One shot - Enfoiré

Enfoiré. Tu es conscient de ce que tu as fait connard ? Tu sais le mal qui coule dans nos veines par ta faute ? Tu sais la douleur constante ? Le vide, l’angoisse ? Tu sais comme elle me manque en chaque instant ? Tu sais qu’à cause de toi, à chaque seconde de chaque jour, j’ai peur. Je crève de trouille et je suis seule.

Sale lâche, tu m’as privé d’un pilier de mon existence. Tu me l’as arrachée, à moi et à ma sœur. Non. Toi tu n’en sais rien. Tu ne connais pas ces crises de larmes. Tu ne sais pas les cris de rage qui hurlent dans nos gorges. Tu ne sais pas la haine qui brille dans nos yeux à chaque fois que l’on y pense. Non, tu n’en sais rien. Et tu ne sais pas la force que l’on en tire. Cette putain de force qui me ferait te tuer si je pouvais. Cette saloperie dont je me serais bien passée et qui me fait mettre un pied devant l’autre chaque jour. Parce qu’on compte sur moi. Et pourtant, j’ai fuis. J’ai encaissé encore et encore jusqu’à ce que ça déborde. Jusqu’à ce que ma sœur ne soit plus en demande. Alors j’ai été conne et lâche.

J’ai des larmes à en vomir qui bouillonnent en moi, des tempêtes de peine qui ne demandent que de se déchaîner. Mais à quoi cela pourrait servir ? A quoi puisqu’il n’y a personne à blesser, personne à faire souffrir comme j’en chie, moi, chaque jour depuis ce moment où tu me l’a arrachée.
Qui t’a permis de faire ça ?!

De quel droit tu as décidé que, ce jour-là, tu allais lui faire ce mal, nous faire ce mal ?!

Furieuse de sentir ces sanglots l’envahir, Jordane serrait les dents autant qu’elle le pouvait. Mais pas moyen. Ça faisait des années pourtant que ça ne l’avait pas prise. Encore ne fois, c’était une petite chose stupide, un détail, une réminiscence. Presque rien pour déclencher le trop plein, pour laisser éclater la tempête, pour vomir son manque. II avait suffit d’un parfum pour que le rire de sa mère remonte, pour que ses plaintes rauques reviennent. Un parfum pour la revoir lui sourire, l’encourager, l’aider à chaque instant de sa vie, une odeur pour se rappeler la solitude dans laquelle elle baignait, l’abandon mordant qui la noyait chaque jour, à chaque problème insoluble, à chaque fois qu’elle aurait eu besoin d’un soutien, d’une caresse, d’un baiser.

Un putain de parfum, une putain d’illusion olfactive qui fait que, une fraction de seconde, un instant fugace, il nous semble que l’être aimé est là, qu’il veille, à sa manière, qu’il manque presque d’apparaitre.

Mais il n’apparaît pas.

Il n’y a qu’une inconnue qui nous regarde bizarrement.

Il n’y a que le vide. Mordant. Froid. Oppressant.