeux. Je dois prévenir le Ministère. »
« La ferme Rain. »

Le ton est tranchant cette fois, son regard se fait plus sombre. Elles sont si différentes, comment deux êtres si opposés peuvent-ils malgré tout garder cette affection que l’une assume plus que l’autre ? C’est bien là pourtant, en souvenir des années passées ensemble entre les murs de Poudlard. Elles sont sorties de l’enfance les unes avec les autres, Moyra et Aurea illustraient elles aussi de belles différences et malgré tout l’attachement était là. Elles ont connu les prémices de l’adolescence, ses déboires, l’entrée dans le monde des adultes … Certains oublient, Jane fait partie de ceux qui conservent les traces du passé dans tout ce qu’il y a de plus beau. Rares sont les fois où elle croise les deux autres aujourd’hui mais elles garderont toujours cette place particulière dans son cœur. Et dans ses souvenirs. Et par Morgane si elle savait ce qui relie la marraine de sa fille à l’Ambassadrice … Si petit ce monde. Surtout, elle n’en reviendrait sans doute pas de savoir Godwin engagée dans une telle Cause.

« Et merde… »

Focalisée sur l’inconnu elle n’entend pas vraiment ce souffle teinté de quelques mots ainsi la surprise est brutale lorsque Rain lui attrape le bras. Sa réaction aurait pu être violente si l’homme au sol n’avait pas exprimé de nouveau hurlements poussant Godwin à se planquer derrière elle.

« Ton altruisme te perdra, Wilson !! »

Probablement.

Oui il est fort possible que cette volonté de défendre l’opprimé lui joue des tours mais serait-elle capable d’aller contre ce qu’elle est au plus profond d’elle-même ? Pour Amalia peut être mais elle n’en est même pas certaine. Par Morgane qu’elle aime son enfant mais malgré les menaces à peine dissimulée d’Oliveira ne continue-t-elle pas de défier le danger ?

« Je te préviens, si ce monstre m’attaque… » Un signe de résignation, interrompu par un mouvement trop fils de l’homme en souffrance « Ahh ! » Jane ne lui laisse pas le temps de reculer, sa main droite enroule l’un des poignets de Rain tandis que l’autre se pose sur la cheville du transformé – au plus loin de ses mâchoires malgré l’angle atroce de sa jambe.  

*Ploc*

Ce son familier les fait disparaitre de la ruelle en un battement de cœur, loin de se douter qu’une quatrième personne tapie dans l’ombre a aperçu la scène. Un sbire d’Oliveira qui n’aura reconnu que Jane, Rain lui tournant le dos tout au long de sa courte observation.

L’atterrissage n’est pas des plus harmonieux, le corps en transition s’écroule sur le sol alors que Jane pose une main au sol pour retenir sa propre chute. Elle a lâché les deux autres individus juste à temps pour poser ses deux pieds correctement sur le sol mais sa proximité l’oblige à s’équilibrer ainsi.
Une vieille maison en bois au beau milieu de nulle part, le plancher y craque et l’atmosphère n’est pas très accueillante mais existe-t-il meilleur endroit pour la première transformation d’un Lycanthrope ? C’est ici que Leroy a fait ses armes, ici que Jane a passé des nuits entières à le regarder souffrir le martyr. Un endroit secret et protégé d’innombrables sortilèges qu’elle s’empresse de renforcer sans attendre. De nombreux jets de lumière sortent de sa baguette sans qu’elle ne prononce un mot, la colonne vertébrale de l’inconnu craque alors qu’il arrondit le dos comme un chat s’étirant. Le hurlement qui meurt dans sa gorge n’a plus rien d’humain et c’est avec précaution mais fermeté que l’Anglaise vient se positionner entre lui et l’Ambassadrice.

« Recule. »

Quelques mètres jusqu’à un semblant de petit salon qui se trouve dans la même pièce. Deux fauteuils, une table basse, le ménage n’a pas été fait depuis un moment aussi la poussière repose partout sur le mobilier comme le sol. La lueur argentée de la Lune passe par la fenêtre et éclaire le corps difforme qui n’a lui non plus, plus grand-chose d’humain. La bête prendra encore sans doute une bonne heure avant de revêtir entièrement sa nouvelle forme, Jane sait qu’elle ne peut faire plus pour lui pour le moment aussi son attention se repose sur Rain.

« Il ne pourra pas franchir cette barrière magique, tu peux être tranquille. » Celle qu’elle vient d’instaurer entre lui et elles « Vous êtes en sécurité ici. » Cette fois c’est à l’inconnu qu’elle s’adresse, consciente qu’il ne l’entend probablement plus. L’adrénaline booste son organisme, son cœur bat à tout rompre et son souffle se calme après s’être écourté. Lorsqu’elle plonge son regard dans celui de l’Ambassadrice, il est déterminé.

« Pourquoi prévenir le Ministère, Rain ? Que crois-tu qu’ils vont lui faire ? »

Le ton est tranchant, la douceur habituelle de ses traits n’est pas présente.

Malgré sa mise en garde de faire appel au Ministère, Rain se doutait bien que son ancienne amie de Poudlard n’en tiendrait pas rigueur et ferait ce qu’il lui semblait le plus juste. L’ambassadrice ne cautionnait pas ces agissements dans ce genre de cas. Mais il subsistait au fond d’elle une part qui la soutenait, car elle aussi avait fait le serment de s’opposer à l’oppression toujours plus grandissante du Ministère. Malgré ses nombreuses divergences avec Myrdinn, sans compter les fois où elle avait voulu les quitter, Rain continuait tant bien que mal. Si les lycanthropes étaient sur la liste des nouveaux opprimés, du fait eux aussi de leur différence, il faudrait bien les défendre. Toujours était-il que l’ambassadrice ne se sentait pas de prendre les rênes d’une telle manœuvre, elle n’était ni assez qualifiée, ni assez renseignée sur le sujet, mis à part le basique appris à l’école. L’étude des créatures en général ne l’avait de toute façon jamais intéressée.

La peur qui la tenait aux tripes, poussait la brune à appeler à l’aide des personnes avec qui elle ne s’entendait pas, le problème étant que ni elle ni Jane n’avaient une idée de ce qu’il se passerait ensuite, comment réagirait la créature. Peut-être était-ce égoïste de la part de Rain, ou simplement son basique instinct de survie, mais elle s’en fichait. Elle n’avait pas envie de finir dévorée, et avait donc hésité à faire marche arrière, mais cela lui avait été impossible, malgré le fait que son ancienne amie n’avait visiblement pas envie de la voir ici, ni de l’entendre. Certes l’ambassadrice aurait préféré ne jamais avoir assisté à cette scène, par Merlin ce qu’elle aurait voulu que cette soirée se passe comme d’habitude…Le sort en avait décidé autrement. Car malgré le fait de s’être fait envoyer promener, Rain s’était agrippée à Wilson la tête brûlée, et tous trois avaient aussitôt transplané.

Le corps de la créature s’écrasa mollement au sol, dans un bruit sourd. Jane, quant à elle, se rattrapa sans difficulté. Ce ne fut en revanche pas le cas de l’ambassadrice, qui n’appréciait toujours pas le transplanage malgré toutes ces années à le pratiquer. Elle se rattrapa certes, mais chancela légèrement en râlant. En plus de ne pas y être spécialement préparée étant donné que son attention était focalisée sur le fait de rester en vie, il était tard, elle était mentalement épuisée de sa journée de travail et avait mal supporté ce moyen de transport sorcier, on-ne-peut plus pratique, mais o combien désagréable.

La brunette n’eut pas besoin d’attendre la consigne de Jane pour reculer, puisqu’elle avait déjà commencé. Elle sursauta lorsque la créature au sol lâcha un grognement sourd, son propre corps frissonnait de peur, elle eut vite fait d’oublier le désagrément causé par le transplanage. Rain s’était donc reculée, laissant son ancienne amie gérer la situation en espérant que la bête ne lui bondisse pas dessus. Pendant ce petit temps, l’ambassadrice jeta un coup d’œil à ce qui l’entourait. Une grimace de dégoût apparût sur son visage, dans quel espèce de taudis Jane les avait emmenés ? Cette vieille bicoque répugnante avait tout d’un logement de fortune emprunté pour les missions de la Garde. Les vieux meubles plein de poussière ne donnaient pas vraiment envie de s’y réfugier toute la nuit. D’ailleurs, que comptait faire Jane en réalité ? Mis à part isoler la créature, elle n’avait pas l’air de faire grand chose d’autre. Tout ça, pour…ça ? Rain soupira et leva les yeux au ciel en secouant légèrement la tête. Elle ne bougeait pas pour autant.

Jane s’était chargée de sécuriser les lieux, de créer une barrière magique pour les protéger. Maintenant que la bête ne bougeait plus, elle assura qu’elles étaient en sécurité et se rapprocha de l’ambassadrice, avec visiblement un petit compte à régler. Sur un ton empli de reproches et aussi déterminé que tranchant, Wilson demanda pourquoi est-ce que Rain avait voulu prévenir le Ministère. Mais quelle question…Godwin ne s’en offusquait pas, au contraire même, le ton de son ancienne amie l’amusa. Il était pourtant évident qu’elle voulait les protéger et ne pas laisser Jane agir seule pour finir en casse-croûte nocturne pour loup-garou. Était-ce si difficile à comprendre ? La brunette laissa échapper un rire. Et, de son habituel air hautain et sarcastique, elle répondit :

« C’est d’une évidence… »

Mais elle n’estima pas utile de développer d’avantage, à quoi bon, puisque la réponse lui semblait effectivement tellement évidente.

« Et toi, alors ? Que comptes-tu faire maintenant ? J’espère au moins que tu as un plan pour cette bête, et que tu n’as pas agit sans réfléchir. »

Au tour de l’ambassadrice de lui faire des reproches en sortant son grand jeu condescendant. Elle n’aimait pas cette situation. Elle n’aimait pas se trouver dans la même pièce qu’un loup-garou, et elle n’aimait pas que Jane lui donne des ordres ou lui fasses des reproches. Surtout si c’était pour la piéger dans un taudis pareil, une petite goutte d’eau qui avait d’avantage agacé Madame l’ambassadrice.

« Je ne compte pas rester des heures dans ce taudis poussiéreux, alors tu vas vraiment devoir trouver de bonnes raisons de ne pas aller prévenir le Ministère, même si cela ne m’enchante guère. »

Il leur restait encore ce point commun, fort heureusement, la haine de ceux qui dirigeaient ce pays sorcier et qui prétendaient faire passer la sécurité de leurs concitoyens d’abord, qu’elle plaisanterie. Malheureusement, il fallait reconnaître qu’en cas d’urgence, ils pouvaient se révéler bien utiles…Maintenant, Rain espérait que Jane allait retrouver son calme et qu’elle avait un plan pour elle et la créature.

Le rire que Rain laisse échapper vient glacer l’échine de Wilson et son poing se serre, par Morgane qu’elle peut l’agacer lorsqu’elle se comporte ainsi.

« C’est d’une évidence… »

Hautaine, sarcastique, Jane garde son regard plongé dans le sien sans ciller mais elle a envie de lui coller une giffle pour lui remettre les idées en place. Dans sa main droite elle peut sentir contre sa paume les crépitement de Magie qui circule entre sa peau et sa baguette. Une évidence ? Putain ce qu’elle a envie de la secouer, lui cracher au visage qu’elle est complètement idiote. Elle le sait pourtant qu’elle ne l’ait pas mais il y a en l’Occlumens ce réflexe de voir le meilleur en l’autre. Même en Godwin. Non, elle n’arrive pas à admettre que son amie puisse être si indifférente à la douleur et au cauchemar de ce pauvre homme qui se tord là sur le sol.

« Et toi, alors ? Que comptes-tu faire maintenant ? J’espère au moins que tu as un plan pour cette bête, et que tu n’as pas agit sans réfléchir. »

Cette bête.

Rien qu’un mot et c’est comme si un violent courant électrique la transperçait de part en part. Là où elle voit l’homme Rain ne voit qu’une bête, un être ne méritant pas son attention. Est ce qu’elle lui cracherait dessus si elle avait le cran de s’approcher ? Non, elle ne se rabaisserait pas à un tel acte bien sûr mais simplement parce que ça n’est pas élégant. C’est l’un de ces instants où Jane ressent cette envie presque violente de lâcher la vérité sur son frère mais elle se contient. Ici Rain vient de lui prouver qu’elle n’est pas digne de cet aveu. Jamais elle ne placera le sort de Leroy entre les mains de l’Ambassadrice qui ne verra en lui qu’une … bête.

« Je ne compte pas rester des heures dans ce taudis poussiéreux, alors tu vas vraiment devoir trouver de bonnes raisons de ne pas aller prévenir le Ministère, même si cela ne m’enchante guère. »

Est ce la peur qui la fait réagir ainsi ? Jane a envie d’y croire, la colère un peu tassée elle l’espère presque. Pas naïve, simplement optimiste. Elle n’a pas envie de s’être trompée toutes ces fois où elle a pris la défense de la brune alors qu’elle se faisait descendre par les uns ou les autres. Pas un job facile à vrai dire tant l’Américaine semble avoir fait de sa condescendance envers les autres un but. Un objectif de vie.  

« Je n’aurai aucun scrupule à t’effacer la mémoire Rain. »

Les mots sont prononcés sans trembler, sans la moindre hésitation face à ce qui est clairement une menace. Non, elle n’hésitera pas à s’imposer dans la mémoire de la sorcière si cela peut épargner cet inconnu dont les os continuent de craquer. Les sons qui s’échappent de celle bulle de magie ferait tourner de l’œil n’importe qui.

« Comment peux tu à ce point être si détachée du sort de tes semblables ?! »

Pas son genre de perdre son calme et ça n’est pas entièrement le cas mais le ton monte, les accusations ne sont pas enjolivés par des sourires. Pas de douceur dans le son de sa voix, elle laisse éclater ses ressentis et sa déception sans chercher à les camoufler.

« Regarde le ! » Sans quitter Rain des yeux elle braque l’un de ses bras vers l’arrière « Crois-tu réellement qu’il comprenne ce qui lui arrive ? » N’a-t-elle pas vu la détresse dans son regard alors qu’il se contorsionnait sur le pavé quelques instants plus tôt ? Évoluant dans le monde sorcier il a peut être désormais compris ce qui était en train de se passer mais l’instinct de survie et le cerveau sont capables de tellement de choses pour nous préserver.

« Jusqu’à preuve du contraire c’est un innocent et en le livrant au Ministère tu le condamnes à mort. Ou pire. »

A une vie d’internement, d’aliénation, de cette culpabilité qu’ils ne vont sans doute pas hésiter à lui mettre sur le dos pour calmer les foules et s’autocongratuler d’avoir enfin capturé l’immonde créature qui fait trembler Londres depuis des mois. Si c’était lui aurait-il eu la marque de la surprise ainsi sur les traits lorsque son corps a commencé à changer ? Une question de bon sens pour Jane, et si elle se trompe qu’il en soit ainsi mais ça n’est pas au Ministère qu’elle le livrera quoi qu’il arrive.

« Ce que je vais faire c’est être présente pour lui, lui parler, l’encourager et surtout être là lorsqu’il reprendra sa forme humaine pour ne pas qu’il soit seul à affronter ce traumatisme. » Parce que c’est de ça dont il s’agit, un traumatisme, un tel changement que certains ne s’en remettent jamais si tant est qu’ils survivent « Si tu n’as pas envie d’être là pas de problème, je le comprends parfaitement et je m’en sortirai très bien toute seule mais tu ne quitteras pas cet endroit avec l’intégralité de tes souvenirs. » Ce n’est pas un combat d’égo, pas du côté de Jane en tout cas, mais son regard sombre plongé loin dans celui de Rain elle ne tremble pas.

Lui effacer la mémoire, à ce point-là. Voilà où elles en étaient à présent, le fossé qui séparait les deux amies se creusait à chaque seconde, entre une Ambassadrice qui pensait avant tout à leur sécurité et une réelle protectrice du genre humain qui s’efforçait de toujours voir le meilleur en autrui. Probablement que Jane avait d’avantage sa place au sein de Myrdinn en cet instant, que Rain. Cette dernière avait bien plus peur de finir en dîner pour loup-garou que d’avoir la mémoire effacée. Mais le traumatisme infligé par la Garde quelques mois auparavant avait déjà été compliqué à gérer pour son amour propre, il était certain qu’elle garderait une rancune inébranlable malgré l’allègement de peine dont elle avait bénéficié. Ce n’était toujours pas assez, d’où son manque de volonté momentané pour s’investir. Ainsi, il était hors de question de laisser Wilson recommencer, par Merlin ce qu’elle regrettait de l’avoir suivie à présent. Rain ne savait plus quoi penser, voilà que maintenant, celle qu’elle pensait être son amie, se faisait plus de soucis pour une personne qu’elle ne connaissait pas.

Certes, elles ne se parlaient pas très souvent non plus au Ministère, toutes deux avaient des obligations et des responsabilités autant aux antipodes que leurs personnalités, l’ambassadrice savait juste que Jane faisait partie de l’unité de capture des loups-garous, entre autre. Alors pourquoi autant s’inquiéter du sort d’un mordu, pourquoi ne pas directement l’emmener au Ministère ? Les lycanthropes n’étaient pour l’heure pas la priorité du MACUSA, donc pas celle de Godwin non plus. Que s’était-il donc passé pour que sa collègue prenne ce rôle tellement à cœur au point de se mettre en danger ? Elle n’était pourtant pas une idiote de tête brûlée. Quoique, parfois, c’était à se demander. En tout cas, Rain n’était pas au courant de tout, c’était certain. Et ce n’était probablement pas le moment pour questionner plus amplement son amie sur le sujet, la tension était encore trop présente, et l’ambassadrice bien trop piquée au vif et stressée pour poser des questions. Peut-être un autre jour, si autre jour il y avait, car pour l’heure la brune n’était pas sûre de pouvoir pardonner la bassesse de cet affront.

Loin de se laisser démonter par les paroles de Wilson, l’américaine piquée au vif fit un pas vers elle, les sourcils froncés.

« Comment oses-tu me menacer ainsi ?! »

Un nouveau grognement émanant du loup-garou en devenir la fit finalement reculer. Elle n’avait pas l’intention de rentrer dans le jeu de la protectrice des créatures. Son regard se détourna de cette dernière, pour venir se poser sur l’homme-loup. Un court silence s’installa dans la pièce, tandis que Rain repensait à tout ce que venait de lui dire Wilson. Elle avait du mal à comprendre que l’ancienne Serpentard soit si détachée, mais c’était pourtant évident. Sans ça, elle n’aurait jamais pu intégrer les hautes sphères de la bureaucratie, et, de surcroît, rester constante et réfléchie dans son rôle pour la Garde. Cela ne signifiait pas qu’elle ne ressentait rien, seulement elle ne le montrait pas, et aujourd’hui rares étaient les situations qui lui faisaient perdre contenance, malgré qu’elle ressente parfois un soupçon d’empathie.
À l’égard de ce loup-garou, il fallait en effet avouer qu’il avait vraiment l’air mal en point, il souffrait le martyre indubitablement, pour autant Rain continuait de ne penser qu’à son propre salut. Peut-être aussi que Jane avait raison, qu’il ne valait mieux pas le livrer au Ministère, qui sait ce qu’ils étaient capables de faire. Elle avait l’intention d’être présente, voilà tout. Elle savait y faire, l’ambassadrice se souvenait à quel point l’ancienne Serdaigle aimait les créatures magiques, même si ce n’était vraiment pas un sentiment partagé. Rain n’avait rien contre les créatures, mais loin d’elle. Maintenant Wilson pouvait bien penser d’elle qu’elle n’était qu’une garce sans empathie, Godwin s’en fichait.

Elle soupira, sans être entièrement calmée pour autant.

« C’est bon, je ne parlerais pas. »

Elle détourna le regard du futur Lycanthrope et s’éloigna, comme Jane le lui avait indiquée quelques instants plus tôt. Elle s’appuya contre le mur opposé à l’homme-loup et croisa les bras sur sa poitrine, même si son ancienne amie l’avait menacée de lui effacer la mémoire et que Rain s’était résignée à rester dans son coin sans rien dire au Ministère, elle n’en restait pas moins piquée au vif et elle n’allait pas laisser son interlocutrice s’en tirer comme ça. Godwin râla, grogna et soupira une nouvelle fois, son air hautain et dédaigneux avait repris le dessus après s’être dissipé très furtivement.

« Et dire que je pensais m’en vouloir si je ne venais pas avec toi, et m’assurer qu’il ne t’arrive rien… » Elle marqua une pause, elle pensait réellement ses paroles. Elle haussa légèrement le ton pour bien faire comprendre à Jane son mécontentement. « Je le regrette amèrement. »

Rain ne s’arrêta pas là, elle recommencera à râler et soupirer, tout en levant les yeux au ciel, piquante et sarcastique, elle souffla :

« Toi qui exècres tant le Ministère et ses méthodes, finalement tu ne vaux guère mieux. »

Cette fois, elle avait un peu exagéré, par pure mauvaise foi, car elle était bien placée pour savoir que la Garde utilisait les mêmes méthodes. Cependant, Jane n’en savait rien, dans un camp comme dans l’autre, c’était une méthode autoritaire, ni plus ni moins. Jusqu’à ce qu’elle ait été victime de cette méthode, Rain n’y prêtait guère attention.
Pour finir, elle continua de manifester son mécontentement et de râler à l’égard du lieu, au cas où Jane n’ait pas complètement intégré que son local était pourri.

« Et puis tu aurais vraiment pu choisir un endroit plus convenable pour nous transporter. C’est tellement humide et insalubre que même « lui » n’en voudrait pas. »

« Lui », la brune parlait évidemment du Lycanthrope qui gisait sur le sol crasseux du local, l’ayant désigné d’un signe de tête. Elle ne l’avait pas qualifié de « bête » cette fois, voilà qui devrait plaire à Wilson…

« Comment oses-tu me menacer ainsi ?! »

Les mots, le ton et l’attitude sont menaçant mais Jane ne cille pas, ne recule pas, ne baisse pas le regard. Ça n’est certainement pas la première fois que les deux amies ont un désaccord mais la plus part du temps Wilson le prend avec un recul qu’elle ne semble pas avoir ce soir. Pas son genre pourtant mais la pression accumulée ces dernières semaines semblent creuser plus qu’elle ne le pense dans ses ressources. Si Rain recule lorsque l’homme derrière elle émet un énième grondement  l’ancienne Serdaigle ne se retourne même pas. Elle a confiance en sa Magie, en ce sortilège qu’elle a lancé pour les protéger toutes les deux d’un homme qui d’ici quelques minutes, quelques heures sans doute, deviendra un animal enragé et affamé de chair humaine.
Le silence qui s’installe n’est pas lourd, il a même quelque chose d’apaisant alors que la tension semble redescendre un peu entre elles deux. Jane se demande ce qui est en train de passer dans l’esprit de l’Ambassadrice, si elle devine toujours la peur elle pense déceler autre chose mais ne s’avance pas à l’interpréter.

« C’est bon, je ne parlerais pas. »

L’agacement persiste du côté de Rain, les traits du visage de Jane se détendent en revanche. Le regard de l’Ambassadrice quitte l’inconnu puis elle s’éloigne, Wilson la suit du regard et glisse sa baguette dans la poche intérieure de sa veste. La pression reste présente mais l’adrénaline redescend et parce qu’elle n’aime pas les conflits, surtout pas avec les personnes a qui elle tient, la tempête en elle s’éloigne.
Lorsque son regard retrouve l’ancienne Serpentard celle ci est appuyée contre le mur le plus loin possible du lycan. Elle râle, grogne, soupir … des tics que Wilson lui a déjà vu tellement de fois. Certains s’en agacent, le prennent mal, ça n’a que très rarement été le cas de l’Occlumens. Elle a appris à l’apprivoiser ce sale caractère. A l’apprécier presque. Et cet air supérieur …

« Et dire que je pensais m’en vouloir si je ne venais pas avec toi, et m’assurer qu’il ne t’arrive rien… » Réellement ? On pourrait en douter, ça n’est pas le cas de Jane « Je le regrette amèrement. » Des mots qui blessent un peu malgré tout et la colère de l’Ambassadrice reste palpable, bien que plus maîtrisée désormais. Piquée à vif d’être malmenée sans doute, ça n’est pas dans ses habitudes.

« Toi qui exècres tant le Ministère et ses méthodes, finalement tu ne vaux guère mieux. »

Le rire que laisse échapper Wilson est bref, à la fois amusé et cinglant. La comparer au Ministère ? Pas une seconde elle ne juge que c’est la réalité, la mauvaise foi de Rain vient frapper de la plus sournoise des manières. A ses yeux Jane s’est contentée de prendre les choses en main pour sauver la vie d’un homme, parce que Rain s’y est opposé elle a été bousculée dans le processus. Si l’Anglaise baisse le regard une seconde c’est simplement le temps d’exprimer son désaccord en secouant doucement la tête de droite à gauche puis de gauche à droite.

« Et puis tu aurais vraiment pu choisir un endroit plus convenable pour nous transporter. C’est tellement humide et insalubre que même « lui » n’en voudrait pas. »

A cours d’argument Madame l’Ambassadrice ? Au moins elle considère l’être présent avec elle comme existant.

« Je pense que l’état des lieux est actuellement le cadet de ses soucis. »

Le ton que Jane emploi est presque amusé, à ce stade elle sait qu’elle ne peut faire plus alors la pression redescend petit à petit et son corps lui même se détend. Ses muscles se relâchent, un soupir s’évade entre ses lèvres entrouverte.

« Je m’excuse de t’avoir bousculé et te remercie d’avoir voulu veiller sur moi. »

Elle a le regard et la voix teintés de bienveillance et de sincérité, tout aussi bien une arme dans ce combat d’égo. Lorsqu’on vous provoque ce genre de réaction à tendance à bloquer « l’agresseur » et l’ancienne Serdaigle en a parfaitement conscience mais n’a pour autant pas l’intention d’en jouer. Elle les pense ces mots, réellement. La culpabilité pèse très peu lourd face à ce choix qu’elle a fait et qu’elle assume mais ça ne change rien aux faits.

« Rain, je t’ai toujours soutenue et défendue même quand tu étais la pire des connasses, ça ne va pas changer maintenant. Qu’importe si tu me claques ta mauvaise foi au visage. »

Elle a le sourire amical, plus franchement amusé.

« Je ne risque rien, il ne pourra pas franchir ce sortilège. Rentre si tu veux mais je te le demande comme une amie te demande une faveur : Ne dis rien, s’il te plait. » Son regard se fait plus franc alors qu’elle plonge au plus profond de celui de l’Américaine « Il ne mérite pas de tomber entre les mains d’hommes et de femmes qui feront de sa vie un Enfer. Parce que c’est ce qu’il se passera, crois moi. » Ils ont beau faire des courbettes et tourner ces histoires en leur faveur il faudrait être idiot pour les penser bien intentionnés.

« J’en prends l’entière responsabilité mais si ça peut te rassurer cette nuit il ne sortira pas d’ici. »

Personne ne risque rien là dehors et la suite on verra même si une idée germe déjà dans son esprit.

Enfin, le ton de Wilson s’adoucît, et les ronchonnements de Godwin également. Cette dernière ne parlait pas vraiment du confort du lycanthrope en devenir devant leurs yeux, mais plutôt de son propre confort à elle. Elle ne s’attendait pas à recevoir des excuses si tôt de la part de Jane, bien que l’ambassadrice qu’elle n’était pas du genre à se fâcher, pas avec ses amis en tout cas. Ou du moins, jamais bien longtemps. De son côté, Rain gardait la menace d’avoir recours à l’Oubliette en travers de la gorge, malgré les excuses. Mauvais sentiment qui finirait bien par se dissiper avec le temps. Peut-être en était-il de même pour l’ancienne Serdaigle, compte tenu des réflexions blessantes de son interlocutrice. L’américaine n’avait nulle intention de s’excuser, car sa fierté avait été bien mise à mal. Néanmoins, elle gardait envers son ancienne amie une bienveillance et une tolérance inédite, qu’elle ne témoignait qu’à de rares personnes en ce monde.

Ainsi Jane lui rappela qu’elle l’avait toujours soutenue et défendue, même quand Rain exagérait fortement, elle avait même esquissé un sourire amusé, au terme pire des connasses. Mais elle ne pouvait nier que Jane avait raison, et qu’avec Moyra, elles étaient vraiment des amies sur qui l’ambassadrice pourrait compter jusqu’au bout, tant qu’elle n’allait pas trop loin, bien sûr.

Elle se redressa finalement, prêtant plus d’attention aux paroles de Jane qu’auparavant, elle-même semblait s’être calmée maintenant qu’elle avait mis la créature sous contrôle, ce qui avait en retour encouragé Godwin à s’adoucir également. Elle se rapprocha alors, lentement, le regard alternant sur le lycanthrope endormi et sur son amie. Elle disait ne rien avoir à craindre, sûre d’elle. Une assurance que Rain ne pouvait guère lui reprocher. Elle avait juste du mal à comprendre les créatures magiques, ne savait pas du tout comment les apprivoiser, les contrôler, tout simplement parce qu’elle ne s’y était jamais intéressée. Et ce n’était certainement pas après ce soir non plus qu’elle s’y intéresserait. En effet, elle préférait laisser Jane gérer ça toute seule. Qu’est-ce que l’ambassadrice aurait pu faire, de toute façon ? À part peut-être donner l’alerte si les choses tournaient mal. Sinon, en cet instant, mis à part râler, elle ne servait pas à grand chose.

Autre point, Jane savait probablement mieux que que Rain ce qu’il se passerait si la créature se retrouvait entre les mains de ce Ministère corrompu, leurs méthodes n’étaient plus un secret pour personne, malheureusement. Maintenant arrivée à sa hauteur, la brune acquiesça et soupira légèrement, résignée.

« Très bien. Je te fais confiance.. »

Une pointe d’amertume dans le ton de sa voix tout de même, cela ne lui plaisait pas de placer son entière confiance en Jane pour prendre en charge le lycanthrope en devenir, mais elle devait savoir ce qu’elle faisait. Jusqu’à présent, elle s’en était toujours bien sortie, il n’y avait pas de raison pour que cela change ce soir. De son côté, Rain fermerait les yeux et ne parlerait pas de ce qu’elle avait vu. Aussi, elle n’avait plus grand chose à faire ici.

« Alors je vais rentrer chez moi, c’est inutile que je reste ici. »

Par prudence, l’ambassadrice contourne la barrière magique créée par Jane pour se diriger vers la porte de sortie. D’ailleurs, elle ne savait même pas dans quel quartier elle les avait emmenées, ce n’était certainement pas Knightsbridge en tout cas. Qu’importe, Godwin transplanerait aussitôt être sortie d’ici.
Cependant, il y avait une autre interrogation qu’elle avait à l’esprit, qui suscitait sa curiosité. Elle se tourna alors une dernière fois vers son amie.

« Mais dis-moi une chose, pourquoi vouloir à tout prix aider les lycanthropes ? »

Au point de se mettre en danger ainsi, même si elle aurait probablement une réponse prévisible, connaissant Jane, et similaire à celle que Rain aurait donné si on lui demandait pourquoi avoir rejoint la Garde.

La tension s’envole, se dissous dans les airs, disparait par les interstices entre deux planches de bois. Les deux femmes ne se jaugent plus mais s’observent, s’écoutent plutôt que de s’affronter. Si l’égo de Rain semble s’apaiser celui de Jane ne s’est jamais réellement éveillé, elle effleure la situation sans en faire quelque chose de personnel. Bien sûr qu’elle a conscience du poids de la Lycantrophie de Leroy dans la balance, ce serait idiot de le nier et ça n’est pas son genre, mais qu’importe ce que son amie pourrait bien lui cracher au visage la concernant elle ne le prendrait pas pour elle.
Son cœur bat moins vite, ses épaules s’affaissent, la nuit promet d’être longue mais elle détesterait quitter l’Ambassadrice sur cette mélodie pleine d’aspérité et de dureté. La reddition se présente par un soupir de la part de la brune, Wilson ressent une légère onde de soulagement la parcourir.

« Très bien. Je te fais confiance.. »

Des mots qui touchent bien plus qu’elle ne le montre malgré la pointe d’amertume qu’elle détecte dans le timbre de sa voix. Consciente du chemin que Godwin fait vers elle en cet instant Jane lui offre un sourire. Toutes deux membres du Ministère elle sait son amie bien plus à cheval sur le respect des protocoles, elle ne lui en veut pas, partant du principe que chacun est comme il est et dispose de ses propres valeurs elle n’a aucune envie de la juger. Ça, c’est parce qu’elle la sait bien plus tolérante que ces ordures malgré le mur de condescendance qu’elle érige entre elle et le « petit peuple » comme elle aime à le qualifier pour se moquer gentiment d’elle. Petit peuple dont elle fait partie.
Rain a toujours eu ce dédain des autres en elle, accentué par sa réussite. Sur le papier rien ne pourrait laisser penser qu’elles sont faites pour s’entendre et pourtant l’amitié développée dans les couloirs de Poudlard bien des années plus tôt est toujours là.

Silencieuse la plupart du temps mais solide.

« Alors je vais rentrer chez moi, c’est inutile que je reste ici. »

Une décision qui ne souffre d’aucune hésitation et que Wilson accueille par un hochement de tête avant de se décaler sur le côté pour laisser passer l’Ambassadrice. Tandis que Rain contourne la barrière magique installée par Jane et qui les protège toute les deux de l’homme désormais à demi-loup, elle pose son regard de nouveau sur ce dernier. Ses vêtements déchirés trainent sur le sol de façon éparse, les angles de ses os n’ont plus grand-chose de normaux. Un pelage gris commence à recouvrir son épiderme là où on peut l’apercevoir et si elle ne l’entend pas car la Magie bloque les sons elle distingue parfaitement sa bouche s’ouvrir à intervalles régulières pour expulser la douleur par des râles sans doute de plus en plus caverneux. Bientôt son regard se voilera, sa colonne vertébrale se brisera, ce schéma elle le connait par cœur.

Concentrée elle ne remarque pas tout de suite le regard de son amie posé sur elle, ce sont ces mots qui viennent la sortir de son observation « Mais dis-moi une chose, pourquoi vouloir à tout prix aider les lycanthropes ? » Rain perçoit-elle l’éclat qui traverse le regard de Jane à ce moment-là ? Mélange de méfiance et d’hésitation, on ne soupçonne pas le poids d’un tel secret. Personne ne l’a jamais forcé à garder ça pour elle et surtout pas Leroy, c’est un choix qu’elle a fait en son âme et conscience. Là, face à une personne qu’elle connait depuis si longtemps, oui elle hésite. A l’intérieur de son être c’est comme un cheval qui se cabre, il se débat comme se débat sa volonté tout en sachant que tout comme elle Rain a le pouvoir de rendre hermétique son esprit. Le secret de son cadet serait en sécurité, n’est-ce pas ? « C’est l’humain que j’aide, qu’importe ce qu’il est de plus. » Mais Jane n’est visiblement pas prête à laisser se fissurer ce mur immense qu’elle a consolidé pour le protéger. Aucune des deux femmes n’est dupe, elles se connaissent depuis bien trop longtemps pour ne pas voir l’étincelle dans le regard de l’autre.

Jane ne s’était pas rendu compte qu’elle avait retenu son souffle alors que ses poumons se vident d’air dès l’instant où la porte se referme sur l’Ambassadrice. Seule désormais elle comptera les heures jusqu’au petit jour sans se douter que ce sont peut-être ses propres heures qui le sont alors que l’ombre d’Oliveira plane au-dessus d’elle.

▬ FIN ▬