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Mer 26 Jan 2022 - 22:41
« ça ne te regarde pas. »

La voix de sa mère, sèche, claquait encore dans l’air lorsque le claquement caractéristique du transplannage se réverbérait contre les hauts murs, disparaissant en glissant contre les meubles de bois cirés, les cadres travaillés des peintures, les moulures baroques. Mâchoires serrées, regard fixe, bras ballants Alec finissait par se détourner du lieu où sa mère avait disparu, le laissant seul et interrogatif. Planté, les mains passées dans ses poches, il se détournait finalement.

« Quoi que tu ais en tête, tu devrais te le retirer de l’esprit. »
« Si je voulais ton avis, je te le demanderai. »

L’homme dont l’image cornée par le temps se penchait sur son bureau, le regard clair posé droit vers son petit fils dont il observait les frasques en silence depuis des années.

« Tu te bats contre un monde trop rude pour toi Alec. Comme ta sœur le faisait avant toi. Tout comme mon petit fils. Tu ferais mieux de protéger ta femme, elle ne mérite pas ce que tu lui imposes. »

Un genou à terre, le visage plongé dans une petite commode qui ornait la salle de réception, Alec arrêtait une seconde son mouvement, le bras dans le vide, prêt à attraper une bouteille de verre sombre à l’étiquette cornée et aux écritures effacées. Un instant, il hésita, finissant par poser la main sur le goulot sans répondre.

«  ça t’intrigue n’est-ce pas ? »
« Les frasques de mon père ? Assez j’avoue. »
« Tu pourrais être grandiose. Faire briller notre famille comme bien des héritiers avant toi.. »
« Ah ! Voilà, ça ça manquait. » Cinglant, le jeune homme se redressait sous le regard plein de nuances de son arrière grand père dans sa robe de sorcier aux couleurs de prunes emprunte d’un style daté, les cheveux poivres et sel et les yeux vifs.
« Tu n’y as jamais été sensible, c’est vrai. Pourtant je pense que tu n’es pas dénué d’ambition mais tu te trompes d’ennemi mon fils. »

Aurait-il été différent ? S’il avait réellement été son enfant ?

« Je vois mal mon père se battre contre le système. » Le goulot porté à ses lèvres, le jeune homme en descendait quelques gorgées avant de porter ses yeux de givre sur son arrière grand père. « D’ailleurs c’est pas ce que je fais. »
« Lui si. » Figé un instant, Alec cherchait à comprendre la teneur de ce qu’il entendait à présent. Pourtant s’il se remettait en marche, c’était qu’il ne faisait plus confiance à cet homme depuis bien des années, conscient de son aptitude à manipuler les uns et les autres et peu désireux de se laisser faire à son tour. « Il pensait notre façon de faire archaïque et voulait faire changer les choses. »
« Wah… » Difficile de l’imaginer ainsi. « Les gens changent. » Tranchant. Et les Hommes mentent.
« Il a surtout compris que l’obstination adolescente ne ferait que l’amener à sa perte. Je respecte celui que tu es mon fils, tu es noble et fidèle à tes valeurs mais tu te perdras à ne cesser de te battre contre chacun de ceux qui croisent ta route. Tu as mieux à faire de ta vie et sans doute bien plus productif. Tu es beau, talentueux, malin, riche et bien né. Tu pourrais avoir le monde à tes pieds si tu le voulais. Quelques concessions peuvent souvent amener les autres à plier tu sais. »

Arrêté dans la grande pièce aux tapis épais, aux grandes fenêtres mansardées et aux tentures de velours, Alec braquait ce regard si caractéristique de la famille dans celui qui se maintenait à travers les âges au sein d’une peinture animée. Le silence emplissait l’espace, le rendant poisseux et lourd, presque palpable tant il se faisait solide et rude.

« C’est toi qui lui a choisi ma mère ? » Fut sa seule réponse. Sans doute manquait-il de subtilité, c’était un fait. Mais cette brusquerie très adolescente comme l’autre le lui affirmait cachait une stratégie bien plus fine. A le penser ouvertement en colère contre tout et tous, incapable de retenir ses pensées et ses paroles, Alec protégeait bien mieux qui il était que ce que lui ou d’autres pouvaient penser. Et face à lui, son ancêtre esquissait un petit sourire amusé, fermant un instant les paupières comme pour accuser l’évidence.

« Tu vois que tu es un garçon intelligent. »
« Sans doute. »

Peut-être son père était-il plus nuancé qu’il n’y semblait après tout. Peut-être avait-il été marié à Lydia justement parce que celle-ci maintenait plus durement ses convictions et que celles-ci allaient parfaitement dans le sens conventionnel. Sans doute l’écrasait-elle depuis des années. Et sans doute ce dernier était-il bloqué de bien des frustrations sans pouvoir s’en extraire, perdant bien souvent patience quand ce qu’il tentait de mettre en place échappait à son contrôle.
Probablement. Cette explication donnait d’ailleurs sens à nombre de ses actes.
Et pourtant ça ne changeait strictement rien.

Quittant la pièce sans donner plus de crédit aux dires de son ancêtre, le jeune homme se décidait à bouger. Sans pour autant quitter le goulot de sa bouteille, Alec négligeait la voie habituelle pour monter à l’étage, les grincements des marches sous ses semelles appelant à ses souvenirs bien des nuits passées à sortir en douce. Par les escaliers d’abord, puis par la fenêtre, sautant dans le vieux cerisier qui faisait face au pignon d’une des dépendances. Durant un moment, il avait cherché dans le vieux manoir…. Sans vraiment savoir quoi.

Bien sûr, Alec pouvait avoir oublié des visages croisés lors des interrogatoires. Pourtant il s’interrogeait à son tour. Connaissant les principes de sa famille, la probabilité qu’ils n’appartiennent pas à cette classe semblait étonnante. Y avait-il quelque chose de changé qui puisse les amener à devenir plus actifs pour cette cause en laquelle ils croyaient tous ? Et dans ce cas, son père était-il aussi profondément persuadé du bien fondé de ces idées ? Ou peut-être n’y songeait-il qu’en référence aux dires d’un arrière grand père bien plus proche de sa mère que ce qui n’y semblait.

Finalement arrêté dans sa chambre d’enfant, aussi austère que dans ses souvenirs, Alec s’immobilisait à la fenêtre qu’il ouvrait. Le regard porté au loin, au travers de la lisière du domaine, des hautes haies de laurier et de thuyas. Une nuit, il était resté assis sur le toit, sans doute tenté par des pensées qu’on n’évoquait pas dans les milieux comme le sien. Nombreuses avaient été ses escapades sur ces faitages, grimpant à la force des bras pour se trouver enfin là-haut, face aux autres étoiles qui brillaient au loin. Là seulement il se sentait un rien libre. Une habitude qu’il avait reprise à Poudlard, posant les yeux sur les astres bien plus vifs là-bas. Tout y semblait plus vif qu’ici d’ailleurs, tant ces lieux étaient ternes à son regard.

Après toutes ces années Alec sentait encore la chaleur des tuiles sous ses paumes irradier après avoir pris le soleil tout l’après midi ou bien au contraire leur glissant, la rugosité des anfractuosités se détachant sous la pulpe de ses doigts. Même maintenant, le jeune homme était persuadé qu’il aurait pu y grimper les yeux fermés tant ces gestes avaient été réalisés souvent durant son enfance puis son adolescence. Et s’il fermait les yeux, il pouvait revoir la petite silhouette qui se détachait sur le bleu gris du ciel, de l’autre côté de la haie. Et le temps passé, en silence à communiquer par gestes. Car il n’y avait pas que les étoiles, à éclairer les nuits de son enfance.

Les avants bras posés sur la tranche des vantaux, le jeune homme posait le regard sur l’immense bâtisse qui se détachait dans les ombres mouvantes et colorées de la fin d’après midi.

Derrière lui, le parquet craqua.
Et Alec ne se retourna pas, déjà trop conscient de ces pas qu’il n’avait qu’à peine entendu tant il les connaissait bien. Conscient, surtout, de la tension qui envahissait chacun de ses muscles, sciait ses nerfs et dressait son épiderme. Pas de sérénité donc, seulement une conscience froide des choses.

« Pourquoi faut-il que tu veilles être l’ennemi de tout le monde ? » La voix de son père raclait dans le vide de la chambre spartiate.
« C’est amusant, je me demande aussi pourquoi tout le monde veut être mon ennemi quand j’aspire à tant de belles et douces amitiés... » Un ton grinçant, pas un regard et déjà, il sentait son père se tendre. Comme si l’un et l’autre n’avaient fini par ne plus fonctionner qu’ainsi, incapables de s’entendre autrement que dans l’escalade bête d’une colère mutuelle.
« ça n’a pas à être ainsi Alec… » Pourquoi faisaient-ils tous ça ? L’appeler par son prénom comme si cette simple technique pouvait les aider à le canaliser comme on le ferait d’un enfant mal élevé ?
Il ne répondit pas, sentant pourtant sa chair s’ancrer plus profondément dans le bois.

« Tu as fouillé mes affaires n’est-ce pas ? »
« Pourquoi poser la question si tu connais la réponse ? » Il ne se justifierait pas, ne s’excuserait pas.

Il ne réagirait même pas lorsque derrière lui, son père sortirait son arme de son étui.
Les yeux d’eau posés sur les bruissements des feuilles emportées par le vent dans la haie d’en face, l’enfant d’hier décrochait déjà du présent.

Une dernière pensée glissa finalement vers ces murs si souvent emplis des hautes figures du passé des Rivers. Si vides, donc, lorsqu'il s'agissait d'entendre, de voir, d'agir. Si vides s'il fallait donner corps au présent. Ils savaient. Ils acceptaient. Comme tous les autres.
Comme lui aussi, sans doute.
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Alec Kaleb Rivers
Break Me If You Can
Alec Kaleb Rivers
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