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Escape - Jordane

 :: Londres :: Sud de Londres :: ─ Brixton.
Dim 7 Nov 2021 - 21:52
Mardi 14 juin 2016, fin d'après-midi


L'heure approchait, inexorablement et il se demandait toujours si c'était une bonne idée, s'il faisait bien d'agir comme ça. Il avait retourné encore et encore tout ce que Maxence lui avait dit il y a près de trois semaines et il n'arrivait pas à s'en défaire, malheureusement pour lui, ils avaient eu du mal à avoir un emploi du temps qui coïncide si bien qu'ils n'avaient pas pu se voir aussi vite qu'il l'aurait souhaité. Des jours, des heures supplémentaires pendant lesquelles il avait cogité, il avait essayé de trouver des indices dans sa mémoire, ou bien sur comment est-ce qu'il allait bien pouvoir aborder ce sujet. Il ne se voyait pas regarder Jordane dans les yeux et lui dire « c'est ton mac qui t'a cogné la dernière fois ? » Non, ça c'était impossible, par ce que si c'était réellement le cas, il risquait de la faire fuir. Néanmoins, il n'avait trouvé aucune approche qui lui plaisait et il craignait plus qu'elle ne lui réponde plus jamais au téléphone qu'elle se mure dans un silence. Le silence, il pouvait gérer, si elle ne voulait pas parler, soit, il pourrait toujours lui rappeler qu'en cas de besoin elle pouvait venir chez elle avec la clef qu'il lui avait fourni la dernière fois... mais si elle ne voulait plus le voir, il craignait qu'elle n'ait pas d'autres lieu de repli. Une safe zone. Et à chaque fois qu'il tombait sur ce constat, il essayait de se rassurer en se disant qu'elle devait avoir des amis, des points de chutes. Il ne semblait avoir aucune solution, alors il verrait bien le moment venu... histoire que cela ne paraisse pas trop étrange le fait qu'il demande de la voir, il lui avait proposé une activité d'accrobranche qu'il voulait faire... sans trouver personne avec qui y aller. Ce qui n'était ni faux, ni vrai, c'est juste qu'il n'avait pas demandé à d'autres personnes de venir avec lui, donc forcément personne ne voulait y aller avec lui.

Se calmer était la priorité, s'il puait le stress, elle sentirait le truc venir et risquerait de se braquer encore plus... ou alors elle verrait qu'il était juste vraiment très inquiet pour elle et qu'il agissait donc avec les moyens du bord d'une personne qui ne savait pas quoi dire, comment agir en sachant pertinemment comment est-ce qu'elle pouvait réagir. Et c'est aussi pour cela qu'il avait préféré lui parler dans un lieu public, non pas pour l'afficher, mais plus pour qu'elle n'ait pas la sensation d'être acculée dans son appartement. Qu'elle soit à l'air libre.... pouvant partir dans n'importe quelle direction à n'importe quel moment et c'était quelque chose d'important de son point de vue.

Arrivé à l'avance, il attendait la jeune femme assis sur sa moto, lui envoyant un message pour lui dire où il était exactement, qu'il ne passe pas trois heures à se chercher. Lorsqu'elle apparut enfin dans son champs de vision, il ne put s'empêcher de lui faire un énorme sourire, franc. Pas quelque chose de forcé, mais elle semblait aller bien, ou du moins au premier coup d’œil, elle était dans un meilleur état que la dernière fois qu'ils s'étaient croisés, alors... c'était déjà un bon point, c'était rassurant, il se dirigea vers elle avant de dire

 « Salut Jo' ! Alors, comment ça va aujourd'hui ?» Il lui dédia son plus beau sourire, et après l'avoir plus amplement saluée, comme ils avaient l'habitude de le faire, il renchérit rapidement  « Quoi de neuf ?» Pour l'instant, c'était quelque chose de simple, il voulait déjà voir son état, savoir si elle n'avait pas de souci. Un genre de test rapide, de prise de température pour plus de sûreté.


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Naveen Evans
911 & Chef gueux des gueux
Naveen Evans
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Naveen Evans
Mar 9 Nov 2021 - 15:31
Assise en tailleur, le visage livide, Jordane avait la tête dans un tonneau qu’on aurait balancé du haut d’une colline et le cœur au bord des lèvres. Mains à plat du sol, les lèvres entrouvertes, la jeune femme luttait contre la nausée violente qui l’assénait. Charge lourde, poussée jusqu’au bout de ses capacités, les altères avaient fini par avoir raison d’elle.

« Eh bah. J’ai toujours dit qu’on ne s’entraîne pas vraiment tant qu’on ne fini pas à chaque fois dans cet état. »

L’homme se plantait devant elle alors que l’ancienne Serdaigle stabilisait son souffle pour le laisser couler au travers de ses lèvres pincées. D’une grimace, l’autre se penchait, un genou à terre.

« Ta bouteille est vide. J’t’apporte de l’eau. »
« Ouais.. c’est gentil. »

Ne jamais accepter de boisson de quiconque. Règle de base.
A la salle ? Sérieusement ? Arrête ta parano.


Pourtant la jeune femme n’avait pu s’empêcher de le garder à l’œil, identifiant ses gestes tandis qu’il allait lui prendre une bouteille au distributeur plutôt que de remplir sa propre bouteille au robinet… Comme s’il avait lu dans ses pensées. Dans un souffle plus profond, Jordane déglutissait, basculant doucement en arrière en redressant une jambe dont elle ne tardait pas à se servir comme d’un accoudoir alors que l’autre revenait, lui tendant l’eau.

« ça fait un moment que je te vois faire. Tu pousses à chaque fois. C’est top. C’est rare de voir une nana s’entraîner réellement. »

Le remerciant d’un signe de tête alors qu’il parlait, Jordane se contentait d’un petit souffle amusé avant de prendre quelques gorgées, les perles de sueur dégoulinant le long de sa colonne vertébrale. Oui, c’était rare de voir une femme soulever autant de fonte, enchaînant sans cesse les entraînements. Et ce type n’avait pas idée de ceux qu’elle passait avec Sanae ou Margo. Son féminisme grognait sévèrement d’être d’accord avec ce propos qui pouvait sonner misogyne mais à fréquenter les salles, la jeune femme savait qu’il portait trop de part de vérité pour qu’elle ai l’indécence de le réfuter. Pas qu’elles ne s’entraînaient pas dur… mais souvent moins, c’était vrai, et surtout centré sur le cardio tandis que lui parlait musculation, un sport qu’elle pratiquait depuis bien des années malgré certaines difficultés à le développer à Poudlard.

« Dis-moi tu.. »
« Ecoute, j’ai pas envie de parler. J’suis dans mon truc là tu vois. » Si j’ai envie de baiser, je te sonnerais. C’est bien le fond du propos non ?

L’homme se rembruni pour la laisser tranquille, coupé net dans son élan.

L’esprit braqué sur son entraînement, Jordane, elle, l’oubliait bien vite tout comme elle oubliait le reste. La mission prévue avec la Garde dès le soir même cramait ses nerfs et si cette séance n’était pas prévue, elle était là pour apaiser son stress. En sortant de là, elle prendrait une douche brûlante au club, y traînerait bien plus longtemps que ce que la décence permettait, le regard braqué sur les carreaux bleutés qui lui rappelaient ceux d’une piscine. Elle ne penserait pas à Kezabel, ne penserait pas à Dorofei, à Zach, Lex ou même Enzo et Riley. Elle ne songerait même pas à ce compte en banque qui baissait doucement grâce à sa collocation mais devenait peu à peu un véritable gouffre. Elle ne penserait qu’à ça, cette mission sur laquelle elle cherchait à se centrer pour oublier ce qui tourbillonnait en elle. Lorsque l’eau s’arrêtait de nouveau pour la millième fois, la jeune femme qui arborait toujours l’auburn rougeoyant -  tandis que le soir même, elle serait de nouveau brune – y resta un instant immobile, l’eau ruisselant sur son corps nu, les lèvres entrouvertes pour en gouter la pureté. Et puis elle s’ébranlait et laissait retomber son bras contre sa hanche dans un mouvement sec. Elle noyait ses erreurs et ses incapacités dans les missions menées sans flancher.
Avant de sortir des lieux, celle qui portait le nom d’une arme japonaise avalait une potion pour écraser la fatigue musculaire et permettre de taire les pulsations sourdes de son organisme fatigué. Elle se reposerait, oui, mais un peu plus tard. Pour l’heure il lui faudrait rester acérée, vive et clair comme un coup savamment porté.

Lorsqu’elle sortait à l’extérieur, c’était sans veste. Un jean et un t-shirt suffisaient sous le soleil aujourd’hui pourtant peu vif du jour. Mains dans les poches, musique dans les oreilles, si elle rejoignait Naveen, c’était à pied. Pendant un temps, la jeune femme avait été distante, n’assumant pas réellement la faiblesse qu’elle avait eu de se réfugier chez lui après l’épisode Dorofei. Chez lui. Non, contre lui. A lâcher des larmes sur son oreiller et coller son corps au sien autrement que dans une fièvre de désir brusque et physique. Les rues défilaient sous ses pas, les talons encrés dans le bitume ou les pavés, le regard fixe, droit, ne se baissant jamais au contact des uns ou des autres comme si elle cherchait dans chaque visage l’inflexion du danger. Mais rien. Seulement des inconnus qui vivaient leur vie sans savoir ce qui dans leur dos, se jouait.
Dans ses tympans, la batterie rythmait ses pas jusqu’au lieu de rendez-vous. Ils s’étaient revus, bien sûr. Pas aussi souvent que des amis auraient pu le faire, simplement parce qu’ainsi, elle rappelait ce qu’ils ne risquaient pas d’être : un couple. Oh oui, l’ambigüité, Jordane la voyait, bien sûr, mais l’ignorait sciemment. Et lui.. lui n’insistait pas. Ce calme, ce manque de demande la rassurait, l’entraînant sans qu’elle n’y songe parmi les figures référentes de son existence. Le statut d’ami était accordé sans même qu’elle ne l’intellectualise, et lorsqu’elle arrivait à sa hauteur, c’était en confiance.

Jamais Jordane ne s’était re-servie de sa clef alors même qu’elle avait passé le mois passé un grand nombre de nuits hors de ‘chez elle’, dormant ci et là, parfois au QG, parfois au dessus de la boutique de Takuma, ou enchaînant les nuits blanches sans se poser de questions. Alors il lui arrivait de voler parfois une heure ou deux de sommeil chez un inconnu qu’elle venait de se taper, emportée contre son gré par la fatigue. Amusant non ? C’était là ce qu’elle faisait à l’époque où elle était tombée sur Naveen. Mais jamais l’idée de profiter de nouveau de son hospitalité n’était venue, justement à cause de cette fois précédente où elle s’écrasait sous sa couette, tremblant en silence des poings meurtriers qui avaient laissé son corps à la torture.

Pourtant quand elle arrivait de nouveau face à lui, si elle n’était sans doute pas dénuée de quelques bleus ci-et-là  - Margo, Sana, on fait coucou à la caméra ! – la jeune femme semblait en forme, droite dans ses bottes, le menton haut, le teint clair. Pas d’abus d’alcool, pas de nuits blanches enchaînées récemment. La mission approchait et elle ne jouerait pas avec la vie des siens parce que le monde s’acharnait à la foutre à terre.

« Salut Jo' ! Alors, comment ça va aujourd'hui ?» « Hey ! » Un sourire sur ses lèvres, un baiser sur sa joue – coutume française qu’elle développait plus par séduction que par habitude – et elle se plantait face à lui, un petit sourire en coin vibrant d’une sorte de fierté mutine dont elle ne se débarrassait que rarement. « ça va bien et toi ? » Qu’y a-t-il de plus général et dénué de sens que ça, dites moi ? ça va bien. Réponse réflexe, sans vraiment de profondeur ni de fond. « Quoi de neuf ?» « Oh, pas grand-chose, la routine. » Sauf qu’il n’avait pas la moindre idée de ce qu’était ‘la routine’ pour elle, étant donné qu’il ne savait rien de sa vie.

J’essaye toujours de réduire l’envahisseur à néant. C’est le chaos sur l’étoile noire et je me débats avec des émotions imprévues. Mon meilleur ami me manque, Enzo et Riley aussi, je ne sais pas comment raccrocher aux amitiés éloignées, je suis une branque et j’ai deux amis à l’âme en écharpe qui comptent plus qu’ils ne le devraient.  Et toi, bien ou bien ?

« Et toi ? » Non mais sérieusement. Conversation à la con. « Bon alors, t’as envie de me faire grimper aux arbres plutôt qu’au ciel si j’ai bien compris ? » Une grimace réflexive sur le visage, elle plantait ses yeux d’azur dans les siens. « Inattendu comme choix, mais pourquoi pas. » L’argent pour payer cette escapade ? Oh, vos gueules ! Rabats joie. Et toi ne t’avises pas de payer pour moi ! « C’est une autre façon de tester son habileté physique quoi... » Les yeux brillants d’un sous-entendu évident, elle esquissait un petit rire, naturelle dans ce petit jeu. « Ou alors c’est juste pour mettre en avant ton corps d’apollon. C’est ça, j’ai trouvé l’arnaque ! Mais oui ils sont beaux tes biceps, Nav’, je te promets.. » Moqueuse, oui, alors même que la vue de ces bras avait tendance à lui mordre le bas-ventre. On n’a jamais dit qu’il fallait être sérieux ! « Alors… Le monde du sauvetage se porte-t-il bien ces derniers temps ou c’est le bordel et tout se barre en couille ? » Comment ça va, toi ? Voilà ce qu’il y avait derrière ces mots désinvoltes.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Jeu 11 Nov 2021 - 9:39
Elle allait bien. Regarde là bien Naveen, est-ce qu'elle a l'air d'aller mal ? La réponse était non... mais il avait appris de part son expérience personnelle en plus de celle de son métier que cela ne voulait rien dire. Beaucoup de choses pouvaient se cacher derrière un sourire, derrière une tête levée. Un défi face à la Vie, au Destin par exemple. Ou bien, juste rendre les apparences plus acceptables, moins inquiétantes. Hey, qu'est-ce que tu crois, mec ? Elle sait que tu t'inquiètes pour elle, tu es tellement transparent là-dessus, aucune surprise, alors elle peut juste s'adapter. mais il restait un fait indéniable c'est qu'elle semblait réellement bien, la lueur alarmante dans ses yeux avait disparu. Elle semblait plus reposée, plus sereine... quelque part plus joueuse. Alors, maintenant on se détend, on laisse passer les choses, on voit comment la situation évolue. Prendre la température en premier lieu, aviser en fonction après.

Il l'avait donc saluée avant de se voir coller un baiser sur la joue – on ne pouvait pas dire qu'il n'aimait pas cette coutume française, elle était au contraire fortement agréable-. Et il n'avait pas tardé à sortir les banalités.

« ça va bien et toi ? »
 « Plutôt pas mal, écoute !»

Je suis juste en train de me faire un ulcère de stress de savoir comment je vais te poser LA question, sinon, pour le reste tout va parfaitement bien ! Enfin autant que ça pouvait aller dans sa situation disons que ça serait plus juste comme formulation ! Il savait que ce genre de formalités ne reflétait jamais la réalité, mais il avait toujours cette impression que c'était un grand manquement, une chose horrible de ne pas le demander, alors bon ! Autant en passer par-là. En attendant, d'ailleurs, il regardait sa gestuelle, l'air de rien, ainsi que son regard. Très important le regard, toujours pas fuyant. Il était franc, elle était capable de le regarder dans les yeux sans moufter d'un poil. Il aurait voulu se dire que tout était résolu, qu'il s'était fait toute une histoire pour rien, mais le doute était toujours là. Il l'imprégnait et il ne parvenait pas à s'en défaire. Il préférait qu'elle lui rit à la gueule, qu'elle se foute vraiment de lui, mais qu'il ait au moins essayé. Par ce que si les « soupçons » de Maxence étaient réels et qu'il ne faisait rien, qu'il arrivait quelque chose à Jordane, il serait impardonnable, il ferait parti de ces coupables silencieux qui n'auraient pas voulu agir par ce que c'était beaucoup plus simple.

« Oh, pas grand-chose, la routine. »
 « C'est sûr que je connais ton emploi du temps par cœur.» ne put-il s'empêcher de lui dire en rigolant un peu. Non, il ne savait pas ce que cela signifiait exactement, mais il n'allait pas insister beaucoup plus, il avait donc préféré opter pour une question, simple mais qui l'intéressait  « Boulot, ou pas ?»
« Et toi ? » Oh Jordane, tu sais bien qu'il est marié à son travail et qu'il n'y a que ça qui compte. En réalité, il n'y avait pas grand chose de neuf, tout était vieux, comme elle l'avait si bien dit quelques minutes avant, c'était juste la routine. « Bon alors, t’as envie de me faire grimper aux arbres plutôt qu’au ciel si j’ai bien compris ? » Cette fois il ne put s'empêcher d'avoir un rire, avant de se contenter de lui faire juste un clin d’œil tandis qu'elle enchaînait déjà. « Inattendu comme choix, mais pourquoi pas. C’est une autre façon de tester son habileté physique quoi...Ou alors c’est juste pour mettre en avant ton corps d’apollon. C’est ça, j’ai trouvé l’arnaque ! Mais oui ils sont beaux tes biceps, Nav’, je te promets.. » Nouveau rire de l'homme. Il secoua la tête comme s'il voulait lui faire comprendre qu'elle n'était pas possible, mais il était réellement amusé. Flatté aussi, même s'il ne s'était pas attendu à ce genre de compliments. [colo=tomato]« Alors… Le monde du sauvetage se porte-t-il bien ces derniers temps ou c’est le bordel et tout se barre en couille ? »[/color]
Ouais, donc elle semblait vraiment en forme. Ca c'était plus la Jordane qu'il avait eu l'habitude de croiser fut un temps, et il y avait quelque chose de rassurant de voir qu'elle était toujours là. Il se passa une main dans les cheveux et pris un air faussement gêné.
 «J'me suis fait latter la gueule à l’entraînement par un petit jeune... du coup tu comprends, mon orgueil... » Lequel Naveen ?  « … en a pris un coup et j'voulais me prouver que j'étais capable de suivre quelqu'un comme toi : jeune, en bonne santé, souple, pleine d'énergie.» Il essayait de garder son sérieux, mais avait bien du mal. Hey, pourtant, dans un certain sens ça aurait pu être crédible ce genre de choses ! Il laissa planer un léger silence avant de reprendre  « Mais tu sais, pour cette question de grimper, l'un n'empêche pas l'autre.» cette fois, c'est le sourire mutin qui s'était affiché sur son visage sans qu'il n'en dise plus. La vérité c'est qu'il n'y avait pas vraiment pensé à la deuxième possibilité, d'ailleurs Jordane en avait sûrement fait qu'une blague... mais on ne pouvait pas dire qu'il était contre... suivant comment se passait ce moment ensemble, la conversation. Ne pas lui attirer plus d'emmerdes.  « C'est vrai, c'est con, j'ai oublié la tenue moulante. Quel do-mma-ge. J'espère que, déçue, tu ne vas pas repartir comme tu es venue ? » il lui sourit avant de reprendre un peu plus sérieusement  « Et bien écoute, je ne compte toujours pas mes heures, je ne risque pas de me retrouver au chômage du jour au lendemain, ça c'est sûr, on manque toujours d'effectif... Ce n'est pas plus le bordel qu'habituellement ! »

Il y avait peut-être plus d'interventions sur certains types de bastons depuis la révélation de la Magie mais c'est quelque chose qu'il préférait passer sous silence. Ce n'était pas vraiment la question ! Il lui fit signe de le suivre et d'avancer vers l'entrée. Nouveau silence, avant qu'il lui dise, avec une sincérité qui pouvait paraître déconcertante, qui révélait l'inquiétude sous-jacente.

 «Je suis content que tu sois venu... et que tu sembles en pleine forme. » Silence, avant de reprendre, l'air de plus joyeusement  « T'en as déjà fait ? C'est sympa par ici, pas sûr, que ça vaille ce que tu as déjà dû voir dans d'autres pays... mais c'est mieux que rien ! Et ne t'inquiètes pas, je ne me laisserais pas distancer.»

La dernière phrase était lancée comme un défi, comme un « donne-toi à fond, je te suivrais ».
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Naveen Evans
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Naveen Evans
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Naveen Evans
Ven 12 Nov 2021 - 2:11
Oh non, elle ne baisserait pas les yeux, c’était une certitude. Rien qu’une assurance vive, sans trace d’épuisement ou des ombres qui barraient son regard la dernière fois elle le savait. Pourtant il y en avait, de la fatigue, mais aucune possibilité qu’elle se laisse aller à de telles évidences. A l’instant, la jeune femme était de nouveau légère et inébranlable, affirmant ses positions comme si elle pouvait simplement faire douter son interlocuteur de ce qu’il avait vu. Qu’elle soit arrivée bardée de bleus, lézardée des coups manifestes d’un homme venu la tabasser à mort était un fait. Mais qu’elle ait craqué au point de se réfugier dans ses bras… non. Une telle évidence se devait d’être effacée, amenée à en douter. L’idée de simplement couper court l’avait traversée mais si Jordane avait pris ses distances un long moment, ne donnant la réplique qu’en de rares occasions, elle passait à présent outre, une partie d’elle raisonnant comme Naveen. Là pour prendre la température, donc, tous deux.

« C'est sûr que je connais ton emploi du temps par cœur.» Elle aurait pu mal le prendre mais cette idée aurait été mal la connaître. Non, il n’y avait dans ses yeux qu’un amusement brûlant. Consciente de ses habitudes semble-t-il un peu étranges, Jordane se moquait d’elle-même avec facilité tant qu’elle ne trouvait dans son vis-à-vis qu’une acceptation simple. Pas de reproches, dans cette réflexion et seulement de l’humour : pas de raisons, donc, d’en être blessée. Naveen acceptait cet état de fait chez elle et n’en faisait pas un sujet tabou, une façon de faire qui la soulageait bien plus qu’il ne pourrait l’imaginer. Alors un petit rire claquait dans l’air, tout léger dans l’été naissant. « Boulot, ou pas ?» « Hm, oui et non. » Est-ce qu’elle en jouait, de cette inaccessibilité ? Oui. En s’étant montrée vulnérable auprès de lui comme elle l’avait été, Jordane avait besoin de compenser un peu, s’enterrant dans ses habitudes et plaçant l’humour et le sexe en premier plan pour étouffer le reste. C’était là simplement retrouver le naturel d’une relation qu’elle ne pouvait réfléchir qu’ainsi.

«J'me suis fait latter la gueule à l’entraînement par un petit jeune... Hm hm, un message là-dedans ? du coup tu comprends, mon orgueil en a pris un coup et j'voulais me prouver que j'étais capable de suivre quelqu'un comme toi : jeune, en bonne santé, souple, pleine d'énergie.» Se faire latter et avoir l’orgueil en écharpe. Hm. Non, je ne visualise pas du tout. Son regain de combattivité vive lors des entrainements et des missions n’y était pas directement lié d’ailleurs ! Absolument pas.
« C’est bien, sans le ‘souple’ t’étais pas loin de me complimenter comme on complimente une vache laitière. »

La réflexion se glissait dans son silence, moqueuse, sans attendre de réponse. L’insolence habituelle reprenait sa place comme une bourrasque. En manque de finesse et de subtilité, légère dans cette reprise de l’humour. Comme si rien n’était arrivé. Que rien ne comptait.

« Mais tu sais, pour cette question de grimper, l'un n'empêche pas l'autre.»

Et là, une autre bourrasque. Une voix, un rire, un visage. Un regard d’ambre.
Vite chassés dans un tsunami brusque d’agacement qu’elle ne comprenait pas, ne calculait pas. Qu’elle niait, comme toujours, se contentant de rire franchement à la réflexion de son ami. C’est toujours bon de plaire et le petit regard qu’il lui avait adressé lorsqu’elle complimentait son physique n’était pas étranger à cette évidence. Et elle ? Oh oui, elle aimait plaire et déclencher l’envie, séduire ou rendre fou. Et pourtant quelque chose résonnait en fond, une angoisse meurtrière dont elle taisait tous les tenants. Rien. Voilà ce à quoi elle réduisait tout ça. Un rien qui ne plaisait pas et qu’elle préférait ignorer pour plonger le regard dans celui de Naveen, un sourire brûlant sur les lèvres.

« C'est vrai, c'est con, j'ai oublié la tenue moulante. Quel do-mma-ge. J'espère que, déçue, tu ne vas pas repartir comme tu es venue ? »
« Ah mais je viens uniquement pour ton cul moi, comment tu veux que je réagisse autrement que par la déception ?! » Parfois il lui semblait simplement mener plusieurs existences en parallèle. La Garde cessait-elle d’exister si elle faisait comme si tout ça n’appartenait pas au même plan astral ? Les coups cesseraient-ils de la marquer alors ? Et ces émotions qu’elle mettait en sourdine, pouvait-elle réellement les contraindre ainsi ?

« Et bien écoute, je ne compte toujours pas mes heures, je ne risque pas de me retrouver au chômage du jour au lendemain, ça c'est sûr, on manque toujours d'effectif... Ce n'est pas plus le bordel qu'habituellement ! »

Voilà, tu vois, le monde n’est pas le même ici. Ici personne ne tombe, personne ne meurt, personne ne risque de finir à Azkaban pour simplement avoir fait l’erreur d’exister. Ici le monde avance, léger, sans se douter des coups infligés dans l’ombre. Ici tu n’as pas à être un soldat. Demain sera assez dur.

Ici tu n’as pas à lutter d’aimer.

As-tu seulement le droit de penser ainsi ou est-ce une insulte envers ceux qui sont concernés ? Souffrir d’aimer. Ne savoir comment le gérer, ne savoir que faire d’aimer ça, ne pas avoir le droit de laisser l’angoisse prendre le dessus et tout engloutir.

« Eh ben écoute c’est déjà pas mal si tu n’as pas trop à faire ! »

Naveen passait sous silence certaines réalités et l’ensemble sonnait comme dissonant aux oreilles de la jeune femme, creusant un peu plus l’impression d’autre monde qui s’effectuait en elle. Alors oui, elle n’avait envie en cet instant de n’être rien d’autre qu’une amie avec petits bonus qui n’avait que faire de l’avenir du monde ou de celui de son cœur courbaturé de ne savoir aimer.

«Je suis content que tu sois venue... et que tu sembles en pleine forme. »

Elle avait embrayé son mouvement vers la forêt et la petite cabane où les entrées étaient venues. Pourtant à ces mots, elle l’observait d’un regard fluide sur le côté, inquiète de ce que ces mots pouvaient cacher. Elle ne répondit pas, s’interrogeant sur la sensation de simplicité qui transparaissait habituellement de cette relation et qu’elle espérait ne pas avoir planté… mais tout autant consciente qu’auprès de Dorofei et de Kezabel, Jordane se savait plus entièrement elle-même. Une sensation qui apportait tout à la fois soulagement et angoisse. De nouveau, ce qui voulait surgir était englouti, effacé, étranglé. Pas le temps de penser à ça. Pas envie de se planter là-dedans. Il lui sembla que si elle y pensait, elle ne ferait que se prendre un mur et risquerait de disparaitre dans la journée, laissant tomber la Garde le soir même. Impossible, donc.

Et pourtant, quand elle y était, ces angoisses-là disparaissaient. Pourquoi ? Etait-elle devenue bipolaire ou basculait-elle d’un monde à l’autre sans vraiment s’en rendre compte ? L’un dans lequel elle était étrangement heureuse de vivre ce qu’elle vivait et l’autre dans lequel tout ça la pesait plus que de raison. Impossible, donc, d’y penser. De trouver une explication, de céder à cette sensation affreuse d’être amener à ressentir à l’encontre de ses propres pensées. Ou peut-être était-ce l’inverse ? Pensait-elle trop à l’encontre de ses sentiments ?

MERDE. Là.

On remet tout le monde sur le même plan et on stoppe simplement le flux de pensées.

« T'en as déjà fait ? C'est sympa par ici, pas sûr, que ça vaille ce que tu as déjà dû voir dans d'autres pays... mais c'est mieux que rien ! Et ne t'inquiètes pas, je ne me laisserais pas distancer.»

L’évocation des autres pays lui arrachait un frisson, se rappelant qu’elle avait évoqué le fait d’avoir beaucoup voyagé pour justifier sa disparition pendant de nombreuses années et esquiver les questions gênantes.
Respire putain, t’es grave.

« J’ai dû en faire une fois ou deux ailleurs ouais. Enfin j’ai surtout déjà fait de l’escalade.. enfin bref, j’ai pas tant d’éléments de comparaisons t’en fais pas. Je ne saurais pas si tu m’arnaque sur la marchandise ou pas. » Oui, elle en avait déjà fait mais ça n’était pas tout à fait son activité la plus courante. Déjà parce que l’accrobranche, ça a un coût. Ensuite parce que ça n’était pas forcément les activités les plus naturelles durant ses voyages. Un détail étonnant si elle avait voyagé comme une touriste classique mais qui l’était moins quand on l’associait plus à du Pekin Express qu’à des semaines en hôtel cinq étoile. Quoi qu’elle l’avait fait aussi… mais gratuitement. « Mais ça me plait bien comme truc ! » Sportive comme elle était et toujours en manque de dépassement physique, évidemment qu’elle ne pouvait qu’être conquise.

« T’en fais souvent ? »

Arrivés à la cabane, ils faisaient la queue avant de passer à la caisse où elle dégainait les billets, semblant sous entendre qu’elle n’avait pas de problèmes de ce côté-là. Un mensonge plus que fantasmé.
Pas de carte bancaire, uniquement des billets. D’ailleurs de carte, elle n’en avait plus, n’ayant pas encore résolu ces différents problèmes administratifs. Depuis neuf mois, OUI. Ya quoi ?
Ainsi, Jordane payait sans laisser le choix à Naveen, validant la possibilité d’évoluer sur tous les parcours durant les quelques heures prochaines. Bonne condition physique tous les deux, choix judicieux donc.

Bientôt, ils s’asseyaient à une petite table de piquenique en bois, attendant que les employés du parc ne mettent eux-mêmes les baudriers sur les hanches des visiteurs. Ainsi les gens faisaient la queue, plaçant les pieds dans les baudriers posés au sol et les employés les remontaient sur leur corps avant de les fixer correctement, s’assurant donc de la sécurité des attaches plutôt que de faire confiance à des utilisateurs en roue libre, persuadés de savoir faire. Posant le regard sur la file qui s’amenuisait, Jordane revint sur lui, l’avant bras posé sur le bois frais et sombre de la table rustique.

« Alors comme ça ton égo est blessé ? C’est con qu’il y ait de monde, on va être bloqués sur les agrès sinon j’aurais bien cherché à te semer. Cela dit sur les parcours les plus vénères il devrait y avoir moins de foule. Je pourrais te mettre la misère. »

Un baiser ironique appelant au défi était envoyé par-delà la distance et déjà, elle se levait pour aller glisser les pieds dans le baudrier au sol. L’employé s’arrêtait un instant sur elle, genou à terre, regard planté dans ses iris clairs. L’éclat dans ses yeux, la jeune femme le connaissait bien et braquait sur lui des yeux perçants alors même qu’elle attachait ses cheveux. Lorsqu’il remontait le harnais, passant ses mains le long de ses cuisses pour caller les sangles épaisses, Jordane esquissait un petit sourire. Bientôt, il posait les mains sur l’harnachement du devant et les siennes les rejoignaient, faisant monter la satisfaction dans ses prunelles vertes. « ça va j’te dérange pas ? » T’en profite pas trop sinon ? Durant un moment, elle l’avait charrié, senglant elle-même le baudrier qui ne tardait pas à ceindre ses membres musclés. Le regard braqué sur lui, elle lui faisait bientôt perdre toute assurance, incapable de dire si elle l’envoyait chier avec violence ou si elle le draguait ouvertement.

Le laissant avec ses interrogations balbutiantes, Jordane s’en détournait, un regard porté sur Naveen.

« T’es pas mal comme ça ! Presqu’aussi sexy qu’en uniforme. »

Oui, elle-même se trouvait chiante, mais déjà, elle et ses faux airs de Lara Croft l’emportaient dans le parc, délaissant les parcours les plus simples pour se présenter à l’avant d’un des trois plus contraignants.

« Donc j’avance et j’te distance, c’était ça le deal hein ? » Elle faisait claquer sa langue dans un petit rire, l’accompagnant d’un clin d’œil. « Tout ça pour mater mon cul, bien joué Evans. » Et l’instant suivant, elle faisait pivoter d’un mouvement de pouce le mousqueton de métal, l’ouvrant pour le refermer sur l’une des boucles de sécurité accrochée à une corde qu’elle avait tiré pour le ramener à elle.
Bientôt, Jordane s’élançait sur le filet de corde lâche, un exercice qui semblait simple à voir ainsi mais que la souplesse des prises rendait vite épuisant. Les muscles roulaient sous sa peau, déjà gonflés de l’entraînement du matin. Sans la potion avalée plus tôt, Jordane savait qu’elle n’aurait pas été capable d’assurer. Ni là, ni la nuit à venir. Mais la magie l’amenait à tenir.

Fait amusant, il s’agissait là de la potion que Sovahnn prenait quand il avait fallu la re-muscler après ses cinq années de coma. Potion qu’elle avait donc appris à faire en observant son amie galérer face à un Logan agacé par son piètre niveau de sorcière.

Ses mouvements souples l’amenaient au fur et à mesure vers la petite plateforme en bois, plusieurs mètres plus haut où elle attendit Naveen.
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Jordane Suzie Brooks
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Dim 14 Nov 2021 - 17:27
« Hm, oui et non. » Oui et non ? Il pencha la tête sur le côté comme s'il essayait de comprendre ce qu'elle voulait bien pouvoir dire par là. Comment est-ce que l'on pouvait répondre « oui et non » à une telle question  sur le boulot. La réponse devait signifier que c'était compliqué... mais ce n'était pas pour le rassurer, d'une certaine manière cela aurait presque pu aller dans l'idée de Maxence, alors autant dire que cela ne le détressait pas du tout... la manière de répondre par contre avait quand même quelque chose d'assez réconfortant malgré tout.  « C'est pas un travail officiel ? Genre au black ?» avait-il finalement dit pour continuer la conversation comme si de rien n'était. Mais il ne voulait pas insister beaucoup plus. Il avait donc bientôt repris la parole pour répondre à la question de Jordane en tournant tout ça un peu à la dérision.

« C’est bien, sans le ‘souple’ t’étais pas loin de me complimenter comme on complimente une vache laitière. »

Il voyait bien qu'elle ne l'avait pas mal pris... mais la réflexion le laissai quand même totalement perplexe et cela devait se voir à son regard. Lui, il avait juste voulu lui montrer qu'elle avait beaucoup de qualités, et que ce qu'il disait c'était sincère. Il ne voulait pas faire un tel étalage pour qu'elle aie cette impression, même si c'était plus de la moquerie qu'autre chose à son égard.

 « D'solé.» glissa-t-il quand même, juste pour qu'elle comprenne que ça n'avait pas du tout était son but... et en plus il avait beau réfléchir, pour ne pas commettre la même bourde face à quelqu'un d'autres... il ne voyait pas vraiment son « erreur ». Peut-être par ce que ça avait toujours été dans sa façon de faire, de montrer aux gens leurs qualités... mais il n'allait pas s'arrêter sur ça maintenant, Jordane pourrait lui lui expliquer plus en détails si elle le souhaitait et sinon... et bien il verrait bien. Personne ne lui avait jamais rien dit, elle voulait peut-être juste l'ébranler un peu pour qu'il arrête avec les notes positives ce qui avait plutôt bien marcher d'ailleurs... Lorsqu'il avait repris la parole, c'était pour sortir une une autre connerie – qui au final n'en était pas réellement une- sur le fait qu'il n'était pas non plus contre une autre façon de grimper. Jo avait lancé le truc, il ne faisait qu'y répondre de la même façon, tout simplement et vu le sourire qu'il lui avait déclenché, l'effet escompté avait totalement marché, et pour réponse, il lui lança le même genre de sourire.

Ils avaient bientôt repris avec leurs blagues habituelles, la façon de se chambrer sans réelle aucune subtilité. Juste pour rire. Pour se détendre. Sans forcément beaucoup de finesse mais surtout sans aucune prise de tête et c'était ça qui était bon : ne pas trop réfléchir aux mots que l'on pouvait dire pour ne pas blesser l'autre. Jordane était un roc, une personne sans trop de filtre, alors il savait qu'il pouvait y aller niveau humour pas trop fin que ça passerait généralement sans trop de souci.

« Ah mais je viens uniquement pour ton cul moi, comment tu veux que je réagisse autrement que par la déception ?! »
Petite moue faussement gênée de la part de l'homme.
 « Bon, ça veut dire qu'il va falloir que je me rattrape d'une manière ou d'une autre pour te faire oublier cette déconvenue alors ?»

Prends-le comme un sous-entendu ou pas, c'est toi qui voit ma grande, il l'avait laissé glisser cette réflexion de façon assez large pour qu'elle ait le choix. Yeux rieurs, sourire taquin, il avait fini par bientôt reprendre avec son boulot... qui était plus ou moins le même qu'auparavant. Pas de changement, toujours la galère. Non, il ne lui dirait pas à quel point c'était éreintant, épuisant et qu'il en faisait probablement trop... et qu'il n'arrivait pas à faire autrement. La seule façon d’apaiser le vide dans son cœur et dans son âme... surtout maintenant que les Inquisiteurs n'étaient plus vraiment-là... Alors, il fallait bosser encore plus, pour ne plus avoir à trop penser, pour se concentrer sur autre chose, pour être si fatigué, une fois rentré chez lui que le cerveau avait du mal à se plonger dans la mélancolie par ce que seul le repos s'imposait. Jusqu'à quel point est-ce qu'il allait continuer à se laisser engloutir par tout ça ?

« Eh ben écoute c’est déjà pas mal si tu n’as pas trop à faire ! »
 « Ouais, on peut dire ça comme ça !»

Non, il n'y avait pas de honte à mentir aux gens que l'on aime pour ne pas qu'ils s'inquiètent trop. Du moins en théorie... tant qu'ils ne voyaient pas le pot aux roses, cela passait sûrement crème. Et, alors qu'ils s'avançaient tranquillement il avait continué sur un autre sujet, sachant qu'il risquait bientôt de rentrer en zone de tempête -aka sur le sujet sensible- s'il continuait sur cette voie, et jouer au funambule ce n'était pas forcément ce qu'il préférait. Bien sûr qu'il sentait que ses mots étaient maladroits, mais il ne savait pas comment le formuler autrement, par ce que c'était en plus juste la vérité : il était content qu'elle soit-là, il était sincèrement heureux de voir qu'elle allait bien... qu'elle ne l'avait pas fui pour cacher de nouvelles blessures, de nouvelles séquelles... mais il avait également totalement conscience qu'il ne pouvait pas en rajouter plus pour le moment et qu'il valait mieux simplement passer au sujet principal :  l'accrobranche... tout en lui lançant un défi. Ce n'était peut-être pas encore le moment de se lancer dans le sujet « mac ».

« J’ai dû en faire une fois ou deux ailleurs ouais. Enfin j’ai surtout déjà fait de l’escalade.. enfin bref, j’ai pas tant d’éléments de comparaisons t’en fais pas. Je ne saurais pas si tu m’arnaque sur la marchandise ou pas. » Il eut un petit rire amusé. Bon c'était déjà ça, elle s'amuserait quand même si elle n'avait pas trop de comparaison. Difficile de savoir si c'était vraiment un lieu sympa quand on avait connu quasiment que celui-là. « Mais ça me plait bien comme truc ! » Il s'en doutait, elle était sportive, c'était le genre d'activité qui lui plairait sûrement mais il fut soulagé de voir qu'il avait quand même tapé dans le mile ! « T’en fais souvent ? »
 « Non, pas tant que ça... Généralement quand je trouve un ou une partenaire, voire plus, avec qui y aller, c'est beaucoup plus drôle et motivant que tout seul. »

Peut-être aussi par ce qu'il aimait la compagnie d'amis, de collègues et compagnie, qu'il aimait rire, échanger avec les autres. La solitude, sauf dans de rares moments, ce n'était pas trop son truc. Mai aussi pour ne pas être trop tout seul avec ses pensées, mais ça encore ce n'était pas quelque chose qu'il allait développer à haute voix. Inutile.
Ils avaient fait la queue pour payer l'entrée et s'il s'était attendu à ce qu'elle paye sa place et qu'il fasse de même ensuite avec la sienne, même si cela ne le dérangeait pas de payer les deux, il fut surpris de voir qu'elle avait réglé les deux. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, un peu gêné quand même de cet état de fait surtout par ce qu'elle ne semblait pas bosser et qu'il valait mieux qu'elle garde cet argent pour elle... Mais elle était grande, également, si elle agissait comme ça c'est qu'elle en avait envie – voire le besoin pour une quelconque raison-.
Alors au final, il avait essayé de refréner tout ça pour se contenter de lui faire un petit sourire chaleureux.

 « Merci Jo'.»

Ni plus, ni moins. Pourtant, il aurait voulu être certain qu'elle pouvait se le permettre que cela ne l'empêcherait pas de manger correctement plus tard. Il canalisa avec difficulté une nouvelle fois cette envie de la surprotéger, déjà par ce que ça risquait de la faire fuir et en plus, encore une fois, elle savait pertinemment qu'il aurait payé sans souci si elle n'avait pas pu se le permettre. Il ne gagnait pas énormément, mais au final, comme il n'avait pas tant de loisirs que ça, ses économies pouvaient largement passer dans ce genre de choses sans que ce soit un souci quelconque pour lui.


Attendant qu'on vienne les préparer avec les baudriers, Jordane avait repris la parole
« Alors comme ça ton égo est blessé ? C’est con qu’il y ait de monde, on va être bloqués sur les agrès sinon j’aurais bien cherché à te semer. Cela dit sur les parcours les plus vénères il devrait y avoir moins de foule. Je pourrais te mettre la misère. »
 « Tu sais, c'est fragile, ces petites choses-là... mais oui faisons ça, les parcours les plus vénères, on verra bien qui tient la distance le plus longtemps.» Elle lui avait un petit baiser ironique, auquel il avait répondu par un clin d'oeil, avant de rajouter.  « Si jamais c'est toi qui abdique avant moi... ton égo se portera-t-il bien ?»

La fougue de la jeunesse parfois, partir trop vite pour être fatigué plus vite. Il doutait que ce soit dans le caractère de Jordane, mais au final il disait plutôt ça pour plaisanter, pour la piquer un peu et qu'elle soit encore plus motivée. Etrange manière de faire, diraient certains et pourtant … il était à peu près certain que ça marcherait.
Et pendant que lui s'était fait harnacher rapidement, celui de Jordane semblait prendre beaucoup plus son temps... et beaucoup plus de plaisir à un tel point que Naveen sentit se tendre et quelques envies de mettre cet homme au tapis pour avoir une tenue un peu plus décente envers les femmes. Crispé, il n'était pas intervenu par ce qu'il savait que son amie pouvait très bien gérer la situation, mais au moindre signe de sa part qui montrerait le cas contraire il savait qu'il pouvait monter au créneau en moins de deux.  Et comme prévu, elle l'avait remis à sa place comme il le fallait. Il inspira un petit coup histoire qu'elle ne voit pas trop qu'il aurait potentiellement pu mal réagir.

« T’es pas mal comme ça ! Presqu’aussi sexy qu’en uniforme. » Il eut un petit rire, et histoire d'en raouter une couche, il fit doucement un tour sur lui-même comme s'il voulait qu'elle l'admire, ce qui n'était pas du tout le coup, mais plus de la dérision de ceux qui agissaient comme ça et bientôt, il avait répondu  « J'sais, le vert moulant me va à ravir au teint... Mais tu es mal pas non plus. Un flingue ou deux planqués, et on pourrait faire un film d'action avec toi... tu serais tout à fait crédible dans le rôle de l'aventurière ou d'la guerrière.»  Affublée de cette tenue, et avec le corps qu'elle avait c'était vrai qu'il ne fallait pas beaucoup d'imagination. Silence.  « Ca va ?» Par rapport à l'autre type...

Et alors qu'ils avaient trouvé un parcours où les gens ne semblaient pas trop s'aventurer, plus difficile que les autres, elle avait bientôt repris la parole
« Donc j’avance et j’te distance, c’était ça le deal hein ? Tout ça pour mater mon cul, bien joué Evans. »
il eut un rire franc et secoua un peu la tête  « Si j'veux le voir, ton cul, faut pas que je me laisse trop distancer, tu vois, ça fait une motivation supplémentaire.»

Il lui avait dédié son plus charmant sourire avant de faire comme elle et mettre le mousqueton dans la boucle de sécurité. Il la regarda s'élancer sur le filet à corde avant de faire pareil, préférant sur celui-là y aller lentement pour ne pas trop s'empêtrer et ne pas se fatiguer dès le départ. Il avançait probablement moins vite que sa camarade mais à un rythme plus que régulier qui fit qu'il la rejoignit quelques instants plus tard vers une petite plateforme. Il regarda le parcours devant eux où s'étendait un pont de liane.

 « Tu sais que si tu m'attends, tu ne pourras pas me distancer... ca enlève quand même un peu de défi.» Silence, haussement d'épaules avant qu'il ne continue l'air de rien  « A moins que tu veux vraiment que j'admire tes fesses... »

Ils avaient commencé s'engager sur le pont et il s'était tu pour mieux se concentrer. En avançant en même temps, ou plutôt tous les deux comme ça l'équilibre était encore plus précaire... mais ils arrivèrent rapidement à l'autre plateforme. Le stress l'avait repris et il avait fini par dire doucement.

 « Jo', j'ai une question... sérieuse. Etrange. Heu...» Gêné, oui.  « Ce n'est pas un jugement ou autres, j'veux juste être sûr que... que c'est ok pour toi.» Autrement dit, je n’interférai pas si tu ne me le demandes pas... en théorie du moins.  « La dernière fois qu'on s'est vus... c'pas un mac ou un truc similaire qui t'avait fait ça ?»  Est-ce qu'il avait l'air un peu d'un gamin gêné et pris en faute de demander ça ? Tout à fait. Par contre cette fois il était sérieux et si ce n'était pas plaisant à entendre, il était certain qu'elle pouvait entendre l'inquiétude qu'il avait dans sa voix. Et la question qu'il y avait sous-jacente, c'était surtout. Si la réponse est oui, est-ce que tu as besoin d'aide pour t'extraire de là, ou est-ce que c'est un mode de vie qui te convient ? S'il ne comprenait pas le deuxième point, absolument pas, qu'il n'arrivait même pas à envisager il savait que c'était la réponse de certaines personnes. Et il devrait l'accepter.



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Naveen Evans
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Naveen Evans
Dim 21 Nov 2021 - 1:38
C’est jamais arrivé.
Oh comme ça aurait été simple de penser ainsi et de seulement oublier ce qui les avaient liés tous les deux la fois d’avant. Simple d’oublier qu’un jour, deux, trois peut-être ; trop souvent, il lui avait tendu la main. Trop souvent, il avait été là pour deviner les plaies sous ses sourires et son assurance. Trop souvent à se taire quand il voudrait parler. Mais ce silence l’apaisait, l’appelait à rester là, à se dire que rien n’était véritablement grave. Qu’elle avait le droit, dans le fond. Qu’il savait déjà, qu’il devinait déjà. C’était apaisant, il fallait l’avouer, d’être ainsi en partie connue, sans doute pas comprise mais … oh, elle n’en savait rien. Il réussissait, c’était là tout l’important non ? Pas de repas, pas d’invitation, pas de baiser spontané alors que le mois dernier, c’était dans ses bras qu’elle étouffait quelques larmes, contre ses reins qu’elle perdait son âme. Mais il n’imaginait rien, ne partait pas dans le moindre délire, comme s’il savait qu’elle finirait bien par disparaitre de nouveau, sans nouvelles.

C’est ok pour toi ?

Il n’avait jamais cherché à la contrôler, se plaçait simplement là comme s’il lui laissait le temps de s’approcher. Comme face à un putain d’animal sauvage. Alors au fur et à mesure, elle faisait le chemin, s’éloignant dès qu’elle donnait trop, incapable alors de revenir vers lui alors qu’elle s’était sentie si vulnérable contre lui une nuit le mois dernier. Aucune fois alors elle n’avait répondu positivement. Pas qu’elle soit réellement prise mais ainsi, Jordane réinstaurait une distance dont elle avait affreusement besoin. Une distance réflexe qui semblait pourtant  inégalement répartie selon les personnes. Peut-être fermait-elle les yeux, refusait-elle simplement de voir ce qui menaçait dans la chaleur d’autrui. Peut-être ne pouvait-elle simplement pas gérer à la fois la douleur de la perte et l’oppression de la présence. Peut-être. Qu’importe, ça devrait attendre.

Attendre qu’elle ait fini ses bêtises, qu’elle ait cessé de rire bêtement, d’agresser crument, de se foutre de son égo ou de chercher le regard d’autrui. Qu’importe tant qu’elle se contentait des artifices pour ne pas creuser plus loin. Et lui, il tournait sur lui-même comme un crétin se moquant de la flatterie qu’il y aurait à se sentir désiré. Ah qu’il est agréable ce sentiment pourtant.

« J'sais, le vert moulant me va à ravir au teint... Mais tu es mal pas non plus. Un flingue ou deux planqués, et on pourrait faire un film d'action avec toi... tu serais tout à fait crédible dans le rôle de l'aventurière ou d'la guerrière.»
« Ravie d’être à la hauteur ! C’est comme l’uniforme, ça tient presque du fantasme comme image. »

Elle riait sans ambages… à vrai dire le compliment lui plaisait réellement, faisant gonfler dans son cœur la fierté d’une petite fille qui, hier, se trouvait seule dans une grande maison vide oubliant qu’elle était grande pour ne plus voir qu’un gouffre de vérité : elle était seule. Une adolescente qui avait pris les armes pour ne pas s’écrouler car c’était bien là l’image de celle qui pouvait survivre à tout ça. La guerrière, celle des films d’action, des jeux ou des romans. Celle qui avancerait sans ployer. Le short sur les longues jambes, les muscles qui se tracent sous la peau pâle, les cheveux remontés en queue de cheval, oui, Jordane attirait les regards c’était certain. Ça tombait bien, son égo en avait besoin ces derniers temps. Ce qu’ils n’imaginaient pas, c’était qu’elle était régulièrement effectivement armée à risquer sa peau. Et l’ensemble de ces deux savoirs faisait flamber une flamme sous son derme.

Ils paieront. De vous avoir fait ça. Tous.

« Ca va ?» Après un silence. « Ouais ! Pourquoi ça irait pas ? » Un sourire sur ses vides.

Ouais. Pourquoi ça n’irait pas ?

Car tu marches au bord du ravin et qu’en face, prêts à basculer, tu vois deux cœurs à la casse.  Et que tu ne sais pas quoi foutre du tien.
Sans compter ceux dont tu détournes le regard, incapable de gérer mieux que tu ne le fais.

Le filet de corde, si haut qu’il en devient vertigineux te semble alors une épreuve bien légère malgré l’entraînement de la matinée.

« Si j'veux le voir, ton cul, faut pas que je me laisse trop distancer, tu vois, ça fait une motivation supplémentaire.»
« Aaah ! Voilà ! Ça ça m’plait. Bel esprit ! »

Et elle grimpait, l’agrée très peu tiré tanguant, bougeant énormément pour les amener à dépenser leur énergie dès le premier exercice. Un mètre, deux, trois, quatre au moins. Qu’importe, ses muscles brûlaient quand sa main droite se refermait sur le bois sale de la plateforme sur laquelle elle s’asseyait le temps d’observer Naveen la rejoindre. Rapide bien que posé. Habitué, sans doute, à ce type d’exercice.  

« Tu sais que si tu m'attends, tu ne pourras pas me distancer... ca enlève quand même un peu de défi.» et il haussait des épaules, d’un air léger. « A moins que tu veux vraiment que j'admire tes fesses... »
« Ben ouais mais de dos, j’ai pas la vue sur tes bras. Et j’avais envie de mater moi aussi là ! » Les mains levées, l’air d’énoncer une évidence. « Et bien sûr que j’ai envie que tu mattes mon cul, j’l’expose assez comme ça ! »

Réponse à tout celle-là. Du moins quand il s’agit de ce genre de conneries sans grande importance. Mattes mon cul va, ça t’évitera de regarder mon cœur.

Moi aussi j’évite. Ça me cramerait les yeux.


Que veux-tu, il y a là des éclipses auxquelles il ne faut faire face sans certaines mesures de sécurité.

Voilà qu’elle se redressait d’un bloc, tirant sur la corde au dessus d’elle, faisant tanguer le pont de corde dans lequel ils s’engageaient ensuite, elle en premier, lui derrière elle. Autorisé à deux. Sans doute. Normalement. Ok, elle, elle s’en cogne, suit les ordres au sein de la Garde, c’est déjà beaucoup. De nouveau souple, les grands mouvements de balanciers rapidement insufflés par la longueur de la traversée rendaient l’avancée précaire. D’autant qu’il fallait déclipser régulièrement les mousquetons de la ligne de vie pour les remettre quelques centimètres plus loin, le tout à bout de bras malgré sa grande taille.

Sovahnn ici devrait être soulevée pour changer l’attache, tient..

La pente montait semble-t-il à perte de vue, le sol s’éloignant de plus en plus sous leurs pas.

« Jo', j'ai une question... sérieuse. Etrange. Heu...» Les doigts refermés sur la corde du pont qui les enveloppait, Jordane hésitait une fraction de seconde avant de poursuivre son geste comme si de rien n’était. « Hm ? » Les questions sérieuses, elle n’aimait pas trop ça, tient. Il faut qu’on parle. Non non, il ne faut rien du tout. Avance et ne réfléchi pas. En tout cas pas sur moi. « Ce n'est pas un jugement ou autres, j'veux juste être sûr que... que c'est ok pour toi.» Devant lui, le regard porté sur les pas qu’elle alignait sans perdre le rythme, Jordane grimaçait.
Part du concept que globalement rien de ce qui se passe en ce moment n’est ok pour moi. « La dernière fois qu'on s'est vus... Eh merde…. c'pas un mac ou un truc similaire qui t'avait fait ça ?»  

Cette fois, elle s’arrêtait, se retournant vers lui, la hanche callée dans la corde qui s’affaissait sous elle mais retenue par la corde reliée à la ligne de vie qu’elle tenait de sa main droite. Le regard planté dans le sien, une grimace tordue de scepticisme sur les traits.

« Qu… quoi ?! »

T’en fais une belle pute.
Ouais je sais.


Le tissu du t-shirt pincé par le harnais, les abdos contractés dans ce ventre plié de côté. Et la lèvre relevée d’incrédulité. Et lui, étrangement penaud face à ce regard perçant, l’angoisse de la voir s’enfuir, elle pouvait la deviner.

ça fait un mois que t’attends de me demander de ça ?

Et brusquement, elle explosait de rire, se demandant combien de fois il avait retourné cette question dans sa tête pour la lui sortir ainsi de but en blanc, conscient qu’il n’y avait sans doute pas de bonne façon de demander ça mais que celle-là n’était probablement pas optimale.

« Putain et t’attends littéralement que je sois entourée de grillage et attachée pour me demander ça quoi ! » Le rire qui claque joyeusement cynique dans les feuillages. Ça, pour savoir qu’elle risquait de se barrer, il en était conscient. « C’est pas mal ça comme technique ! La prochaine fois, si tu me mets les menottes, j’vais me poser des questions ! » Et loin devant sur une plateforme, un type se retournait vers elle. Ah, t’as parlé fort mon enfant !

Toujours un sourire mais pas de réponse. Dans ses yeux, il y a des souvenirs d’hommes, des souvenirs d’ignobles, des souvenirs d’utiles, d’oublis, de vide. Dans ses yeux, il y a les torrents secs qui frappent les roches. Qui frappent ses os. Mais ses muscles, eux, restent bandés, son menton haut, ses épaules fières, solides face au poids qui pèse pourtant.

Jolie poupée disloquée s’est ré-emboitée. La lueur piquante dans les iris, les lèvres insolentes, les pommettes hautes, moqueuses. La flèche cramée de son âme toujours prête à s’abattre, à refuser l’aide. A se battre. Mais la flèche voit aussi l’inquiétude, la douceur, la sollicitude. Toutes ces parts de bienveillance qu’elle a d’abord pris, sept ans plus tôt, pour un mensonge apte à plaire. Mais il ne mentait pas. Il l’était véritablement. Gentil.

Pourtant la vie t’a claqué à la gueule. Elles sont où ? Abby. Callie. J’ai pas oublié tu sais. Tu fais comment ? Pour chercher sans cesse à relever les autres ainsi ? C’est ça que tu fais hein, tu me proposes ton aide, une foutue main tendue de plus au cas où je sois esclave d’un type, quel qu’il soit.

Le rire se taisait, ses lèvres n’en disaient pas plus, les torrents sauvages ondulant dans le clair obscur des feuillages dont les ombres dansaient sur sa peau.

Dans le fond de son âme, une envie brutale, fourbe, mauvaise de claquer ces deux noms soudainement, de poser la question tant retenue. De faire mal. Pour faire reculer. De blesser. Pour forcer le rejet.

C’est une simple question Jordane. Enveloppée de non jugement, de paillettes et de guimauve. D’incertitude et d’hésitation.

J’suis pas comme ça moi. Bienveillante. J’suis une garce moi. La vie m’a pété à la gueule comme une bombe dégoupillée et j’ai pas accepté, moi. J’ai pas tendu l’autre main, l’autre joue, l’autre plaie.

Ça ferait quoi ? Moi. Si j’attaquais ?


« J’ai pas d’mac. » Les trois mots sonnaient comme un affront, un défi balancé dans le vide. Les crocs à peine visibles sous la moquerie du sourire. Pas besoin d’aide, te dis-t-elle. « Et j’vais bien. » J’ai pas b’soin d’aide jte dis.

J’en ai niqué des gueules.
J’en ai tenu des fronts.
Je suis debout.
Je vais bien.

Elle se retournait, la flamme dans les yeux, un sourire en coin à t’en claquer les sens, mutine l’insolente. Prête à voleter ailleurs, l’orgueilleuse. C’était ce qu’elle faisait, d’ailleurs, cavalant soudainement, légère et fluide jusqu’à la prochaine plateforme de bois, déjà partie sur les rondins accrochés au bout de chaînes, roulant sous ses pieds, basculant à chaque pas comme des balançoires éloignées les unes des autres. Premier agrée avalé, les muscles bandés, assurée dans chaque pas, poussée par l’envie d’avancer ou de fuir, sans trop savoir quel était le pire. Pourtant au suivant, passant déjà la plateforme de bois, Jordane s’arrêtait. Des étriers reliés par des cordes, éloignés les uns des autres de sorte à ce qu’il faille se balancer pour attraper la chaine, gainer pour se tracter en avant et passer le pied dans le nouvel étrier, se laisser basculer un peu en lâchant le précédent, recommencer.

Elle avait le bout du pied dans le quatrième étrier, les trois premier balançant depuis son passant, ceux de derrière l’attendant fièrement. La seconde jambe dans le vide, la main accrochée à la chaîne, la seconde dans le vide, elle attendait que Naveen rejoigne la plateforme et le fixait silencieuse.

« C’est si compliqué que ça… de ne rien savoir de moi ? »

Rien d’étonnant pour une telle question, que d’être pendue dans le vide.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Dim 21 Nov 2021 - 17:28
L'humeur était bonne enfant ? Effectivement, et il préférait que ça se passe comme ça en ce moment, les sujets plus sérieux auraient tôt eu vite d'être abordés de toute manière. Alors, il faisait le con ne pouvant s'empêcher de tourner sur lui-même pour qu'elle fasse semblant de l'admirer tout en continuant à débiter de nouvelles conneries.

« Ravie d’être à la hauteur ! C’est comme l’uniforme, ça tient presque du fantasme comme image. »
Il eut un petit rire amusé, avant de secouer la tête.
 « Celui de pompier est quand même un peu plus glorieux et fait généralement meilleure impression, mais il moule tout autant.» avait-il continué   « Ca fait beaucoup de fantasmes, non ? Surtout en l'espace de quelques minutes alors qu'on doit surtout avoir l'air ridicule.»

Non en vrai ce n'était pas franchement la tenue la plus saillante qu'ils pouvaient avoir, mais c'était tout aussi drôle comme ça. Il eut une petite moue et il avait bientôt fini par lui demander si ça allait – après l'épisode avec l'autre homme- .

« Ouais ! Pourquoi ça irait pas ? »

Et pour toute réponse, il s'était contenté d'hausser un peu les épaules. Pas la peine d'essayer d'argumenter dans ces moments-là, il savait que ça ne servirait à rien. Jordane savait pertinemment de quoi il parlait, elle lui disait que c'était ok ? Et bien d'accord. On insiste pas plus. Pas avec elle du moins. Par ce qu'il avait conscience qu'elle faisait partie de ces gens pour qui c'était contre-productif tandis que d'autres avaient probablement juste envie de se confier mais qu'il fallait les tanner un peu plus. Ne pas aller plus loin. La croire même s'il restait quand même un peu septique.  Mais ça non plus, il ne pouvait pas la laisser le percevoir, alors il avait continuer à déconner... sur quelque chose qui passait toujours plutôt bien avec Jordane à savoir le cul.

« Aaah ! Voilà ! Ça ça m’plait. Bel esprit ! »
 « Je sais, tout dans le glamour et la finesse.»

Et puis, c'est vrai. Elle était bien foutue, il ne pouvait pas dire le contraire. Alors autant plaisanter sur tout cela, autant faire le mec un peu lourd ou qui lui faisait trop de compliments sur ses atouts. L'escalade avait bientôt commencé, il la suivait pour le moment sans se faire distancer, mais il était clair qu'elle aussi semblait très à l'aise dans ce genre de lieu.

« Ben ouais mais de dos, j’ai pas la vue sur tes bras. Et j’avais envie de mater moi aussi là ! Et bien sûr que j’ai envie que tu mattes mon cul, j’l’expose assez comme ça ! »
 « Je pourrai toujours passer devant après... que tu puisses les admirer, comme ça, il n'y aura pas de jaloux.»

Il eut un petit sourire taquin. C'est bien aussi de rester dans ce registre, dans ces « chamailleries », dans ce petit jeu sans réel avenir. Ca évitait de tendre trop vers les sujets sérieux, dont celui qui lui prenait la tête depuis tant de semaines. Et pourtant, il savait pertinemment qu'il allait bientôt devoir l'aborder.. et il ne savait toujours pas comment faire. Une chose était à peu près certaine, il faudrait qu'il attende encore un peu. Ou pas. Si, attendre pour ne pas qu'elle se sente trop prise au piège, même si effectivement elle pourrait partir dans tous les cas ?
Il continuait de suivre Jordane, et pas franchement plus grand qu'elle, lui aussi était à bout de bras par moment... et soudain. Il s'était entendu reprendre la parole, le stress avait gagné sur sa logique initiale. Il s'était donc lancé de la manière la plus maladroite qui soit mais qui avait le mérite d'être assez franche.. Il essayait néanmoins de lui faire comprendre que malgré tout, tout ce qu'il voulait c'était juste être certain qu'elle allait bien, qu'elle n'avait pas besoin d'aide. Et il se sentait à chaque parole un peu plus comme un gamin pris en faute. Merde, qu'est-ce qu'il se sentait con et mal de lui sortir ça comme ça, ici. Pas le choix le plus judicieux, Evans.

Et à la fin de son monologue elle s'était arrêtée pour se tourner vers elle. Regard dans le sien ; tandis qu'il avait à présent bien du mal à savoir ce qu'elle pouvait penser. Mais il n'avait pas repris la parole, il s'était contenté de la regardé, un peu gêné, pour ne pas dire qu'il ne savait plus trop où se mettre, mais hors de question de baisser le regard. Il s'inquiétait juste pour elle. Tout simplement.

« Qu… quoi ?! »

On sait très bien tous les deux que tu as très bien compris ? Si bien qu'il ne reprit pas la parole, la laissant encaisser l'information, la surprise. Ne rien rajouter. Ne pas s'excuser plus... même s'il se doutait que ça pouvait être mal pris, que l'on pouvait le voir comme une insulte ce qu'il sous-entendait. Mais tant pis. Il préférait ça, qu'elle le voit mal, mais qu'il ait la certitude qu'il se trompait, ou plutôt que Maxence l'avait mis sur une fausse piste. Et le silence avait flotté encore jusqu'à ce que soudain, elle éclate de rire. Ah ? Heu ? Cette fois, il cligna des yeux franchement perplexe... mais quelque part un peu rassuré... Es(tu sûr que c'est de bonne augure ? Ce rire peut être encore plus destructeur que bien des mots. Attends de voir la suite avant de te réjouir de suite. les rires, dans les moments les plus inopportuns par ce que les nerfs lâchaient – ou autres- était au final quelque chose d'assez courant.

« Putain et t’attends littéralement que je sois entourée de grillage et attachée pour me demander ça quoi ! » Nouvelle moue, un peu gênée.. par ce que ouais... c'est vrai que ce n'était pas du tout judicieux. « C’est pas mal ça comme technique ! La prochaine fois, si tu me mets les menottes, j’vais me poser des questions ! »
 « Dois-je noter que tu n'es pas contre les menottes ?»

Naveen !!! Le sujet était sérieux ! Et le pire c'est que c'était sorti d'une spontanéité la plus totale.. par ce que même si elle était fâchée, ou blessée, elle ne semblait pas si outrée qu'il aurait pu le penser, elle ne semblait pas non plus en mode fuite... rien n'était gagné. Très loin même. Mais, elle avait parlé de prochaine fois... ce qui restait plutôt de bonne augure lorsqu'il s'agissait de Jordane, du moins de son point de vue.

 « Sérieusement, ce n'était pas censé arrivé maintenant.. J'ai un poil craquouiller.»

Il haussa les épaules, et laissa juste un peu plus de distance entre eux avant de la suivre lorsqu'elle réavancerait, qu'elle ne se sente pas trop oppressée, qu'elle ait toujours de l'espace et même une longueur d'avance sur lui si elle souhaitait partir.
Mais en attendant la vraie réponse à sa question n'était toujours pas tombée.

« J’ai pas d’mac.  Et j’vais bien. »

Est-ce qu'il venait de pousser un réel et fort soupir de soulagement ? Tout à fait ; merde lui qui voulait être discret, c'était raté, maintenant elle allait savoir à quel point ça l'avait travaillé. Il se passa une main dans les cheveux, et si la première phrase, il voulait bien la croire – ou du moins qu'à son niveau il ne pourrait rien faire- pour la deuxième affirmation ne sonnait pas aussi juste qu'elle l'aurait voulu à ses oreille. Peut-être qu'elle allait bien, et que c'était lui et son côté un peu trop surprotecteur qui s'était mis en marche ; mais peut-être qu'elle n'allait pas bien et qu'elle ne voulait juste pas d'aide. Et tu ne peux rien dire, Evans. Qu'est-ce que tu fais deux ans ? Mentir. Encore et toujours. « oui, ça va ». Et tu continues de le faire sans état-d'âmes en sachant pertinemment qu'un jour viendra où tout t’explorera à la gueule. Alors Jordane, es-tu aussi dans ce cas-là ? Il n'en savait rien, mais même si la réponse était oui, il ne pourrait rien y faire, il était trop bien placé pour comprendre qu'il valait mieux laisser passer les choses et juste être présent au moment où tout dégringolerait. Il essayerait, si elle acceptait à ce moment-là de la rattraper, d'être là pour elle, de l'aider comme il le pourrait.

Alors non, il n'avait pas repris la parole, préférant le silence ce coup-ci... tandis qu'elle avait recommencé sa « course », son cheminenement sur les rondins de bois. Derrière elle, lui prenait son temps alors qu'il aurait pu avancer un peu plus vite ; qu'elle puisse partir hors de sa vue si elle le souhaitait, lui laissant cet espace vital font elle avait probablement besoin. Mais non, à la prochaine plateforme, l'avait attendu -ou plutôt elle s'était arrêtée ce qui était plus ou moins la même chose-, pendant un instant il s'était demandé si elle ne cherchait pas à le désarçonnait, pour qu'il arrête, pour qu'elle gagne. Victoire pour elle.. Mais là encore, erreur de sa part... car elle avait juste continué sa route tandis qu'il continuait de la suivre arrivant à son tour sur la plateforme. Visualiser et se concentrer sur la nouvelle difficulté du parcours. Essayant de bien prendre son souffle, d'avoir les gestes les plus correctes pour ne pas trop se fatiguer avant l'heure, il allait poser un premier pied sur l'étrier lorsqu'elle avait repris la parole

« C’est si compliqué que ça… de ne rien savoir de moi ? »

Ah. Bonne question, qui n'était pas si facile que ça à répondre. Il se concentra plus sur la jeune femme que sur ce qu'il était en train de faire pour essayant de capter son regard et manqua de lâcher sa prise se rattrapant in-extremis dans un geste absolument pas élégant. Aoutch. Légère grimace, alors que son bras l'avait retenu et tout la pression qu'il avait ressenti d'un coup.  Il avança finalement une première fois, sans plus se planter avant de répliquer.

 « Est-ce que je t'ai déjà posé des questions sur ta vie, à part les fois où tu étais mal ?» Ce n'était qu'une question. Une seule foutue question. Il déglutit avec difficulté, par ce que s'il pouvait comprendre la jeune femme, il fallait aussi qu'elle visualise, lui ce qu'il voyait... et comme il ne savait rien se faire des scénarios étaient si faciles.  « Soyons francs, qu'est-ce que je sais réellement de toi, Jordane ?» Pas de haine, de ressenti, de colère : juste un état de fait. Il ne savait presque rien, et il ne lui avait jamais rien demandé lorsqu'il avait compris qu'elle n'avait pas envie d'en parler.  « Je respecte ton choix, de ne rien dire... mais ... mais quoi, Evans ? Est-ce que tu veux la faire fuir ? Non bien sûr que non. Pourtant, il y avait une part de frustration qu'il ressentait lorsqu'elle avait dit cette phrase. Par ce qu'il la trouvait particulièrement injuste.  ... je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose. «  Et tu le sais, en plus que je respecte tes choix, sinon, ça ne serait pas chez moi que tu serais venu. Tu le sais que je tiens à toi. Tu le sais, alors pourquoi me reprocher ça ? Pour être blessante, pour que j'arrête tout et que je t'envoie balader ? Raté.  «Je ne veux pas être de ceux qui voient que quelque chose ne va pas et qui préfèrent fermer les yeux, par ce que c'est plus simple, par ce que ça les arrange, par ce que ça évite une dispute ou une fuite. » Il avança de nouveau un peu avant de continuer  « Tu as répondu à ma question, je ne comptais pas insister.»

Alors qu'est-ce que tu me reproches-là ? Qu'est-ce que tu veux que je sache de moins de toi ? Je ne sais pas ton métier, ce que tu fais de tes journées, où tu habites. Non les seules informations que j'ai à ton sujet c'est ton âge, ton prénom, le fait que tu ais visiblement un coloc – violent?-, que tu fais/as fais des sports de combats et que tu as voyagé. Mais surtout que tu étais une gamine qui draguait les gens plus vieux pour un toit à l'époque et aujourd'hui que tu te ramènes chaque fois avec des bleus. Alors, Jordane, qu'est-ce que tu attends de moi, à quel point est-ce que je dois fermer les yeux ? A quel point est-ce que je dois me renier pour que tout se passe bien ? Par ce qu'à ce moment-là, il ne savait plus. Il ne comprenait plus. Elle aurait été en colère, il aurait pu saisir, mais là ? Quelque chose lui échappait totalement.
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Naveen Evans
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Naveen Evans
Jeu 2 Déc 2021 - 0:47
Que dire ? Qu’il était étonnant qu’une telle question ait mis tant de temps à surgir entre les lèvres de quelqu’un. Voilà tout. Lui avait pu voir celle qu’elle était bien des années auparavant. Moins subtile, sans doute. Plus brusque et directe, moins certaine de ce qu’elle pouvait faire, plus profondément inquiète de ce qui pourrait se passer. Mais au fil du temps Jordane avait prit ses aises dans un milieu qui n’accueillait pas les jolies jeunes femmes de son genre pour les bonnes raisons. Mais elle avait avancé, s’était trouvé une voie là où il n’y en avait pas. Et non, ce n’était pas auprès d’un mac, cette option aurait sans doute été trop aisée. Pour autant cette question en soulevait d’autres, plus pudiques chez elle. Et lui… c’était justement parce qu’il n’avait jamais cherché à planter des limites sur son comportement et sa liberté de garder certaines choses pour elle qu’elle n’envisageait pas de le planter là sans autre forme de jugement. Naveen avait été fidèle à sa manière à ses propres valeurs, à la bienveillance sans faille qu’il lui offrait et pour ça, elle n’avait pas envie de se comporter en gamine furieuse et apte à criser pour rien. Car c’était bien là ce qu’elle faisait par moment. Un caprice. Alors c’était par le rire qu’elle répondait, trop consciente qu’il n’y avait dans cette question qu’une volonté profonde de lui tendre la main si elle en avait besoin. Ne se serait-elle pas plantée en réponse furieuse et implacable si quelqu’un avait agit ainsi sur ceux qu’elle appréciait ? Ne se battait-elle pas tous les jours pour ne pas agir en empotée stupide qui ne rêvait de d’une chose : crever les yeux de ceux qui lui avaient déjà pris un frère d’arme et avaient manqué de l’en délester de deux autres ? Sans compter qu’aucun des trois n’était « que ça » à ses yeux. Alors oui, elle riait, parce qu’elle le lui devait bien, consciente qu’elle lui en faisait baver à sa façon.

« Dois-je noter que tu n'es pas contre les menottes ?»

Réponse réflexe. Réponse parfaite même, qui la prenait de court tant elle était naturelle et lui arrachait un rire bien plus clair et dégagé.

« Tu peux l’noter oui. »

Son esprit, ce troll, partait une seconde auprès des souvenirs de Lex, de cette conversation très étrange qu’ils avaient pu avoir, du malaise de ce qu’il énonçait et qu’elle aurait aimé passer sous silence quand au contraire il se murait dans le mutisme quand son comportement lui arrachait pourtant le myocarde et qu’elle aurait aimé démêler tout ça.

Pas le sujet. Tellement pas le sujet putain.

« Sérieusement, ce n'était pas censé arrivé maintenant.. J'ai un poil craquouiller.»

Pas comme ça que tu aurais voulu le dire hein ? Tu la gardes depuis longtemps, cette question qui te ronge ? Sept ans ? Ou seulement la première nuit. La dernière ? Sans doute la dernière. Depuis que j’ai eu un comportement de gosse vulnérable totalement ébranlée et incapable d’encaisser. Depuis que je me suis réfugiée contre toi l’espace de quelques heures avant de seulement faire comme s’il n’y avait rien.

Une phase dans laquelle elle était toujours, essayant de simplement dépasser tout ça sans faire peser sur Dorofei le poids de ses sentiments. Responsable mais non coupable, c’est bien ce qu’on dit dans la loi non ? Pourtant ça allait mieux… et le soulagement n’était pas venu de là où elle l’attendait. Mais puisqu’elle n’avait aucune volonté d’aborder le sujet avec Naveen à présent, Jordane faisait ce qu’elle savait faire de mieux. Elle donnait deux pauvres informations entrecoupées de silence, comme balancées comme ça, vieille purée dans l’assiette du self. Et elle s’esquivait. Voilà bien ce qu’elle avait fait, passant le long pont de corde pour traverser vivement la plateforme suivante et se lancer dans l’atelier où quelques étriers permettaient de traverser. Une dizaine, amenant donc les participants à se fatiguer, sans cesse gainés et tendus pour gérer leur équilibre et attraper le prochain étrier. Pourtant ça n’était pas ce qu’elle cherchait à faire. Restée là, suspendue une jambe dans le vide, la seconde dans l’étrier, le bras stabilisant sa posture pour observer Naveen la rejoindre en douceur.

C’est pas toi que tu ménages. C’est moi. Et ça n’a aucun rapport avec nos aptitudes physiques à chacun n’est-ce pas.

Alors la question sortait, sans vraiment qu’elle ne s’y attende. Une question qui tournait trop souvent pour qu’elle ne l’admettre, qui la blessait parfois, qui résonnait surtout. Une question qui importait réellement et qu’elle n’avait jamais osé poser, non plus. Après tout, ceux à qui elle pouvait l’énoncer ne savaient pas de quoi elle voulait parler et ceux qui auraient pu… n’étaient plus là pour lui répondre. Alors cette fois, elle se lançait… et pour le coup, c’était lui qui retombait. Sans doute pris de court, perturbé ou troublé, Naveen loupait son geste et glissait, se rattrapant dans une position qu’elle notait, espérant qu’il ne se soit pas blessé tout autant qu’elle s’agaçait de sa maladresse. Comme si les autres n’avaient pas le droit à leur tour d’être impactés… tu es injuste, Jordane. Alors même que c’est bien là la teneur de ton interrogation.

Alors ? Est-ce dur ? Dur de me suivre, dur d’être là, dur d’exister dans mon sillage ?
Est-ce que je vous fais du mal ?

A eux, je leur fais du mal tu crois ?


Il se ressaisissait et avançait, à deux sur un atelier, comme il était écrit partout de ne pas faire. Avec un écart, surtout, entre eux. Et les yeux rivés dans les siens, étrangement durs quand ils étaient d’ordinaire si doux.

« Est-ce que je t'ai déjà posé des questions sur ta vie, à part les fois où tu étais mal ?»

Ok. Donc oui ça l’est.

Le ton sec sans être réellement tout à fait brusque l’agressait, la prenait de court. Lui qui semblait toujours comprendre et laisser couler lui semblait faire barrage pour une fois, hérissant ses nerfs et faisant crisser ses  peines. Sans doute parce qu’il énonçait droit sur le papier qu’elle avait été mal. La pauvre petite victime qu’on secourt, voilà ce qu’elle semblait être soudainement face à lui. L’adolescente apte à en faire des bêtises, qu’on mettait face à ses larmes quand elle se croyait forte, pauvre buse qu’elle était.
A son tour, Jordane déglutissait mais ne dit rien.

« Soyons francs, qu'est-ce que je sais réellement de toi, Jordane ?» Et lui retrouvait un ton factuel qui tendait pourtant à lui crisser les nerfs. Sans doute y avait-il dans cette façon de se sentir agressée l’appréhension d’être en effet en tort. Car ce qu’on pouvait lui reprocher, la jeune femme le savait parfaitement. Elle ne faisait qu’attendre le moment où la bombe exploserait et l’enverrait au loin de ceux qu’elle appréciait. Qu’elle aimait, même, oserait-on dire. Après tout, on se fout bien d’énoncer les sentiments quand la distance est vouée à les étouffer.
Tu sais qui je suis. Sans doute plus que quiconque ici. Et cette réalité lui pétait à la gueule à l’instant. Oui, il savait quelle gosse paumée elle avait été, cherchant à faire plier autrui sans réellement savoir comment agir. Cherchant, sans doute, à se détruire. Oh oui, tu en sais déjà bien trop Naveen. C’est vrai, tu ne sais pas d’où je viens, ce que je fais, qui j’aime et qui j’ai quitté. Mais tu sais ce qui marque mon caractère, dessine mes choix et peint mes décisions. Tu sais ce que je n’ai pas dit aux autres. Ce que je crains qu’un jour, quelqu’un dessine de la pointe du fusain. Mais toi tu sais déjà. Et je suis encore là.
« Je respecte ton choix, de ne rien dire... mais ... Ce ‘mais’ crissait dans ses os avec autant de violence que si son mousqueton s’était soudainement détaché et qu’elle s’était rétamé au sol le crâne en avant. ... je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose. Dans ces mots, elle entendait les inquiétudes de ceux qui avaient quitté son chemin depuis bien longtemps et sa poitrine se serrait. Alors Jordane détournait le regard, masquant dans le bleu de ses yeux ce qui ne laissait pas de marques sur sa peau mais qui lui tatouait pourtant le cœur depuis bien des années.

C’est amusant, non ? Que personne n’ait osé te dire ça depuis longtemps.

«Je ne veux pas être de ceux qui voient que quelque chose ne va pas et qui préfèrent fermer les yeux, par ce que c'est plus simple, par ce que ça les arrange, par ce que ça évite une dispute ou une fuite. »

Dans le vide, Naveen lâchait une main, attrapait la chaîne d’un étrier, le ramenait à lui, passait une jambe dedans pour lâcher celui qu’il laissait pendre derrière lui, se rapprochant d’un mètre d’elle. Et elle… elle avait ce recul physique, purement animal bien avant de chercher à seulement intégrer ce qu’il pouvait bien lui raconter. Il y avait chez elle une crainte viscérale à être enfermée quand étaient évoqués ces sujets-là.

« Tu as répondu à ma question, je ne comptais pas insister.»

De nouveau, elle déglutissait, se forçant à retrouver son regard, à comprendre ce qu’il venait de dire. Faire taire les cloches de l’angoisse n’était pas toujours simple mais il lui semblait n’être qu’une pauvre môme incapable d’agir en adulte quand elle était ainsi. Cette faiblesse qui crachait dans sa poitrine, elle aurait aimé la tordre totalement pour l’enterrer loin d’elle plutôt que de sentir le souffle lui manquer et sa gorge se resserrer encore.

Pourtant ce qu’il lui disait, outre ce quelque chose qu’elle sentait en lui et qu’elle percevait comme blessé donc agressif… elle pouvait l’entendre. Ne pas agir, être celle qui se tait face à un danger était une erreur qu’elle avait déjà fait et dont elle comprenait les fracas. Pire encore, elle savait que derrière ses mots il y avait une colère qui couvait, parce qu’il…. n’y arrivait pas.

’J’y arrive pas avec toi… ‘

Elle l’avait tant entendu déjà.

Tu penses que si tu es toi, je vais m’enfuir ?
Tu as sûrement raison.
Tu penses que tu pourrais faire quelque chose ? Me sauver de ce que je suis, de ce que je fais, de ce qu’est ma vie ?
Tu peux pas.

Un moment, Jordane était restée muette, le regard planté en lui comme si elle pouvait extraire ce qu’il ne disait pas.

« Il m’arrive déjà des tas de choses Naveen. Des belles parfois, mais des sacrément moches aussi. Et parfois, c’est les deux mélangées… » Parfois, je comprends une complicité que je n’imaginais pas et dont j’ai besoin à travers des moments impensables. Parfois je peux pas. Parfois je me rappelle ce que c’est d’aimer, et je regarde ensuite un cercueil s’enfoncer sous terre. Et parfois, je la bouffe la tête la première, la terre, sous les coups d’un ami qui devient ce que je n’attendais de personne avant lui. Parfois j’ai peur. Parfois j’ai besoin de prendre de la hauteur, d’oublier que j’ai pu glisser dans tes bras, ou dans des autres. Que j’y ai peut-être trouvé le calme le temps de quelques trop longues minutes.  Parfois c’est pire. Parfois j’oublie ce que c’est que d’être moi. Et de pas savoir. Il m’arrive des tas de choses. Et moi j’ai pas envie de les voir. « … ça arrête pas. » ça me pète à la gueule tous les mois et j’ai pas le temps de me rattraper que ça explose à nouveau. Je crois que je ne saurais pas passer quatre semaines sans qu’on m’en demande encore plus. Sans que d’autres attendent de moi ce que je ne sais pas. Tu crois qu’ils arrêteront, un jour, de vouloir nous foutre à genoux ? Tu crois que j’arrêterai, un jour, de craindre que vous me demandiez d’aimer, d’exister, d’être là, de m’engager, de promettre des choses auxquelles je ne crois pas ?

« Ecoute, j’en ai ma part de responsabilité. Et si j’avais un mac prêt à me démonter la gueule, c’est qu’à un moment ou à un autre, j’aurais accepté cette situation. A moi, donc, de m’en sortir. Qu’importe ce qui peut m’arriver, toi, t’y es pour rien. Et si je venais à disparaitre, sache que tu as tout fait et que tu ne pouvais rien faire de plus. » Je pourrais. Je pourrais être la prochaine. J’aurais pas à affronter ce que je provoque alors. Ça serait beau, tu crois pas ? De mourir en guerrier, loin d’un échec assuré.. Pas si mal, cette fois. J’aurais pas à être celle qui foire tout, celle qui blesse et qui vous tue à coup de cœur, coup de veine, coup d’erreurs…   « Et vu ta réaction… ouais : c’est compliqué de ne rien savoir de moi. Et ça a l’air de t’faire du mal. »

Oui. Parce que dans le fond, encore une fois, ce n’était pas d’elle qu’elle parlait. Seulement de lui.

Seulement de vous, tous.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Dim 5 Déc 2021 - 14:04
Est-ce qu'il se sentait soulagé d'avoir enfin pu larguer ce message qui lui tenait à cœur et qui l'inquiétait ? D'une certaine manière oui. Au moins c'était fait, pas comme il l'aurait voulu et il restait toujours qu'il craignait un peu sa réaction ou un retour de bâton mais ça serait quand même assez bien mérité. Il avait cas faire les choses un peu mieux ! Il s'était totalement vautré dans sa façon de présenter les choses et avait été à la limite de l'indécence même s'il était certain que Jordane comprendrait là où il voulait en venir : que ce n'était pas un jugement, juste de l'inquiétude pour sa vie, juste l'envie de l'aider. Alors oui, il avait été étonné lorsqu'elle avait répondu par le rire et avait saisi la première perche tendue, il faut bien l'avouer. Par ce que oui, forcément, elle avait parlé de menotte d'une telle façon qu'il n'avait pas pu s'en empêcher et que c'était sorti plutôt assez naturellement. Et il avait réussi à la faire rire cette fois, d'un rire plus agréable, plus spontané, plus vrai, quelque chose qu'il reconnaissait un peu plus à la Jordane habituelle.

« Tu peux l’noter oui. »

Il eut un petit sourire en coin qui montrait clairement qu'il comptait le noter. Pas besoin de dire quelque chose de supplémentaire. Ca serait en faire trop. Le silence avec le regard et sourire adéquat était beaucoup mieux selon lui, il lui correspondait mieux. Pour lui montrer aussi que rien ne changerait, que ce n'était au final qu'une question, osée certes, mais c'était tout. Malgré tout, il avait conscience d'avoir abusé ou plutôt de ne pas avoir mis assez de forme, alors il en était venu assez rapidement à s'excuser par ce que c'était la moindre des choses : non pas pour le fond des paroles, mais pour l'endroit où il l'avait fait et la manière... mais au moins, il avait eu la réponse qu'il attendait. Il était soulagé en grande partie, par ce que s'il la croyait lorsqu'elle disait qu'elle n'avait pas de mac, il n'était pas certain qu'elle aille bien. Réellement bien. Ce n'était que quelques mots, un mensonge si facile à proliférer. « ça va », des mots qui n'avaient pas beaucoup de sens au final et pourtant quelque part il avait quand même une vertue un minimum apaisante.

Et bientôt, elle avait fait ce qu'elle savait faire de mieux ; retourner la situation avec une seule question qui le laissa tellement perplexe, le surpris qu'il manqua de se rétamer en beauté, se rattrapant de justesse. En soi, elle avait raison. C'était son droit de ne pas parler d'elle ; il ne  pouvait pas l'y obliger même s'il aurait voulu en savoir un peu plus... Néanmoins, elle était quand même un peu piquante alors qu'il essayait réellement de la ménager dans ce sens, bouffant la plupart des questions qu'il avait pour le bien être de son amie, pour ne pas qu'elle se sente acculée et qu'elle fuit. Il n'aurait pas dû lui vouloir de lui demander et pourtant cela résonnait trop fort en lui. Et il avait bientôt répliqué probablement un peu plus sec qu'il ne l'aurait voulu. Par ce qu'il ne comprenait pas. Par ce qu'il ne savait quasiment rien sur elle. Alors qu'est-ce qu'elle voulait ? Qu'est-ce qu'elle cherchait ? Qu'est-ce qu'elle lui reprochait au juste ? De s'inquiéter pour elle ? Mais c'était simplement ce qu'on fait pour les gens auxquels on tient. Il avait inspiré pour retrouver un ton plus factuel, qu'elle comprenne qu'au final, ce n'était qu'une broutille. Il avait repris en essayant de lui expliquer le « choix » de cette question, qu'elle comprenne que ce n'était pas de la curiosité mal placée, qu'il respectait ce qu'elle voulait dire ou pas : sauf en cas de « force majeur ». Tandis qu'il avançait, elle avait un léger recul qui semblait plus réflexe qu'autre chose, mais qui quelque part faisait mal. Cela donnait l'impression d'être l'ennemi ou quelque chose de similaire, d'être un bourreau qui avait touché un point qui faisait mal. Et il ne voulait pas la blesser, il ne voulait qu'elle se sente acculée. Ris, allez marre-toi la situation est totalement débile, rocambolesque. Je suis débile d'avoir réagi comme ça. C'était stupide. Improbable. Alors, rigole par pitié, ça ne mérite rien de plus. Mais le rire semblait loin pour l'instant, alors il avait fini en lui faisant comprendre qu'il n'insisterait pas – comme il essayait de le faire au maximum-. Est-ce que tu le comprends que c'est juste ton bonheur, te voir heureuse et épanouie qui m'intéresse ?

Et ils s'étaient regardés longuement, tandis qu'il s'était arrêté en plein parcours pour ne pas la brusquer d'avantange, toujours pour lui laisser l'espace nécessaire. Silence, presque de morts. Et il ne comptait plus rien rajouter pourtant il avait envie de lui dire de dire quelque chose, même si c'était pour l'envoyer bouler. C'était presque préférable à ce stade-là. Par ce que le « verdict » de la jeune femme, quelque part, il le redoutait. Par ce qu'elle pouvait fuir ou encore se renfermer.

« Il m’arrive déjà des tas de choses Naveen. Des belles parfois, mais des sacrément moches aussi. Et parfois, c’est les deux mélangées… »

Comme à tout le monde en somme, le monde était bien plus souvent gros que tout blanc ou tout noir. Pour l'instant, il se contenta d'acquiescer doucement, par ce que jusque-là, il comprenait totalement... mais il n'était pas certain de voir où elle voulait en venir exactement. Probablement qu'elle n'avait pas fini, alors il préférait la laisser continuer. C'était primordial

« Ecoute, j’en ai ma part de responsabilité. Et si j’avais un mac prêt à me démonter la gueule, c’est qu’à un moment ou à un autre, j’aurais accepté cette situation. A moi, donc, de m’en sortir. Qu’importe ce qui peut m’arriver, toi, t’y es pour rien. Et si je venais à disparaitre, sache que tu as tout fait et que tu ne pouvais rien faire de plus. »

Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais la referma aussitôt. Ce raisonnement tenait la route, totalement. C'était vrai en soi, mais parfois il y avait de mauvais choix de faits et c'était difficile de s'en sortir seul, il fallait juste un petit coup de main. Il eut un doux sourire, dont la manière dont elle avait prononcé les choses, même si sa dernière phrase laissait encore pas mal de questions en suspens : est-ce qu'elle pensait disparaître ? Est-ce qu'elle se sentait en danger ? La réponse, même s'il posait la question il ne l'aurait pas. C'était juste une manière de parler, guère rassurante mais qu'une formulation comme il aurait pu avoir.  Sauf qu'elle était réellement une bonne personne, il en était certain, malgré ses défauts et ses failles, elle n'en était que plus humaine, que plus forte, que plus touchante. Et des paroles si belles, si dures dans le sens propre, l'inquiétaient. Disparaitre, qu'est-ce qu'elle cachait, encore ?

  « Et vu ta réaction… ouais : c’est compliqué de ne rien savoir de moi. Et ça a l’air de t’faire du mal. »

Est-ce que ça faisait mal ? Oui et non. On s'en fichait un peu non, au final ? Il hésita quelques instants avant de répondre doucement.

 « C'est plus compliqué que ça, quand tu sembles comme aujourd'hui aller bien, c'est... comment dire, je suis curieux donc oui, j'aimerai en savoir plus mais si tu ne veux pas te confier ou autres c'est OK. Pas de souci. Tu n'as pas à t'obliger à débiter des choses sur toi pour me faire plaisir.» Il se tut quelques instants avant de reprendre  « C'est plus compliqué quand tu ne sembles pas... en forme, juste par ce que ça m'inquiète Jordane. C'est fait pour ça, les amis, être là quand on en a besoin, savoir écouter, savoir aider... Et dans ces moments-là je me rends compte que je suis incapable de te venir en aide si tu ne viens pas à moi. C'est tout.» Nouveau silence, il eut un nouveau tendre sourire avant qu'il ne rajoute  « Est-ce que dans le cas contraire tu n'essayerais pas d'en savoir plus ? Je doute que tu sois quelqu'un à lâcher tes amis, Jo. Tu es trop loyale pour ça.» Il la regarda dans les yeux avant de continuer  « Et merci, pour ce que tu as dis, ça me touche. Et même si tu ne veux peut-être pas entendre ça, même si on est pas toujours sur la même longueur d'onde et que l'on a pas les mêmes besoins ou la même vision des choses, je serai quand même toujours là pour toi si tu en as besoin.»

Peut-être pas dans la façon dont elle pensait, pour la façon dont ça le touchait. Oui, il trouvait ça vrai et adorable de sa part d'essayer de le rassurer sur le fait qu'il ne pouvait rien faire de plus. Oui, mais ça ne suffisait pas, par ce qu'elle le ramenait ailleurs, à la faille béante dans son coeur. Est-ce que ça avait suffi quand tous ses proches, ses collègues, les médecins avaient assuré qu'il n'aurait pu rien faire de plus pour Abby ? La réponse était non. Par ce que la douleur était là, par ce qu'il n'aimait pas se sentir impuissant, ne pas pouvoir aider.
Alors oui, transposé à aujourd'hui, si Brooks disparaissait, il aurait fait beaucoup pour elle... mais est-ce qu'en agissant autrement, il aurait pu être plus efficace. Les regrets et remords étaient là, et on ne pouvait les étouffer que difficilement.
Oui, il avait été présent pour sa fille, mais en se débrouillant autrement est-ce qu'il n'aurait pas pu, au moins faire en sorte que Callie vienne la voir ?
Oui, mais pour Jordane, est-ce qu'il n'aurait pas pu trouver une autre approche ?
Elle était têtue, la mule qu'il était.


 « Bon ceci dit, je préférais quand tu étais en train de te marrer sur ma tronche, on peut peut-être repartir là-dessus, non, maintenant que c'est réglé... à moins que tu veuilles rajouter autre chose.»

Comme promis, il changeait de sujet, il n'insistait pas, il lui offrait une porte de sortie. Il avait eu sa réponse, bien que très brève en plus. Alors autant juste passer un bon moment à présent, c'était encore possible, car même si parfois elle avait des réactions assez vives, elle restait une adulte, elle lui avait répondu comme il le fallait. Maintenant qu'ils s'étaient « expliqués », ils pouvaient juste passer à autre chose.

 « Je suis sûr qu'on va en rire dans quelques temps de ça, à moins que tu fasses f hurler de rire tes potes avec ça.» avait-il même rajouté sur le ton de la dérision.  Oui on changeait de sujet, il essayait de dédramatiser le tout. De lui montrer que de son côté c'était OK, qu'ils pouvaient même en rire, qu'elle pouvait le chambrer là-dessus, qu'il n'y avait aucun problème. Et qu'il savait qu'il avait été un poil (beaucoup) ridicule sur ce coup-là. D'après ce qu'elle lui avait dit... Par ce qu'il n'en restait pas moins qu'elle restait bardée de coups ce jour-là, et qu'il ne savait toujours pas le pourquoi du comment. Mais faire comme si c'était bon, s'il ne se posait plus de questions semblait la seule solution ici, comme d'en rire.
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Naveen Evans
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Naveen Evans
Dim 12 Déc 2021 - 16:06
Tu te tortures. Arrête d’y penser, arrête de tout rouler encore et encore dans tes pensées comme on charrierai de la merde dans la poussière. Arrête de te faire ça Jordane. Tu es là, tu essayes, tu te saignes pour réussir à faire ce pour quoi tu te sais mauvaise. Personne ne pourra te reprocher d’essayer, même si tu te plantes.

‘Si. Moi je peux.’ Répondait une voix sourde à ses propres plaies, écrasant la bienveillance qui n’arrivait jamais véritablement à poindre en elle.

Pourquoi ? Pourquoi tu fais ça ? T’es distante, froide, limitante. Tu ne laisse rien au autres, seulement des miettes de toi. Tu leur échappes, comme de l’eau vivre qui ne cesse de leur glisser entre les doigts.
Le pire dans tout ça, c’est que tu te l’imposes de même. Tu t’arraches à eux, tu te violente tu te blesses. Ils ne t’auront pas, mais tu ne les auras pas non plus. Qu’est-ce que ça serait, hein, de te connaître ? Qu’est-ce que ça ferait s’ils posaient véritablement les yeux sur toi ?

‘Ils verraient.’ Répond la petite souris, blessée de sa propre litanie. ‘Il me verraient..

Alors, ils sauraient.’

ils sauraient qu’ils se plantent, qu’ils ne croient qu’en une coquille vide. Ils se rendraient compte que tu es bien plus belle à l’extérieur. Qu’au cœur il n’y a que sel et acide, que tu es critiques et dure, que tu ne crois pas en eux, ni en toi. Que tu n’es rien de ce qu’ils espèrent de toi. Oh oui, ils verraient comme ils se plantent, comme tu es laide, comme il n’y a là qu’une âme bien vide finalement, qu’un cœur sans vide qui ne sait aimer, qui ne sait rester, qui ne sait leur accorder l’importance qu’ils méritent. Ils verraient comme tu ne mérites pas l’attention qu’ils te portent.

Alors elle haïssait cette discussion, profondément. Sentir, mot après mot, que sa présence amenait à blesser l’autre, que ce qu’elle pensait léger et viable ne l’était pas tant que ça. Qu’elle le blessait, finalement. ça fait quoi de moi si ma manière d’être te fait saigner, dis-moi ? Ça fait qui de moi si je continue comme ça ?
Alors elle aurait aimé tout effacer, recommencer, oublier. Une tendance nette, dangereuse. C’est toujours si simple au début, quand on ne trace rien de concret. Quand il n’y a pas de pression à se révéler car après tout, c’est normal au début de ne rien savoir de l’autre. Et puis au fil du temps l’espace se creuse, le déséquilibre se forme et les reproches tombent.

Et elle le sentait. Elle voyait bien que chacune de ses réactions creusait le creux. Qu’elle s’éloignait quand il s’approchait, frissonnait d’angoisse ou de colère quand il cherchait à refaire ce qui se détruisait pourtant.

Mais toi, toi t’as pas envie que ça s’arrête. Tu ne veux ni le dire ni le faire, mais tu crains de ne pas être suffisante. T’es trop, t’es pas assez, mais t’es surtout pas la bonne personne pour qui que ce soit.

Voilà bien des plaies qui suintaient tout au long des mots échangés.

Ecoute ce qu’on te dit pourtant. On te dit qu’on t’aime, qu’on voudrait être là pour toi, que tu es ‘assez’, justement. Ecoute ! Bougre d’idiote.

« C'est plus compliqué que ça, quand tu sembles comme aujourd'hui aller bien, c'est... comment dire, je suis curieux donc oui, j'aimerai en savoir plus mais si tu ne veux pas te confier ou autres c'est OK. Pas de souci. Tu n'as pas à t'obliger à débiter des choses sur toi pour me faire plaisir.»
« J’comptais pas le faire. » Woh. Le tranchant s’allume, en réponse à l’amour, un besoin de remettre de la distance, jamais vraiment claire avec elle-même. Incohérente tu es mon enfant, à espérer l’autre mais à en craindre la présence. C’est ainsi, l’humain est pétri de contradictions et ton chaos, à toi, il est détestable.

« C'est plus compliqué quand tu ne sembles pas... en forme, juste par ce que ça m'inquiète Jordane. C'est fait pour ça, les amis, être là quand on en a besoin, savoir écouter, savoir aider... Et dans ces moments-là je me rends compte que je suis incapable de te venir en aide si tu ne viens pas à moi. C'est tout.»

‘Et c’est mal, ça ?’ Se demandait-elle. Ainsi, elle n’avait d’aide qu’en cas de besoins, quand elle était apte à l’accepter, quand elle voulait quelqu’un dans son entourage et non quand celui-ci voulait le lui imposer. Etait-ce ça alors ? Etait-elle son amie, du genre à être là quand on en a besoin, savoir écouter, savoir aider.
L’idée la déchirait.

« Est-ce que dans le cas contraire tu n'essayerai pas d'en savoir plus ? Alors Jordane ? Dans le cas contraire, serais-tu là ? A quel moment finirais-tu par lâcher ? Avant ou après ? Tu le blesserais par ton incompétence, tu penses ?

Je doute que tu sois quelqu'un à lâcher tes amis, Jo. Tu es trop loyale pour ça.»

S’il y avait une plaie ouverte en elle, c’était celle-là. Une réflexion qui lui perçait les cotes, droit dans le cœur. A l’instant, elle aurait préféré se retrouver de nouveau sous les poings de Dorofei plutôt que d’entendre ça.

T’étais où pour ta mère ?
T’es où pour ta sœur ?
Tu sais les aider, ceux que tu aimes à présent ? Ou s’enfoncent-ils jours après jours plus violemment ?
Ça prendra combien de temps, à ton avis, avant que l’une ne se foute en l’air et que le second se disloque tout à fait ?
Et les autres ? Je parie que tu ne te souviens même plus des noms. Tous ceux que tu as largués en arrière. Tous ceux qui ont disparu de tes pensées car tu ne fais que ça, depuis des années. Lâcher les gens.
T’étais où quand Lex manquait de se faire tuer ? Ah oui, tu baisais Enzo.
T’étais où quand ta famille disparaissait ?
T’étais où quand tu comprenais ce qu’avait vécu Will, que tu disparaissais, lâche, du quotidien d’Enzo pour ne pas avoir à affronter ça.

Loyale hein ?

T’étais où pour Zach ?


Lui, il reprenait, totalement inconscient de l’acide qu’il venait de verser dans la plaie, faisant face au visage impassible de celle qui pourtant, se sentait bien poreuse aux compliments qui ne lui revenaient pas.

Tu vois. Il voit une autre au travers toi.

« Et merci, pour ce que tu as dis, ça me touche. Et même si tu ne veux peut-être pas entendre ça, même si on est pas toujours sur la même longueur d'onde et que l'on a pas les mêmes besoins ou la même vision des choses, je serai quand même toujours là pour toi si tu en as besoin.»

Elle déglutissait, toujours pendue sur son étrier, le corps dans le vide, une jambe pendante, le corps en arc, bandé. Mais elle n’était pas prête à décocher. Non, c’était elle qui se trouvait criblée de flèches.
Incapable, surtout, de savoir si elle était pétrie de colère face à ces belles paroles qui la blessaient plus qu’elles n’auraient dû, ou seulement triste car si lui avait l’impression d’améliorer les choses, de clarifier le propos, de faire du bien à la relation… elle n’avait que la sensation désastreuse d’être confrontée à un truc qu’elle ne voulait ni entendre ni vivre.

J’en fais quoi, de tes belles intentions, quand elles me ravagent le cœur plutôt que de le protéger ?

Sans doute aurait-il fallu se taire. Cette question, elle n’aurait pas dû la poser et lui, il n’aurait pas dû faire des compliments insensés à celle qu’il ne connaissait pas. Mais si elle lui disait, à présent, c’est lui qui partirait. Peut-être pas instantanément, mais ça arriverait. Quel intérêt a-t-on, dans le fond, à protéger quelqu’un qu’on ne connait pas ?

Voilà pourquoi elle aimait être vue comme une garce, une poupée gonflable ou une salope. Quelqu’un de haïssable. Il n’y avait là rien à décevoir.

‘T’es pas une garce.’ Avait dit Lex.

Oh si. Crois-moi je le suis. Cessez donc d’espérer de moi ce que je ne suis pas.

« Bon ceci dit, je préférais quand tu étais en train de te marrer sur ma tronche, on peut peut-être repartir là-dessus, non, maintenant que c'est réglé... à moins que tu veuilles rajouter autre chose.»

Mais elle n’avait plus le cœur à rire. Il se trouvait seulement en bandoulière, coulant dans sa poitrine pour s’écraser plusieurs mètres plus bas, dans les fourrés et les épines.

« Je suis sûr qu'on va en rire dans quelques temps de ça, à moins que tu fasses f hurler de rire tes potes avec ça.»

Si le propos s’en était tenu au fait qu’elle ait un mac, oui, probablement. Mais les mots allaient plus loin et elle se fermait douloureusement, regrettant le moment où elle n’imaginait pas quelle vision il avait d’elle.

Alors ? Dans le cas inverse, tu ferais quoi pour lui ? Demandaient ces voies intérieures.
‘J’en sais rien, demande à Ana’. Etait-elle tentée de répondre.
‘Ou pire… demande-le toi à toi-même.’ Jamais elle n’avait posé de questions sur sa femme et sa fille, jamais elle n’avait cherché à creuser ce qu’elle devinait être douloureux. Jamais elle n’avait cherché à savoir comment il allait réellement, sans les faux semblants qu’elle devinait pourtant.

Non, parce que tu es une salope autocentrée qui se fout bien des autres. Crachait le venin. Et quand c’est pas le cas, admettons-le une bonne fois pour toutes : t’es pas très douée. Le regard fou de Dorofei s’imposait à elle, les coups, les chocs, la perdition complète. La violence de ce qu’elle provoquait, la déception dans son regard, la frustration d’être considéré comme dangereux ou incapable alors qu’elle lui demandait de se délester de ses armes. Et puis le mal-être de Kezabel, cette impression qui la saisissait par moment lorsqu’elle était avec elle, comme si chaque instant était le dernier.

« J’en doute. »

Lèvres pincées, Elle se détournait, utilisant un coup de hanche pour balancer son bras sur l’avant et attraper l’une des autres cordes à pendre dans le vide pour se tracter jusque là et passer la jambe dans l’anneau. Sans un mot, elle fit de même pour chaque arceau et atteint la plateforme. Sans plus de cérémonie, elle enchaînait, regrettant de ne pas simplement pouvoir tout effacer, alléger la douleur sous sa chair et oublier cette conversation malheureuse. Mais malheureuse, c’était elle qui l’était.
Un instant, elle eu envie d’en parler à quelqu’un. Et ce quelqu’un, elle savait de qui il s’agissait. Pourtant l’idée lui filait la nausée. Alors quoi ? Appeler quelqu’un pour qui elle n’était rien. Baiser, cesser d’exister, frapper ou embrasser. Etre ailleurs et quelqu’un d’autre mais cesser d’être observée ainsi. Un agrée puis l’autre, les muscles bandés, le ventre creusé, le regard fermé, surtout. Elle aurait voulu transplaner.

Mais elle sautait dans le vide, suspendue par une corde sans se rendre compte de la violence avec laquelle elle se balançait.. le balancier l’emportant jusque dans la toile d’araignée qui servait de filet d’atterrissage. La corde sertie de métal en pleine gueule dans un choc brusque et douloureux qui lui donnait l’impression de se manger le mur de ses propres sentiments. Pas un mot, pas de rire, de déconnade. Elle aurait dû. C’est con non ? Mais elle n’y arrivait pas. Elle grimpait, muette comme avec Dorofei. A l’instant, il lui manqua brusquement.
Ça aussi c’est con. Tu vis chez lui.

Plateforme, tronc à escalader – elle ne songea même pas au fait que la vue soit agréable du dessous – nouvelle plateforme.

Et puis au détour d’un ‘pont’ de troncs particulièrement éloignés sur lesquels il fallait sauter sans réellement d’accroche, elle balançait un simple : « J’suis pas quelqu’un de loyal. Celle que tu veux protéger n’existe pas. »

Détestes-moi.
Barres-toi.
Je ne suis pas celle-là.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Dim 12 Déc 2021 - 18:22
 «  J’comptais pas le faire. »
 « Ok. Au moins ça c'est super clair et précis.» dit-il en rigolant très doucement en essayant de faire abstraction au ton qu'elle avait utilisé. Ne pas y prêter attention. C'était les paroles qui comptaient seulement les paroles. Il l'avait visiblement touchée, blessée et elle répondait en conséquences, il ne devait pas l'oublier. Et il avait continué de parler. Beaucoup. Beaucoup trop même, essayant de se dépêtrer de cette situation dans laquelle il s'était lui-même collé.
Et puis, aucune réponse.
Et silence radio.

Les secondes s'étaient écoulées. Lentement. S'égrénant.  Trop lentement. Comme le tic tac d'une horloge.
Tic tac. Tictac. Silence toujours de mise.
Tic tac. Tic tac. Jordane les lèvres toujours closes.
Tic tac. Allez dis quelque chose.
Tic tac. Allez, s'il te plait.
Tic. Tu as encore merder Naveen.
Tac. Trop de questions, petit malin, trop de questions.
Tic. Tu vas encore la faire fuir.
Tac. Comment est-ce que tu vas pouvoir l'aider après.
Tic. Mais elle ne veut peut-être pas de ton aide.
Tac. Arrête de raisonner comme si chaque point soulevait était un foutu problème. Laisse ton foutu boulot de côté. Tout n'est pas un sous-entendu. Tout n'est pas une demande d'aide, ou un aveu dissimulé.
Tic. Eternel problème.
Tac. Allez Jo. Même un merde.



Qu'est-ce qui peut bien se passer dans ta cervelle Jordane ? Quelle informations y circulent ? Qu'est-ce qui a bien pu se passer pour que tu réagisses comme ça ? Est-ce que tu as vraiment non pas écouté mais entendu ce qui venait d'être ? Est-ce que cela posait un quelconque souci ? Il essayait de retrouver chacune de ses phrases pour y voir une faille, quelque chose qu'elle aurait pu mal interpréter... mais il ne voyait pas. Essayer de reprendre la parole, même si ça le tentait, aurait été une mauvaise chose. Peut-être qu'elle avait juste besoin de ce silence, peut-être qu'elle avait besoin juste d'un moment pour tout intégrer, ces informations qu'il avait données. Pour lui, ce n'était pas grand chose, pour elle ça pouvait être beaucoup. Alors il n'avait rien dit. Il l'observait seulement en silence, en essayant que ledit regard ne soit pas trop pesant pour ne pas qu'elle se sente oppressait. Et il essayait de lire sur les traits de sa camarade, sur sa gestuelle quelque chose à interpréter.

Il avait voulu l'aider, lui montrer qu'il fallait qu'elle reste comme elle était et que ce n'était pas pour autant qu'il voudrait la foutre dehors. Peut-être que ce n'était pas ce qu'elle voulait entendre... et décidément, il ne la comprenait pas du tout, ou du moins il n'était pas très à l'aise avec le fait de s'être planté de la sorte avec un sujet aussi tendu et compliqué. Il soupira doucement. Se taire, peut-être que ça aurait été la solution.... mais jusqu'à quand ? On ne pouvait pas toujours se taire et éluder les sujets compliqués par ce qu'au bout d'un moment c'était forcément contre-productif. Par ce qu'on finissait par étouffer et à vomir des rancœurs passer à un moment inopportun ; et parler pour régler les problèmes c'était aussi une bonne manière d'agir. On ne pouvait pas tout enterrer sous son tapis. Foutaises ! C'est l'hôpital qui se fout de la charité, là, Evans. Comme si tu disais tout, tout le temps ! Souvent pour ne pas les inquiéter mais c'est peut-être ce que tu fais là, Jordane. Ne pas répondre pour ne pas ouvrir certaines de tes plaies, pour ne pas m'inquiéter qui plus est.

Par ce que oui, cette attitude l'inquiétait et il ne se voyait pas le formuler comme ça. Il ne pouvait pas lui faire ça alors qu'il comprenait déjà qu'elle était à bout d'une manière ou d'une autre.
Alors le silence continua... jusqu'au moment où...

« J’en doute. »

Finalement, peut-être que le silence était mieux que cette réponse tranchante, douloureuse surtout pour elle par ce qu'elle montrait des failles. Est-ce que Jordane s'en rendait compte ? La situation était drôle, ce qu'il avait dit c'était juste pour l'appaiser après... après si elle ne pouvait pas en rire c'est que quelque chose pesait. Les fameuses failles qui semblaient presque plus béante que l'autre nuit.
Et l'inquiétude grandissait. Mais que pouvait-il faire, là ? Rien. Il ne pouvait pas vraiment répondre. Elle n'était clairement pas en état d'entendre ce qu'il disait et il craignait que tout soit mal interpréter, que tout soit sel sur des plaies. Alors tais-toi, Naveen. Ta gueule. Juste ferme-là. s'imposa-t-il . Les questions, elles tournaient toujours son crâne, inlassablement. Comme toujours. Il y voyait là presque un appel à l'aide, mais particulier. De ceux où il ne pouvait pas faire grand chose. Juste être à peut-être. Juste éviter de dire des choses trop mignonnes, trop problématiques. Rester juste dans le jeu, dans l’insouciance voilà ce qu'elle semblait demander... à moins qu'il ne se trompe totalement.

Il la laissa également repartir jusqu'à l'autre plateforme et commencer même la suivante et il la suivit lorsqu'elle fut à une distance assez raisonnable pour lui laisser encore plus d'air. Si le silence faisait peut-être du bien à Jordane, c'était très loin d'être le cas pour l'homme.
Silence.
Il ouvrit la bouche prêt à lui dire faire attention lorsqu'elle sauta dans le vide pour se balancer sans aucune douceur au bout de la corde.
Silence, encore, même lorsqu'elle sembla se faire mal. Il s'en était presque mordu la langue jusqu'au sang pour ne pas lui poser la moindre question. Silence, on a dit, Naveen.
Et elle enchaînait les plateformes, il la suivait – manquant lui aussi de se faire avec l'histoire de la corde, et son bras amortissant encore un peu trop un choc-. Et encore lorsqu'elle était du pont de troncs où il fallait sauter de l'un à l'autre, elle avait enfin repris la parole

« J’suis pas quelqu’un de loyal. Celle que tu veux protéger n’existe pas. »

Silen-

 « Tu te trompes.»

- ce.
Raté, le silence, mon grand.
Avant de reparler, il vérifia qu'elle était bien posée sur un des bout de bois, bien stable pour ne pas risquer de se faire mal.

 « Tu te trompes, Jordane. Je ne sais pas comment tu te vois, mais pourquoi est-ce que c'est moi qui aurais tort ? Bien sûr que si, elle existe, celle femme là. Tu es là, devant-moi. Et moi, j'y crois. C'est con, hein, mais j'y crois dur comme fer.»  Aussi loin d'elle qu'il était, séparés par ces quelques longs mètres il planta son regard dans le sien avant de continuer  « Pourquoi ne serais-tu pas loyale, Jordane ?  Par ce que tu es partie un jour sans prévenir ? On s'en fout. On s'en fout complètement.» Qu'est-ce que c'était la loyauté ? Être présent pour ses amis notamment. Ne pas attaquer dans le dos. Etre fidèle à ses engagements.  « N'es-tu pas fidèle à tes engagements ? J'suis certain que si. Est-ce que tu n'es pas là pour tes amis ? La même chose. Personne n'est parfait, on fait tous des erreurs de jugements ou autres, mais ce n'est pas pour autant que tu n'es pas loyale, Jordane. Tu es juste humaine. Ose- me regarder dans les yeux et me dire que si l'un de tes amis t'appelait en pleine nuit par ce qu'il avait besoin d'aide tu n'irais pas lui prêter main forte ?» Il se tut quelques instants avant de soupirer doucement.  « On devrait descendre dès que possible.» Par ce que là, ce n'était pas possible. trop dangereux. Beaucoup trop dangereux vu la situation.  « Alors j'suis peut-être stupide, ou naïf, ou même totalement à côté de la plaque, mais moi, je crois en toi, en ce que tu es. Moi, je vois en toi une belle personne quoi que tu puisses en penser. Et tant pis si ça fait de moi un vieux bon, ou le mec relou. Je m'en fouts, pour l'instant tu ne m'as pas prouvé l'inverse alors je reste sur ma position, et je suis têtu, pour rappel.»

Il avait dit tout cela sans aucune colère, mais il était vraiment animé par... par quoi ? Par l'envie de la convaincre elle-même, par sa propre conviction, par ce qu'elle voulait qu'elle voit qu'il était sincère, qu'il le pensait vraiment. Et la question qui demeurait à présent, c'était pourquoi est-ce qu'elle se dépréciait tant ? Qu'est-ce qui avait bien pu se passer pour qu'elle se voit comme ça ? La question lui brûlait les lèvres mais il avait conscience qu'il en avait probablement déjà trop dit. Beaucoup trop. Et qu'il avait encore une fois voulu être contre-productif. Pourtant, des choses, il en avait tu des tas. Beaucoup trop. Les questions qui tournaient encore dans sa tête.
Écoute. Entends. Intègre ces informations Jordane, tu es quelqu'un de bien. Pas de parfaite, c'est tout, tout le monde a des failles, personne ne peut être présent à chaque instant pour ses amis. Chacun se trompe. Tout le monde fait des erreurs. Tout le monde a des regrets ou des remords. Tu es une bonne personne, fais-moi confiance au moins sur ce point.

Quelle situation compliquée, et comme il ne voulait pas qu'elle se sente prise au piège, il tenta quelque chose, sans savoir s'il avait raison ou pas. Mais il fallait qu'il essaye de lui donner une porte de sortie.

 « Tu veux qu'on aille chez moi ? Oublie l'option menottes cependant. Pas cette fois du moins.»

….
….
…..
Est-ce qu'il venait vraiment de faire ce changement de sujet aussi brutal que stupide ? Même lui n'en revenait pas  - sa tête devait trahir son scepticisme- et pourtant si ça lui était venu naturellement c'est par ce qu'il avait compris que pour Jordane, le sexe, c'était une façon pour elle de s'exprimer, de se battre, d'aller mieux, d'avoir du réconfort. Alors cette fois, il prenait les devants.

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Naveen Evans
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Naveen Evans
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Naveen Evans
Lun 20 Déc 2021 - 23:52
Don't speak, I know just what you're sayin'
So please stop explainin'
Don't tell me 'cause it hurts
Don't speak, I know what you're thinkin'
I don't need your reasons
Don't tell me 'cause it hurts

Tais-toi.

« Tu te trompes.»

Tais-toi s’il te faut faire ça. S’il te faut me juger, me considérer, m’expliquer qui je suis quand il est clair que tu n’en sais rien. Tais-toi si tu penses que tu es qui que ce soit pour m’apprendre ce que je vis, ce que je ressens, ce qui est juste ou non. Tais-toi car tu ne sais pas. Tu n’as jamais su. Tu n’as qu’une pauvre image de celle que j’ai pu être, tu n’as que tes impressions, tes déductions. Tu n’as pas accès à la vrai moi, tu ne peux donc ni la rejeter, ni l’aimer, ni la décevoir ni la blesser.

Elle se figeait, une balle dans le cœur, le regard braqué sur lui et les dents serrées. Plantée là, il lui semblait que l’homme s’était emparé d’un javelot qu’il lui plantait à présent entre les côtes quand une seule question lui martelait les neurones : T’es qui pour dire ça ?! Voilà bien l’intérêt d’être aussi distante, de ne pas laisser aux autres la possibilité de la connaître  véritablement : qu’ils ne puissent ni juger ni présager de quoi que ce soit la concernant. Qu’elle ne soit pas à portée. Qu’ils n’aient aucune arme à retourner contre elle. Et pourtant il essayait. Il jugeait. Il croyait savoir.

Et il reprenait. Non content de s’arrêter là, Naveen s’enterrait dans sa réflexion sous le regard dur de la jeune femme qui serrait le câble de métal sous ses doigts crispés.

« Tu te trompes, Jordane. Mais ta gueule ! Je ne sais pas comment tu te vois, mais pourquoi est-ce que c'est moi qui aurais tort ? Parce que tu ne me connais pas. Parce que je sais ce que je vis au quotidien, je connais mon passé, je me connais, moi ? Bien sûr que si, elle existe, celle femme là. Tu es là, devant-moi. Oh oui, je suis là, lointaine et multiple, cachée derrière la brume des non-dits. Et toi ? Toi tu crois savoir voir et percer les ombres ? Mais de quel droit ?! Et moi, j'y crois. C'est con, hein, mais j'y crois dur comme fer.»

Ce qu’il faisait partait sans doute d’une bonne intention toute mielleuse mais c’était inconvenant, paternaliste, blessant et méprisant. Croire qu’il détenait la vérité sans aucune preuve. Juste le désir d’imposer sa pensée sur la sienne, d’avoir raison, d’écraser ses opinions et d’imposer quoi ? Un simple ressenti infondé ? Mais agissant ainsi, il ne faisait que pointer plus encore l’écart qu’il y avait entre ce qu’elle était et ce qu’il voyait. Et donc cette merde qu’elle pouvait être à ne pas être à la hauteur de la façon dont il pouvait la percevoir.
Ça veut dire quoi alors ? Qu’elle ne mérite pas ton amitié ?
C’est, du moins, ce qui se plante dans ses côtes actuellement.

« Pourquoi ne serais-tu pas loyale, Jordane ?  Par ce que tu es partie un jour sans prévenir ? On s'en fout. On s'en fout complètement.»

Des dizaines de jours, des centaines de fois.
Pourquoi tu t’aventures sur un terrain dont tu ne sais rien ? Es-tu idiot au point de penser que tu sais tout ? Arrogant au point de te croire si supérieur à moi que tu aurais raison sans rien savoir de moi ?


« N'es-tu pas fidèle à tes engagements ? Dépend des jours. J'suis certain que si. C’est bien tout le problème. Est-ce que tu n'es pas là pour tes amis ?Non. Je ne le suis pas. Je suis celle sur qui on ne peut compter. La même chose.Crétin. Personne n'est parfait, on fait tous des erreurs de jugements ou autres, mais ce n'est pas pour autant que tu n'es pas loyale, Jordane.En effet. C’est parce que je n’étais pas là, parce que j’ai été lâche trop de fois pour m’en souvenir. C’est parce que j’ai jamais été la même, inconstante et perfide, trompeuse et malhonnête, je disparais seulement hors des regards de ceux qui, sans doute, ont dû m’aimer. La haine et l’oubli, voilà tout ce qu’il reste dans le fond. Tu es juste humaine. Des mots qu’elle aurait dû entendre, mais qui se noyaient sous le reste, emportés par la marée des larmes qui ne coulaient pas. Ose- me regarder dans les yeux et me dire que si l'un de tes amis t'appelait en pleine nuit par ce qu'il avait besoin d'aide tu n'irais pas lui prêter main forte ?» Voilà quelques mots qui ébranlaient sa colère sourde. Quelques mots qui perçaient au travers des murailles soudainement érigées. Quelques mots qui trouvaient en elle un écho qu’elle n’était pas prête à entendre. Car oui, elle était là. Elle était là pour Dorofei et Kezabel. Là pour les uns, absente pour les autres. Que dire alors de Sovahnn, Riley ou Enzo ? Que dire des autres ? Que dire de Zach ? Que dire de sa propre sœur ? De sa mère ?

Que dire d’Ana qui se pointait devant elle, lui demandait de l’aide, les larmes aux yeux et le corps bardé de bleus et qu’elle envoyait se faire foutre sans une once de compassion ?
De Lex qui l’appelait une fois, deux fois, trois même peut-être, alors qu’on attentait à sa vie et qu’elle, elle ne faisait que repousser l’appel pour se perdre contre les lèvres d’Enzo.
De ceux qu’elle avait été jusqu’à oublier au fil des ans ?

Alors non, elle ne pouvait entendre sa loyauté quand il ne restait chez elle que le mal-être de l’incompétence.

Elle bouillonnait de ses erreurs, de ses manques, de toutes ces personnes pour qui elle n’était qu’une absence confondante quand il cherchait, lui, à souligner ce que, dans le fond, il ignorait.

Le regard vif, les mâchoires serrées, la jeune femme ne desserrait pas les lèvres, droite et tendue à le dévisager du centre de son pont suspendu, les deux pieds rassemblés sur un tronc, immobile et froide comme une statue.

« On devrait descendre dès que possible.»

Oui.
Dangereux ? Une telle pensée l’aurait heurtée tant son infantilisation lui aurait sauté à la gorge.

« Alors j'suis peut-être stupide, ou naïf, ou même totalement à côté de la plaque,… En effet. … mais moi, je crois en toi, en ce que tu es. Moi, je vois en toi une belle personne quoi que tu puisses en penser. Elle était là, de retour ; la flèche entre ses côtes. La douceur vive lui sciait le souffle mais la jeune femme n’en montrait rien.

Oh oui, c’est ce que tu vois, quoi que je puisse en penser. Qu’importe après tout puisque tu t’es déjà fait une opinion. Qu’importe que je te sache dans l’erreur.
Qu’importe que je vois à quel point tu te fourvoies.
A quel point tu apprécies quelqu’un qui n’existe pas.
A quel point je ne suis pas à la hauteur de cette façon dont tu me vois.
A quel point tu pourras te détourner de moi.

Je ne mérite rien de tout ça.


Et tant pis si ça fait de moi un vieux con, ou le mec relou. Je m'en fous, pour l'instant tu ne m'as pas prouvé l'inverse alors je reste sur ma position, et je suis têtu, pour rappel.»

S’il était têtu, elle était obtuse et fermée. Blessée et triste, tout bêtement, car elle voyait se dessiner devant ses yeux l’une des situations qu’elle craignait le plus au monde. Placée comme ça, au détour d’une conversation qui n’aurait rien dû être autre que banale. Poser ces questions qui pourraient lui permettre de se rapprocher des autres risquait-il d’amener à de tels désastres ? N’était-elle apte qu’à déclencher ça ? Des attentes inconsidérées, des fantasmes idylliques ? Voilà de qui il se sentait proche, peut-être, d’une certaine manière. D’une image. Belle image hein, bien sûr, comme le corps qu’elle arborait. Toute bien foutue d’idéaux. Fausse. Voilà tout.

« Tu veux qu'on aille chez moi ? Oublie l'option menottes cependant. Pas cette fois du moins.»

Pas un rire, rien que le froid abyssal de la déception. Rien que l’impression mordante qu’il n’y avait en elle rien d’appréciable.

Ces compliments auraient pu faire plaisir si elle n’était pas qu’une inconnue. S’il ne tombait pas douloureusement à côté, pointant alors non les atouts mais les défauts de celle qui lui faisait face. Blessant donc, violemment et brutalement. Chaque mot prononcé, elle l’entendait dans son exact sens inverse, creusant son cœur et étreignant sa gorge.

« On descend. »

Pas de cynisme, d’humour ou de chaleur. Rien que deux mots tranchants entre ses lèvres épaisses Tandis qu’elle se détournait, terminant l’activité sans y faire attention, puis la suivante et enfin l’agrée permettant de descendre plus vite si c’était souhaité, leur permettant d’esquiver la part la plus compliquée. Plus le moral pour ça, pas l’envie de se mesurer à quoi que ce soit et certainement pas à elle-même tant elle se sentait laide en cet instant. Disparaitre et se soustraire au regard d’autrui, voilà tout ce qui importait.

Ainsi en touchant le sol, les seuls mots qui sortirent furent blessants.

« Tu es un crétin condescendant Naveen et ta foi est comme toute les autres : aveugle. »

La beauté de glace avait remplacé la séductrice joueuse et avenante, plaçant entre eux un fossé énorme. Sans doute le perdait-elle, en cet instant exact, incapable de faire mieux, d’être mieux. Mais voilà, elle n’avait pas sa place ici. Du moins elle ne le pouvait plus à présent, perdant au fil des mots imposés la possibilité de fermer les yeux. Impossible à présent de continuer à avoir l’hypocrisie de sembler être cette femme qu’on attendait qu’elle soit.

Elle n’avait jamais su faire.
Face à la déception de l’autre.
Face à la honte d’être soi.

Le baudrier tombait au sol dans un tintement mat et elle l’abandonnait là comme la garce qu’elle était, prenant calmement le chemin de la sortie du parc.

Au dessus d’elle, le soleil brûlant qui perçait, joyeux, au travers des feuillages semblait la narguer.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Mer 22 Déc 2021 - 17:14
Il aurait voulu qu'elle comprenne ce qu'il disait-là et non pas ce qu'elle interprétait... mais il y avait été peut-être un peu trop fort, effectivement. Il n'avait pas eu les mots qu'il fallait, ou du moins pas ceux qu'elle attendait. Et fort heureusement, il ne voyait pas à quel point est-ce qu'elle était dure envers elle-même dans ses pensées – et envers lui mais ce n'était qu'un détail-. Il avait pu voir au fur et à mesure de ses paroles divers sentiments passés sur le visage, dans les pupilles de son amie mais il avait continué, espérant que quelque part elle entendrait ce qu'il disait. Elle était une bonne personne, même si elle avait fait des trucs moches, même si elle avait fait des erreurs, même si elle n'avait pas toujours été là pour tout le monde. Ca se sentait, ce genre de choses : elle était quelqu'un de bien et il ne voulait pas en démordre. Mais il vrai, qu'ils ne se connaissaient pas plus que ça au final, néanmoins... il avait envie de croire à la façon dont il la percevait, à cette fragilité qui transparaissait parfois tandis que la force était presque toujours présente chez elle.  

Avait-il merdé, et à quel point ? Voilà la question qui fallait à présent se poser tandis qu'il se maudissait de ne pas avoir sû se la fermer... il fallait au moins espérer qu'elle comprendrait un jour, et si ce n'était pas aujourd'hui que ce soit plus tard. Que tout cela n'ait pas été vain.   Tu vois le silence, c'était quand même drôlement mieux, vous auriez pu finir la journée de façon sympathique, mais tu as franchement tout gâché, c'est presque à applaudir une telle performance. ca ne tournerait pas en positif, pas lorsqu'il voyait tout son corps tendu, pas lorsqu'il la sentait au bord de a la rupture, alors il avait tenté une dernière chose. Puisque quitte à s'enfoncer autant le faire bien et pas qu'à moitié n'est-ce pas ? Il lui avait proposé de descendre avant d'essayer de lui monter la façon dont il la voyait réellement. Il n'était plus questions de loyauté, d'être présente ou non pour ses amis, juste le fait qu'il voyait en elle une belle personne. N'aurait-il pas d'ailleurs dû s'arrêter sur ce passage là sans dire tout ce qu'il avait bien pu déblatérer avant ? Oui, bien sûr qu'il l'aurait pu, mais non il ne l'avait pas fait et si c'était à refaire, il le referait pour qu'elle entende tout cela, pour qu'elle arrête de se déprécier, par ce que dans son comportement il y avait de ça – il n'avait juste pas idée à quel point et il était même très loin de la vérité-.

Il aurait pu en rester là, il aurait pu juste se taire, attendre qu'elle réponde, explose ou fuit. Il aurait pu, mais il avait préféré tenter de lui apporter une porte de sortie, quelque chose qu'elle semblait faire habituellement. Une bonne idée d'ajouter cela ? Il n'en savait rien et pourtant il avait tenté. C'est ce qu'on, que l'enfer était pavé de bonnes intentions, son enfer à lui aujourd'hui devrait sacrément être grand et baraqué vu la tournure des choses... et il n'était pas encore au bout de ses peines.

« On descend. »

Ton froid, catégorique, tranchant, presque un appel à l'ordre et il avait obtempéré. Déjà elle avait parlé, elle n'avait pas fui, il espérait qu'il pourrait en tirer quelque chose. Il espérait  qu'ils pourraient en parler si elle en ressentait le besoin à moins qu'elle ne préfère juste changer de sujet. De l'espoir dans ces quelques mots si abruptes soient-il, il y en avait quand même.  Oui, il l'avait suivi bien sagement et lorsqu'ils furent à terre, il comprit qu'il avait fait erreur. L'espoir, pour aujourd'hui était bel et bien mort et enterré : en quelques mots, elle avait fait tout baldinguer.

« Tu es un crétin condescendant Naveen et ta foi est comme toute les autres : aveugle. »

Condescendant, alors qu'il avait voulu l'aider ? Qu'est-ce qu'elle avait bien pu comprendre ?A quel moment est-ce qu'il avait agi de façon à ce qu'elle prenne les choses comme ça ? Quelque chose ne tournait pas rond... il avait l'impression qu'il avait entaillé pile là où ça faisait mal, involontairement, et que ça réaction était celle d'une gamine blessée qui voulait faire fuir puisque aujourd'hui elle ne fuyait pas. Une réaction de défense. Purement et simplement, mais il pouvait se tromper aussi. Visiblement, il l'avait déjà fait pas mal aujourd'hui.. Néanmoins, est-ce qu'elle n'essayait pas de lui prouver qu'il avait tort ? Elle avait commencé à s'éloigner et, pendant un instant, il avait voulu la retenir, mais il savait que ce n'était pas une bonne idée. Ce n'était plus le moment, plus tard peut-être si elle voulait toujours lui parler une fois cet état passé.
Est-ce que c'était une réaction de pure colère qui passerait ? Est-ce qu'elle aurait des regrets après et n'oserait plus revenir vers lui ? Ou est-ce qu'elle était vraiment fâchée par ses propos, assez pour ne plus avoir envie d'avoir sa  gueule ? A cet instant précis il n'en savait trop rien vu qu'il ne comprenait pas bien sa réaction, qu'il n'était pas certain de ses hypothèses.

Et il se retint de la rattraper, encore une fois. La laisser partir, s'éloigner. Et si elle se faisait du mal? Vu l'état où elle était c'était possible, mais elle semblait plus énervée que totalement désemparée... alors si elle cherchait les ennuis ? Il inspira rapidement. Beaucoup trop de choix tournaient dans son esprit, alors il ne tarda pas à reprendre la parole, assez fort pour qu'elle l'entende, énonçant quelque chose qui lui tenait à cœur, qu'il y avait toujours une porte ouverte chez lui.

 « Possible.» Après tout, elle avait le droit de le penser même s'il n'était pas d'accord.  « Tout crétin condescendant que je suis, sache que si tu as besoin tu as toujours la clef de l'appartement, tu seras toujours la bienvenue.» il fallait qu'elle ait cette possibilité si quelqu'un lui tombait de nouveau dessus.  « Bonne après-midi, malgré tout.»

Et elle avait répondu par un doigt d'honneur par dessus son épaule, sans se retourner, simple efficace qui valait bien des mots, mais ça aurait pu être bien pire, au final même si ça faisait mal, ça restait quand même quelque chose de soft.
Il aurait pu dire qu'il était désolé, c'était vrai de l'avoir mis dans cet état, mais il n'était pas désolé d'avoir dit ce qu'il pensait... Tout comme il aurait pu lui dire à la prochaine, ou à bientôt mais là encore ce n'était pas une bonne option, il ne voulait pas paraître insister. Il voulait lui laisser le choix, qu'il n'y ait aucune obligation.  Il soupira doucement et finalement, lorsqu'elle se fut éloignée partit à son tour vers sa moto en maugréant mentalement contre sa propre connerie, de ne pas avoir su y faire... et surtout qu'est-ce que cela pouvait cacher tout cela. Et il était désolé pour elle, désolé qu'elle doive trimballer des choses qu'elle ne semblait pas apte à avouer, à expliquer. Tu n'es pas forcément mieux, alors, encore une fois tais-toi. Et ne t'avises pas de la recontacter, même si tu es inquiet, elle le fera d'elle-même lorsqu'elle sera prête... ou peut-être pas.
Alors c'était peut-être un drôle adieu qui venait de se passer-là.
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Naveen Evans
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