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Mer 29 Sep 2021 - 12:26
Nuit du 13 au 14 juin 2016

Sovahnn avait finalement passé une part de la soirée à discuter avec le barman, riant de la situation étrange que Gary  lui avait fait vivre, elle avait fini par quitter les lieux sous le regard tardif de celui qui avait allégé son ressenti. Une touche ? Possible. Mais l’envie était passée et ce fut seule qu’elle rejoint les ruelles londoniennes. Le silence de l’extérieur contrastait violemment avec l’ambiance qui régnait dans le pub qu’elle quittait et l’air frais d’une nuit d’été lui sembla un instant froid comparé à la chaleur moite des corps emmêlés sur surchauffaient la piste de danse. Le chemin pour la ramener chez elle, Sovahnn l’avait fait rapidement sans pour autant se plonger dans l’angoisse sourde de faire une mauvaise rencontre. Fatiguée d’avoir peur, d’être sur la défensive, de voir un danger à chaque coin de rue. Elle n’était qu’une inconnue … et si les actes d’une enflure lui revenaient en pleine gueule à mesure qu’elle engloutissait le chemin jusque chez elle, Sovahnn les repoussait pourtant avec force. Savoir s’en sortir, dépasser ce qui eut pu exister, ne pas donner à leurs ennemis le pouvoir de s’insinuer dans son quotidien. Cette lutte, c’en était une de tous les jours, et pourtant elle se faisait force de l’emporter. Systématiquement.

Ainsi, ce fut donc et sans surprise sans la moindre encombre qu’elle rejoint le petit escalier dans la cour ensorcelée. Celui qui passait derrière d’autres bâtisses, dont le pallier était masqué et protégé, où ses amis pouvaient transplanner sans risquer d’être vus. L’appartement qu’on ne trouvait qu’en y ayant déjà été invité. Le petit appartement qu’elle et Zach avaient trouvé ensemble il y avait plusieurs mois et qui à présent était totalement vidé de vie. Mais pas de ce qui semblait être leur vie. Le bazar d’une jeune maman, la chambre de la petite semblait être utilisée, la cuisine aussi. Ça n’était pas le cas pourtant, Tim comme elle vivaient dans la maison d’Ecosse, mais cet appartement devenait une dépendance, un sas, une pièce de plus. Refermant la porte derrière elle, Sovahnn déposait les clefs dans le petit pot sur la table basse à côté du canapé qui semblait prendre tout l’espace de cette pièce de vie. Quarante mètres carrés pour trois pièces. Beaucoup trop petit. Mais il y avait là l’emprunte du père de sa fille. Dans le choix de la couleur des murs de la chambre, dans le sommier qu’il avait monté, dans les rires qu’elle revoyait lorsqu’ils apportaient les meubles ici. Dans cette tasse qu’il avait ramenée de chez lui et qui restait posée sur la table comme si finalement, il risquait de venir la remplir de nouveau. Pinçant les lèvres, Sovahnn avait alors fini par la saisir, laissant glisser son pouce sur la porcelaine avant de l’emporter, rejoignant la cheminée. Il fallait qu’elle arrête de faire ça : faire transiter les objets entre les deux habitations…. Mais qui ferait réellement attention à ce genre de détails ? L’instant suivant, elle apparaissait dans la maison d’Ecosse. Bien plus grande, l’espace commun à lui seul devait faire l’intégralité de la surface de l’appartement londonien. Pas d’emprunte cette fois ? Si, bien sûr. S’il s’agissait d’un héritage familial, Sovahnn savait que tout ça, elle le lui devait.

Soupirant légèrement, la jeune maman alla déposer la tasse proche de la bouilloire qu’elle activait avant de laisser l’eau chauffer. Elle lâchait sa veste en faux cuir sur le dossier du canapé et déjà, sans prendre le temps de se démaquiller, Sovahnn rejoignait la chambre de sa fille. L’air lui-même y semblait plein de douceur et c’était avec tendresse qu’elle souriait en découvrant un Timothy endormi sur le fauteuil à côté du berceau de la petite. Ces pièces étaient celles qu’elle avait meublé le plus rapidement, donnant à leurs chambres un air plus que spartiate que Tim n’avait pas tardé à combler à son tour. Mais ici… ici, c’était décoré. Le petit fauteuil de tissus clair, la commode qu’elle avait repeint, le berceau qu’il avait fallu monter sans le père de Liyana. Des petites statuettes, un mobile. Le gros ours d’Enzo posé dans un coin à qui elle avait mis des lunettes de soleil et un chapeau. Un vif d’or sur la commode, la pile de bodys offert par ses amis, des peluches des uns et des autres. Le petit loup ici, le blaireau là. Les grands rideaux – qui coutaient une BLINDE bordel ! – pour cacher les fenêtres larges qui laissaient passer trop de lumière en journée.
Et puis, en douceur elle s’approchait de sa fille endormie … pour la découvrir parfaitement réveillée, jetant des coups de pieds dans le vide en observant la silhouette floue que sa mère devait être pour elle.

« Qui garde qui dis moi… ? » Avait-elle murmuré en se penchant au dessus du berceau. Une main posée sur son petit ventre arrondi, Sovahnn ne tardait pas à poser la seconde sur le bras de Tim, cherchant à le réveiller doucement… mais celui-ci restait emporté dans son sommeil. Des somnifères ? Peut être. L’épuisement, seulement, probablement. En douceur, elle laissait sa fille qui s’agaçait un peu, rapportant un plaid qu’elle glissait sur son ami avant de soulever Liyana pour la prendre contre elle et s’esquiver de la pièce sans réveiller le baby sitter endormi.

La porte fermée, elle déposait un baiser sur le front de son enfant. « Faudra que tu apprennes vite à parler pour lui rappeler qu’il a le droit d’aller simplement dormir dans sa chambre avec le babyphone activé.. » Puis en éloignant son visage, Sovahnn découvrait quelques marques de rouge-à-lèvre sur la peau fine de la petite. « Mierda… » Du bout du pouce, elle l’effaçait tout en allant se servir une tasse d’une tisane quelconque.

C’était donc toujours habillée pour sa soirée de folie prête à faire tous les bars et les boites de nuit du coin qu’elle sortait dans le calme de la nuit pour profiter du bruit sourd des vagues au bas de la falaise non loin. Sa fille, étrangement apaisée, dans les bras, une tasse de tisane dans la main, au pied d’une grande maison qu’elle n’avait pas payé. Pas tout à fait l’idée qu’on se faisait de la jeune femme que certains inconnus abordaient, un verre d’alcool à la main, moins d’une heure plus tôt. Mélange des genres, l’ado et l’adulte toujours en cohabitation.

En douceur, elle berçait sa fille en écoutant les flots quand son regard fut attiré par du mouvement sur sa droite. De même, ici, personne ne pouvait emprunter le petit chemin de terre qui amenait à la maison sans y avoir été invité au préalable. Différents sorts avaient même été tissés dans l’environnement de la bâtisse pour protéger les activités sorcières afin de leur fournir calme et protection. Ses proches pouvaient donc transplanner ici sans aucun problème et chacun avait été prévenu et invité tour à tour pour leur permettre d’aller et venir en sécurité… un besoin d’aller et venues dont Sovahnn ne se cachait pas. Mais là ? A cette heure là ? Sa première pensée fut pour un nouveau drame… mais elle ne tardait pas à reconnaître le visage de Kezabel… et l’expression sur son visage. Non pas de l’angoisse, des larmes ou de la panique mais de la surprise et de la confusion. Sans doute avait-elle transplané directement sans vraiment se rendre compte de l’heure. Ainsi, Sovahnn la voyait envisager le retour alors même que son amie ne l’avait pas encore remarquée, plongée dans la pénombre.

Sans être proches, les jeunes femmes s’étaient toujours entendues et Kezabel avait été là une nuit de cauchemars pour l’apaiser dans leur salle commune. Sovahnn s’étant réveillée sans avoir été prévue au programme, elle n’avait ni lit ni fringues et la jeune femme avait été présente pour lui fournir bien des affaires à l’époque. Et puis à présent, elles évoluaient toutes deux dans les mêmes cercles, alors l’amitié s’était tissée au fil du temps, des douleurs, des présences, des absences aussi. D’invitation en invitation. De soutiens un peu maladroits en messages trop impersonnels sans doute mais envoyés avec toute la chaleur du monde. Naturellement, sans vraiment y songer donc.

« Kezabel ?! Tout va bien, je suis réveillée. » Le « ça va ? » Etait sous-entendu dans sa voix sans qu’elle n’ose réellement le poser. Elles ne s’étaient qu’à peine vues depuis les évènements malgré les nombreux messages de la petite blonde. Normal, bien sûr. D’ailleurs il n’y avait dans ses messages que du soutien et des ouvertures dont Kezabel se saisissait ou non sans que cela ne pèse en rien. Elle était là, ne savait quoi faire… mais elle était là. Mettant totalement de côté sa rancune envers la Garde depuis la mort de Zach. Celle-ci était bien présente… mais douloureusement  hors propos pour l’instant. Alors elle la reléguait au second plan.

Calmement, la jeune femme la rejoignait, apparaissant dans la lumière qui filtrait par les fenêtres de la maison. Les fringues, le maquillage, tout sous-entendait qu’elle-même venait à peine de rentrer chez elle.

« Tisane ?! » Tout naturellement et comme si elle l'attendait, Sovahnn lui tendait la tasse dans laquelle elle n'avait pas encore eu le temps de boire, rassurant par là même la légitimité de sa présence. D'un grand sourire, elle soulignait ce simple fait : c'était plaisant de la voir.
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Sovahnn Dawn Lockwood
Sovahnn Dawn Lockwood
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Sovahnn Dawn Lockwood
Sam 9 Oct 2021 - 21:42
Spend my nights in dreams
Sova & Kezabel


■ Nuit du Dimanche 12 Juin 2016 ■

Attends. Il manque quelque chose.

Elle avait raison, mais quoi ?
Les mains sur les hanches, Kezabel scrutait l’œuvre, la lèvre mordu dans un geste songeur.

Il manquait en effet un petit quelque chose, une petite touche qui donnerait au dernier dessin un aspect plus vivant et vif qu’il ne l’était déjà. Trente minutes qu’elle avait donné son dernier coup de pinceau et la jeune femme n’arrivait pas à se résoudre de vernir le tout.

Elle déporta son poids sur sa jambe gauche, froissait sa chemise grise devenu un poil trop grande pour elle en croisant les bras sur sa poitrine. La nuit donnait au monde un silence qui lui était bienvenue, le bruit de son esprit était suffisamment bruyant pour avoir à supporter celui des autres et de la foule londonienne. Tess ronflait dans son panier non loin d’elle. Astrée, perchée sur le rebord de la fenêtre, surveillait sa maîtresse d’un œil attentif.
Elles étaient ces deux garde-fous mais aucune des deux n’avaient la solution à lui apporter.

Tu te souviens, sur la plage ? Lorsque tu m’as demandé comment je faisais pour donner cette impression de remous aux vagues ?

– ‘De la poudre magique’, murmura Kezabel en souriant, son regard éclairée par l’illumination du souvenir soufflé. La touche finale. »

Kezabel ouvrit les portes du placard et fouina dans le fond d’une étagère pour en sortir une petite boite abîmée par le temps passé. Le contenu lui offrit un bouquet de souvenirs chauds, un déluge d’émotions qui fit frisonner de nostalgie ses avant-bras. Le bois n’était plus imprégné de l’odeur de l’atelier de sa mère depuis longtemps mais les sensations restaient aussi intacts que les souvenirs. Plusieurs petites fioles colorés s’y trouvaient, certaines presque vides, d’autres à peine entamées.
Ce qu’appelait Melinda « poudre magique » était une sorte de poussière pigmentée et ensorcelée difficile à se procurer. Un cadeau de la femme de Masahiro bien avant que cette dernière ne décède, qu’elle lui avait ramené d’un long voyage à l’étranger au fin fond de l’Inde. Raison pour laquelle Mélina l’utilisait avec parcimonie tout comme Kezabel n’en faisait usa que de très rares fois. Ici, l’occasion lui semblait parfaite.

La jeune femme sortie délicatement de la boite en bois une fiole azur, orangé et rouge.
L’application de cette poudre lui demanda une concentration toute particulière et lorsqu’elle se releva une heure et demie plus tard, Tess s’étirait de tout son long en baillant avant de rejoindre sa maîtresse assise sur le sol, face au coffre à jouet. Un sourire tranquille flottait sur ses lèvres, sa main venant rencontrer le poil épais de son chienne qui posa sa gueule sur son genoux.

Le spectacle face à elle était transcendant. L’atelier désormais plongés dans le noir, des reflets bleutés et jaunâtre dansaient sur sur son visage fatigué mais satisfait. Ces ondulations de couleurs lui rappela un doux souvenirs, moins lointains cette fois.

Celui d’un aquarium dont la quiétude avait fait naître une tendresse apaisante.

±

■ Nuit du Lundi 13 au Mardi 14 Juin 2016 ■

La journée de Dimanche avait durée 24 heures pleines. Sans dormir.
Comme promis, le texto lui était parvenue dès son retour sur Londres. La porte entrouverte était devenu un peu plus béante, laissant un passage plus large pour que les douleurs aient toute la place de passer sans heurter leurs armatures. C’était la dernière chose qu’elles souhaitaient, se blesser plus encore.

Les deux jeunes femmes s’étaient retrouvées dans une douceur tremblante et incertaine avant que les réflexes, les habitudes, ne reviennent prendre leur place tranquillement. Sans brusquer. Sans mentir. Juste elles. Changées, certes, mais elles quand même. Le Ying, le Yang. L’équilibre était chevrotant mais personne ne pouvait leur reprocher de ne pas essayer.

C’était de Riley qu’elle rêvait d’ailleurs. Peut-être parce que Kezabel avait passée une bonne partie de la journée dans son nouveau studio pour l’aider à aménager, donner des conseils sur les couleurs ou l’aménagement, lui proposant d’y laisser un dessin sur un mur. Des heures à parler de sa lune de miel avec Mateo, des derniers projets artistiques de Keza, de Keegan aussi. Cette peur de le revoir, de l’affronter quand, lui, a tout oublié. Des connexions qui se retissaient progressivement, avec la force du temps.
Quant bien même ce dernier risquait de vite se raccourcir, la jeune femme profitait de chaque seconde donné.

Ses songes la portaient sur les contrées écossaises, au beau milieu des plaines, un des endroits préférés de sa meilleure amie. Les images sont flous, abstraites, mais les ressentis sont nets et précis.
Chaleur. Douceur. Tranquillité.
Une paix qu’elle craignait d’en oublier la saveur à force de se faire absente.

La jeune femme se réveilla sans sursaut et lentement, s’extirpant de son rêve en clignant des paupières. Kezabel avait l’impression d’être plus épuisée que lorsqu’elle s’était décidée à dormir, vers 17 heures. Elle venait d’écraser six heures de sommeil après plus de 24 heures à errer, fuir la léthargie qui laisserait l’occasion à tous ces traumatismes de revenir. La première chose à laquelle elle pensa en ouvrant les yeux, c’était Sana.

Un élan de panique surgit de nul part. Une alerte qui s’allumait, foutait tous les voyants au rouge.

Et si elle replongeait ?
Le tri des affaires l’avait ébranlée et approfondie le vide qui était déjà si envahissant.
Kezabel tremblait à l’idée que l’absence de Masahiro soit si douloureux que sa sœur aînée ne pourrait en supporter le manque, au risque de combler ce dernier par un autre.

La sensation tenace la prenait à la gorge et lui retournait le ventre, une main invisible s’immisçait entre ses entrailles. Puis dans son esprit où la paranoïa lui jouait mille et un scénario catastrophes. Un poison invisible qui gangrenait son cerveau pour y bombarder des images atroces d’une Sanae convulsant dans ue rue abandonnée, une aiguille plantée dans le bras.

Tu dois lui laisser le temps de faire son deuil.
– Je sais, répliqua-t-elle la voix endormie, main tendue sur son téléphone avant de se raviser. Je sais. »

Lui laisser du temps et de l’espace. Une gymnastique compliquée que Kezabel essayait du mieux qu’elle pouvait de tenir. La jeune femme se leva, un peu groggy, en complet décalage avec le monde sans même s’enquérir de l’heure qu’il était. Elle prit le temps de sortir Tess une bonne heure en pleine nuit, sans se soucier des absents dans les rues, laissant sa conscience errer le long des murs endormis. C’est toujours sans réfléchir qu’elle avala rapidement un fruit, prit une douche après un quart d’heure à lutter contre l’envie de se terrer dans son canapé devant des images qu’elle ne regarderait même pas. C’est en posant ses yeux sur le coffre terminé depuis Dimanche qu’elle eut l’impulsion.

C’était le bon moment, non ?
Elle saisit la flamme avant qu’elle ne lui échappe, enfila un jean, un tee-shirt qui retombait légèrement sur ses épaules amaigries et se glissa dans une veste en jean noire. Baskets aux pieds, elle réajusta ses cheveux bruns coupés courts en descendant les escaliers de l’immeuble. Le coffre ? Dans son petit sac à main en bandoulière ensorcelé où elle put ranger le meuble après l’avoir miniaturisé.

Elle trouva un portoloin à trois rues d’ici qui la conduisit dans un vieux village anglais, avant de transplaner dans un bourg écossais, puis usa d’un second portoloin pour aussi bien brouiller les pistes qu’assurer une sécurité jusqu’au domicile de Sovahnn.

Le bruit des vagues se crachant contre la falaise la saisit aussitôt. Non loin du bord, Kezabel franchit les quelques pas qui la séparait du vide. La lune éclairait le contre-bas opaque où elle devinait les flots rageurs s’échouant contre la roche, sans craindre le choc. Un déchaînement houleux, brute. Vif. Trente mètres plus bas.
Trente mètres de vide.
Trente mètres d’oublie.

La jeune femme cligna des paupières avant de se reculer, l’embrun fouettant son visage déjà rafraîchit.
Elle s’était jurée un dernier combat.

Son regard s’égara au loin sur cette eau bien plus calme à l’horizon. C’était là qu’elle devait se raccrocher et non au fracas.
Les deux mains accrochées à la sangle de son sac, Kezabel fit demi-tour et marcha vers le petit chemin de terre qui menait vers la maison. Les yeux rivés sur ses baskets foulant le sol, la jeune femme ne réfléchissait pas. La cacophonie perpétuel faisait désormais partie du décors, agitait bon nombres de ses pensées pour reléguer les plus logiques au second plan. Cependant, les questions n’avaient de cesse de se crasher avec la même violence que les vagues sur les rochers.

Est-ce que Sovahnn allait seulement tolérer sa présence après tout ce qu’il s’était passé ? Après son silence ? Les invitations de son amie avait été peu nombreuses mais honnêtes et sincères. Kezabel y avait rarement répondu, préférant fuir tout ce qu’elle pourrait entâcher de son mal être. Mais aussi parce que cette enfant que tout le monde semblait adorer lui remuait un couteau dans le ventre. Une absence qu’elle s’était imposée parce que sa situation ne le lui permettait pas.

C’était il y a un an.
A cette période là, elle aussi portait la vie. Un bébé qu’elle envisageait sincèrement de garder et d’élever seule avant que la réalité ne la rattrape. Comment poursuivre le combat qu’elle s’était engagée à mener en portant la responsabilité d’une vie elle, puis entre ses bras ? D’autres avant elles l’ont fait, mais à cette période de sa vie, Kezabel ne s’en était pas sentie capable.
Aujourd’hui, elle ne regrettait pas son choix mais ça n’empêchait pas la vive et brève morsure qui s’échappa bien vite lorsqu’elle prit conscience d’un détail.

Il faisait nuit noir et ce n’était qu’arrivée à la hauteur de la maison que l’évidence la frappait.

Cette idiote était plantée là, en pleine nuit, complètement déphasée dans son rythme de vie et de sommeil sans se dire que d’autres dormaient comme des gens normaux.

– Merde. »

Elle hésitait en marquant un bref arrêt. En plus de s’inviter sans prévenir, elle débarquait à pas d’heure. Mâchoire serrée, elle doutait sur la démarche … déposer le coffre avec un mot ou le remettre en main propre ? Après tout le travail abattue avec Enzo, puis dans son propre atelier il aurait été injuste et presque dégueulasse de le larguer ici avant de fuir comme une lâche. Plus tard alors. Peut-être. Si le courage ne se déroberait pas pour la énième fois. Sovahnn ne lui en voulait pas et Kezabel en était parfaitement consciente, mais ses instincts foirés et foireux peinaient à l’intégrer. Le malaise guidant ses pas, la jeune femme fit demi-tour en ronchonnant contre elle-même.

– Kezabel ?! Tout va bien, je suis réveillée. »

Elle sursauta sur le côté, les deux mains toujours accrochées à la lanière avant de pivoter vers la source de sa voix.
Sovahnn était là, sur le perron, la petite dans ses bras.
La culpabilité égorgea son courage.
La lumière tamisée enrobait celle qui avait été une amie avec qui elle passait de rares mais de bons moment à l’époque où les cours étaient l’une des seules préoccupations. Désormais mère célibataire, guerrière silencieuse, Sovahnn lui apparaissait comme une lumière au fond des ténèbres. Elle illuminait les alentours de son sourire sincère malgré toutes les épreuves venus lui fracasser le coeur. Et pendant qu’elle souffrait, traînait son deuil comme l’on trainerait un boulet à sa cheville, elle avait soutenue celle qui se tenait dans l’ombre et qui n’avait pas daigner être là pour elle. Kezabel avait merdé, de A à Z. S’était fait presque absente et silencieuse en envoyant quelques messages de soutien. Préférant le retrait à la confrontation.

Le courage face à la lâcheté.

Alors que Kezabel envisageait de bredouiller des excuses à la con et reculer d’un pas, Sovahnn la prit de court en avançant pour se dégager de la lumière du perron et rejoindre celle que la fenêtre dégageait. Son visage lui apparut plus nettement et l’oeil observateur capta les traces de maquillage, les vêtements qui n’avaient rien de quelque chose de cosy à cette heure de la nuit, la chevelure blonde légèrement ébouriffée. Et entre ses bras, cet être endormi qu’elle tenait contre elle. La tendresse qui émanait de cette image l’émeut en silence.

Il restait encore de belle chose à voir malgré les ombres planant sur son coeur.

– Tisane ?!

Pas de rejet. Pas de rancœur.
Sovahnn concrétisait ce qu’elle lui avait déjà sous-entendu ou dit clairement par message : Elle était la bienvenue.

La tasse fumante tendue accompagnait l’immense sourire que la jeune mère lui offrait, rapidement accompagné par celui plus timide de Kezabel qui tendit la main pour récupérer le mug.

– Merci. »

Un mot murmuré déguisant plusieurs significations qu’elle comprendra, ou non.
La chaleur de la tasse se diffusa aussitôt entre ses paumes, son regard glissant du liquide coloré aux  yeux de Sovahnn dont elle connaissait déjà la clarté.

– J’suis désolée pour l’heure tardive. Je pensais pas qu’il était aussi... tard. » Elle sourit, statique sur ses jambes fermement ancrées sur le sol. En arrière plan, le fracas des vagues couplé à la symphonie nocturne des êtres qui, comme elle, trouvait leur rythme au cœur de la nuit. « Tu veux que je repasse plus tard ? T’as l’air d’être parée pour flamber les pistes de danse et d’avoir plus d’énergie que deux Jenkins réunit. »
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Mar 12 Oct 2021 - 11:21
Le visage de la jeune femme se détachait dans les ombres, ses traits amincis, ses doigts enroulés autour de la sangle d’un sac qu’elle portait au côté. Ici, dans la grande maison perdue sur les côtes écossaises, là où le vent sifflait dans les brumes de la nuit, il n’y avait que le bruit des vagues à s’écrouler au bas de la falaise. Le petit village était en dessous, bien loin, et parfois, quelques sons leurs parvenaient mais sans ça, il était aisé de se croire au bout du monde. Isolés. L’ambiance pouvait être pesante, mais au regard de la jeune femme, il y avait dans la force des éléments une brutalité pure et apaisante. Ce lieu était isolé, oui. Protégé. Une porte ouverte vers la liberté. Un pied à Londres, l’autre en pleine nature. Un endroit où chacun pouvait aller et venir en parfaite sécurité sans que quiconque ne puisse les apercevoir. Son petit coin de force vive, à son image. Et puis, après avoir été enfermée pendant des années, que ce soit dans un château ou un lit d’hôpital, sembler pouvoir observer les bordures du monde depuis sa fenêtre donnait l’impression qu’elle pouvait s’y envoler d’une seconde à l’autre et seulement vibrer avec l’écume, siffler avec la brise. A avoir entendu Enzo lui parler de son océan durant des années, quelque chose l’attirait plus encore ici. L’impression que face à l’eau, quelque chose de fort s’exprimait sans qu’il ne nécessite de mots. Peut-être avait-il fini par lui filer le virus de l’océan, qui sait ?
Ici, chaque parcelle avait surtout été protégé à la fois par le père de sa fille mais par chacun de ses proches, donnant à ces lieux qu’elle héritait d’une famille éloignée … ce quelque chose qui manquait. Une véritable identité, un attachement émotionnel, la marque d’une véritable famille si essentielle à ses yeux.

Et à sa façon, Kezabel en faisait partie. Non par leur lien immédiat mais par celui qui la reliait à nombre de ses proches. Peut-être était-ce naïf et enfantin mais Sovahnn les voyaient, ces liens noués tout autour d’eux qui s’étaient tissés pendant des années. Enfants du chaos, soldats désignés du massacre, chacun avait fait comme il le pouvait face à l’horreur. Et ces marques, elles les reliaient, s’apposaient sur leur peau comme une peinture qu’on avait déchirée et éparpillée au vent. Mais il suffisait parfois de seulement remettre les brisures dans le bon sens pour que les plaies coïncident de nouveau. Il y avait entre elles un lien que l’intimité ne connaissait pas mais qui suffisait à devenir force. Est-ce qu’elle lui en voulait ? Comme Riley, Sovahnn en voulait à la Garde. Profondément. Elle en voulait à ces choix qui avaient été faits et qui la privaient aujourd’hui d’un père pour son enfant. Elle en voulait à la vie d’être placée au bord d’une cible dont elle ne voulait pas, lassée de s’en prendre des éclats chaque mois durant. Elle en voulait à Zach de l’avoir laissée. Elle en voulait aux autres de ne l’avoir considérée dans son décès, de ne l’avoir respectée au point de lui nier jusqu’à la vérité. Elle était en colère, épuisée, violenté, elle aussi. Mais cette colère n’était simplement pas à propos. Elle n’avait juste pas sa place ici, maintenant, au travers de ce que Kezabel traversait. Elle ou d’autres, d’ailleurs. Car l’hypocrisie de lui en vouloir à elle quand elle avait été prompte à enlacer Timothy était ridicule et Sovahnne en avait conscience. C’était… simplement ni le lieu ni le moment. Chacun avait besoin de panser ses plaies et à l’idée, celle qui était face à elle était l’humaine, la femme maltraitée et bafouée par la vie autant que par son statut. C’était l’amie réellement, à présent, plus que l’amie d’amis. Plus que la connaissance, la copine. C’était la femme à bout, elle le comprenait par ses silences, par le regard inquiet qui glissait dans ses prunelles, par l’hésitation de ses gestes et de ses mots. L’humaine, simplement, qui, aussi, n’en pouvait plus des coups reçus. Celle dont elle ne connaissait réellement les tourments, qu’elle ne savait comment aider, envers qui elle ne savait comment aborder les plaies. Celle dont elle ne connaissait l’état qu’à travers les inquiétudes des autres. Oui, par moment, Sovahnn en voulait au monde. Mais pas aux gens. Pas quand elle les voyait trembler et risquer à leur tour de s’écrouler.

Alors oui, peut-être Jordane avait-elle pris le coup qu’elle aurait voulu distribué à d’autres, bouffé le sel qu’elle était apte à encaisser et que la jeune maman, elle, ne pouvait porter en cet instant. Elle savait qu’elle était injuste, surtout sans avoir la preuve de ses suppositions. Mais deux mois avaient passé et elle n’avait simplement plus de force que pour l’amour, laissant les ressentiments de côté pour plus tard. Elle faisait ses choix, tout simplement. Décidant de mettre son énergie là où elle avait de l’importance. Et en ce moment, l’important était d’être ensemble. De cultiver la joie pour ne pas laisser les ombres les engloutir.

Après tout, Sovahnn l’avait dit bien des mois plus tôt. Elles étaient là ses armes.
Certains avaient la rage de vivre. Elle avait la rage de rire.

Alors c’était un sourire qu’elle lui adressait dans les ténèbres, tout juste éclairée par les lueurs de la maison, Sovahnn se plaçait très exactement là où elle décidait d’être. Dans le halo de bonheur au cœur des ombres.

– Merci. » Souffla Kezabel en acceptant la tasse fumante de tisane que la jeune femme lui offrait. Elle en entendait plusieurs significations, ne s’y attardant pourtant pas, répondant d’un simple « De rien. » qui balayait de ces deux mots le simple fait qu’il y ait quelque chose à remercier. S’il y avait quelqu’un avec qui interroger cette situation, ce n’était pas elle, elles n’étaient pas assez proches pour cela. Oh, d’autres, oui. Mais pour Layla par exemple, Sovahnn avait fini par repousser ses certitudes pour les enterrer ailleurs, hors de sa vue. Le frère et la sœur ne lui feraient pas cela tout deux, n’est-ce pas ?

N’est-ce pas ?

Qu’importe. La vérité, c’était que si elle se laissait emportée par l’angoisse, les interrogations et, d’une certaine façon, la réalité, la jeune femme n’y arriverait simplement pas. Alors elle faisait face, à sa façon, brides par brides, morceaux par morceaux, pour réussir à remettre en place ce qui avait trop bougé lors des derniers séismes. Elle réparait, repeignait, apaisait, à sa façon. Les Hommes et les cœurs. Les heurts et les pleurs.

– J’suis désolée pour l’heure tardive. Je pensais pas qu’il était aussi... tard. »
« Boh, t’en fais pas ! »
« Tu veux que je repasse plus tard ? T’as l’air d’être parée pour flamber les pistes de danse et d’avoir plus d’énergie que deux Jenkins réunies. »
« Oulah, un truc pareil est pas possible malheureuse ! Va pas dire ça, je ne serais jamais à la hauteur. Déjà une c’est un défi, mais deux j’ai pas le niveau ! » Répondait-elle sur le ton de l’amusement, trop habituée à s’y mesurer, justement, à la Jenkins. Non sur le sol mais dans les airs. « A vrai dire, c’est pire que ça : j’en reviens. » Oui, ton horloge biologique est dans les choux et il est si tard que ça. « Mais ça doit se voir un peu, je suis loin d’être partie pour me coucher, je viens de rentrer. »

La petite bougeait légèrement, lovée dans les bras de sa mère, indifférente à ces deux femmes qui se retrouvaient après deux mois sans se voir. La dernière fois, elle l’avait aperçue avec Jordane à l’enterrement, détournant le regard, pour le poser ailleurs, sur ceux qu’elle ne savait ou ne soupçonnait pas appartenir à la Garde. Trop dur à gérer, trop difficile de faire face à ceux qui étaient peut-être là sans empêcher le drame, ceux qu’elle avait tenu responsable par défaut, sans avoir d’autre figure à qui reprocher le départ de celui qui lui avait promis de passer sa vie à ses côtés. Seule, avec un avenir dans le fond du bide dont elle ne savait quoi faire, ce jour-là, la petite blonde ne tenait plus, en vrac, elle s’effondrait. Enzo l’avait maintenue à bout de bras. Riley l’avait réveillée.

Celle qui se tenait à présent face à Kezabel n’avait pas digéré, ni l’absence ni le deuil, mais elle avait cessé de se laisser happer par ce trou noir emplis de désespoir dans lequel elle s’était laissée couler. Parce qu’elle n’avait jamais cessé d’aimer la vie, parce qu’elle s’était promis de la respecter et de chérir cette chance qu’elle avait eu de se relever une première fois, Sovahnn avait de nouveau fait e chemin vers la lumière, refusant aux ténèbres le choix de l’en délester.

« Je peux ? » T’enlacer. Sovahnn laissait sa brusquerie de côté, consciente que la situation demandait sans doute un peu plus de doigté que ce dont elle avait l’habitude. Passant un bras autour d’elle, elle lâchait un petit « En évitant d’ébouillanter ma fille … ou mon sein gauche, j’en suis capable. » plus pour elle-même qu’en avertissement pour Kezabel, soyons honnêtes.

Laissant une main sur son épaule un instant, elle désignait l’intérieur. « Tu entres ? Un jour peut-être que j’aurais une terrasse histoire de pouvoir faire des soirées barbeuc’ chamallow à pas d’heure mais j’avoue que là c’est pas ça. » L’extérieur était en friche, à peine délimité par une petite barrière en bois qui tombait en ruine depuis bien longtemps et faisait le tour de la propriété. Si ça restait en l’état, c’était essentiellement pour identifier le lieu exact où les sorts ne faisaient plus effet. Un jour, oui, elle s’occuperait de ça… mais pour l’heure si son hyperactivité la poussait à retaper les pièces une à une – souvent avec l’aide d’Enzo - l’extérieur, lui, devrait attendre.  

Initiant le mouvement, elle l’invitait à entrer.

« Tient, tant que j’ai une sorcière sous la main qui a plus de capacités magiques qu’une petite cuillère, est-ce que tu peux insonoriser la pièce principale ? J’ai un colocataire endormi dans la chambre de la petite. »

C’est bizarre, non, la douleur. Un instant, on a l’impression que tout est totalement insurmontable, le second on a agit comme si seul le quotidien et les habitudes pouvaient combler le marbre de nos pieds. Et puis l’un et l’autre se compensent, se contredisent, s’explorent et s’alternent. Jusqu’à ce que l’un cède du terrain et que la normalité revienne à sa façon.
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Ven 5 Nov 2021 - 19:03
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Sova & Kezabel


■ Nuit du Lundi 13 au Mardi 14 Juin 2016 ■

–  Oulah, un truc pareil est pas possible malheureuse ! Va pas dire ça, je ne serais jamais à la hauteur. Déjà une c’est un défi, mais deux j’ai pas le niveau ! »

Elle avait raison. Personne ne serait jamais à la hauteur de sa Tornade.
Sa Tornade… pouvait-elle seulement prétendre avoir encore le droit de l’appeler comme ça ? Les deux jeunes femmes peinaient à combler cette distance incontrôlable avec toutes les forces qu’elles gardaient enfouis et nourrit par l’amour qu’elles éprouvaient pour l’autre. Quoi qu’il arrive, quoi qu’il advienne et même si Riley devait un jour lui dire qu’elle ne pouvait plus rester, qu’elle ne pouvait plus encaisser et rester dans sa vie, elle resterait sa Tornade pour toujours. On efface pas un lien aussi fort comme l’on éteindrait une bougie. De loin ou de près, la trace de sa meilleure amie, de son âme sœur, restera à jamais indélébile.

– A vrai dire, c’est pire que ça : j’en reviens. Mais ça doit se voir un peu, je suis loin d’être partie pour me coucher, je viens de rentrer. »

Comment un œil aussi observateur que le sien pouvait être à ce point à côté de la plaque ? Ce n’était que maintenant que Sovhann lui pointait du doigts ces détails que Kezabel les percevaient. Son cerveau était dans les choux complets, totalement à la ramasse du monde et de ses heures. Un parfait décalage quand elle luttait pour retrouver sa place, un point de mire auquel se raccrocher pour ne pas se laisser porter loin des autres.
Elle s’excusa silencieusement d’un sourire en biais, baissant le regard vers le sol.

Le froissement de tissu qui s’agitait contre la poitrine de Sovahnn attira l’attention de Kezabel qui ne put se soustraire au regard de la jeune mère face à elle.

– Je peux ? »

De ?

L’étreinte.

Ses neurones à la ramasse, ses codes sociaux en hibernation quand elle a toujours été celle si tendre, si ouverte, si proche. Si tactile. Pourquoi tout était devenu si difficile ? Non, le pourquoi elle le connaissait. La question était de savoir comment ils avaient réussi à ce point à éteindre et détruire toute son identité.
Kezabel laissa Sovahnn s’approcher et se laisser porter par cette simple étreinte, le bras de sa comparse de maison autour de ses épaules alors qu’elle tentait de ne pas écraser la petite de son poids.

– En évitant d’ébouillanter ma fille … ou mon sein gauche, j’en suis capable. »

Un rire bref, proche du murmure, franchit ses lèvres. La sorcière glissa son propre bras autour des hanches de Sova, profitant de cette brève chaleur humaine. Celle qu’elle oublie trop souvent.
Brève, mais salvatrice. Un regain de courage, de vie peut-être. Ou était-ce seulement l’attitude de Sovahnn qui était aussi solaire que Kezabel pouvait être terne. L’odeur du bébé lui enivra les sens, des effluves de shampooing, de lessive, un tout mélangé presque réconfortant qui rappelait l’enfance. Qui lui rappela son petit frère lorsqu’il était gamin, a gesticuler des jambes quand Kezabel tentait de lui changer la couche avec l’aide de sa mère.
Même d’Adam, elle s’était éloignée. De son père aussi, petit à petit. Elle se cloisonnait sans y prendre garde.

– Tu entres ? Un jour peut-être que j’aurais une terrasse histoire de pouvoir faire des soirées barbeuc’ chamallow à pas d’heure mais j’avoue que là c’est pas ça.
– Oh, ça peut être faisable, lâcha-t-elle en regardant aux alentours, Je suis certaine qu’Enzo te ferait des miracles. »

Elle se surprit à se dire qu’elle pourrait l’y aider, se plonger tête et coeur dans une tâche qui ne lui demandait pas plus de réflexion que des gestes mécaniques.
Son coeur martela vivement sa poitrine lorsqu’elle pensa à Riley, à l’Afrique. Une idée peut-être stupide qui surgit des ombres, de la mélasse épaisse qui l’étouffait tant. Une éventualité, une opportunité de tout recommencer.

Une dernière chance.

Kezabel baladait son regard sur les alentours décrépit et aux allures abandonnées pour noyer la vérité. Une méthode parmi tant d’autres pour protéger ses habitantes. Devant la porte, la jeune femme marqua une brève hésitation avant de pénétrer dans la chaleur d’un foyer.
Ca lui saisit aussitôt son cœur froid malmené, ses yeux se posant sur tout et rien, de détails en détails. Des traces de vie quotidienne avec un torchon abandonné, une table pas totalement débarrassée, des chaussures près de l’entrée, des photos parsemées à droite, à gauche. Si l’extérieur ne donnait pas tellement envie de s’aventurer dans l’antre de cette maison, l’intérieur jurait par sa beauté simple et vivante, solaire et accueillante. Kezabel se sentirait presque comme une tâche au milieu d’un tableau blanc avec ses chiens ombrageux juste derrière elle.

Mais ce qui lui sautait le plus aux yeux comme au coeur, c’était de voir à quel point Sovahnn avait réussi à construire tout ça, à garder ce menton relevé tout en continuant d’avoir ces gestes vifs. Naturels. Sans aucun remord vis à vis d’elle et de ce qu’elle représentait. Ou, en tout cas, si Sovahnn conservait de la rancune envers Keza, elle le dissimulait foutrement bien.
La jeune femme admirait sa force de vivre malgré les blessures, oubliant parfois que les émotions et sentiments sont bien trop complexes et obscures pour espérer en comprendre les mécanismes. Certains se relèvent, d’autres pas.

Et jusqu’ici, Kezabel se persuadait qu’elle n’était pas capable de cette force qui habitait la jeune mère malgré le poids évident de l’absence qui flottait très certainement sur son coeur, chaque jour passé.

–  Tient, tant que j’ai une sorcière sous la main qui a plus de capacités magiques qu’une petite cuillère, est-ce que tu peux insonoriser la pièce principale ? J’ai un colocataire endormi dans la chambre de la petite.
– Bien sûr. »

Kezabel s’exécuta, intriguée par l’évocation d’un colocataire dont elle n’avait pas connaissance. C’était ça, de se terrer dans ses ombres douloureuses mais bien plus rassurantes que cette lumière aveuglante.

Le sortilège engloba la pièce et insonorisa leurs voix et elle rejoignit Sovahnn au milieu de la pièce, les deux mains encerclant le mug encore chaude de tisane. Elle le porta à ses lèvres tout en prenant garde de ne pas se brûler, appréciant en silence la chaleur réconfortante qui dévalait son œsophage.

– L’extérieur ne paie pas de mine mais ici, ça donnerait presque des envies de vacances perdu dans le trou du cul du monde. »

Des envies de s’enfoncer dans la montagne française, au fin fond d’un chalet au coin du feu, ou ailleurs. Peu importe tant que l’endroit inspire autant le côté douillet que celui-ci.
Le malaise stagne toujours, lui colle au coeur, mais Kezabel tente de s’en défaire, de faire un pas en avant au lieu de rester cloîtrer derrière ces barbelés. Malgré elle, elle se sentait comme une intruse ou, en tout cas, pas tellement à sa place. Et ça n’avait rien à voir avec l’accueil que lui réservait Sovahnn mais plutôt à cette incertitude, à craindre le retour de bâton. Elle se répétait mentalement les mots d’Enzo, comme un mantra.

– Je suis désolée d’avoir autant tardé à venir et à me manifester. J’ai pas été le soutient le plus brillant que t’ai pu avoir. »

Les mots lui échappent d’une voix rauque, sans qu’elle ne la regarde vraiment. On pourra dire ce qu’on veut, que c’est pas sa faute, qu’il y a des circonstances atténuantes ou pas, que c’est passé ou trop récent, que de toute façon Sovahnn avait déjà une belle brochette d’ami solide sur qui elle avait pu compter et que la présence de Kezabel n’aurait très certainement rien changé. On pouvait lui dire tout un tas de chose mais ça n’enlevait pas à ce ressenti imposant, à cette honte qu’elle ressentait parfois envers d’autres. C’était là et comme un poison, il fallait qu’elle s’en débarrasse.
Son regard épuisé se porte sur la petite, toujours dans les bras de sa mère, puis sur Sovahnn.

– Elle est encore plus adorable que sur les photos, lâcha-t-elle avec un sourire tendre. Sincère. Vous êtes adorables, toutes les deux. Désolée, passée minuit tout est permis, même la niaiserie. Un rire chaud franchit sa gorge, rejetant que c’était peut-être son coeur à nu, à vif et ses multiples insomnies responsables de ces quelques mots. Exacerbant toutes les tendresses et les peurs avec. Alors, cette soirée ? Et toi, comment tu vas ? J’ai cru entendre et comprendre que tu débrouillais comme une cheffe. »

Avec ses petits cassages de gueule, peut-être. Qu’est-ce qu’elle en savait ?
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Sam 13 Nov 2021 - 14:57
Comment faire ? Comment se placer face à ce qu’elle vivait, l’accueillir après tout ça ? Ces questions auraient dû lui claquer à la gueule et dans d’autres circonstances, sans doute l’auraient-elles fait. Et pourtant… pourtant ça n’était pas la première fois. L’horreur cognait de nouveau à leurs portes et si personne ici n’avait le mode d’emploi, Sovahnn avait cessé de voir les plaies avant l’humain. Cette normalité qu’elle imposait sans complexe ne marquait évidemment aucun désintérêt mais permettait seulement à l’autre de prendre son temps sans être fixé avec un air de cocker en placardant le mal-être en place publique. Bien sûr que Kezabel allait mal, bien sûr qu’elle notait son air fatigué, son corps perdu dans des tissus trop larges, son regard fuyant, ses latences et ses hésitations.  Elle ne savait ni où elle en était ni ce qu’il en était réellement avec Riley, ni grand-chose d’ailleurs. Et elle savait que son hésitation pouvait être liée également au comportement distant qu’elle avait elle-même eu… Simplement tout ça était juste… hors sujet pour elle. Il y a des choses qui doivent être hiérarchisées par moment et pour l’heure, il s’agissait simplement de retrouver contact avec une amie. De l’inclure de nouveau dans une sorte de normalité bénéfique, l’amener à retrouver le chemin de ce foyer qu’elle construisait petit à petit et dans lequel elle avait sa place.

Pas facile, justement, de construire un foyer quand on s’inclus à peine dans le monde adulte. Si la maison n’était pas en bordel, Tim n’y était pas étranger. Ainsi, grâce à lui, le frigo était plein, la vaisselle en partie faite et rangée – du moins bien plus que si elle s’en était occupée – et les espaces de vie, propres. Ce qu’elle construisait se détourait autrement. Lorsqu’elle avait découvert les lieux que Zach avait négocié avec sa mère, le bas était déjà propre. Une cuisine aménagée et moderne (à gauche d’elles) un grand canapé … et c’était tout. Alors oui, tout était encore un peu vide mais il y avait à présent un meuble récupéré à la casse et repeint pour soutenir une télé que Timothy avait ramené. La grande table de la salle à manger, elle l’avait trouvée dans la remise, poncée et repeinte. La table basse venait de l’appartement de Londres (vous avez déjà passé des meubles par réseau de cheminette ? Bah elle oui, et c’est comique !) ainsi que le tapis sur laquelle elle reposait. Tous deux provenaient de chez Zach. Les Dissemba lui avaient fourni la grande majorité des meubles qui restaient quand elle s’était attelée à construire un véritable petit cocon pour sa fille dans la chambre qu’on distinguait à leur droite. Depuis, quelques petits détails apparaissaient. Un plaid top moumoute étalé sur le canapé, puis un second, quelques photos qui sortaient de son enfance des deux collocs. Et surtout, quelques unes prises depuis. Des détails posés par-ci par là. Enzo, Riley. Zach. Liya. Tim maintenant. Il y en avait d’autres également. Deux, à vrai dire. Des photos de Poudlard qu’elle avait emporté sans même le savoir dans ce seul sac qu’elle avait pris sans réfléchir en filant en balai par-dessus la forêt interdite, n’emportant en réalité que ça. Un sac quasi vide, un sweat, son balai. Et sa fille. Sa vie était remplie, riche et foisonnante même, et pourtant en terme de matériel, il ne lui restait que bien peu de choses, à l’image de ses premières années à Poudlard quand elle devait prendre les fringues des uns et des autres. Et pourtant, tout ça rendait bien. La vie s’était insufflée d’elle-même dans les grands espaces de la maison d’Ecosse, envahissant les pièces communes quand les chambres, elles, restaient encore un peu pauvres. Trois chambres en bas, propres. La sienne et celle de sa fille, à droite, au plus proche de l’eau qu’on entendait au loin. Celle de Tim et celle d’Enzo, plus petite mais indispensable, oui. Hey, c’est qu’on prend des habitudes à force de vivre en grande communauté ! Et puis avec l’appartement de Londres, il y avait encore une chambre et deux canapés de disponibles. Véritable auberge de jeunesse en devenir, donc. Restait l’étage, l’escalier se plantant à gauche. Là-haut, en revanche : le chantier. Si sa famille en était encore à rénover les lieux, elle se débrouillait à présent seule. D’ailleurs toutes les chambres sentaient encore la peinture fraiche par moment tant elle s’en était occupée récemment, celle de Liya en priorité pour ne pas laisser les effluves imprégner les poumons jeunes de l’enfant.
Ainsi, Sovahnn n’était peut-être pas la plus douée pour entretenir, mais pour construire, elle savait faire. C’était d’ailleurs bien ce qui arrivait. S’enfermant un temps dans une bulle dans laquelle seul Enzo pouvait vraiment trouver sa place, elle s’était de nouveau ouverte au monde par l’intermédiaire de Riley. A présent, les rancunes, la jeune maman les écrasait, les rejetait, leur interdisant l’accès immédiat à ce petit havre de paix dans lequel elle voulait construire quelque chose de beau. Et oui, Kezabel y avait totalement sa place. Ils y avaient tous leur place.

Peut-être était-ce parfaitement naïf de sa part mais oui, elle espérait que certaines haches de guerre pourraient être enterrées ici. Qu’ils arriveraient au fur et à mesure à se comprendre et s’accepter malgré les choix difficiles, les oppositions certaines et les erreurs douloureuses. Un pas après l’autre, parfois hésitant, parfois dans la mauvaise direction mais au fur du temps, tout ça finirait par prendre un sens.

– Oh, ça peut être faisable… je suis certaine qu’Enzo te ferait des miracles. » L’extérieur. Une terrasse.
« Oh c’est certain. Faudrait que je le débauche un jour pour qu’on s’y mette. »

Ce qui est drôle car dans une autre vie, c’est lui qui l’avait débauchée, haha ! Quoi … elle est drôle ! Mais si elle est drôle !

Refermant la porte derrière elle avant de la verrouiller après une hésitation – chose qu’elle ne faisait jamais mais au vu des circonstances, l’ex Poufsouffle se disait que son ancienne camarade de chambrée serait plus à l’aise ainsi – Sovahnn l’invitait à prendre ses aises dans la grande pièce à vivre où chaque espace était ouvert sur les autres. Un peu comme elle, donc.

– L’extérieur ne paie pas de mine mais ici, ça donnerait presque des envies de vacances perdu dans le trou du cul du monde. »
« Merci. Je l’aime bien mon petit trou du cul du monde. Mais j’aime bien ma friche extérieure aussi cela dit. D’ailleurs si le bas est bien… t’as pas vu le haut. Au deuxième étage, ya une zone que j’ai entouré en rouge, on passe le pied à travers. » La jeune femme ne rabaissait pas les lieux, elle ne faisait que s’en moquer gentiment. Ça ne faisait que quelques mois qu’elle était là et avait eu bien à faire…
A vrai dire, elle aimait ça, ce truc entre deux états, un peu comme elle, chaleureux et beau d’un côté et percé de partout un peu plus haut.

Quelques mots pour détendre les choses car elle sentait bien que Kezabel luttait, que ce qu’elle aidait à devenir naturel ne l’était pas chez elle. Pourtant, elle, se mouvait avec facilité, parlait comme si de rien n’était. Elle lui laissait l’espace, en fait, à sa façon, de venir, de se taire, de parler ou de nier. Peut-être de l’hypocrisie de sa part, c’était vrai, de se détourner hier pour y raccrocher dès le coup de trop. Pas de réponses à la mort de Zach, un temps de latence qu’elle avait fini par faire taire. Et puis les messages quand c’était au tour de Kezabel de s’écrouler.

Tu auras toujours ta place ici.
Parfois on peut se fracasser, seul ou à plusieurs, parfois les uns sur les autres, parfois les uns contre les autres. Mais il y a des choses qui ne changent pas. Ça, ça change pas.
Je suis conne aussi, moi, parfois.  


Et comme si ses pensées suivaient les siennes, tandis que Sovahnn allait se servir une nouvelle tasse, s’emplissant de la chaleur de sa fille contre son cœur, la voix de Kezabel résonnait d’une douceur un peur rauque, hésitante.

– Je suis désolée d’avoir autant tardé à venir et à me manifester. J’ai pas été le soutient le plus brillant que t’ai pu avoir. »

Un instant d’arrêt, le regard venu capter le sien ; les mots qui manquent, un peu idiots dans sa gorge.

On fait ça ? Vraiment ? On joue cette partition là, maintenant, à minuit passé ?

« T’en fais pas pour ça.. » Qu’elle est bateau ta réponse. On vous croirait parler d’une tasse cassée quand c’est vos cœurs qu’on a fracturé.
Elle est même tellement bateau qu’elle ne semble pas avoir de sens, être là seulement pour meubler, pour remplir ce vide qui se répand un instant.

Et puis Kezabel posait le regard sur elle, puis sur sa fille, esquissant un sourire profond de tendresse avant de reprendre. Elle est encore plus adorable que sur les photos Un pouce sur la joue de sa fille venait jouer sur son épiderme, un sourire sur les lèvres. Vous êtes adorables, toutes les deux. Désolée, passée minuit tout est permis, même la niaiserie. Cette fois, Sovahnn riait franchement, de ce rire clair et chaud qui emplissait souvent ces murs. Mais à présent, elle n’était plus seule, le même passait enfin celles de son amie. Alors, cette soirée ? Et toi, comment tu vas ? J’ai cru entendre et comprendre que tu débrouillais comme une cheffe. » Pourquoi la fierté se mêlait-elle toujours un peu à la honte quand elle entendait ça ? Pourquoi ne pas se détacher de cette sensation merdique qui diffusait toujours comme un poison insidieux alors même qu’elle ne voulait pas donner ce pouvoir à ceux qui les blessaient sans cesse.
Pas si simple, hein, d’être celui qui survit.

« Ya un Enzo derrière tes mots tu feras gaffe, c’est encombrant ces bestioles-là ! » Pas Riley car, même si elle s’en doutait sans doute, elle n’avait pas encore pu passer. Moins encombrante cela dit. Quoi qu’aussi turbulente. « Pour la soirée : une catastrophe. Lamentable au possible. Pour le général … je suis une chiée pour gérer cette baraque, ma vie est un bordel, j’me casse la gueule régulièrement, j’agis complètement au pif et ma fille a hérité d’une ado un peu paumée comme maman mais dans le fond je crois que ouais, j’m’en sors bien. Et que ça va. Du moins j’ai décidé que tout ça c’était ok. » Si les pires peurs se réalisent d’un bloc, reste-t-il tant à craindre ? Oui, sans doute… et pourtant il lui semblait avoir dépassé le stade où son corps pouvait physiquement continuer à bouffer l’angoisse par la racine et où son âme saturait de toute l’horreur pour l’affronter en bloc.

Peut-être disait-elle ça pour se dédouaner en partie, non pas pour s’excuser ni pour se justifier, mais parce qu’une part d’elle savait que non, ça n’allait pas, et que son comportement pouvait sembler étrange. « Je sais que c’est un peu bizarre mais je crois que je suis juste calibrée pour réagir comme ça. » Faire autrement serait trop dur, trop ingérable. Ça serait la porte ouverte au désespoir et elle ne pouvait le laisser entrer.

Terminant ce qu’elle était partie faire, la jeune femme se servait une seconde tisane, ayant légué sa première à son invitée imprévue.

« Reste pas comme ça, fait comme chez toi hein….  Je te jure que le canapé ne mord pas et que tu peux chier dans mes chiottes. »

Le naturel, parfois un peu brusque, qui refusait de laisser une situation s’embourber quitte à mettre les pieds dans le plat avec humour et légèreté. Amitié, surtout. Alors allait-elle faire ça ? Se taire ? Kezabel était revenue à mi-mot sur ce qui, sans doute, lui pesait en cet instant. C’était vrai, les deux jeunes femmes ne s’étaient pas revues depuis l’enterrement de Zach et son propre silence, son premier message un peu trop froid, bientôt englouti par la nouvelle situation se présentant comme une seconde couche de peinture craquelée sur la première …. Oui, tout ça rendait les choses délicates puisqu’elles n’avaient jamais parlé. Alors à présent, elles pouvaient s’enfermer dans une discussion légère en niant le reste, chose qu’elle envisageait jusque là. Mais ces mots n’étaient pas sortis pour rien et si elle les exprimait, c’était que « t’en fais pas pour ça » restait sans doute une réponse bien conne face aux tempêtes internes qui la saisissaient.

« En fait j’ai déjà un poêle mais je sais pas s’il marche. Avec un pouf dans le coin et des chocolats chauds, on serait pas mal. » Oui, il y a un poêle pas loin de la télé, c’est nouveau. Mauvais plan pour l’informatique cela dit.

Une réflexion légère tandis que Sovahnn hésitait encore sur la marche à suivre, ne tardant pas à revenir pour s’assoir en tailleur sur la table basse, sa fille callée dans le fauteuil créé par ses jambes croisées.

« Ecoute… » cette partition, j’ai pas prévu de la jouer, j’ai pas prévu d’y revenir, mais ça semble sortir presque contre ton gré alors si tu veux qu’on en parle, on en parlera. « Ces dernières semaines, voir ces derniers mois ont été difficiles pour tout le monde. On a le droit de … simplement pas pouvoir parfois. C’est pas grave. Ça vaut pour toi comme pour moi. » Pour d’autres aussi. « Je suis désolée d’avoir réagi comme je l’ai fait. » Parce qu’elle n’avait aucun problème à voir là où elle-même avait été conne et que ces excuses, elle les pensait et ce, même si elle ne se sentait pas prête à agir de même avec Jordane. Injuste ? Oui. Sovahnn en avait conscience. Mais cette dernière était prête à encaisser ce qu’elle, là tout de suite, n’arrivait pas toujours à aussi bien concilier que ce qu’elle laissait entendre. « T’as rien à te reprocher, je t’aurai sans doute pas laissé faire de toute manière…. » Une petite moue désolée se dessinait sur ses traits, le regard dans le sien. Sovahnn pouvait être emportée, injuste, vive ou arbitraire mais elle était aussi terriblement honnête et loin d’être lâche. Alors ses erreurs et ses incapacités, elle les assumait, tout autant que la réalité de cette situation. « On a tous nos combats, et parfois on n’a plus vraiment la force pour les mener. A un moment, ou en tout cas en ce moment je pense qu’il faut les choisir. Moi en tout cas c’est ce que j’ai décidé de faire. Mais il y a le moment et le lieu. Je suis en colère contre la Garde, c’est clair et ça ne risque pas de se calmer tout de suite. Mais il y a des questions que j’ai décidé de ne pas poser et des réponses que je ne veux pas avoir. Ça, c’est ni le moment ni le lieu. Et toi, t’es pas la personne qui… enfin t’as pas à être une cible de ce malheur en fait. Donc par extension, ne t’impose pas la culpabilité d’un truc que t’aurais pas pu contrôler de toute manière ok ? »

Sa mort. Ma rancœur. Les deux.

Te bats pas contre toi-même. Ce combat-là n’a pas sa place ici, tu en as de trop gros à mener pour perdre tes forces là-dedans.


« Je t’en veux pas, tu m’en veux pas. Balle au centre, les comptes à zéro, on passe à autre chose. » Ces mots-là remplissaient d’humidité son regard sans qu’elle ne sache trop pourquoi.                          « Je me trompe ? » Tu m’en veux ?

« On a trop à gérer pour s’arrêter là-dessus je crois. » Peut-être que ç’en est pas, des conneries. Mais pour l’heure, Sovahnn ne pouvait simplement pas tout gérer d’un coup. C’était peut-être sa façon de cloisonner, sa façon d’être dans le déni après tout. Mais il ne lui semblait pas. Il semblait simplement que certaines choses avaient plus d’importances que d’autres. Le pardon avant les accusations, la sororité avant l’amertume.

L’amitié, oui, avant les convictions.
L’amour avant la mort.
L’avenir, avant le passé. Et le présent pour seul guide.
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Mar 30 Nov 2021 - 23:00
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■ Nuit du Lundi 13 au Mardi 14 Juin 2016 ■

–  Ya un Enzo derrière tes mots tu feras gaffe, c’est encombrant ces bestioles-là ! Pour la soirée : une catastrophe. Lamentable au possible. Pour le général … je suis une chiée pour gérer cette baraque, ma vie est un bordel, j’me casse la gueule régulièrement, j’agis complètement au pif et ma fille a hérité d’une ado un peu paumée comme maman mais dans le fond je crois que ouais, j’m’en sors bien. Et que ça va. Du moins j’ai décidé que tout ça c’était ok. »

C’était assez admirable de l’entendre dire à quel point elle pouvait se casser la gueule mais qu’elle était au clair avec ce fait. Admirable, aussi, de trouver la force nécessaire pour ne pas laisser ses peurs de mal faire prendre le dessus sur tout le reste.
Est-ce que c’était réellement si simple que ça où il suffisait de simple décider que tout était ok pour que les choses soient plus faciles à gérer ?

Mais pour Sovahnn, ça lui suffisait. Elle semblait assumer ses parts d’erreurs sans trop craindre la foudre ni de rougir de honte, actant que c’était ainsi et qu’elle n’y pouvait rien. Son ancienne camarade de maison avait vécu l’enfer de Poudlard, était tombée enceinte, avait perdu le père de sa fille mais surtout un ami et elle se maintenait là, dans ce salon animé par un joyeux bordel, son enfant entre ses bras. Vivante et vaillante, les épaules lourdes de fatigue mais légères d’espoirs. La lumière qui irradiait de son regard bienveillant devenait presque oppressant pour quelqu’un qui était autant rongée par la dépression.
La jeune femme l’enviait plus qu’elle ne saurait l’exprimer.
Si seulement cette méthode était universelle, Kezabel ne serait pas chaque matin entrain de jauger sa balance et de voir de quel côté elle penchera au prochain matin.

Elle l’enviait secrètement, l’admirait ouvertement et au milieu, l’éclosion d’une petite flamme de voir que Sovahnn réussissait à mener sa barque malgré les tempêtes. Le bonheur qu’elle construisait à tâtons au fil des jours était tout ce qu’elle méritait.

– Reste pas comme ça, fait comme chez toi hein….  Je te jure que le canapé ne mord pas et que tu peux chier dans mes chiottes. En fait j’ai déjà un poêle mais je sais pas s’il marche. Avec un pouf dans le coin et des chocolats chauds, on serait pas mal. »

Kezabel se contenta de sourire pour seule réponse, sa tasse entre les mains. Son malaise était évident mais allait plus loin qu’une simple crainte d’être impoli ou du désir de ne pas vouloir s’imposer. Ce lieu, aussi chaleureux et beau soit-il dans son authenticité dégageait une bulle qui, à ce jour, l’étranglait malgré elle. Sa place ici semblait être claire pour son ancienne camarade de classe mais Kezabel gardait au fond du ventre l’impression de jurer dans le décor. Tout simplement parce qu’elle même, n’était plus à l’aise avec sa propre personne.
Son regard bifurqua sur le fameux coin où le pouf pouvait résidé, évoquait visuellement les chocolats chauds, puis le corps d’une femme avachit dans ce fauteuil mou qui s’enfoncerait dans la matière. Le ravage d’une cascade brouilla son esprit l’espace d’une seconde, le temps d’un battement de paupière.
Sans y faire attention, Kezabel s’était assise sur le canapé, Sovahnn juste en face d’elle sur la petite table basse.

– Ecoute… Ces dernières semaines, voir ces derniers mois ont été difficiles pour tout le monde. On a le droit de … simplement pas pouvoir parfois. C’est pas grave. Ça vaut pour toi comme pour moi. Je suis désolée d’avoir réagi comme je l’ai fait. » La jeune femme glissa son regard dans sa tasse qu’elle avait à peine touchée jusqu’ici, ne comprenant pas pourquoi les excuses venaient de sa bouche à elle. «  T’as rien à te reprocher, je t’aurai sans doute pas laissé faire de toute manière… »

Mais j’aurai au moins pu essayer.

C’était ce qu’on faisait lorsque l’on connaissait une proche ou une connaissance en pleine détresse. On essayait. Peu importe quoi, même si ça ne prend pas, on essaie.
Elle, elle n’avait rien tentée. Ou vaguement. Un murmure dans le brouhaha à peine audible. Mais Sovahnn avait raison sur un point : Parfois on ne pouvait pas. Et Kezabel, elle, ne pouvait pas crier sa présence lorsqu’elle était trop occupée à hurler sur ses propres tempêtes qui ne cessaient jamais de rugir. Même ce soir, au bord de cette falaise, l’ombre s’était tissée dans la nuit pour la couvrir d’une tentation qui semblait si reposante comparée à tout ce qui se jouait dans sa tête.
De son côté, Sovahnn n’aurait pas pu laisser entrer n’importe qui dans une blessure si vive, si douloureuse et si forte. Jamais il n’était venu à l’esprit de Kezabel de lui reprocher sa distance ou sa froideur dans son deuil mais aussi parce qu’elle ne se sentait absolument pas légitime vu le passif avec la Garde. A tort ou à raison, elle n’en savait plus trop rien, mais n’empêche que c’était là à stagner comme des eaux croupies.

– On a tous nos combats, et parfois on n’a plus vraiment la force pour les mener. A un moment, ou en tout cas en ce moment je pense qu’il faut les choisir. Moi en tout cas c’est ce que j’ai décidé de faire. Mais il y a le moment et le lieu. Je suis en colère contre la Garde, c’est clair et ça ne risque pas de se calmer tout de suite. Mais il y a des questions que j’ai décidé de ne pas poser et des réponses que je ne veux pas avoir. Ça, c’est ni le moment ni le lieu. Et toi, t’es pas la personne qui… enfin t’as pas à être une cible de ce malheur en fait. Donc par extension, ne t’impose pas la culpabilité d’un truc que t’aurais pas pu contrôler de toute manière ok ? »

Son coeur trébuche dans sa cavalcade, désordonne les battements qui raisonnent jusque dans ses tempes. Son rythme cardiaque grimpe en flèche, les émotions la submergent et Kezabel doit noyer son regard et son nez dans sa tasse pour ne pas se mettre à chialer… Non, à sangloter, comme une gamine de trois ans face aux mots de Sovahnn.

T’es pas à la personne qui … enfin t’as pas à être une cible de ce malheur en fait. »

Est-ce qui que ce soit avait seulement prit la peine de le lui dire, depuis le chaos qu’elle se persuadait de semer derrière elle ?

Ses doigts se crispaient sur la céramique sous la vague de colère qui la surprenait et qu’elle ravalait en déglutissant silencieusement. Beaucoup trop de choses faisaient échos dans son coeur rabougrit et Kezabel avait l’effroyable sensation d’être mise à nue. Devait-elle, elle aussi, choisir ses combats du moment ? Peut-être était-ce là tout le nœud de son problème. Elle cherchait à lutter sur tant de front… Ses amitiés pour ne pas les fracturer plus encore, son quotidien, ses terreurs, sa santé mentale. Plusieurs fils étaient tirés, tous en même temps, épuisant le trop peu d’énergie qu’elle avait à fournir ne serait-ce que pour elle-même.

Choisir ses combats, hein.

Elle ne savait pas où Sovahnn trouvait l’énergie d’une telle résilience mais il était clair qu’elle était parvenue à quelque chose qui la menait pas à pas vers un mieux. Sortie de sa bouche, comme ça, tout avait l’air si simple… une simplicité qui échappait totalement à Kezabel, trop enchevêtrée dans ses propres douleurs.

– Je t’en veux pas, tu m’en veux pas. Balle au centre, les comptes à zéro, on passe à autre chose. Je me trompe ?
– No… Kezabel s’éclaircit la voix dans son poing. Non. »
– On a trop à gérer pour s’arrêter là-dessus je crois. »

Il suffit de croiser son regard humide pour que ses propres larmes se fassent traîtresse. Une perle salée lui échappe qu’elle essuie d’un geste vif, presque sec et tremblant.

Choisir ses combats.
Choisir de savoir où diriger ses colères, ses rancœurs. A quel moment. Et pourquoi.

Si elle pouvait chasser sa culpabilité, elle le ferait … Mais force était d’admettre que ces quelques mots de la part de Sovahnn aidait à se sentir délester d’un léger poids de sa poitrine. Elle ne chassera pas totalement le tort qu’elle s’infligeait malgré elle, il lui faudra bien plus de temps que ça pour estomper le poids de la culpabilité, mais les mots étaient là. Marquants. Apaisants, quelque part.  

La jeune femme ne s’attendait pas à tant… De compréhension ou plutôt de lâcher prise. Elle ne sait pas si elle s’attendait à quelque chose tout court, d’ailleurs. Kezabel ne connaissait pas Sovahnn aussi bien qu’Enzo ou même Riley, mais en comparaison avec la camarade de classe qu’elle avait connue, il lui semblait qu’elle avait déjà tant changée, tant apprit. Tant grandit.
Sovahnn se cassait peut-être la gueule, mais elle parvenait à se rattraper comme une pro, évoluant dans ce nouveau quotidien qui était le sien en slalomant entre les problèmes de la manière la plus humaine possible.
L’ambre glissa sur cette image terriblement touchante d’humanité. Sovahnn assise en tailleur, sa fille endormit entre ses jambes croisés, les émotions venant faire briller les yeux bleus. Elle représentait un courage dans cette vulnérabilité qui touchait le coeur à vif de Kezabel.

– J’ai un truc pour toi. Pour vous deux. »

Sa voix enrouée s’élève enfin, pour plus qu’un mot. Elle se penche pour attraper son sac en bandoulière et se lève d’un même mouvement. Kezabel agita sa baguette sans un mot, sortant d’un mouvement du poignet le coffre à jouet minuscule qui retrouva bien vite sa taille réelle lorsqu’il fut délicatement déposé sur le sol.
Elle n’ignorait pas tout le discours de Sovahnn. C’était justement parce que celui-ci était terriblement juste et poignant, qu’elle ne reprenait pas ses mots. N’y répondait pas. Elle en était incapable, comme elle l’était tout autant de s’ouvrir.
En revanche, elle pouvait au moins formuler ses émotions autrement.

Un autre mouvement de baguette… et la vie s’animait sur chaque surface. Un enchantement discret aider par les poudres colorés magiques de sa mère que Kezabel avait utilisée. La jeune femme se plaça derrière le coffre au couvercle arrondit, un dôme pouvant recelé une montagne de jouet ou d’autres choses encore. Le meuble rectangulaire faisait un mètre de largeur sur cinquante centimètres de hauteur et sur chaque surface, Sovahnn pouvait y voir un monde.
Celle de droite représentait un océan animé aux couleurs vives, un requin nageant dans les eaux profondes aux multiples teintes d’un monde aquatique qu’elle était parvenu à retranscrire grâce aux récits et conseils d’Enzo.
Et en parlant de lui …

– Ce « tableau » c’est pour son parrain, articula Kezabel en glissa ses doigts sur l’océan. Il m’a aidé à bâtir la structure du coffre. Et celui-ci, c’est le tien. »

Elle désigna en effleurant la surface de ses phalanges, un levé de soleil qui découpait deux silhouettes. Une femme et une enfant, de dos, main dans la main, sous les couleurs pâles d’une aube qui promettait un beau jour, gorgé de vie. De paix. Kezabel avait glissé sur la veste de la mère, l’écusson des Poufsouffle. Au bord d’une falaise, faces à l’immensité d’un monde à découvrir, la jeune artiste avait tenté de retranscrire toute la vie d’aventures qui les attendaient tous les deux. Ensembles.

– Et là, c’est pour Zachary. » Kezabel se pencha légèrement en avant pour désigner la plus grande surface, celle de devant. Sa voix s’animait, se réchauffait alors qu’elle lui présentait l’œuvre.

L’Afrique du Sud représentée dans sa beauté la plus brute, la plus naturelle, la plus vive. Les contrées rocheuses en fond tranchaient avec la savane herbeuse du premier plan, où se dessinait des animaux au loin ou plus proche. Mais surtout, les plus visibles, une famille de Suricate debout sous le soleil de l’Afrique, veillant sur les leurs.
Le patronus de Zachary représenté, Kezabel marquait sa présence à sa façon.

Et les trois tableaux se rejoignaient. L’océan finissait par rejoindre le devant du coffre dans un fleuve où s’abreuvait un zèbre. Et les terres herbeuses de l’Afrique rejoignait le troisième tableau pour la falaise aux verts intenses. Tous les trois étaient reliées, nouées, à une seule et même personne.
Kezabel plongea sa main dans la poche de son pantalon et en retira une petite clé.  L’émotion était là, vive et palpable mais étrangement positive. Elle avait mit du temps et du coeur à l’ouvrage pour réaliser ce coffre de ses propres mains, du début à la fin. Si la construction et le travail du bois c’était fait en binôme avec Enzo, les dessins sortaient de son imagination dont ses mains n’avaient été que le prolongement.
Un cadeau de naissance, de vie, pour une enfant et une adulte en devenir.

– Il y a un premier loquet pour l’ouvrir, elle joignit le geste à la parole avant de se tourner vers Sovahnn. L’hésitation n’était pas timide, elle était émue. Il y a un « coin secret » à l’intérieur, une partie dissimulée que seule ta fille pourra ouvrir avec cette clé. » Tous les enfants ont des secrets qu’ils veulent préserver et conserver précieusement. Kezabel s’approcha de son ancienne camarade de maison et lui tendit l’objet. J’ai fais en sorte que personne ne puisse l’utiliser à part elle. Elle refusera de s’activer si ça n’est pas Liyana. »

Elle donnait certainement trop d’informations, peut-être même que ce cadeau serait trop imposant et intime pour Sovahnn. C’était justement ce qu’elle craignait lorsqu’elle avait présenté le projet à Enzo… Kezabel avait parfaitement conscience de sa maigre place dans la vie de la jeune femme et que ce présent était peut-être trop « fort ».
La sorcière prit une inspiration discrète, serrant les dents, ravalant l’avalanche de questions écrasantes.

Tu vois, non, je ne t’en veux pas.

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Ven 10 Déc 2021 - 1:37
Parfois la vie t’écarte, te bouffe et te noie. Sovahnn avait bien plus profondément peur de l’immobilisme et du néant que de la souffrance. C’était là un apprentissage qui s’était ancré en elle durant des années de chaos et d’enfermement, des années d’une réelle détention qui n’avait rien à voir avec ce qu’elle avait vécu à Poudlard. Cette angoisse là, celle qui la poussait à s’arracher de l’apathie et du mal-être pour se souvenir que la vie c’est aussi ça, c’est boire la tasse par moment, c’est se perdre dans le sel et les larmes et sentir ses plaies brûler violemment mais que ça n’empêche pas de remonter vers la surface.
Kezabel ne savait pas, bien sûr, d’où venait réellement cette philosophie de vie. Elle n’avait pas idée que lorsqu’elle avait vu l’autre Poufsouffle pour la première fois, quatre ans auparavant, elle sortait en réalité des nimbes, spectatrice du royaume des morts, à peine dans celui des vivants depuis cinq ans. Elle n’avait idée de ce qui se passe dans votre tête quand vous ne pouvez trouver le chemin de la sortie de votre propre prison, que vous écoutez les autres bouger et vivre, puis se détacher doucement pour enfin vous oublier. Oui, Sovahnn évoluait et grandissait, changeait et s’affirmait ces derniers temps mais ce qui était là dans son regard, cette barrière à l’abandon, cette flamme brusque qui cramait dans la nuit, elle était née il y avait bien des années. Une luciole de lucidité, un élan brusque de vie quand tout semble perdu. Ça avait toujours été ça, cette volonté indomptée de vivre, même si ça veut dire avoir mal, parce que c’est beau de souffrir, tant qu’il y a un lendemain à construire.

Sa résilience venait de là, masquant des angoisses bien plus profondes et des traumatismes dont la jeune femme ne parlait pas, ou si peu. Ça avait été le cas au réveil, comme si en parler pouvait rendre la chose légère et gérable. A présent la jeune femme taisait cette part de sa vie la majorité du temps, refusant de s’attarder là-dessus, consciente qu’il y avait là des sujets ravivés par Caleb puis Tim qu’elle n’avait envie de développer. Une chose à la fois. Un combat après l’autre. Voilà la voie qu’elle avait choisie à présent, préférant laisser la place à certaines choses d’exister, à d’autres de se réparer avant d’encaisser d’autres chantiers. Une façon de faire comme une autre. Il lui semblait surtout qu’à l’instant, ça lui convenait à elle. Peut-être  y avait-il une part d’égoïsme ou de lâcheté là-dedans, une façon de compartimenter et de laisser de côté ce sur quoi elle n’avait pas d’impact pour laisser la place au reste. A sa fille. A l’avenir. Le reste devrait attendre, car accepter et encaisser la situation était assez dur pour en rajouter.

Morceau par morceau, donc.
Il lui sembla que ce qu’elle pouvait dire parlait à son amie. Sans insister, Sovahnn allait au bout de son propos. Son regard la couva un moment avant de s’extirper de là, la laissant la fuir pour ne pas l’écraser. Ainsi elle glissait le regard sur le canapé gris usé par endroits, sur le plaid bleu clair balancé là sans y penser, les coussins blancs et marrons tissés de motifs probablement très artificiellement ethniques (laquelle, on ne sait d’ailleurs pas) façon grandes chaîne de distribution. Il rejoignait le sol, un parquet neuf que quelqu’un de sa famille avait sans doute posé dans l’année sans imaginer qu’elle serait celle qui investirait les lieux. Zach avait-il seulement usé de persuasion et de flegme ou les négociations s’étaient montrées plus ardues ? La question passait dans son esprit sans qu’elle ne s’y accroche, glissant hors de portée sans l’écorcher plus que ça. Il y avait juste à côté de sa jambe, posé sur la table basse un biberon laissé de côté, un bavoir et un bracelet d’une pierre semblable à de l’ambre que la mère de Zach lui avait offert et traînait là comme si de rien. Comme si elle n’imaginait pas qu’un jour, le père de sa fille avait porté l’objet à son poignet, l’avait mordillé et ne verrait jamais son enfant faire de même. Oui, les lames de fond étaient là, bien sûr. Elle faisait seulement avec ; du mieux qu’elle pouvait.

Tout en parlant, son regard remontait par moment sur celle qui fuyait le sien dans sa tasse la majorité du temps. Difficile. Tout lui semblait douloureux et par moments, Sovahnn hésitait sur la façon dont ses mots pouvaient être perçus. Recroquevillée au creux de ses jambes, Liya s’était apaisée, comme souvent lorsque la situation semblait difficile. Par moment Sovahnn s’interrogeait sur la façon dont un si petit bébé pouvait percevoir les choses ; pouvait-elle intégrer qu’il y avait des phases dans cette vie qui nécessitaient du calme ? Ou était-ce seulement une question de chance ? Pour l’heure la petite ne somnolait pas mais observait sa mère penchée sur elle, sans doute fascinée par les boucles d’oreilles qui pendaient et reflétaient les lumières du plafonnier au rythme de ses paroles.

Terminant sa tirade, Sovahnn achevait ses propos en posant sa main droite à plat sur le ventre gonflé de la petite sur lequel le body vert était tiré comme si elle était déjà devenue trop grande pour les premiers vêtements de naissance achetés ou récupérés. Celui-ci venait de Riley, le vif d’or qui y était dessiné pouvait le laisser deviner.

Rien de ce que Sovahnn avait dit n’était prévu ou répété, pour autant, ces réflexions avaient eu le temps de tourner encore et encore dans son esprit durant les nombreuses nuits trop pâles pour être ensommeillées qu’elle avait pu passer ces derniers temps. Pas tout à fait blanches, mais certainement pas reposantes. Elle aurait pu se penser assez solide pour ne pas sentir l’onde douloureuse dans sa poitrine, pourtant celle-ci remontait jusqu’à ses yeux pour les voiler d’humidité. Elle faisait face, se sentant par moment osciller totalement entre l’enfance et le monde adulte, s’arrêtant souvent au stade d’adolescente sans véritablement savoir où se situer. Ce qu’elle savait, c’était que cette larme venu s’échouer sur la joue de Kezabel lui serrait gorge et poitrine, plantant en elle le sel de l’empathie. Trop dur, ce qu’elle venait de dire ? Ou profondément rassurant ? Le doute était resté à planer dans l’air, se soulevant au rythme des respirations de la petite qui levait les bras et tapait des pieds sans véritablement contrôler ses gestes. Sovahnn, elle, avait un nœud dans la trachée et une enclume dans la poitrine mais ne quittait pas cette fois Kezabel du regard, craignant d’avoir loupé un signe, une information muette qui, plus tôt, aurait dû lui dire de se taire. Si son amie effaçait d’un geste vif, presque brutal, cette larme qui s’échappait contre son gré, Sovahnn restait là avec les nœuds de son cœur, l’air doux de son regard et l’attente, simple et sans demande de réponse. Ce qui était dit l’était et elle-même avait entendu la réponse seule qui lui importait : pas de ressentiment. Bien. Alors on avance. Viens on arrête de se faire ça, de s’enfermer dans le silence, de s’imposer ses propres limites, de s’en vouloir et de se tirer vers le bas. On se connait pas assez toi et moi finalement pour savoir qui est l’autre et ce dont il a besoin, interpréter ses limites et comprendre ses blessures. Mais tu sais quoi ? Ça commence ici. Maintenant on apprend. Et on se laisse le temps de guérir.

Voilà ce qu’elle faisait, se rendant compte qu’elle était pour la première fois face à la Kezabel du dessous, celle que l’acide de la vie et le temps ont fini par percer de trous, celle qui se désagrège au fil des jours, celle qu’elle ne connaissait que par l’intermédiaire de Riley à qui elle n’avait pu parler depuis bien des semaines depuis qu’elle était partie en Afrique. Alors elle n’avait pas cette référence là pour faire face. Elle était seule face à celle vers qui elle n’osait se tendre pour la prendre dans ses bras. Celle qui nouait son âme de douleur de la voir si brusque envers elle-même, si profondément éreintée. Très différente des premières images qu’elle avait eu d’elle, la sortant d’un cauchemar, un jour bien lointain à présent, dans une salle commune où elle n’avait aucun lit pour elle. Alors elle restait bêtement là, toute gauche assise en tailleur sur sa table basse de bois compacté. Peut-être faisait-elle mal, avec ses mots pourtant si sincères ? Peut-être ce mal était-il nécessaire.

Et soudain, la voix rauque de larmes qui ne coulaient pas s’élevait enfin.

– J’ai un truc pour toi. Pour vous deux. »

Le discours était ignoré, c’était vrai. Mais Sovahnn devinait aux gestes vifs, aux tremblements mal dissimulés, aux larmes refusées et à la pâleur de ce visage creusé par des semaines bien difficiles que tout ça faisait sans doute trop. Qu’il y avait là des choses qui devaient prendre le temps d’être intégrées et que le sujet était clos, tout bêtement. Alors elle-même se redressait légèrement, se rendant soudainement compte de ce dos voûté au dessus de sa fille, comme si d’un geste si simple la maman bien maladroite pouvait protéger son enfant de la violence du monde qu’elle évoquait à mi-mot. Pas besoin d’entendre certains mots pour comprendre que les nôtres ont touchés. Ainsi Sovahnn inspirait profondément, pinçant les lèvres et déglutissant, comme si elle pouvait d’une grimace chasser toute cette tension pourtant bienveillante qui passait sous son épiderme. Alors son regard trouvait le sac que Kezabel avait traîné jusqu’ici, observant avec un brin d’admiration et d’envie cette facilité qu’elle avait d’user – comme eux tous – de la magie comme si tout ça était aussi simple que de respirer. Le sac libérait alors une boite qu’elle n’identifiait pas et que Kezabel posait d’un geste au sol avant d’y jeter un nouveau sortilège. Alors dans une secousse, la petite boite devenait coffre, enflant de la même manière que l’avait fait l’ours dans la chambre de la petite quand son parrain lui avait rendu sa taille initiale. Petit ou grand, ça dépendait des jours à présent. Mais pour l’heure, Sovahnn restait interloquée, comprenant à retardement qu’il s’agissait d’un cadeau.

Ainsi alors que Kezabel se levait pour passer derrière le coffre, un petit sourire était apparu sur les lèvres de la jeune maman qui, à son tour, se levait. Ses doigts s’étaient glissés sous le dos de la petite, l’emportant contre son cœur, enfermant sa petite tête dans sa main droite quand la gauche la maintenait contre elle, déposant un baiser contre son front qui frôlait son menton tandis qu’elle se levait, en équilibre sur son pied droit le temps de dégager le gauche. Et voilà qu’elle s’asseyait, les sourcils froncés non d’interrogation mais d’émotion car elle sentait déjà à quel point tout ça venait du cœur.

– Ce « tableau » c’est pour son parrain, articula Kezabel en glissa ses doigts sur l’océan. Il m’a aidé à bâtir la structure du coffre. Et celui-ci, c’est le tien. »

Quelques phrases qui y sautaient directement, justement. Droit en plein cœur comme une flèche qui s’y enfonce sans douleur, certes, mais vous coupe le souffle quand même. S’asseyant, presque hésitante, le regard porté sur les bords de la malle, Sovahnn laissait la petite contre elle, son visage se peignant déjà d’émotions. Ils avaient fait ça à deux. Une belle surprise qui lui étreignait la gorge et serrait ses doigts sur son enfant en découvrant, les lèvres entrouvertes, les tableaux peints à la main. Là sous ceux de Kezabel se dessinait les couleurs vives d’un océan profond qui lui semblait en mouvement. Les créatures marines, les scintillements de l’eau et leurs courbes douces où se cachaient ça et là les ombres de leurs habitants et les chatoiements de la vie si brute et douce qui retranscrivait si vivement son meilleur ami. Le sourire s’étirait, les sourcils se fronçant en miroir trahissant l’émotion qui l’étreignait en silence. La jeune maman suivait les doigts de Kezabel qui faisait légèrement pivoter la malle pour lui permettre de voir la nouvelle face où elle devinait sa silhouette et celle de sa fille. Deux corps en contre-jour qu’un lever de soleil inondait. Au bord d’une falaise, elles surplombaient le monde, prêtes à se jeter à cœur perdu vers tout un monde à découvrir. Prête à voler vers les lumières pâles d’une nouvelle belle journée, à s’en draper ou à les rendre plus vive selon ce que ce jour pourrait bien leur réserver. Deux silhouette et pourtant ça n’était pas la plus adulte qui lui sautait au cœur mais bien celle, plus petite, qui lui semblait alors si grande. Sa petite fille, qui un jour serait là, prête à son tour à bouffer le monde.

C’est toi et moi.. avait-elle dit un jour. Et cette peinture retranscrivait exactement cette sensation.

C’est nous… oui mais…

Elle refermait sa lèvre inférieure entre ses dents, cherchant à contenir la violence des émotions. Consciente, déjà, qu’elle n’y arriverait pas.

– Et là, c’est pour Zachary. »

Zach et sa sœur. Un père perdu, un monde inconnu.

Quelques mots qui lui avaient fait l’impression de la dynamite dans la poitrine. Une brusque inspiration, comme une onde de choc dans ses veines et elle découvrait la peinture de landes de couleurs chaudes qui avaient vu naître les grands parents de la petite qui s’étirait légèrement, frottant son visage contre la clavicule de sa maman. Au fonds, les rochers, la terre brute qui portait chacun de leurs pas, les couleurs vives coulaient jusque dans les herbes du premier plan qu’on devinait dissimuler un million de petits organismes divers. Mais là, surtout, juste sur l’avant, une famille de suricates, debout face au monde, sentinelles essentielles protégeant les leurs. Le patronus de Zach. Celui qu’il avait envoyé au loin le jour où elle avait réussi son premier véritable sortilège, lui sauvant la vie au cœur d’une bataille brusque et violente. Mais à l’heure actuelle, il ne lui restait que le sourire qu’il avait eu en reprenant connaissance, les paroles bêtes et drôles qu’ils avaient échangés, les reflets argentés du suricate sur sa peau.

Et les larmes se mirent à perler sur ses cils, brouillant sa vision sans qu’elle ne cherche à les retenir, secouée d’une onde d’affection brusque qu’elle n’avait aucune envie de masquer. Pour Zach, pour ces peintures qui se rejoignaient et dessinaient tout à la fois racines et avenir pour cette enfant logée dans ses bras, pour ceux qui en avaient eu l’idée, qui avaient réalisé ces œuvres et pour cette simple malle de bois toute emplie d’affection et d’espoir.

– Il y a un premier loquet pour l’ouvrir. Il y a un « coin secret » à l’intérieur, une partie dissimulée que seule ta fille pourra ouvrir avec cette clé. » Kezabel joignait le geste à la parole, lui montrant la clé et la cachette tandis que Sovahnn peinait à détacher réellement le regard des différentes scènes peines à la main et des ondulations qu’elle devinait magique et qui donnaient vie à l’ensemble. J’ai fais en sorte que personne ne puisse l’utiliser à part elle. Elle refusera de s’activer si ça n’est pas Liyana. »

Chaque détail l’étreignait avec une violence toute bardée d’émotion et de joie, secouée de toutes ces petites choses qui avaient été pensées, réfléchies, abouties pour offrir à son enfant quelque chose qui lui ressemblait déjà tant.

Et tu hésites encore à l’idée d’avoir ta place ici…

Elle n’avait rien dit, rien réussi à articuler, remontant le regard dans celui de Kezabel. C’était sans doute exactement ce qu’elle aurait dû éviter s’il avait absolument fallu retenir ses larmes, il fallait bien l’admettre. Car à l’instant même où elle posait les yeux dans l’ambre, sa poitrine se soulevait d’un sanglot brusque, lâchant les larmes qui menaçaient depuis un moment. L’émotion la ceinturait totalement, étranglait les mots qu’elle ne trouvait de toute manière pas, incapable de ne pas porter de nouveau les yeux sur les différentes scénographies, arrêtant son regard au travers des larmes sur la famille de suricates pour se laisser aller à des larmes soudaines mais douces, vives, joyeuses et émues, douloureuses et nuancées qui s’écrasaient sur son sourire tremblant. Contre elle, Sovahnn serrait un peu plus sa fille, déposant sur son crâne auréolé des bouclettes brunes de son père un baiser trempé de sel et d’amour. Si Kezabel écrasait sa peine, Sovahnn, elle, la laissait s’échouer, s’exprimer comme le reste, brusque et entière, si complète qu’elle se mêlait de joie et d’affection, de manque et de reconnaissance. C’était ainsi, parfois ça remontait brusquement et la fauchait toute entière. Sovahnn avait seulement décidé d’arrêter d’y résister.

« Merci… merci énormément. »

Il aurait sans doute été particulièrement absurde d’essayer de dire à quel point tout ça la touchait puisqu’elle aurait été bien incapable d’en retenir les bouillonnements. Pourtant inspirant profondément, portant le regard au plafond, Sovahnn tentait de calmer la violence de la sensation, inspirant bonheur et malheur pour apaiser la surface, difficilement consciente qu’il y avait peut-être là des choses que Kezabel ne pouvait gérer. Mais voilà, trop dur pour elle, bien vulnérable, aussi, face à ses propres trop-pleins.

D’un geste, elle l’invitait à l’approcher, à passer un bras autour d’elles. A partager ça et à accepter un baiser de reconnaissance.

Inspirant profondément, elle lâchait un petit rire.

« Nan, franchement ça m’plait pas. J’suis pas touchée d’ailleurs ! J’ai un grain de sable dans l’œil… » Dit-elle avait une larme qui rebondit le long de ses cils, bientôt écrasée d’un revers de la main.

« Sache que si ma fille planque là-dedans un joint un jour, je t’en tiendrais comme personnellement responsable. »

Nouveau rire, joyeux et clair, car oui, elles sont belles ces larmes. Elles sont légères ces larmes. Lourdes d’amour et de manque mais légère d’espoir et de reconnaissance.

« C’est superbe. Merci, vraiment. »

Les lèvres pincées dans un sourire plein d’affection, elle portait sur Kezabel toute la douceur du monde.

Merci à tous les deux.
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Sovahnn Dawn Lockwood
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Mar 4 Jan 2022 - 23:40
Spend my nights in dreams
Sova & Kezabel


■ Nuit du Lundi 13 au Mardi 14 Juin 2016 ■

L’émotion n’était pas qu’une vague étincelle dans un regard ou le léger tressautement d’un sourire au coin des lèvres. Elle était les larmes qui menaçaient, perlaient au bord de ses longs cils blonds et qui cherchaient à s’échapper pour exister dans leur éphémère. La jeune femme n’était pas certaine de l’effet que produirait ce cadeau, c’était comme la roulette russe. Ca passe ou ça casse. Alors quand elle vit Sovahnn planter ce regard humide et que le sanglot surgit du plus profond de son ventre et de son thorax, Kezabel senti son estomac se retourner en même temps que son cœur.

Merde… elle avait été trop loin, c’est ça ? Trop intrusif, trop tôt aussi, pour lui rappeler la mort de Zachary et de toute l’absence qu’elle avait générée derrière elle. Le malaise l’écrasa comme un raz-de-marée, ne sachant plus où se mettre dans l’immensité de ce salon. Elle était si déconnectée de la réalité et des autres qu’elle n’avait même pas été capable de déceler les limites … Kezabel n’osait franchir les lèvres, de peur de pleurer à son tour de culpabilité. Oui, si déconnectée, aveugle trop souvent sur le bonheur des autres tant le sien lui devenait inconnu qu’elle ne perçut pas tout de suite que les larmes de Sovahnn étaient gorgées de joie, de bonheur et d’émerveillement face à ce cadeau.

La douleur la cisaillait mais elle ne dit rien, pinçant les lèvres, désolée de la mettre dans cet état, de lui foutre le nez dans l’absence terrifiante. Kezabel ne lâchait pas des yeux la jeune mère qui embrassa crâne de sa fille.

– Merci… Merci énormément. »

La jeune femme papillonna des paupières avant de comprendre le véritable sens des mots. Elle l’observait lever les yeux vers le plafond, cherchant à reprendre son souffle, à taire peut-être les autres vagues de sanglots et il fallut tout ce temps à Kezabel pour saisir que ces larmes n’avaient rien de monstrueux, d’accusateurs. Elles étaient, au contraire, belles dans leur sincérité et leur humanité. Comment souvent, elle avait cette sale impression d’osciller entre deux mondes différents : le leur et le sien. Le 1er étant cette normalité qu’elle avait autrefois connu où tout était plus simple à comprendre, où communiquée ne lui était pas difficile, aux couleurs tantôt douces, tantôt rudes. Puis le second, plus complexe, plus sombre que tout. Où la joie ne perçait que peu de nuages, où entrevoir un moment de paix se faisait rare. Face à Sovahnn, elle tanguait d’un monde à l’autre, trop à l’étroit dans son propre corps qu’elle supportait peu, trop persuadée de son illégitimité auprès de la jeune femme. Mais encore une fois, cette dernière lui fit entendre le contraire en tendant le bras vers elle pour l’inviter à la rejoindre, chose que Kezabel fit sans trop réfléchir.

L’étreinte brève mais pleine de tendresse et de reconnaissance, menaça de la faire pleurer.
Coeur à vif.

– Nan, franchement ça m’plait pas. J’suis pas touchée d’ailleurs ! J’ai un grain de sable dans l’œil… »

Kezabel ne répondit rien, les larmes étreignant sa gorge non sans lui offrir un sourire. Elle s’écarte d’un pas à peine, de quoi avoir l’espace de la regarder. De les regarder. La petite ne se doute de rien, n’imagine pas que ce coffre lui est destinée et qu’elle pourra y glisser tout ce qu’elle veut de secret sans que personne ne puisse empiéter sur ça. Ca sera son petit truc à elle, inviolable, infranchissable.

–  Sache que si ma fille planque là-dedans un joint un jour, je t’en tiendrais comme personnellement responsable 
– Pas besoin, il y en a déjà un de caché pour ses 16 ans … »

Évidemment que c’est faux mais ça n’empêche pas les rires de fuser dans l’espace et éclairer les visages, la pièce. Les larmes baignent encore les joues de Sovahnn quand celles de Kezabel refusaient de sortir. Par pudeur ou parce qu’elles étaient incapables de puiser plus loin, parfois.

– C’est superbe. Merci, vraiment. »


Kezabel baissa les yeux vers ses chaussures, pudique face à ses remerciements, un sourire comme seule réponse.

La jeune femme avait mit du coeur à l’ouvrage sans attendre de retour particulier. Sovahnn la remerciait avec chaleur, mais c’était Kezabel qui devait lui dire merci. Ce coffre à jouet n’était pas qu’un coffre à jouet. Il était la renaissance d’une amitié, le lien physique d’un être cher à un autre. Ses souvenirs dans l’atelier avec Enzo à façonner le bois les sourcils froncés de concentration, le front humide d’effort, resteront dans la catégorie des plus beaux. La complicité des deux jeunes gens avaient refleurie comme une pousse au printemps, lui rappelant le goût de la tranquillité, l’odeur d’une paix intérieure. Ce soir, Kezabel se reconnectait à l’étrange plaisir de provoquer le bonheur chez les autres. Pour l’une des trop rares fois, les sourires remplaçaient les moues inquiètes et gorgées de reproches quant les larmes n’étaient plus l’incarnation d’une douleur ou d’une tristesse mais d’une véritable reconnaissance sincère. Elle avait presque oubliée ce que cela faisait de faire ce bien, jeune adulte amnésique des sentiments qu’elle devenait à se perdre dans le trou noir de sa dépression qui dévorait absolument tout.

Elle qui pensait avoir dépassée la limite de l’intimité en osant ramener Zach «  à la vie » par un simple dessin, se sent moins oppressante dans sa présence et dans ce cadeau qu’elle venait de livrée.

– Tiens, elle lui tend la clé pour la petite partie à secret. Si jamais t’as un problème avec ou si tu la perds, appelle moi. »

Kezabel glissa les mains dans les poches de sa veste en jean dont elle ne s’était toujours pas défaite, glissant son regard vers la petite qui ne dormait pas, parfaitement éveillée et silencieuse tout contre sa mère. La douceur que Sovahnn dirigeait vers la jeune femme devait être contagieuse ou, en tout cas, apaisante pour un temps car elle senti en elle germée une envie qu’elle n’avait ni anticipée, ni imaginée.
Elle porta son poids sur sa hanche gauche, puis la droite avant de demander presque gênée de cette nouvelle intrusion.

– Tu serais d’accord pour que je la tienne un peu dans mes bras ? J’comprends si tu refuses, t’en fais pas. »

Déjà, elle senti les morsures du regret. C’était pas vraiment une bonne idée vu sa condition psychologique, si ? Et si elle se mettait à avoir une absence ? Une crise de rage de panique d’avoir ce petit être qui n’était même pas le sien, au creux de ses bras ?
Son ventre se tordit légèrement avant de comprendre que son besoin venait de son manque de vie, de ce vide en elle qui ne se comblait jamais. Kezabel voulait porter dans ses bras ce petit être pour qui elle avait passée de nombreuses nuits blanches pour lui fabriquer ce coffre où Liyanna y trouvera la trace de ses origines et y déposera la marque de son futur.

Tenir ce petit bout de vie contre elle, avant que le vide infini ne la remplace.
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Mer 5 Jan 2022 - 16:10
La morsure du manque était là bien sûr, l’arrachant par sa meurtrissure. Mais il y avait autre chose qui prenait le pas, qui s’imposait sans pudeur, douloureux d’avoir à exister mais heureux d’y arriver. La joie de trouver dans des petites choses le soulagement de retrouver des parcelles de lui. D’offrir quelque chose de si plein d’affection à une petite fille qui jamais ne pourrait poser le regard sur son père. Il ne lui resterait que si peu. Quelques mots adressés au travers de la chaire, une chanson, des rires et des joies. Des convictions surtout, des valeurs fortes qui perduraient au travers de la mort. Des certitudes, des espoirs. La détermination d’un père qui avait tout risqué pour rendre le monde meilleur. Et si ce petit coffre lui venait de celle qui partageait ses combats, l’image n’en était que plus forte. Elle écrasait même un moment la rage que la mère éprouvait à l’encontre de cette organisation qu’elle ne voulait pas connaître. Elle taisait les heurts et les doutes, la colère et les ressentiments. Un instant, il n’y avait que ça, que la force vive d’un homme qui lui manquait tant. Que cette présence qui, à sa manière, perçait le voile et apparaissait là, au travers de quelques planches de bois et de beaucoup d’amour. Car autour d’elle se greffait une bienveillance dont elle n’aurait rêvé quelques années plus tôt. Au travers de l’horreur, voilà ce que Kezabel s’était décidée à créer. Un présent fait de reconnaissance, de tendresse et d’attentions. Enzo et elle lui offraient en douceur le rappel que bien des choses étaient aptes à demeurer malgré la violence du monde. Un combat donc, à coup de clous, de ponceuse ou de pinceaux. Quelques victoires au travers les larmes coulées et les étreintes échangées. Il y avait là un devoir de mémoire autant qu’une célébration de l’avenir. Une belle mise en couleur de toute cette tendresse dont Liya devait être entourée. Et oui, Kezabel y avait sa place. La colère n’a pas à être une muraille entre deux êtres. Ça ne suffit pas à étouffer l’affection et s’il fallait du temps, Sovahnn n’était pas bonne au jeu de la patience. Elle bouffait tout trop vite, avalait les jours et les semaines, quitte à se planter. Qu’importe donc, ce qui se devait d’être ou non, elle agissait à l’instinct. Et pour l’heure son cœur battait d’amour, tranché pourtant de manque, blessé d’absence, il pulsait plus fort encore pour ceux qui restaient et qui prenaient le temps, à un moment lourd et tragique de leur existence, pour lui offrir la plus belle des attentions.

En silence, Sovahnn voyait bien ce qui tremblait dans les prunelles de son amie mais taisait ses inquiétudes ou ses remords. Les émotions étaient là et si elle les calmait au mieux, ce n’était pas pour les brider tout à fait. Pas sur quelque chose de si violent et si souvent passé sous silence dans son quotidien. Pas alors que ça effleurait si souvent, l’explosion venant disloquer son cœur à présent. Simplement parce que cette peine et cette joie mêlée étaient importantes, tout bêtement. Et qu’elle savait combien la vie pouvait être trop courte pour brider ce qui est pourtant essentiel. Et les émotions le sont. Elles traduisent les morceaux de l’être. Important, donc, de les laisser vivre.

– Tiens, elle lui tendit la clé pour la petite partie à secret. Si jamais t’as un problème avec ou si tu la perds, appelle moi. »
« Donc là tu me dis à moi de ne pas perdre cette clef pendant bien cinq ou six ans de sa vie ? Aucun souci je gère. » Pas du tout, mais comme pour l’histoire du joint, ces petits rires bien futiles avaient eux aussi leur place ici. Allégeant l’atmosphère et retranscrivant ce que l’amitié a de léger, ils vibraient doucement dans l’air, lui permettant d’apaiser les larmes et de les essuyer sans chercher spécialement à s’en défaire.

Kezabel gardait tout, depuis le début, comme une bombe prête à exploser. En ça, elle lui rappelait Tim, toute façonnée de trop pleins. Mais puisqu’elle ne savait sous quelle forme aborder les choses ou quoi dire, Sovahnn laissait seulement couler, se disant peut-être bêtement que si Keza voulait en parler, elle le fera. Mais ça ne serait sans doute pas à elle. Ainsi elle laissait aller, se sentant bien peu légitime de pousser sur un terrain qui lui était parfaitement inconnu.

Et dans ces yeux, elle vit un trouble soudain, quelque chose d’à la fois grinçant et doux qui se posait sur son enfant. Timide aussi, pudique, voire craintif quand elle basculait le poids de son corps d’une jambe à l’autre, hésitant manifestement.

– Tu serais d’accord pour que je la tienne un peu dans mes bras ? J’comprends si tu refuses, t’en fais pas. »

Que de craintes pour une si bête question.

« Evidemment, oui. J’ai pas pensé à te le proposer. Viens-là. »

La pensée qu’elle puisse faire une crise ou réagir brusquement ne perçait pas une seconde les sens pourtant aiguisés de la mère-louve qu’elle était. Simplement étonnée de ne pas avoir songé à une telle évidence. Les gens allaient et venaient, et pour la majorité, s’ils le souhaitaient, prenaient l’enfant sans s’interroger. Mais Kezabel ne l’avait encore jamais vue, n’avait pu la prendre contre elle. Non, elle était restée dans les ténèbres de ses angoisses, bien loin de la bulle de lumière des deux Lockwood. Ainsi, souple et douce, elle se glissait près d’elle et, une main sous la tête de l’enfant, une seconde contre ses reins, Sovahnn la faisait couler dans les bras de son amie. Etrange ce que la douceur d’un enfant peut faire. D’une grimace contrariée, la petite se laissait transférer, ne tardant pas à se tendre un instant comme un chat s’étirerait au réveil.

Et dans un gazouillis, elle ouvrait ses yeux clairs pour les poser sur Kezabel qu’elle voyait probablement d’une image brouillée.

Quand la vie contemple celle que la mort menace, que peut-elle lui offrir ? Sovahnn n’en su rien, ne se posa pas la question. Elle se contenta d’observer ce que ses sens ne percevaient pas. Une jeune femme malmenée par la vie. Et un enfant qui, lovée dans ses bras, lui souriait simplement.

- Fini pour moi je pense ! =) -
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Sovahnn Dawn Lockwood
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