[Event 04.04.2016] Crash Test ▬ Timothy

Crash Test

Timothy & Enzo

■ Lundi 4 Avril 2016 ■

Avancer, oui, mais accepter aussi parfois d’avoir un coup de blues parce que finalement, ça ne fait pas si longtemps. A peine trois semaines, déjà plusieurs phases de traversées, une sorte de boucle dans laquelle les émotions se suivent et se ressemblent. Ça va, ça vient, comme la main de ma meilleure amie dans mes cheveux alors qu’on est tous les deux affalés sur son canapé, face à la télé. Chez moi il fait à peine jour, ici il fait déjà nuit. D’ici quelques heures les cours commencent mais en attendant c’est là que j’avais envie d’être. Au moins un moment, à me faire cajoler comme un gros bébé j’avoue tout. J’ai retrouvé le chemin de ma maison, la présence quotidienne de mon frère, ça ne veut pas dire pour autant que je n’ai besoin de rien ni de personne … Simplement que la crise est passée, que le temps a fait son œuvre et que je me suis vraiment reposé. Le temps d’accepter, d’encaisser aussi sûrement.

« Globicéphale. »

La tête à moitié sur ses genoux je ne vois pas l’expression sur son visage mais devine à peu près ce qu’il s’y passe. Sur le mien, c’est le sourire du sale gosse content de sa connerie qui commence à s’étirer. Et sans prévenir je me redresse, plante mon regard dans le sien une fois assis.

« C’est ça ! Ton stade baleine. T’es un globicéphale. »

Ok c'est plutôt un dauphin mais ... Le coup part, me rate, pas le coussin que je me mange en pleine tête. Lycanthrope ou pas, femme enceinte ou pas, faut pas oublier qu’elle a été Attrapeuse de Quidditch la p’tite dame alors la rapidité et les réflexes sont toujours bien là. Les miens aussi, parce que je suis rapidement debout, à une distance de sécurité respectable.

« Hey ! Il a dit quoi le Doc ? Du repos. »

Mon index braqué vers elle j’affiche maintenant un faux air réprobateur. Un deuxième coussin traverse la pièce, me frôlant les cheveux alors que je l’esquive de peu.

« C’est pas moi c’est elle. »

A qui je parle ? A Zach, qui entre dans l’appart à ce moment-là. Chez lui, tout simplement. Son regard se pose sur moi, puis sur Sovahnn, de nouveau sur moi. Sourcil arqué. En clair, un adulte face à deux mômes. Sois pas si sérieux Grand Sage, je sais que t’as pas envie de l’être en plus de ça.

« Toujours pas mon mot à dire concernant le parrain ? »
« Non. »
« Non. »

Vous voyez Simba & Nala face à Sarabi ? La même. Ça m’a pris du temps mais je commence à connaitre les classiques.

« Bon j’me sauve les jeunes, faut que j’repasse chez moi avant d’aller en cours. »

Je me risque quand même à m’approcher de Sova pour déposer un bisou sur son crâne, me prends un nouveau coup de coussin et salue Zach d’un signe de main …

« Bisou à ta sœur. »

… avant de disparaitre en Transplanant.

#

Mains dans les poches de mon manteau, capuche sur la tête évidemment, j’avance d’un pas régulier mais rapide dans les rues de Londres. Je ne prends jamais le même chemin, aussi bien pour eux que pour moi quand bien même je transplane directement dans l’appart ou devant la porte. Londres n’est toujours pas un endroit où je me sens en sécurité alors je tache de prendre le plus souvent les plus grands axes, ceux les plus fréquentés, pour rejoindre un Portoloin.
Arrêt au passage piéton, le feu passe au vert pour moi et je m’élance sans me poser de question. Toujours un regard alentours, question d’habitude, mais l’attention rapidement attirée par mon téléphone qui vibre dans ma poche arrière. Téléphone que je sors, un message de Mia pour me dire que la session de ce matin risque d’être putain de bonne vu l’état des vagues – parce que oui, j’ai recommencé à surfer.

Mon sourire s’élargit, les lumières s’éteignent.

Ce qui a suivi ce moment m’a semblé s’être passé à une vitesse vertigineuse. Des bruits, des odeurs, les phares d’une voiture, un sentiment de déjà vu qui m’a glacé le sang. Une voiture qui freine, un bruit de taule qui se plie, du carburant qui se déverse sur l’asphalte et mes souvenirs qui reviennent comme si ça c’était passé la veille.
Je n’ai pas senti le choc, je l’ai simplement deviné en reprenant conscience. Au bout de combien de temps ? Aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que j’ai ouvert les yeux sur un regard affolé. Une femme qui demande qu’on appelle les secours, enfin je suppose puisque mes oreilles sifflent je n’entends pas vraiment. Je devine être étendu sur le sol, essaie de bouger, rien, jusqu’à ce que mes terminaisons nerveuses se souviennent de leur existence. Et par réflexe je serre les dents alors qu’autour de nous l’obscurité n’est brisée que par les phares de voitures à l’arrêt, warnings allumés, ou lampes de téléphone. Pas de trace du mien, la panique qui commence à m’envahir lentement mais sûrement. Je retrouve des sensations dans chaque parcelle de mon corps, perçoit l’odeur du sang, devine des morceaux de verre sous mes paumes … Et cette douleur encore une fois bien familière dans ma jambe droite : Celle que j’expérimente chaque mois quand mes os se brisent. Dans mes tempes le sang bat à tout rompre, la tête me tourne, mes souvenirs se mélangent avec ce présent que je ne comprends pas vraiment.

A ce moment-là j’accroche un regard familier et ne le lâche plus.

code by bat'phanie

HRP:

Il fallait qu’il trouve le moyen de mener à bien sa « mission » que lui avait donné Ruben en début de mois dernier. Vu qu’il n’était pas franchement motivé, il avait dit qu’il regardait pour l’instant les possibilités qu’il y avait. Ce qui n’était ni vrai, ni faux. Il y réfléchissait, mais comme il lui avait dit s’il y a certain bouquins qu’il pourrait trouver sans que ce soit dangereux pour d’autres c’était mort. D’’autant plus qu’il n’aimait franchement pas cette idée de leur donner des lèvres sur la magie noir, les sorts de mémoires même si c’était pour débutant. Lui restait certain, qu’avec les Supérieurs au pouvoir, les Cracmols dans son genre étaient plus que surveillés dans le monde magique. Il ne pouvait pas faire n’importe quoi et c’est bien pour cela qu’il avait essayé de repérer quelques ouvrages qui « pourraient faire l’affaire », sans que ce soit suspect et surtout sans que ça puisse trop nuire aux Sorciers et c’était là la difficulté de la chose. La vérité c’est qu’il n’y était allé qu’une fois en compagnie de sa mère sur le Chemin de Traverse, et qu’il avait fait semblant de fouiller un peu dans tous les bouquins, sans vraiment trouver quelque chose qui pouvait être safe et qui me paraitrait pas suspect. Il avait commencé à fouiller la maison de son père lorsqu’il n’y avait personne dedans, les rares fois où il y était allé pour essayer pour essayer de trouver les anciens manuscrits de ses sœurs. Mais là encore, pour l’instant il avait fait quasi choux blanc, il avait réussi à leur ramener « Les Animaux Fantastiques de Newt Scamander » ainsi que Le Livre des sorts et enchantements (niveau 1) de Miranda Fauconnette. Heureusement il n’avait pas retrouvé ceux de DCFM, potions et compagnie… mais il allait devoir s’activer un peu sur le sujet.


Il fallait bien avouer que cela l’arrangeait mais le tic-tac, la patiente des Inquis ou plutôt celle de Ruben vu qu’il était son « garant » n’allait pas être éternelle non plus. Il allait falloir qu’’il trouve quelque chose à lui mettre sous la dent et vite. Il comptait retourner chez son père en milieu de semaine, pendant que tout le monde bosserait, avec un peu de chance il ne tomberait pas nez à nez avec quelqu’un et cette fois, il devait prendre un bouquin, quelque chose, n’importe quoi qui puisse faire plaisir à tout le monde sans qu’il n’y ait de révélations là-dedans, pendant un moment il avait pensé à prendre un truc de contes pour enfants, mais il était à peu près certains que ça ne plairait à personne même pas à Shadwell.
Il essayait donc de réfléchir, encore et encore à la meilleure solution, au meilleur ouvrage. Bien sûr qu’il aurait probablement pu tout dire à sa mère mais …. Non. l’option n’était pas envisageable, elle aurait été capable de faire une descente chez Eux. A quelqu’un comme Dunan avec qui il se sentait assez en confiance ? Non, cela pourrait aussi donner des bains de sangs, vengeance et guerre. Il avait l’impression d’être sur le même mode, le repeat, depuis l’attentat sans trouver rien qui lui convienne, aucune solution qui empêche des mots, le sang de couler.

Dans ses pensées, il marchait tranquillement dans les rues de Londres où il devait rejoindre Lewis, seulement à un moment toutes les lumières s’éteignirent d’un coup. Comme par magie, attirant totalement son attention par la même occasion, ainsi que son imagination : son palpitant s’était mis à battre à un rythme effréné dans sa poitrine comme s’il présentait une merde, une attaque ou quelque chose dans le genre.
Et puis, il y avait eu un bruit, un énorme bruit de taule froissée et autres juste à quelques mètres de pomme ! Pour une fois, il était sain et sauf, pas même une égratignure, ou alors quelques écorchures dues à de bris de verre. Une femme demanda qu’on appelle les secours tandis que lui venait de repérer dans ce bordel un regard connu.
Quelqu’un qu’il aurait préféré ne pas trouver ici, parce qu’il en avait sincèrement peur. De ce qu’il était, ce qu’il représentait, ce qu’il devenait aux Pleines Lunes. Mais il avait besoin d’aide…. Probablement. Il semblait blesser… et si les secours arrivaient jusqu’à lui qu’est-ce qui se passerait exactement ? Est-ce qu’un médecin pouvait se rendre compte rapidement de sa condition, est-ce qu’il ne serait pas traité en rat de laboratoire ? Il n’en savait foutre rien, mais une chose était certaine, il ne pouvait pas le laisser comme ça sans avoir essayé quelque chose. Enzo avait fait du mal à des gens comme lui, mais pas volontairement, pas vraiment… sinon jamais il n’aurait fini avec Kyle n’est-ce pas ? Sa conscience ne pouvait pas le faire partir sans se retourner, il n’était pas comme ça… même après tout cette merde. Il poussa un peu quelques badauds pour arriver au Sorcier ne sachant pas franchement ce qu’il voulait réellement. Putain, vu l’état des bagnoles, quelqu’un allait forcément se poser des questions sur les blessures d’Enzo qui sembleraient peut-être faibles pour le choc… ou pas.

«Comment est-ce que tu te sens ? »

Non pas de bonjour, rien. Comme s’ils se connaissaient, s’étaient déjà vus. Il ne va quand même pas dire que c’est son copain, pour paraitre moins bizarre avec les badauds ? Il verra sur le moment mais n’apprécie pas franchement cette idée, d’autant plus si certains Inquisiteurs trainent dans le coin. Eux aussi, il a l’impression qu’ils sont partout à attendre la moindre de ses erreurs.

« Comment est-ce que je peux t’aider ?»

On ne touche pas les blessés, on attend les secours. Ca il le savait ; Mais il voulait entendre la volonté d’Enzo.. sans savoir quoi faire exactement. Et s’il lui disait qu’il voulait partir comment est-ce qu’il allait improviser cette fois ? Autant avec Duncan qui faisait adulte pouvait marcher et compagnie ça allait… là… ils passeraient beaucoup pour des gamins et Enzo ne pourrait probablement pas utiliser la magie avec tant de moldus autour – tant mieux pour Tim par ce que rien qu’à penser à une baguette sortie, il en frissonnait-.
De toute manière Ryans comprendrait par là qu’il voulait savoir s’il avait besoin d’une porte de sortie ou s’il voulait faire le gentil petit moldu.

Le temps s'arrête, les visages sont flous, les mécanismes du cerveau s'actionnent les uns après les autres. Là, étendu sur le sol, je me retrouve projeté quatre ans en arrière. Un instant tout va bien, tout est normal, puis il y a un bruit, un choc, plus rien l'espace de quelques seconde et enfin le chaos.
Le karma est une pute diraient certains, probablement, mais par je ne sais quel miracle j'arrive à garder l'esprit plus ou moins clair. Là face à moi, mon regard dans le sien, son attention captée, je reconnais un visage auquel je m'accroche de toutes mes forces. Un seul échange de regard pour qu'il comprenne, je pourrais presque voir ses pensées s'imbriquer les unes dans les autres avant qu'il ne se rapproche de moi. Une étincelle d'hésitation, oui, mais une décision prise qui le pousse vers moi.

« Comment est-ce que tu te sens ? »

J'ai connu mieux. En temps normal j'aurai déjà sorti une connerie, probablement, mais les mâchoires serrées par la douleur j'en suis incapable. Sans parler de ma tête qui continue de tourner. Et si j'ai des blessures internes ? Tout ce que je sais, c'est que j'peux pas rester là.

« Comment est-ce que je peux t’aider ? »

Ma main vient aggriper son bras, pas besoin de beaucoup me concentrer pour sentir la terreur que je fais naitre chez lui. Ça a toujours été comme ça, j'ai pas vraiment essayé de changer les choses. Il a ses raisons, des raisons que je peux difficilement contester alors je m'estime simplement chanceux qu'il arrive à prendre sur lui pour venir jusqu'à moi. Parce qu'un moment comme ça, t'as pas envie de le passer seul.
Seul. C'est ce que j'étais cette nuit du 8 mars 2012 quand mon monde s'est écroulé. Seul dans un putain de ravin, le corps de mes parents quelques mètres plus bas complétement carbonisés. Des odeurs que je n'oublierai jamais, certaines se mélangent ici et me filent la gerbe mais j'ai pas le temps pour ça. Pas le temps de céder à la panique. Je sais très bien ce qu'il va se passer, les secours vont arriver, ils vont m'emmener et ensuite quoi ? Prise de sang, blessures qui guérissent trop vite pour que ça soit normal … Non. Définitivement non. Transplaner ? Pas la peine non plus, pas ici, pas comme ça à la vue de tous. Et à vrai dire je sais même pas si ma baguette est en un seul morceau. Si elle est dans le même état que ma jambe alors ça craint, vraiment. La où réside ma chance c'est que mon jean n'a pas l'air tellement déchiré, même si je souffre le martyr je peux encore espérer tromper tout le monde.

« Aide moi à m'relever, s'il te plait. »

Juste un murmure à l'adresse de Timothy, ma main toujours accrochée à son bras. Autour de nous le cercle de personnes commence à s'étoffer, ma cage thoracique elle se compresse de plus en plus.

Mais accroche toi, cède pas, t'as pas l'choix.

« J'peux pas rester ici, j'peux pas aller à l'hôpital. »

J'peux pas prendre le risque de finir branché à des fils, j'veux pas non plus retrouver le bip incessant et insupportable des moniteurs, l'odeur acre de ces bâtiments. J'peux pas prendre le risque de finir à nouveau dans une cage.
L'énergie du despesoir, sans doute, mais j'arrive à me redresser suffisamment jusqu'à m'assoir. Là haut c'est le bordel, le chaos le plus total. L'odeur du sang flotte autour de moi, j'aperçois un type avec une arcade éclatée qui reçoit lui aussi de l'attention. Sans doute un des conducteurs. Des morts? J'en sais rien, j'veux pas le savoir, j'veux juste foutre le camp d'ici.

Pourquoi est-ce qu’il agissait ainsi ? Pourquoi est-ce qu’il se dirigeait vers Enzo alors qu’il avait juste envie de fuir, d’être loin de lui, de ses souvenirs de ce sentiment de faiblesse, d’humiliation, d’angoisse que lui apportait le loup-garou ? Pourquoi est-ce que sa conscience lui disait d’aller l’aider tandis que le reste de son corps lui dictait le schéma inverse ? Est-ce qu’il ne signait pas un potentiel arrêt de mort pour tous les deux si jamais les Inquisiteurs étaient là ? Est-ce qu’il agissait vraiment de la bonne façon ?  Ruben de lui avait-il pas parlé de côté trop gentil, trop serviable ? Peut-être. Il n’en savait rien. Et à vrai dire, à cet instant précis il s’en fichait. La seule chose dont il était à peu près certain c’est qu’il fallait l’aider, par ce que personne ne méritait de finir entre les mains de secouristes en étant  ce qu’il était. La vérité c’est que même sans cette malédiction, probablement qu’il l’aurait quand même aidé, par ce que c’était ça Lui.  Par ce qu’il était comme ça, qu’il ne pouvait pas laisser quelqu’un dans ce genre d’emmerdements.
Sa première question : totalement stupide. Mais avec la panique qui le gagnait on ne pouvait pas trop lui en demander non plus. La deuxième, un peu mieux, mais ce n’était pas encore ça. Le contact de la main du Sorcier le fit frémir, mais il essaya de ne pas trop broncher. Son rythme cardiaque s’’était encore accéléré et il espérait pouvoir se contrôler et ne pas finir en totale attaque de panique, sinon il serait le mec qui venait le plus ridicule de l’histoire : échec total. On reste calme Tim, on essaye d’activer ses neurones. La réponse de Ryans à ce qu’il lui avait demandé quelques instants ne tarda pas à tomber.

« Aide moi à m'relever, s'il te plait. » Et pendant ce temps-là le cercle de personnes autour de lui s’agrandissait, ce qui ne l’arrangeait absolument pas : il détestait la foule et en plus, probablement que l’autre allait lui dire qu’il fallait partir et ça serait beaucoup plus compliqué. Il avait eu de la chance avec Duncan, là ça ne serait probablement pas le cas.  Et d’ailleurs Ryans n’avait pas tardé à confirmer ce qu’il pensat. « J'peux pas rester ici, j'peux pas aller à l'hôpital. »

Tim acquiesça doucement. Il savait pourquoi. Il chercha un peu en mode désespoir un lieu où ils pourraient se poser au moins pour qu’Enzo puisse transplaner ou alors  se poser le temps d’appeler un ami. Un lieu discret… Et dans le coin, il y en avait pas trop. Dans une ruelle adjacente, ils pourraient probablement avoir un minimum d’intimité. Mais avant il allait devoir se débarrasser de tous ces gens, car même si beaucoup étaient occupés il y en avait encore autour d’eux.
Agir rapidement : diversion ou mensonge ?

« Tu penses pouvoir marcher seul jusqu’à une des rues à côté où il y a moins de monde si je fais diversion ?» avait-il murmuré de  façon à ce  qu’Enzo soit le seul  l’entendre.

C’était le plus simple, mais c’était peu probable que ça marche, par ce que c’était Enzo qui avait reçu le choc, probablement. Tout s’était passé si vite que probablement personne ne pourrait le certifier. La question réelle était : est-ce qu’il pourrait marcher avec  et/ou sans aide. S’il lui servait de béquille peut-être que ça pourrait faire l’affaire mais seul ?
Il restait donc, probablement le mensonge. De quoi cette bonne populace avait peur ? Qu’est-ce qui les dégoutait ? Qu’est-ce qui pouvait les faire reculer assez pour leur laisser un champ de passage. Il avait des idées, plusieurs, mais qui ne marcheraient probablement pas… Seulement  il n’avait pas le choix, il devait improviser rapidement, dans les secondes qui  suivent.
Drogue ? Folie ? VIH ? Tuberculose ? Il ne s’y connaissait pas franchement beaucoup en médecine. Il avait quelques connaissances…. Il ferma les yeux quelques instants ne croyant pas franchement ce qui allait suivre, il était certain que ça n’allait pas marcher, mais il n’avait pas le choix. Il était presque dégouté  de certains arguments qu’il allait utiliser… mais dans le désespoir. Inspiration.

«Je suis désolé pour ce qui va suivre…. Et si tu pouvais cracher un peu de sang si t’as ça en stock vas-y. » Encore un murmure.

Il avait fermé les yeux avant d’embrasser Enzo rapidement, mais baiser quand même. Et voilà qu’il frôlait la crise de panique, mais c’était presque probablement mieux comme ça. Il  se releva aidant par la même occasion le grand brun à se lever, il avait l’impression d’être un gabarit ridicule à côté de lui.

«C’mon copain. L’a le SIDA, on a pas d’mutuelle. On pourra pas payer.  Laissez-nous passer… s’il vous plait. » arriva-t-il à prononcer difficilement.

Le contact un peu trop proche d’Enzo, son gabarit, sa force le faisait totalement paniquer et pourtant il savait qu’il ne lui ferait rien ; mais il n’arrivait que difficile à se calmer. Et l’argument de la maladie lui donnait plus envie de pleurer dépit d’en être arriver là. Ceci dit, entre sa tronche paniquée, et ses tremblements, sa nervosité, il pourrait être pris au sérieux ou alors … pour un drogué, y’a ptet des drogues qui font ça ? Il n’en savait foutre rien. Allez Ryans, un petit crachat plein de sang et avec de la chance (même si c’était horrible de ça dans ce sens là)  les préjugés de la maladie, bien ancrés,  feraient le reste. Et il fallait surtout que si tout ça marchait que le grand gars puisse marcher… et que lui ne finisse pas par perdre totalement son sang-froid par ce qu’il risquait d’avoir beaucoup de mal à respirer dans ce cas-là.
Et si ça ne marchait pas, il feindrait le malaise, ça occuperait les badauds avec un peu de chance assez pour que Ryans puisse dégager un minimum.

Ma concentration est quasi totalement focalisée sur un objectif : Ne pas céder à la crise d’angoisse. Parce qu’elle est là, je la sens dans chacun de mes muscles, chacune de mes respirations, chaque battement de cœur … Comme un serpent sinuant entre mes côtes. L’adrénaline ne va sans doute pas tarder à retomber, la douleur fera sa grande entrée, faut que je me tire de là. Dans ces moments-là le cerveau passe en mode survie, c’est presque comme devenir extralucide l’espace de secondes qui paraissent éternité. Je le vois bien, Timothy est dans le même état que moi et son regard se pose alentours comme s’il passait en revue toutes les options possibles. Je ne le lâche pas, j’y arrive pas, j’ai besoin de sa présence. D’une présence. Le chaos est perceptible mais je devine sans trop de mal les premiers téléphones. Au choix : Appeler les secours ou filmer la scène. J’ai foutrement pas besoin de ça.

« Tu penses pouvoir marcher seul jusqu’à une des rues à côté où il y a moins de monde si je fais diversion ? »

Juste un murmure à mon adresse, que j’ai peine à entendre correctement puisque mes oreilles me semblent continuer à siffler. Focus ! Putain. Décroche pas c’est pas le moment. Un coup d’œil à droite, puis à gauche, je n’arrive à voir que des paires de jambes ou des bouts de carrosserie. Mon estomac se soulève aussi sûrement que j’ai envie d’appeler ma mère à la rescousse. Exactement comme je l’ai fait cette nuit-là, la dernière où elle m’a pris dans ses bras.

« Je suis désolé pour ce qui va suivre…. Et si tu pouvais cracher un peu de sang si t’as ça en stock vas-y. »

Pas le temps de réagir, pas le temps de comprendre, pas même celui de me demander d’où sort une requête pareille. Cracher du sang ? Pourquoi ? En un éclair je vois son visage se rapprocher du mien, les réflexes trop lents pour être efficaces. Ses lèvres se posent sur les miennes puis s’éloignent aussi rapidement, je reste comme un con qui ne comprend pas ce qui se passe. Entre le choc de l’accident et ça, mon esprit n’arrive plus à suivre.
Je me contente de suivre le mouvement, m’accrocher à lui comme je peux pour me relever en évitant de poser ma jambe blessée sur le sol puisqu’elle ne me supportera de toute façon pas. Si je pensais être au bout de mes peines j’étais encore loin du compte.

« C’mon copain. L’a le SIDA, on a pas d’mutuelle. On pourra pas payer.  Laissez-nous passer… s’il vous plait. »

Étourdi, certes mais suffisamment conscient pour entendre et surtout comprendre les mots qui viennent de sortir de sa bouche. Ça explose dans ma cage thoracique, comme si ce choc-là était encore plus violent que tout le reste. Qu’il me fasse passer pour son copain, soit, une idée comme une autre et sincèrement je m’en fous, mais le reste ? Je revois Derek me balancer des horreurs en liant cette maladie à l’homosexualité dans un ramassis de clichés plus gerbant les uns que les autres. Je me prends le regard des gens autour et n’arrive pas à déterminer ce que j’y lis. Les battements de cœur de celui qui est en train de me sauver la mise résonnent dans mes os autant que les miens, une fois debout la tête me tourne et je ne sais pas si c’est dû au choc physique ou bien celui plus insidieux, mental. Je comprends aussi pourquoi il m’a demandé de cracher du sang et tout ce que j’ai envie de faire là tout de suite c’est de vomir, encore une fois à cause du choc mais pas seulement. Le dégoût, le rejet supposé qu’il a pu imaginer en balançant une telle horreur. Hors de question que je fasse ça, pas avec tout ce que ça implique. Je peux pas cautionner, encourager, non.

« Attendez, vous n’pouvez pas … »
« Me touchez pas, foutez moi la paix. »

La réaction est brutale, je manque de me casser la gueule et m’appuie sur lui en serrant les dents tant la douleur me scie en deux. Je peux sentir des larmes pointer sur le bord de mes yeux tellement j’ai mal mais la volonté de fuir cet endroit, cette réalité, prend le pas sur tout le reste.

« J’vais bien, c’est rien. Le choc était entre les deux voitures, y a même pas d’impact sur votre parechoc. »

Un vague coup d’œil, un ton plus calme, je m’impose un peu plus auprès de Tim pour le pousser à marcher. S’éloigner, maintenant, zapper ce qui vient de se passer et lutter contre cette envie d’attraper ma baguette pour le faire plus facilement. Les premiers pas sont une torture, je finis par trouver des appuis et compte sur la force de celui qui est en train de mettre de côté ses angoisses pour me sauver la mise. Je dépends totalement de lui en cet instant, que ça nous plaise ou non à tous les deux.
Le chemin me parait durer une éternité, j’essaie de faire abstraction du monde au maximum jusqu’à ce qu’on arrive dans une ruelle adjacente. L’obscurité comme amie, il faut l’admettre, puisqu’il est bien plus simple de disparaitre quand personne ne peut vous voir. Quand je plonge ma main dans ma poche c’est du soulagement que je ressens, celui d’y trouver ma baguette en un seul morceau. Sa Magie vibre contre ma paume. J’attends un signal de sa part, le feu vert pour me faire comprendre que la voie est libre, et dès que c’est le cas le transplanage vient nous saisir tous les deux.

L’atterrissage ne se fait pas en douceur, j’ai juste le temps de trouver appuie contre un mur avant de vider sur le sol l’entièreté de ce que j’ai pu manger ces dernières heures. A bout de force, tremblant des pieds à la tête sous l’effet du stress, j’admets oublier sa présence l’espace d’un instant. Juste … quelques secondes pour me reprendre, retrouver un semblant de lucidité. Puis finir assis par terre contre à quelques mètres de là parce que je ne tiens plus debout. J’aurai pu le laisser sur place, j’ai simplement pas réfléchis. Peut-être aussi que je ne voulais pas me retrouver seul.

« Désolé. »

Mon rythme cardiaque se calme, mon souffle aussi, je cherche son regard et lui adresse un merci silencieux. Il aurait pu me laisser là, dans ma merde, et il l’a pas fait. Qu’importe la méthode même si elle m’a secoué autant que les faits, j’imagine que la panique a parlé pour lui. J’ai de toute façon pas la force de me lancer dans un débat maintenant.

« Toi. Tu vas bien ? »

Trouver une solution, absolument, mais laquelle ? Il n’arrivait pas à réfléchir, ou du moins comme il fallait. Il paniquait de tout ce qui pouvait arriver s’il ratait, si Enzo pouvait marcher ou pas, comment étaient les passants. Il devait réussir, sinon les médecins  verraient rapidement que Ryans n’était pas comme les Moldus, que quelque chose « clochait ». Il se mordilla la lèvre, il essayait de trouver un moyen de diversion, un endroit où ils pourraient se poser… Mais rien ne lui venait alors il allait devoir utiliser la méthode B, la seule qui semblait présente dans son esprit d’ailleurs. Il se sentait mal de faire ça, d’utiliser cet argument pour ne pas dire que cela le débectait mais il n’y réfléchit pas plus. Utiliser un cliché d’une maladie si horrible n’était pas bien, mais laisser Enzo dans la merde le temps que son cerveau daigne trouver quelque chose de moins problématique était encore pire. Oui, c’est ça, il n’avait pas le choix, tenta-t-il de se persuader dans sa panique.
Plus le temps de trop réfléchir les secours pouvaient être là rapidement. Alors il s’exécuta, il fit à son idée – mauvaise-… mais qui sembla quand même marcher. Ces abrutis ne semblaient qu’à moitié vouloir les retenir comme s’ils avaient peur de quelque chose, alors que probablement aucun n’avait aucune plaie ouverte, alors qu’aucun d’eux ne courrait réellement un risque. Au final lequel comportement était le plus dérangement : ce qu’il avait dit ou le comportement des autres ?

Quelqu’un sembla vouloir empêcher de partir mais la réaction d’Enzo, assez brutale l’en dissuada. Réaction qui le mit encore plus mal à l’aise qu’il ne l’était, mais il n’y avait qu’à voir la tête de Ryans pour savoir qu’il avait vraiment mal et qu’il ne pouvait pas se laisser aller maintenant ou fuir. Tim essaya donc de se focaliser sur cet objectif : l’emmener en lieu sûr et après … et bien sûrement que tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ils avaient donc marché un peu plus loin, pas très loin et pourtant ça avait paru très long à Turner. Et enfin, une fois dans l’obscurité, il vérifia qu’il n’y avait rien autour d’eux pour lui dire qu’il pouvait y aller s’il voulait faire de la magie. Cela ne l’enchantait absolument pas,  plus les secondes passaient, plus l’idée de voir Ryans une baguette dans sa main le rendait malade ; c’est probablement pour ça que sa respiration se faisait d’ailleurs plus difficile, la panique le gagnait encore plus  maintenant que le sorcier était en sécurité, et qu’ils étaient seuls dans la rue. La parano revenait totalement : est-ce qu’il n’allait pas l’emmener dans un endroit où on allait l’interroger sur les Inquisiteurs ? Est-ce qu’il n’allait pas de nouveau se faire emprisonner, séquestrer ? Pourquoi est-ce qu’il ferait confiance à Enzo ? Par rapport à Kyle ? Il avait pu changer depuis le temps… Il avait pu, mais ce n’était probablement pas le cas. Malgré tout, la panique était bien là. Et puis…

Comme un trou noir, une envie de vomir après un atterrissage brusque. Ils venaient de transplaner ? Est-ce qu’ils venaient de faire ça ?  Il connaissait déjà la réponse, mais putain, où est-ce qu’ils étaient exactement ? Pourquoi ? Pourquoi l’emmener avec lui alors qu’il aurait pu le faire seul ?
Aie confiance, Tim. Il aurait pu tomber dans les pommes, tout simplement.
Parce qu’il ne voulait pas être seul.
Par ce qu’il préférait qu’il y ait quelqu’un avec lui jusqu’à ce qu’un secours arrive.
Par ce qu’…. Ils savaient.

Il eut un petit hoquet de panique se sentant de plus en plus hyperventiler. Bonjour le drama. Il y en a qu’un ici qui devrait avoir le droit de tourner de l’œil et ce n’était pas lui. Il devait se calmer. Absolument. Si son cerveau n’ était pas assez alimenté en oxygène qui sait ce qui pourrait se passer ? Il ne pourrait plus du tout réfléchir s’il y en avait besoin.

[colo=tomato]« Désolé. »[/color] la voix d’Enzo le tira brusquement de ses pensées et en partie de sa panique.  Il cligna plusieurs fois des yeux, tandis que l’autre garçon reprenait la parole « Toi. Tu vas bien ? » Comment dire que non, alors que lui était entier et n’avait rien de cassé ? Ce n’était au final que de la peur, de l’angoisse, rien d’autres… rien de bien grave. On se concentre. De toute manière à part cette impression de crâne qui allait exploser, sa respiration toujours mauvaise et son cœur qui battait à tout rompre dans sa poitrine ainsi que la peur, il n’y avait rien à signaler et la plupart des choses paraissait-il que les Loups pouvaient le sentir. Il se contenta d’hausser les épaules. « C’pas la question. On est où là exactement ?» Ne pas penser au pire, surtout. « Ton téléphone marche pour que tu appelles quelqu’un ? Je suppose que tu en as un… et que tu nous as transplané ici pour … être plus au calme ?» En attendant il cherchait des yeux s’il ne trouvait pas quelque chose qui pourrait servir de canne ou d’attelle à son interlocuteur. Temps de silence. Il se mordilla les lèvres, lui aussi devait s’excuser de quelque chose. Inspiration douloureuse et il se lança «Je suis également désolé. Pour… hum le baiser et le reste. C’était totalement indécent mais sur le moment je n’ai rien trouvé d’autres à dire. » Raclement de gorge. « Ce n’était pas pour te dévaloriser. J’suis de ton bord.» Autrement dit, il savait pertinemment tout ce que cela impliquait.

« C’pas la question. On est où là exactement ? »

Un peu quand même. T’es venu à mon secours, tu m’as aidé, t’aurais pu être blessé toi aussi pour ce que j’en sais. Et moi je t’embarque alors que je sais pertinemment la terreur que tu ressens en ma présence. Je t’éloigne probablement de chez toi, de tes plans, c’est probablement pas le fun de se retrouver tout seul avec un type qu’on craint dans une ruelle à peine plus éclairée que l’était l’endroit où tout a merdé.

« Brixton. »

A l’instinct, sans prendre le temps de réfléchir parce que j’en étais incapable. Une coïncidence ? Aucune idée, sans doute pas, mais le fait est qu’on se retrouve pas loin de la boutique de Benjamin. Fermée à cette heure-là évidemment, mais j’en viens à me demander s’il habite dans le coin. Et s’il est par là, aussi. L’appeler lui ? ça me traverse l’esprit mais la solution la plus logique est autre.

« Ton téléphone marche pour que tu appelles quelqu’un ? Je suppose que tu en as un… et que tu nous as transplané ici pour … être plus au calme ? »

Je ne sais pas si c’est parce que je sens sa panique que je me calme, mais je le fais. J’acquiesce et fouille dans ma poche pour en sortir mon téléphone, réflexe que je n’avais pas eu jusqu’ici. L’écran est fêlé mais l’objet en lui-même a l’air de fonctionner et déjà le répertoire défile sous mes doigts. Une pensée pour Maxence, mais l’évidence est autre part. Leiv. Médicomage, certes, mais surtout … Famille. Dire que je ne pense pas à Liam serait mentir mais à quoi bon ? Il n’a plus jamais répondu, jamais décroché, pourquoi est-ce qu’il le ferait maintenant ? On n’est plus ensemble, pourquoi est-ce qu’il débarquerait ? Aucune raison.

« Je suis également désolé. Pour… hum le baiser et le reste. C’était totalement indécent mais sur le moment je n’ai rien trouvé d’autres à dire. »
« Pas grave. »

En fait, si, mais c’est juste pas le moment. Je l’ai dit, ce baiser je m’en contrefous, les mots c’est autre chose mais je devine sans aucun mal qu’il a juste fait comme il a pu.

« Ce n’était pas pour te dévaloriser. J’suis de ton bord. »
« J’ai pas de bord. »

C’est pas agressif mais ça sort du tac au tac. Les personnes qui me connaissent savent que les étiquettes et les cases dans lesquelles on range les gens sont passablement le truc qui m’insupporte le plus. T’as couché avec un mec, t’as eu une histoire avec, t’es forcément gay. Sinon, faut que tu sois bi. Peut-être qu’on peut juste arrêter de coller des mots sur tout et tout le monde non ?

« Désolé de t’avoir embarqué avec moi, j’ai juste pas réfléchi. J’te déposerai si tu veux. »

J’attends pas de réaction de sa part, appui sur l’écran et porte le téléphone à mon oreille. Il n’est pas encore trop tard, je sais qu’il est rentré du boulot et pas encore couché. La petite, si, Isma sans doute aussi. Troisième sonnerie, il décroche, je me sens comme un môme rassuré d’entendre la voix de son père.

« Salut. Désolé de t’embêter mais j’ai un problème. »

Encore. Pourtant aucun jugement dans le son de sa voix, jamais, juste du pragmatisme quand je lui explique l’ampleur des dégâts, que je lui indique où je me trouve. J’écoute ses directives et raccroche après l’avoir remercié, sur mes épaules un poids en moins mais les sens aux aguets malgré tout. La fatigue, l’état de choc, la blessure, tout ça m’assomme mais face à moi c’est un animal pris au piège que j’ai. L’odeur de sa peur flotte partout dans l’air, surpasse presque celle du sang, je me sens désolé parce que je sais être la cause de cet état.

« Il va pas tarder, tu peux y aller si tu veux. »

Aucune idée d’où il vit, c’est surement débile de dire ça parce que j’ai dû l’éloigner de chez lui et même si ici le courant semble présent pas sûr que le métro fonctionne.

« J’te fais peur. »

Juste un constat.

Il ne savait plus trop ce qu’il voulait ou pas. Où est-ce qu’il préférait être. Il se sentait totalement perdu et vulnérable. Sur combien de kilomètres pouvait-on transplaner ? Et puis, ce n’était pas comme s’il pouvait fuir réellement si le besoin s’en faisait ressentir : la magie gagnerait toujours. Un sort, un seul et il pouvait être à ses pieds, comme un chien. Probablement que cela n’arrivait pas, mais il ne pouvait pas s’empêcher d’envisager cette situation, juste au cas où. La voix d’Enzo le tira une nouvelle fois de ses pensées.

« Brixton. »

Il acquiesça doucement. D’accord. Ce n’était pas la porte à côté et ça l’obligerait à prendre les transports en commun si jamais l’électricité marchait bien dans son coin, et il fallait bien avouer que cela ne l’enchantait guère. Peut-être qu’il pouvait abuser et demander à Lewis de venir le chercher et ils changeraient leur plan de soirée ? Il était certain que son meilleur ami viendrait le chercher sans hésiter s’il lui demandait. Chaque chose en son temps, lui n’était pas blessé, il pouvait donc attendre un peu… Il demanda donc à Ryan si son téléphone marchait, avant de lui demander la question qui lui brûlait sur les lèvres : POURQUOI est-ce qu’il avait transplané ? Il fallait bien avouer que Turner avait un peu de mal à comprendre cette action, mais il était néanmoins bien placé pour savoir que tout le stress on ne faisait pas toujours des choses logiques. Enzo n’avait pas tardé à sortir son téléphone de sa poche, il le regarda faire quelques instants se demandant s’il devait sortir ou non la suite : les excuses. Après encore quelques secondes d’hésitations, il finit par le faire, par ce qu’il se doutait que se faire embrasser comme ça par surprise, presque de force, ce n’était pas agréable et pouvait être pris comme une agression… et pour le reste, c’était probablement encore pire mais le mal était de toute manière fait !

« Pas grave. »

Ok, parfait. Il préférait ça qu’une leçon de morale ou autre, pour ses nerfs c’était beaucoup mieux, il n’était pas certain qu’il n’aurait pas fini en PLS si Enzo avait râlé, ou élevé la voix, mais afin que ce dernier comprenne qu’il n’avait rien contre sa sexualité, il avait préféré rajouter une chose ou deux, visiblement à tort …. Car la réponse ne se fit pas attendre.

« J’ai pas de bord. »

Il comprenait bien que c’était juste un état de fait mais cela le laissait quand même assez perplexe, il fallait bien l’avouer. Il n’était pas certain de bien comprendre ce que l’autre voulait dire par là. Il fronça donc un peu les sourcils mais n’osa franchement pas poser la question de peur de l’agacer, de l’énerver ou autre. Il se contenta donc de se taire.

« Désolé de t’avoir embarqué avec moi, j’ai juste pas réfléchi. J’te déposerai si tu veux. »
« C’est pas dramatique…» murmura-t-il doucement tandis qu’Enzo avait pris son téléphone pour appeler. Pas dramatique, ni grave mais cela le stressait… quant au fait d’être déposé …. Il n’en avait trop rien. Il ne pouvait pas dire, pour l’instant il était encore trop paniquer, mais en même temps en transplanant chez sa mère il serait chez lui rapidement… Il déglutit difficilement, pas franchement certain d’avoir envie de renouveler cette expérience déplaisante et puis Enzo devait se faire soigner en priorité. Il le laissa donc passer son coup de fil sans l’ouvrir plus, il donnerait sa réponse après. Est-ce qu’il aurait pu en profiter pour fuir ? Probablement, mais il n’allait pas le faire. Il avait toujours clairement peur, mais ne sentant aucune animosité de la part, il arrivait un peu à calmer son angoisse. Alors, il allait rester, par ce qu’il se voyait mal, malgré tout l’abandonner dans cet état, seul en ne sachant pas ce qu’il avait, ce qui pouvait arriver. Il priait juste pour qu’il n’y ait pas d’inqui qui l’ait aperçu tout à l’heure, sinon il allait droit au drame.

« Il va pas tarder, tu peux y aller si tu veux. »

Il secoua la tête, négativement.

« Je préfère attendre qu’il soit, on ne sait pas ce que tu as et ce qui peut se passer… Quelques minutes peuvent être dangereuses. »

Et lui, comment est-ce qu’il ferait pour partir après ? Il verrait à ce moment-là. De toute manière, il n’arrivait pas à se décider pour ça… et il fut tiré de sa réflexion par une nouvelle phrase d’Enzo qui le fit déglutir difficilement !

« J’te fais peur. »
« Je… je… suis dé-désolé.» Et voilà qu’il se remettait à bafouiller, à ne plus savoir où se mettre. « Vous tous .. c’pas que toi. A quelques exceptions. »

Une façon comme une autre de rire qu’il ne fallait pas le prendre spécialement pour lui ou plutôt qu’il n’était pas le seul, que tous les sorciers lui faisaient peur. Il se mordilla un peu la lèvre avant de se ronger nerveusement un ongle, l’angoisse revenant à présent en force.

« Mais, effectivement pour toi… avec ce qui s’est passé là-bas. Oui, tout particulièrement.» Alors la bonne phrase aurait été oui toi avec tout ce qui s’est passé là-bas, ce que tu as fais aux gens comme moi sous ta forme lupine j’ai particulièrement peur de toi, même si je sais qu’au final tu n’y ais pas pour grand-chose. T’étais aussi un pion, une victime. Il déglutit encore une fois difficilement, respiration qui repartait en live, mais il arriva à ajouter «J’sais que tu te contrôlais pas, que c’était pas volontaire, mais c’est plus fort moi. Incontrôlable. Pour toi. Pour les Autres. »

Pour lui aussi c’était juste aussi énoncer un fait. Cela ne servait à rien de le cacher, de mentir ou autres ; il fallait assumer que ça faisait partie de lui, que c’était un traumatisme « normal » cette peur, cette angoisse après ces deux années. Il n’y avait pas de haine particulière par ailleurs, pas vraiment, d’autres sentiments négatifs en rapport à ces « chasses », mais c’était tout. Il essayait aussi de se dire qu’il aurait pu être de l’autre côté et qu’il n’aurait pas pu faire grand-chose, qu’il aurait pu être un pion, comme Enzo. Qu’à part les Supérieurs, les vrais, les autres ne devaient pas être haïs pour tout cela.

« Je… je… suis dé-désolé. »

L'angoisse personnifiée, voilà ce que j'ai face à moi. Un être vivant, un être humain, bousillé par un stress qui empeste jusqu'au bout de la ruelle dans laquelle on a échoué. Tout ça n'est pas un jugement de ma part mais un simple constat. Mauvais endroit, mauvais moment, j'aurai pu lui épargner tout ça et foutre le camp sans l'embarquer mais je me suis comporté comme un égoïste. Parce que j'avais peur d'être seul, parce que j'en peux plus d'être seul. Solitude que je me créé la plus part du temps, cette solitude qui vient vous prendre à la gorge même quand vous êtes entouré. Pas toujours, évidemment, mais parfois vous décrochez et plus personne n'existe si ce n'est celui qui contrairement à tous les autres n'est plus là. Comme s'ils ne faisaient pas le poids, ce qui est profondément injuste pour eux. Là, assis par terre, la jambe en vrac, j'en suis encore à penser à lui parce que j'aimerai qu'il soit là.

Mais il ne l'est pas, et je commence à l'accepter.

« Vous tous .. c’pas que toi. A quelques exceptions. »

Vous tous.

Les sorciers, la Magie, tout ce qui a fait de leur vie un Enfer là bas. Une pensée pour Kyle, pour Cameron, Emily et les autres. Traités comme des moins que rien par des êtres infâmes persuadé d'être supérieurs … Et ça fait mal d'être associés à ces personne là. Est ce que je lui en veux pour autant ? Non. Je comprends. J'en suis pas sorti indemne, le traumatisme a la peau dure, alors oui je comprends. Je comprends aussi que je ne suis pas tout à fait comme les autres à ses yeux, pour des raisons que je devine bien avant qu'il ne les formule.

« Mais, effectivement pour toi… avec ce qui s’est passé là-bas. Oui, tout particulièrement. »

Avec le mal que j'ai fait. Peu importe ceux que j'ai tenté de sauver, peu importe les coups que j'ai pu prendre,  j'ai participé à cette mascarade qui a marqué au fer rouge et de manière indélébiles des êtres arrachés à leur vie. Timothy est un survivant, ni plus ni moins, et cette angoisse que je capte émaner de lui j'en suis en partie responsable. J'aurai pu essayer d'arrondir les angles, lui parler, le rassurer … Je ne l'ai jamais fait.

« J’sais que tu te contrôlais pas, que c’était pas volontaire, mais c’est plus fort moi. Incontrôlable. Pour toi. Pour les Autres. »

A aucun moment je ne baisse les yeux ni ne cherche à éviter son regard. La vérité fait mal à entendre, le passé ressasser n'est peut-être plus si douloureux mais comprendre et admettre qu'on a ne serait-ce qu'une infime part de responsabilité dans le traumatisme de quelqu'un ça fait mal. Et ça, ne pas détourner le regard, j'estime le lui devoir.

« T'as pas à être désolé, ni à t'excuser. »

Si le Loup s'agite face à cette proie facile – à ses yeux, pas aux miens – l'humain lui reste tranquille. Fatigué, blessé, certes, mais ça ne tient pas qu'à ça.

« On a tous été victimes, et même si j'ai pu avoir des circonstances atténuantes ça n'excuse pas tout ce que j'ai fait. Ça ne rend pas ça moins grave. »

J'assume les conséquences de mes actes, j'endosse ma responsabilité. Ça n'est pas agréable mais qui est celui qui en souffre le plus ici ? Certainement pas moi. Je ne suis pas l'auteur ni le créateur de tous ses maux mais c'est déjà trop.

« J'pourrais jamais effacer tout ça mais pour c'que ça vaut, c'est moi qui suis désolé. »

Pas d'être un sorcier, jamais, c'est pas comme j'avais eu voix au chapitre de toute façon, mais pour le reste. J'aurai du être plus fort, ne pas céder comme je l'ai fait. Je ne vis pas avec un poids sur les épaules, j'ai fait la paix avec ça mais j'estime qu'il … mérite au moins ça de ma part.

Est-ce qu’il se sentait ridicule ? Oui. Mais il n’y pouvait rien, on ne pouvait pas régler ce genre de problèmes d’un claquement de doigts, ou du moins pas chez lui. Pourtant, certains anciens prisonniers comme Emily, Cameron ou même Matthew n’avaient jamais semblé être comme ça, mais au contraire, ils prenaient la vie du bon côté. D’un côté, il les enviait énormément, cela devait être tellement plus simple d’arriver à vivre avec, ou alors faire comme Lewis : arriver à faire comme si rien ne s’était passé, le mettre au fond de son esprit sans trop y penser. Il se con, faible, stupide de ne pas arriver à faire l’un ou l’autre. L’heure des explications semblait finalement arriver, et il tenait à savoir que ce n’était forcément que contre lui, qu’il avait peur de tous les sorciers en général… mais que oui vu ses antécédents Ryans lui faisait plus peur… Normal en même temps, il aurait pu finir bouffé par ce qu’il devenait pendant la Pleine Lune, pendant qu’il ne se contrôlait pas forcément. Il avait conscience que ce n’était pas gentil, ou juste pour Enzo. Il en était un peu désolé, de remuer probablement le couteau dans la plaie, mais c’est lui qui avait posé la question au départ ! Il avait essayé d’arrondir un peu les angles en essayant de lui montrer qu’il savait que son interlocuteur ne se contrôlait pas mais que malgré ça, Turner angoissait quand même. Tout comme Enzo plutôt, c’était un fait, des faits. Toujours pas de haine. Pourquoi est-ce qu’il le détesterait ? Et c’était peut-être là le souci également avec les Inquisiteurs, c’est qu’il ne comprenait pas cette haine que les Moldus avaient envers les Sorciers, pour beaucoup c’était beaucoup plus que de la peur. Lui, qui avait voulu changer les choses en entrant là-dedans, en espérant juste éliminer la magie se retrouvait dans un groupe qui était aussi extrémiste que les Supérieurs ; soi-disant pour la bonne cause. Combien connaissaient réellement les Sorciers (et pas qu’un ou deux ?), combien pouvaient réellement imaginer l’enfer de Poudlard, certes, mais aussi la vie que menaient des nés-moldus qui était racisés pour leur sang. Pourquoi tous les mettre dans le même panier ? Pourquoi TOUS les haïr ? Cela n’avait aucun sens pour lui. Il avait beau essayé de suivre leur raisonnement pour mieux se fondre dans la masse, il se sentait sincèrement larguer dans cet Océan de mauvaises ondes.

Et il regrettait. Mais qui en avait à faire de ces regrets ? Personne vu qu’il ne pouvait pas l’ouvrir. Le serpent qui se mord la queue. Il tournait en rond, trop lâche et apeuré pour prendre une quelconque décision qui pourrait finir dans un bain de sang de ses proches ou des Inquis.

« T'as pas à être désolé, ni à t'excuser. On a tous été victimes, et même si j'ai pu avoir des circonstances atténuantes ça n'excuse pas tout ce que j'ai fait. Ça ne rend pas ça moins grave. J'pourrais jamais effacer tout ça mais pour c'que ça vaut, c'est moi qui suis désolé.»
« Si, Enzo, j’ai à être désolé. Par ce que c’est injuste pour toi…» Ca il en était certain. Il en avait même planté quelques instants son regard dans celui de l’autre garçon avant de finalement rebaisser le regard «Par ce que tu n’as rien demandé. Quoi que je puisse ressentir, ou quoi qu’on puisse te dire, ça ne fait pas de toi quelqu’un de mauvais, ou de méchant. Tu l’as dis, tu as été une victime, comme nous. » Il se tut quelques instants avant de reprendre difficilement, par ce que ses pensées n’étaient pas forcément claires «Ne laisse personne te faire croire que ce ne sont pas des circonstances atténuantes, tu ne te contrôlais pas. C’est probablement la putain de meilleure excuse qui soi. Qui sait ce que ça fait de se transformer ? Ni moi. Ni Eux. Ni la plupart de la population. Ca n’enlèvera pas le fait que, malgré tout, j’aurais peur de toi, par ce que j’en suis clairement pas à ce stade là…Je. Mais, je ne peux pas t’affirmer que je n’aurais pas fait comme toi dans ta situation, ou pire, ou mieux. C’est un juste un fait. » Nouveau temps de silence. «J’aurais pu être élève et je ne peux pas te dire comment j’aurais réagi.»

A part qu’il ne s’en serait pas pris aux gens, sauf s’il ne se contrôlait pas. Mais ce n’est pas pour autant qu’il se serait retrouvé parmi ceux qui se sont rebellés. Il ne voulait pas être un donneur de leçon par ce qu’il y avait réfléchi et qu’il ne pouvait pas dire ce qui se serait passé dans sa tête s’il avait un sorcier. Il ne voulait pas être spécialement de quelqu’un de bon, ou de mauvais. Il voulait juste essayait d’être juste… Et s’il avait été sorcier, peut-être que tout se serait mieux passé avec ses sœurs, avec son père.

« Mais merci.» Par ce que pour lui aussi, cela ne devait pas être simple à dire. « Les seuls qui n’ont pas vraiment de circonstances atténuantes ce sont les Supérieurs, ceux qui ne sont jamais remis en question. Et mes sœurs.»

Surtout ses sœurs ; par ce que tout aurait pu s’arranger plus facilement plus lui si en sortant de là, il n’avait pas continué à être rabaissé par des frangines. Mais là encore c’était juste un fait entouré de beaucoup de fragilité et de lassitude.

« Tu vois, si ça peut te rassurer, ce n’est pas vraiment toi, le monstre de mes cauchemars.»

Pas monstre pour la Créature, mais pour ce qu’il y avait dans l’âme.

« Si, Enzo, j’ai à être désolé. Par ce que c’est injuste pour toi… »

J’attendais rien de cette discussion, vraiment, mais ces mots-là viennent me taper en plein dans le cœur et j’ai le sentiment que c’est la première fois depuis le début qu’il me regarde aussi frontalement. Comme si la peur avait disparu, comme si face à lui j’étais devenu … un égal. Pas un cauchemar, juste un type dans le même bateau que lui. J’ai plus envie de ressasser le passé et je n’ai jamais attendu le pardon de qui que ce soit mais ce soir, en sa présence, avec ces mots, je réalise à quel point ça m’atteint et me rend fébrile.

« Par ce que tu n’as rien demandé. Quoi que je puisse ressentir, ou quoi qu’on puisse te dire, ça ne fait pas de toi quelqu’un de mauvais, ou de méchant. Tu l’as dis, tu as été une victime, comme nous. »

Sauf qu’à la différence de toi, par ma faute des gens sont morts. Que ce soit directement ou non, des êtres ont perdu la vie par ma faute. Encore une fois je le dis, le répète, je vis avec et je me suis pardonné parce que je ne pourrais rien y changer, mais ça n’efface rien de ce que j’ai pu faire.

« Ne laisse personne te faire croire que ce ne sont pas des circonstances atténuantes, tu ne te contrôlais pas. C’est probablement la putain de meilleure excuse qui soi. Qui sait ce que ça fait de se transformer ? Ni moi. Ni Eux. Ni la plupart de la population. Ca n’enlèvera pas le fait que, malgré tout, j’aurais peur de toi, par ce que j’en suis clairement pas à ce stade là…Je. Mais, je ne peux pas t’affirmer que je n’aurais pas fait comme toi dans ta situation, ou pire, ou mieux. C’est un juste un fait. »

Et c’est là où il se plante, là où lâchement j’ai pas envie de le reprendre parce que supporter que son regard change à nouveau sur moi je peux pas. J’avais le contrôle, la plus part du temps. C’était pas stable et l’humain était complètement bousillé, mais au sens propre je l’avais ce contrôle. Sur moi, sur Loup, sur ses actions et les miennes.

« J’aurais pu être élève et je ne peux pas te dire comment j’aurais réagi. »

Est-ce que quiconque peut vraiment le savoir ? On se découvre dans l’adversité, gamin j’aurai jamais pensé une seule seconde être capable de tout ce que j’ai pu faire ces dernières années. Que ce soit en bien ou en mal, clairement.

« Mais merci. »

Pour seul réponse un sourire, sincère. Je commence à sérieusement sentir les effets du choc que je viens de vivre, je sais que Leiv ne va pas tarder mais en attendant, sans aller jusqu'à ressentir un coup de chance dans mon malheur, je suis content qu'on puisse avoir cette discussion tous les deux. Si ça peut lui permettre de fermer une porte sur le passé alors tant mieux, c'est tout le mal que je lui souhaite. Je sais que de mon côté ce sera bénéfique, je le sens déjà.

« Les seuls qui n’ont pas vraiment de circonstances atténuantes ce sont les Supérieurs, ceux qui ne sont jamais remis en question. Et mes sœurs. »

Un frisson à l'évocation de ces connards, puis une pensée pour mon frère. Difficile de faire autrement quand je réalise avoir plus de points commun avec ce type que je n'aurai pu le penser. J'ai en revanche la chance d'avoir pu crever l'abcès avec Derek, établir les bases d'une relation aujourd'hui saine. S'il avait continué à soutenir et supporter ce mouvement que j'exècre les choses auraient été différentes mais ça n'est pas le cas. Tim n'a visiblement pas la même chance que moi à ce niveau là si j'en crois ce qu'il laisse entendre et j'en suis désolé pour lui. Sincèrement. La vie est déjà suffisamment difficile alors si en plus la famille s'en mêle, comment on fait ? Ça me fait mal pour lui.

« Tu vois, si ça peut te rassurer, ce n’est pas vraiment toi, le monstre de mes cauchemars. »
« Surtout qu’en toute objectivité j’ai juste l’air d’une grosse peluche. »

L'atmosphère se détend, je me laisse aller à un trait d'humour, une légère taquinerie avec un sourire sur le coin des lèvres. C'est ironique, évidemment, mais je suppose que tout ça c'est aussi une question de point de vue. Certains n'ont jamais eu peur de moi même en m'ayant vu sous mon autre forme, d'autres sont terrorisés rien qu'à l'idée de ce que je suis sans même avoir croisé ce que je deviens une fois par mois … C'est comme ça.

« Et j’ai le poil soyeux. »

Pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Ça permet surtout à la pudeur d'avoir un peu de répit avant de baisser les yeux une seconde pour mieux le regarder ensuite. Il y a des choses qui se disent face à face, des choses importantes.

« Merci, pour tout ça, ce que tu viens de dire. Ça … Ouais, ça compte. »

Il aura fallu un accident de voiture, un nouveau choc, pour nous amener à nous recroiser. Parfois le hasard fait bien les choses, cette soirée aurait pu se terminer complètement différemment.

« J’espère que tu parviendras à avancer, à te sortir de tout ça. J’te le souhaite en tout cas. »

Là encore en toute sincérité. Je vois le chemin parcouru, je vois les rechutes, je sais ce qu'il ressent tout comme je sais ce que c'est d'avoir enfin le sentiment de s'en sortir. Ça prend du temps, ça demande de l'aide, mais c'est pas impossible. Cet état que j'ai acquis aujourd'hui je lui souhaite sincèrement de l'atteindre un jour, qu'il puisse vivre sa vie sans avoir ce réflexe de regarder en permanence derrière lui parce que c'est l'impression qu'il me donne.

« Mais la prochaine fois roule moi une pelle digne de ce nom s'il te plait, qu'on leur en donne un minimum pour leur argent au moins. »

Parce que quand même, j'allais pas rester sérieux trop longtemps.

Qu’est-ce qui allait en découler de tout ça ? Il n’en savait rien. Pour l’instant, il se sentait un peu fébrile, probablement aussi un peu trop coupable de tout ce qui se passait chez les Inquisiteurs et de son indécision là-dessus. Est-ce que l’on pouvait lui reprocher vu qu’il était plus du genre à tendre l’autre joue qu’à se rebeller ? Probablement que non, par ce qu’il était tombé dans quelque chose qui le dépassait totalement à 18 ans et que d’un côté et de l’autre les traumatismes divers et variés n’aidaient pas. Mais ce genre de discussion remettait encore plus en valeur ses doutes, trop nombreux. Et la culpabilité revenait à flot. En attendant, la question n’était pas vraiment là… Il voulait juste être franc jusqu’au bout, même pas sympa, ou diplomate, juste franc : oui il lui avait du mal, oui il avait peur de lui, mais il y avait des circonstances atténuantes pour Ryans, et il ne faisait pas partie de ces cauchemars prédominants. C’était tout, c’était aussi simple que ça. Encore une fois, juste quelque chose de factuel.

« Surtout qu’en toute objectivité j’ai juste l’air d’une grosse peluche. »
« J’en ai jamais eu de cette taille.»

Visiblement voyant Enzo aussi calme et détendu, sans aucune réaction violente, parole plus qu’une autre…. Tim se détendait un peu, le radar paranoïaque était toujours là, la peur s’amoindrissait mais pouvait remonter en un pic incontrôlable au moindre geste suspect, à la moindre parole qu’’il interprèterait mal. Par ce qu’il marchait comme ça au feeling, ou plutôt à l’aura qu’il pouvait ressentir chez les uns, chez les autres. Même avec les Moldus. C’est pour cela qu’il arrivait à être plus détendu avec Ruben qu’avec Maeve par exemple. L’un avait quelque chose qu’il jugeait comme une bonne aura, même s’il avait déçu d’une de leurs dernières entrevues, l’autre en avait une mauvaise.
Avec les Sorciers, il prenait ça en compte, mais la peur était généralement toujours présente.

« Et j’ai le poil soyeux. »
« Ils me semblaient un peu emmêlés. Les chats ont les poils long, ils ont l’air soyeux mais ils s’emmêlent vite.»

Mais oui c’était une blague… enfin en partie, parce que pour ses chats c’était plutôt vrai. Et ce n’était pas de petits chats. Il essayait de se détendre un peu, mais l’humour n’était pas forcément la chose la plus facile, qu’il gérait le mieux. Et soudain, l’autre se mit à le regarder un peu plus.. un peu trop, peut-être. Un peu gêné, Tim se dandina pendant quelques instants d’un pied sur l’autre.

« Merci, pour tout ça, ce que tu viens de dire. Ça … Ouais, ça compte. » Tant mieux, si ça pouvait l’aider un peu. « J’espère que tu parviendras à avancer, à te sortir de tout ça. J’te le souhaite en tout cas. »

Il haussa les épaules, ayant un faible sourire triste, par ce que c’est tout ce qu’il avait en stock. Il aurait pu avancer si ses sœurs n’avaient pas été comme ça, son père un peu moins… un peu moins comme il était. S’il n’avait eu cette idée irraisonnée d’aller chez les Inquisiteurs. Un mot, il lui fallait un mot, un seul et peut-être qu’il pourrait lui donner un nom ou deux de personnes de confiance à qui se confier. Mais comme pour Duncan, il ne le fit pas. Pas raisonnable. Trop peur.
Pas de trahison.
Il ne devait pas faire comme Lex. Il devait se la fermer, assumer les choix d’une faiblesse. S’il parlait, en plus du reste, est-ce que des choses ne retomberaient pas sur Shadwell qui le protégeait selon ses dires. Deux informateurs qui merdaient, et avec l’arrivée de Grégory ça serait dangereux pour le professeur.
Pas de mort. Pas de bain de sang.
Coincé. On se reprend, on avance comme on peut, par ce qu’il n’y a plus grand-chose d’autres à faire. Se mettre un coup de pied au cul et continuer d’essayer de panser ses plaies comme il le pouvait sans pour autant renouer avec le monde magique : déjà par ce qu’il ne s’en sentait pas la force, mais en plus par ce qu’il se sentait toujours observé par les Inquis ce qui voulait dire que c’était dangereux.

« Mais la prochaine fois roule moi une pelle digne de ce nom s'il te plait, qu'on leur en donne un minimum pour leur argent au moins. »

Cette fois Enzo réussit à lui décrocher un petit rire, un peu stressé certes, mais cela restait quand même un petit rire.

« La prochaine fois ? C’est une invitation ?» répliqua-t-il amusé. « Mais si tu veux, ok.»

Ca ne restait qu’un baiser au final pour faire du spectacle qui plus est.

«Mais essayons, la prochaine fois, que tu ne te fasses pas percuter par une voiture… j’suis pas secouriste, j’ai pas les bases. Et entre toi et Duncan que j’ai dû emmener à Sainte Mangouste, j’avoue que là je n’ai plus d’idées d’excuses en stock pour éviter les secours Moldus. Ca va aller, ta jambe ? Faut pas faire de garrot ni rien ?»

« La prochaine fois ? C’est une invitation ?»

Sur mon visage une mimique l’air de dire : Va savoir. La réalité est plus claire, évidemment, et on le sait tous les deux mais cette connerie a au moins le don de nous détendre l’un comme l’autre. Je crois que c’est la première fois que je l’entends rire et sans trop savoir pourquoi, parce que je pourrais m’en foutre, ça me fait plaisir. Parfois ça m’amuse de faire peur, pas la peine de le nier, mais ici c’est pas le cas. J’ai rien contre ce type, il n’a jamais cherché à me nuire, là est toute la différence. Ça et le fait que ma tête de con est peut être légèrement assommée par l’accident, aussi. Détail.

« Mais si tu veux, ok. »

It’s a date.
Ou pas.

« Mais essayons, la prochaine fois, que tu ne te fasses pas percuter par une voiture… j’suis pas secouriste, j’ai pas les bases. Et entre toi et Duncan que j’ai dû emmener à Sainte Mangouste, j’avoue que là je n’ai plus d’idées d’excuses en stock pour éviter les secours Moldus. Ca va aller, ta jambe ? Faut pas faire de garrot ni rien ? »

Duncan ? Ça me fait arquer un sourcil, puis je me dis que finalement c’est pas illogique qu’il le connaisse. Ça m’amène assez logiquement à avoir une pensée pour Doryan, une autre pour Sovahnn qui s’est retrouvée à devoir gérer un changement de repères de manière précipitée et surtout totalement imprévue. A quand il remonte cet accident au juste ? Est-ce que je l’ai vu entre temps ? Est ce qu’il va bien ?

Pense à toi, peut-être, non ? Enfin là tout de suite ça me parait pas déconnant garçon.

« Ça va aller, t’en fais pas. Mon … »

Ton quoi ? Bonne question, oui. Ami ? Non. Père ? Presque.

« La personne que j’ai contacté va pas tarder. »

Ouais, voilà, la personne. Je pourrais simplement dire Leiv, après tout il doit le connaitre en plus de ça mais faut pas me demander d’être au taquet là tout de suite.

« Vaut mieux rien toucher pour le moment, il est médecin je préfère qu’il regarde avant de faire quoi que ce soit. »

La sens-tu, cette connerie plus grosse que toi qui pointe le bout de son nez ?

« Mais merci pour ton bisou magique, j’me sens déjà beaucoup mieux. »

Ferais-tu une fixette sur ce baiser, Enzo Ryans ? Absolument. Je vais rêver de Tim toutes les nuits maintenant. NDLR : Ça sentait trop le pari dans la box, je pouvais pas faire autrement.
Un « ploc » familier retenti dans l’obscurité, quelques bruits de pas, si je sens Tim se tendre mes sens se remettent au repos dès l’instant où je capte l’odeur de celui que j’ai appelé à l’aide. Carrure imposante, regard froid, la concentration affichée sur les traits c’est à peine s’il adresse un coup d’œil à Tim avant de venir s’accroupir à ma hauteur. Il me passe au crible, examine les coupures sur mon visage qui commence à tirer gentiment puis passe à ma jambe. Sur son visage rien ne transparait, rien qui puisse me donner une idée sur la gravité de la situation.

« Laisse-moi voir ça. »

Je serre les poings, serre les mâchoires, alors qu’il déchire mon jean et manipule ma jambe pour mieux appréhender les choses. Puis c’est mon ventre qu’il tâte, sans doute à la recherche d’une hémorragie interne.

« Comment tu te sens ? Des nausées ? Maux de tête ? »
« Non, ça va de ce côté-là c’est passé. »

La présence de Tim m’a beaucoup aidé à reprendre mes esprits, clairement. Ça ne change rien à mon état physique mais pour ça je ne m’en fais pas trop. Plus maintenant alors que l’un des hommes en qui j’ai le plus confiance prend les choses en main. Et l’homme en question passe ses bras autour de moi, je comprends qu’il veut m’aider à me relever.

« Il faut qu’on te remette ça avant que ton organisme commence à travailler. Je te ramène au cabinet. »
« D’accord. »

Est-ce que je pense à Ismaelle et ce que je vais encore une fois lui infliger comme dose de stress ? Oui, évidemment. Mais j’ai aussi incroyablement envie et besoin de la voir.
Une fois debout mon regard croise celui de Tim, je le désigne d’un geste du menton pour attirer l’attention de Leiv sur lui.

« C’est Tim, il m’a aidé. »
« Merci jeune homme. »

Il peut avoir l’air indifférent mais je sais que c’est sincère.

« Est-ce que tu veux qu’on te dépose quelque part ? »

Un sorcier c’est déjà beaucoup pour lui, je l’ai compris, alors deux ? Sans doute pas la meilleure configuration pour lui.

Tim restait probablement un peu septique à la mimique d’Enzo n’arrivant pas vraiment à définir s’il était sérieux ou s’il blaguait. Est-ce qu’il souhaitait réellement être embrassé, une autre fois ? C’était un peu confus ne sachant pas trop quoi répondre et ne voulant pas passer pour plus coincé qu’il n’était, il essaya donc de le prendre à la plaisanterie sans trop y entrer pour autant. Juste quelques mots suffisaient. Il voulait ensuite vérifier que sa jambe n’allait pas trop mal, qu’il ne saignait pas trop, pas au point de faire un garrot même si ce genre de chose n’était peut-être pas préconiser pour un loup-garou ? Qu’est-ce qu’il en savait ? La vérité était simple, presque vulgaire : foutre rien. Juste une façon de dire coucouche panier Tim, tais-toi, on a pas besoin de toi.

« Ça va aller, t’en fais pas. Mon … » Il pencha un peu la tête sur le côté en attendant la suite, mais plutôt rassuré de voir qu’il n’allait pas devoir essayer de s’improviser m édecine ou secouriste. « La personne que j’ai contacté va pas tarder. »

Acquiescement  tout doux, l’angoisse regonflait doucement par ce qu’il était plus que probablement sorcier et qu’il ne se sentait pas de se retrouver entouré de plusieurs personnes comme elles. Il aurait trop à surveillé pour son cerveau angoissé et stressé, même si ça allait à présent mieux en la présence de Ryans. Il ne fallait pas trop lui en demander non plus.

« Vaut mieux rien toucher pour le moment, il est médecin je préfère qu’il regarde avant de faire quoi que ce soit. »  Non, lui n’avait pas DU TOUT senti arriver la suite…  si bien qu’il tomba un peu des  nues lorsqu’il entendit les dires d’Enzo « Mais merci pour ton bisou magique, j’me sens déjà beaucoup mieux. »

Et soudain un plop qui fit sursauter Tim, renaitre ses peurs et angoisse, même s’il avait essayé de ne pas bouger il n’avait qu’une envie se terrer loin, très loin d’ici. Le gamin n’osa pas bouger d’un seul poil le temps que Ryans se fasse osculter, pourtant maintenant il aurait pu partir, appeler Lewis par exemple pour qu’il vienne le chercher, ou alors sa mère. C’était bien sa mère aussi, mais son meilleur ami semblait quand même une meilleure première solution.
Ils dialoguaient ensemble, et lui essayait d’être le plus invisible possible, dommage qu’il n’ait pas ce pouvoir cela lui serait fort utile, une petite cape d’invisibilité : non, il ne ferait pas de conneries avec, il pourrait juste mieux respirer par ce qu’il se sentirait moins observé et si on ne le voyait pas : on ne pouvait pas l’attaquer : CQFD.

« C’est Tim, il m’a aidé. »
« Merci jeune homme. »
Le Tim en question avait un poil – beaucoup- déconnecté mais lorsqu’il entendit son nom, il essaya de se renconcentrer sur ce qui se passait autour de lui.
« Est-ce que tu veux qu’on te dépose quelque part ? »

Enzo venait de poser cette question. Il secoua un peu la tête. Il ne voulait pas gêner, il avait besoin d’être seul et Ryans avait besoin d’être soigné le plus rapidement possible alors une seule réponse s’imposait :

« Non, c’est gentil, je vais laisser te faire soigner. Je vais appeler mon meilleur ami pour qu’il le dépose. Avec la coupure de courant, ça serait peut-être un peu plus… enfin moins prise de risque.... Au revoir !»

Pas de  « à la prochaine », bisous ou autres familiarités par ce qu’il saurait très bien qu’il ne le pensait pas vraiment… enfin ils n’étaient pas assez proche pour ça pour être plu exact.