un plein de clients

Il m'est difficile de me souvenir à quand remonte la dernière fois que je me suis retrouvée si loin au nord du pays, mais revenir en Écosse a un double tranchant. D'une part, je retrouve mes racines, les collines et vallées qui ont bercé mon enfance, les paysages qui m'ont réconfortée les jours où je ne demandais qu'à fuir l'étreinte de mes parents. En cela, mon cœur retrouve une certaine légèreté dans la familiarité de mon environnement. Mais le village se dévoile peu à peu au fur et à mesure de mon approche, et plus loin, devinée dans les ombres à moins d’une demie heure de marche d’ici, l’école de magie au cœur de bien des affrontements de ces dernières années. J’observe l’horizon, et me demande si l’hiver est à blâmer pour le frisson qui me parcoure l’échine ou alors si mes souvenirs de la région sont seuls à blâmer.

Je parcoure un peu plus dans les rues sinueuses de Pré-au-Lard, relâchant un peu ma garde, même si le danger reste omniprésent, de nos jours. Surtout pour les gens comme moi. Le sol est déjà blanc, mais ce sont les prémisces d’une nouvelle chute de neige qui m’encourage à pousser la porte des Trois Balais. Mieux vaut passer le temps au coin d’un feu plutôt que de risquer l’hypothermie en extérieur; l’hiver dans les Highlands peut être brutal, après tout.

《- Bonjour, installez-vous et choisissez le temps que je nettoie les tasses et je vous sers, d'accord ?》

Je lui retourne son salut et à peine ai-je passé le seuil de la porte que je murmure un enchantement rapide pour faire fondre et disparaître la neige attachée à mes bottes, avant de m’avancer un peu plus dans la pièce et me tenir devant le feu de cheminée un instant. Il y à bien un charme pour se réchauffer, mais rien ne vaudra jamais le plaisir d’une flamme faisant fondre le froid et réveillant les sens. Une fois réchauffée, je me retourne pour m’installer à une table à mi-chemin entre le feu et le bar, face à la sortie; les Trois Balais avaient peut-être une réputation positive aux yeux de la Garde, surtout avec la Créature y travaillant, mais j’ai appris durement qu’on ne pouvait jamais être trop prudent de nos jours.

Quelques instants passent avant que le centaure ne revienne, gracieux, et avec un sourire que je lui rends bien volontiers avant de commander. Si l’auberge est réputée pour sa Bierraubeurre, je préfère me servir un simple chocolat chaud aujourd’hui, et laisser la température de la boisson passer de la tasse à mes doigts endoloris. La créature revient promptement avec ma commande, et je ne peux réprimer un soupir approbateur lorsque le liquide chaud glisse le long de la gorge, me réchauffant avec plus d'efficacité (et plaisir) que n'importe quel sortilège conjuré: un bon chocolat chaud est un plaisir non négligeable lors d’une météo pareille.

Merci beaucoup, ser !

Il repart dès qu’il m’a servie et semble rejoindre un groupe attablé un peu plus loin, apparemment dévoué à célébrer quelque chose que je ne parviens pas à comprendre au-delà du brouhaha régnant dans l’établissement. Il n’en faut pas bien longtemps pour que ma curiosité ait raison de moi, et je m’approche du groupe en gardant ma tasse de chocolat chaud contre mon menton, sirotant la boisson de temps en temps alors que j’observe l’activité devant moi.

Curieuse coutume, n’est-ce pas?

J'excuse mon intrusion et curiosité d'un sourire, espérant que le groupe ne s'offense pas de la curiosité d'une cliente. Mais la tradition était amusante pour moi. Je ne l’ai jamais vraiment comprise, mes parents ayant toujours estimé les Sinclair au-delà de telles frivolités, si bien que je n’ai jamais pu participer à ce partage aussi simple. Et si j’en juge l’expression de mon hôte, il semble au moins aussi confus que moi.

Je pense que ça vient d’une tradition moldue, mais je ne suis plus sûre laquelle… ou pourquoi. Je n'ai jamais vraiment compris, j'avoue, je me souviens juste que la frangipane est délicieuse... En avez-vous déjà mangé?
 

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J’imagine que c’est une manière comme une autre de régler une situation, dis-je d’un air songeur lorsqu’il me décrit la situation hypothétique où l’un de mes rivaux pourrait venir à trépasser, mis à bas par quelque chose de si simple qu’une fève (en céramique?) ou alors par la mauvaise conception de la galette. Mon commentaire à moi pourrait soulever autant de questions que son idée à lui, je ne lui en tiens donc pas rigueur et hoche doucement de la tête lorsqu’il assure plaisanter. Mais en attendant, la question reste là: je reste un instant confuse, m’interrogeant sur la raison que pourraient avoir les moldus à risquer l’étouffement juste pour célébrer quelque chose. Quiconque trouve la fève devient le roi du jour. Le roi de quoi? J’avais entendu parler de la tradition, mais je n’ai jamais prêté plus attention, mes intérêts m’ayant entraînée ailleurs; à voir la jovialité du groupe et l’enthousiasme exprimé lorsque mon hôte sort “vainqueur” de la dégustation, je me sens rongée par la curiosité et je me promet de me renseigner en rentrant à la maison… Enfin, pour toutes les informations que je ne pourrais pas glaner ici, aujourd’hui.

Mon hôte mords gaiement dans sa part de gateau, et le choc de ses dents contre quelque chose de plus dur qu’une simple marmelade me fait grimacer. La petite équipe a un vainqueur, semble-t-il. Je porte le chocolat chaud à mes lèvres pendant que le centaure est couronné, apparemment la morsure ayant fait plus de bruit que de mal, et l’énergie du groupe m’arrache un sourire que je ne peux réprimer (même si je tente de le dissimuler derrière le bord de ma tasse)

《- C’est la meilleure ! Vous collectionnez ces trucs ?》

Il a serré du poing jusque là, et je me demande si -une fois libéré- le Merlin miniature va faire mine d’avoir manqué étouffer. Les effigies savent être dramatiques, quand elles le veulent. Je m’approche de la créature, et je cherche à avoir un meilleur point de vue sur la petite figurine, curieuse du rire cristallin que j'entends faiblement depuis la paume du dénommé Pholos..

Pas vraiment, non, c’est à vrai dire la première figurine que je vois. J’ai goûté à de la frangipane, mais jamais dans le contexte de cette fête moldue, et ça remonte à tellement longtemps… Mes parents n’ont jamais vraiment permis ce genre de frivolités, même si je ne peux me refuser un chocogrenouille lorsque j’ai l’occasion. L’êtes vous? Un collectionneur, je veux dire?

Je me retourne et pose un regard songeur sur la pièce principale de l’auberge, bientôt occupée à calculer et imaginer des figurines amassées dans un coin, à se chamailler selon l'alignement du sorcier qu'ils représentent. J'avais vu un moldu regarder un film avec de tels personnages un jour, et imaginer la situation transposée ici me fait légèrement rire.

Vous pourriez commencer. J’ignore si ces fèves se collectionnent, mais si vous le décidez vraiment, vous pouvez avoir les têtes réduites sur la poignée de la porte d’entrée, et un peloton de ces figurines posés sur le manteau de la cheminée. Ça pourrait être drôle, selon quel autre personnage vous obtenez.
 

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Je penche la tête de côté lorsque j’observe le centaure se confondre en excuses à la fève, ses sabots frappant le sol dans un léger stress qui m’amuse presque. La figurine a l’air d’avoir un caractère facétieux, a contrario de l’homme historique sur lequel elle est basée; peut-être était-ce un autre élément de la célébration.

Je voyage énormément et cela fait pas mal de temps que je n’ai pas considéré une quelconque cité comme étant “chez moi”, donc me promener avec un attirail qui ne m’est pas pratique n’est pas logique. Je préfère garder des photos, avoir un souvenir concret du passé. Et comme vous l’avez remarqué…, Merlin chahute un peu plus avant que la créature ne le range dans sa sacoche, ... elles ont tendance à n’en faire qu’à leur tête.

Je suis la seule compagnie qui me soit nécessaire

Je dois être l’une des rares qui n’achète des chocogrenouilles que pour la friandise. La carte, je finis toujours par la donner à quelqu’un ou alors la jeter. Quelles sont les chances que vous ayez obtenu toutes les Vivianne que j’aurais pu avoir un jour, parce que je ne pense pas avoir un jour obtenu cette carte. Je lui offre un sourire avant de siroter un peu plus mon chocolat chaud.

《 …les centaures rejettent les fêtes humaines, à l’exception des anniversaires. 》

Je l’observe attentivement, curieuse à nouveau en espérant que mon intérêt ne soit pas accepté à mal. J’ai passé tellement de temps sur la route, à voyager d’une ville à l’autre, d’un pays à l’autre pour la Garde, ou simplement pour moi selon la nécessité. Mon retour à Pré-au-Lard n’avait pas été voulu, mais maintenant que je suis là, je considère presque prendre une chambre pour la nuit. L’aubergiste m’intrigue et il y a une certaine innocence qui fait plaisir à voir. Tout a tellement été chaotique dernièrement, ce sont des petites joies dans le style de la célébration qui rappellent la valeur des choses simples, pas chaotiques.

J’espère que vous ne prendrez pas mal mes mots, mais je dois avouer être surprise de découvrir un centaure en dehors des bois de la vallée. Agréablement surprise, certes, mais je n’ai jamais pensé que votre peuple puisse avoir le moindre intérêt à fréquenter de simples mortels..

J’agrippe ma tasse d’une main, avant de tendre l’autre dans un salut que j’estime universel assez pour ne pas offenser, même si je suis anxieuse d’être corrigée et apprendre s’il a des coutumes cordiales différentes.

Je suis Rowan. Ça fait longtemps que vous travaillez ici?

L’idée de lui offrir un autre nom me passe par l’esprit, mais je décide de rester honnête. Les centaures sont des créatures profondément nobles et portant une certaine importance sur l’honnêteté… Ou du moins, c’est ce qu’on m’a toujours inculqué.

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《 …je me suis fait à vos bizarreries et votre culture. 》

Il y a une énergie dans ce qu’il dit qui m’arrache un petit rire, et je ne peux que comprendre ce qu’il veut dire. Enfin, à ma manière, je n’ai de toute évidence pas la perspective d’une créature vis à vis du reste du genre humain. Mais dans son énergie, bien que légèrement assombrie par le sérieux de ses propos précédents, je retrouve un certain plaisir. Joie des choses simples, peut-être? Je l’ignore. Je ne sais pas si j’aurais pu me déchirer ainsi de tout ce que j’ai connu, j’ai peut-être échappé à ma famille mais au moins je suis restée dans le même “univers”, si ce n’est une classe différente. L’homme-cheval avait complètement changé de monde, et je regrette intérieurement les événements qui l’ont arraché à ce qu’il a toujours connu.

Nous n’avons pas toujours le choix, hélas. Surtout de nos jours, vu comme le monde tourne. Mais vous semblez avoir trouvé un agréable petit groupe et même si je ne vous connais pas plus que ça je suis ravie de voir qu’une créature semble avoir réussi à s’intégrer. Ils ont l’air aimables, à trouver un moyen de vous inclure dans nos bizarreries culturelles, je dis dans un rire en coin, comme pour lui signifier que son terme n’a pas été mal pris. Je suis navrée de ce qui vous est arrivé, je n’ai pas besoin d’avoir les détails pour deviner qu’il doit s’agir de quelque chose de majeur pour que vous ayez recours à ce schisme dans votre cercle social.

Je ne sais pas ce qui me pousse à poser la main sur son bras dans un geste que j’espère réconfortant, ou au moins témoin d’une sympathie qui -je l’espère- n’allait pas être mal reçue. Je connais à peine Pholos, mais il y a quelque chose dans ce qu’il me dit qui résonne dans mes propres expériences, même si bien sûr rien n’est jamais pareil. Toujours est-il que son existence a changé du jour au lendemain et ça, je peux le comprendre. Au moins il a trouvé un endroit dans lequel il est le bienvenu, ou au moins ne semble pas souffrir de trop de préjudices. La proximité de Poudlard y est probablement pour quelque chose, il y a toujours eu une aura spéciale autour de l’école et la vallée a toujours protégé différentes communautés.

Et je dois vous remercier pour ce chocolat chaud. Je suis déjà venue boire par ici, surtout lorsque j’étais étudiante mais… je ne sais pas, il y a quelque chose de différent. Ingrédient secret?

Je crains d'avoir un peu trop éloigné le fil de la conversation de la légèreté amenée par le partage de la frangipane et la nomination du nouveau roi, alors j'espère alléger l'ambiance à nouveau sans pour autant nier la douleur que j'ai pense avoir deviné sur ses traits.

Donc si vous êtes le Roi du jour, ça veut dire que vous avez droit à l'après midi de congé, pas vrai? Il y a un fracas derrière moi et pendant une seconde, je me demande si ça vient d'un client ou alors si le patron de Pholos va venir s'interposer entre nous et mettre les points sur les i. Je plaisante!, dis-je pour son bénéfice. ... peut-être, finis-je d'un ton conspirateur, avec clin d'oeil et tout, juste pour Pholos.